Alma SCHINDLER-MAHLER - Waldseligkeit (1915 n°2, Dehmel) - I
Par DavidLeMarrec, vendredi 22 août 2008 à :: Poésie, lied & lieder - Les plus beaux décadents - Alma Schindler-Mahler :: #1022 :: rss
Voilà bien longtemps que nous projetons de revenir sur le peu que la postérité a pu récupérer du génie perdu d'Alma Schindler, épouse Mahler-Gropius-Werfel.

Alma Schindler à l'âge de huit ans.
Une présentation plus générale est à l'étude depuis assez longtemps, il nous faut simplement le temps de l'achever (et de refaire, à chaque fois, la discographie attenante, malgré sa quantité très réduite).
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Pour l'heure, introduction à ce lied totalement hors du temps compositionnel.
Le poème de Dehmel
Richard Dehmel (1863-1920), poète chéri des meilleurs décadents (notamment Zemlinsky, Schoenberg, Webern, Weill et même le postromantique Reger), a trouvé pour son poème Waldseligkeit une réception musicale très généreuse : pour les plus célèbres, Max Reger et Richard Strauss en 1901, Joseph Marx en 1911, et la deuxième pièce de la série de Fantaisies pour piano d'après Dehmel Op.9 de Zemlinsky (1898).
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WALDSELIGKEIT (traduction DLM)
« Béatitude de la forêt » [1]
Der Wald beginnt zu rauschen, / La forêt commence à bruire,
Den Bäumen naht die Nacht, / La nuit environne les arbres,
Als ob sie selig lauschen / Comme si, heureux, ils s'écoutaient
Berühren sie sich sacht. / S'effleurer doucement.
Und unter ihren Zweigen / Et parmi leurs rameaux
Da bin ich ganz allein, / Je suis là, parfaitement seul,
Da bin ich ganz dein eigen / Je suis là, parfaitement lié à toi,
Ganz nur dein ! / Je suis seulement à toi !
Difficile d'oublier, à la lecture de la thématique et de la structure de la première strophe, l'ineffable Schöne Fremde d'Eichendorff, fondé sur le même décor et la même attente grammaticale :
Es rauschen die Wipfel und schauern, / Bruissent les cîmes, elles frissonnent ;
Als machten zu dieser Stund / Comme si à cette heure se formaient
etc.
De façon encore plus nette que dans Laue sommernacht (autre texte de Dehmel mis en musique par Alma, dans la série publiée en 1910), l'univers sylvestre entre en confusion avec le monde émotif du poète. C'est une constante dans les textes choisis par Schindler : l'Hymne de Novalis, un mystère érotique, s'enracine dans le monde entier pour développer ses descriptions semi-abstraites. Un goût de l'ambiguïté et une obsession pour les sens proprement décadents (Schreker revient à cela pour chacun de ses livrets, en plus d'une méditation insistante sur la nature de l'art et sur l'avenir de la passion).
Inutile de s'étendre sur la seconde strophe et l'évincement du décor forestier au profit d'un 'recentrement' quasiment aphasique sur le Moi - et, nous dit-on, le Toi.
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La composition
Voici ce qu'en tire Alma :
Notes
[1] Le titre reproduit donc le mélange du poème entre décor et subjectivité, c'est pourquoi nous avons renoncé au trop descriptif "béatitude sylvestre" ou au trop restrictif "béatitude en forêt".
Christina Högman et Roland Pöntinen (BIS).
Oui, piano extrêmement déroutant, fortement autonome, ligne vocale accidentée (grands sauts d'intervalles), mélodisme fuyant, chromatisme [1] extrême, modulations [2] sauvages... Lorsqu'on songe que cette pièce a été écrite quelque part entre 1900 et 1914, on demeure songeur.
Nous reste à regarder cela de plus près, mais pour l'instant, il nous faut filer.
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Et bientôt, nous proposerons une introduction générale déjà largement ébauchée - afin que chacun puisse se repérer, trouver des disques, etc.
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(code de recherche pour les articles du même thème : AlmaSchindler) [3]
Notes
[1] C'est-à-dire intrusions de notes étrangères à la gamme de base d'un moment ou d'un morceau.
[2] Changement de gamme de référence.
[3] On essaie cette nouvelle formule pour faciliter les recherches : des codes indiqués dans l'article qui permettent de filtrer efficacement les contributions.
Commentaires
1. Le vendredi 22 août 2008 à , par lou :: site
2. Le samedi 23 août 2008 à , par DavidLeMarrec
3. Le samedi 23 août 2008 à , par lou :: site
4. Le samedi 23 août 2008 à , par DavidLeMarrec
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