Carnets sur sol

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Autour de Faust - une balade sonore - Chanson de la Puce (2, Anton Radziwiłł)

Le début est ici. Le reste ci-dessous.


Le Prince Anton Radziwiłł (1775 Vilnius - 1833 Berlin), de cette famille qui donna à la Pologne des rois et à Chopin des bienfaiteurs, a rassemblé un nombre conséquent d'extraits significatifs du Faust de Goethe, et les a mis en musique avec orchestre. Contrairement à Beethoven, Schubert et Wagner, ce ne sont pas des scènes très isolées, mais un faisceau de situations, certes sans lien direct, qui finit par créer des psychologies et une logique dramatique, à la manière des Szenen aus Faust de Schumann (qui lui sont postérieures) ou, dans une moindre mesure, des Scènes de Faust de Berlioz (l'état primitif de la Damnation, sans ensembles, récitatifs ni dénouement [1]).

Le Prince était bon chanteur, excellent violoncelliste, et avait été incité par Carl Friedrich Zelter [2] à mener cette entreprise, pour laquelle il entra en relation avec Goethe, qui lui écrivit même deux pièces spécialement pour son oeuvre.
Création pour l'anniversaire de sa femme Luise le 24 mai 1820 dans le palais familial de Berlin, puis deux semaines plus tard au Monbijou. L'oeuvre est achevée, en réalité, en 1830, et donnée tous les ans par la Sing-Akademie zu Berlin, jusqu'en 1860. Un vrai petit succès qui lui valut l'estime de ses contemporains, fussent-ils poètes ou compositeurs.

Et, incontestablement, à l'écoute, si l'écriture ne dispose que de la science d'un amateur et demeure d'une grande simplicité, l'efficacité et le charme de l'ensemble sont incontestables, et fonctionnent bien plus sûrement, par exemple, que l'opéra de Spohr, malgré le caractère rhapsodique du texte.

Vous entendez, dans cette chanson de la puce, combien, si le caractère de chanson badine y est conservé, l'épaisseur des personnages se réalise au moyen de ces traits ironiques. Interruptions, violon solo qui semble se moquer du propos dépourvu de sens du chanteur (ou illusion diabolique) ; et cette pulsation qui bondit lourdement, suffisamment pesante pour être suivie des estomacs emplis de bière.

Radziwiłł se joue ici d'une rengaine aux effets tout à fait pittoresques, avec un vrai bonheur, à ce qu'il nous en semble.




Prochains sur la liste : Berlioz et Gounod.

P.S. : Inutile de chercher un enregistrement dans le commerce, il semble que ça n'existe pas. Vous êtes condamnés à recueillir les miettes obligeamment jetées par les lutins de CSS, apparemment.

Notes

[1] Une seule (et bonne) version existe au disque, celle de Yutaka Sado avec Angelika Kirchschlager (Marguerite) et Jean-Paul Fouchécourt (Méphistophélès).

[2] Concernant Zelter, on peut consulter les trois notes qui lui sont consacrées sur CSS : discographie et bibliographie, lieder et style, histoire du lied. Et aussi, plus brièvement, à propos d'Erlkönig.


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Commentaires

1. Le samedi 22 août 2009 à , par Prosper

Merci beacoup pour cet article très propice (latin: faustus) pour moi. Je voudrais seulement admettre que l'opéra de Radziwiłł était la première adaptation du Faust, considerée aussi par Goethe comme la meilleure (même qu'il ne connaissait pas des postérieures). Sa vision de "Faust" Goethe formulait comme "une plaisantrie solennelle" que Radziwiłł selon lui a bien deviné. Même il a ajouté des nouveaux fragments au livret qu'on ne peut trouver dans le drame original (p.ex. en 1.4, après les mots: "Blut ist ein ganz besondrer Saft"). D'ailleurs le "Faust" de Radziwiłł est continuellement joué dans le Grand Théâtre à Poznań et j'espère le revoir bientôt.

2. Le samedi 22 août 2009 à , par DavidLeMarrec

Bonsoir Prosper,

Et merci pour toutes ces précisions !

Ca donne furieusement envie de se précipiter à Poznań, parce qu'il n'y a rien d'étonnant à ce que Goethe l'ait trouvé excellent : c'est très proche du texte, et aussi de son esprit, avec ce mélange de drame et de facéties, qui se trouvent ici jusque dans la forme de la musique.

Pour ce qui est des dates, la création (1820) est postérieure à celle de Spohr (1816), mais il est tout à fait possible, voire probable, que sa conception ait débuté antérieurement.

Merci encore !

3. Le samedi 22 août 2009 à , par Prosper

Bonsoir!

Quelle vitesse agréable! Oui, Spohr a été avant. Cependant les parties de Radziwiłł a été presenté en scène en 1810 à Berlin (et il y a parfois des mentions que c'était tout d'un coup la date de la première). La version pleine a paru en 1830. Un an avant Chopin l'a lu.

C'est incroyable qu'il y a un propos musical- savez-vous d'où il provienne? C'est clair qu'il n'y a pas des enregistrements achetables même en Pologne. Moi j'ai gaigné à peine la partiture chez un bouquiniste biélorusse.

Mes salutations!

4. Le dimanche 23 août 2009 à , par DavidLeMarrec

Bonjour Prosper,

Effectivement, d'après le Grove : composition débutée avant 1810, extraits représentés dès 1816, partition achevée en 1831 et représentée en intégralité en 1835.

Ma version est dirigée par Joshard Daus (Ensemble Zelter de l'Académie de chant de Berlin et Staatsorchester Braunschweig). Dans les rôles principaux : Fionnuala McCarthy (Gretchen), Annette Kuhn (Marthe), Thomas Dewald (Faust), et le plus célèbre Thomas Mohr (Méphisto).
C'est un repiquage de radiodiffusion, bien sûr, parce que ce n'est nullement commercialisé - ce qui rend assez difficile de trouver des interlocuteurs pour en parler !

Vu la rareté absolue (et la qualité) de l'oeuvre, à titre exceptionnel, j'échangerais volontiers scan de partition contre version sonore. -<]:o)

Bonne journée !

5. Le lundi 24 août 2009 à , par Prosper

Bonsoir!

Bien sûr! Quand je reprendrai ma partition (que j'ai laissé malheuresement à Poznań...) je ferai un scan pour vous!

Selon un article de L. Kolago (Poznań 2003) quand Carl Zelter a refusé d'écrire la musique après les encouragement de Goethe, Radziwiłł avait déjà commencé sa composition en 1808. Dans un lettre de Carl Zelter pour Goethe de 1810 "un aristocrate se fatigue beaucoup pour composer la musique à la tragédie". Les premiers fragments était présentés en Singakademie à Berlin en 1810. Un an plus tard les mêmes- à Weimar chez Goethe. Après- la version augumentée en 1816 à Berlin (premièrement en scène). La version intégrale en 1835 (1830 c'est ma faute, mais c'est vrai que Chopin l'a lu en 1829 et avec une admiration). Il y avait aussi la version polonaise en 1848. D'après tout cette histoire est assez intéressante...

Bonne nuit!

6. Le lundi 24 août 2009 à , par DavidLeMarrec

Et Zelter n'aurait pas fait mieux ! Pour ceux qui connaissent Zelter (1, 2 et 3), c'est assez dans le même genre, à ceci près que Radziwiłł sait admirablement varier les atmosphères... et quel humour !

C'est vraiment un bijou, il faut le répéter.

Merci encore pour toutes informations factuelles !

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David Le Marrec

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