Clara juge de Richard (2)
Par DavidLeMarrec, jeudi 23 avril 2009 à :: Clara Wieck-Schumann - L'horrible Richard Wagner :: #1217 :: rss

Photo de famille.
(Source.)
2. Mendelssohniens, schumanniens, wagnéro-lisztiens, brahmsiens et brucknériens
Il faut peut-être préciser que Clara a traversé plusieurs tempêtes esthétiques, et que ses positions sont aussi régies par sa formation, la fidélité à Schumann et les épreuves de sa vie.
Dans les autres combats, en revanche, Clara sera d'arrière-garde. Opposée aux wagnériens et aux lisztiens, qui considéraient la musique de Schumann, à nouveau, comme trop romantique à l'ancienne manière, tournée vers le sentiment (encore !), l'intériorité, au lieu d'attacher toutes ses formes créatrices à révolutionner les formes musicales.
Encore une fois, Schumann se voit opposer le goût de la forme, qu'elle soit conservatrice ou avant-gardiste.
Clara, bien sûr, défendra Schumann coûte que coûte de son vivant. Puis défend la musique de Brahms - qui n'est pas tout à fait sans rapport avec celle de son mari agonisant : encore formelle, massive, mais donnant également une large part aux atmosphères. Ce sera avec une constance inébranlable, à l'image de l'attachement réciproque qu'ils connurent. Malgré la différence d'âge, les relations d'égal à égal - qui semblent avoir largement laissé Brahms dans l'antichambre, cela dit - avaient paru étranges aux contemporains. Mais Brahms, soutenu dès sa jeunesse par Clara, l'épaule constamment durant les années de folie et d'isolement de Robert, le foyer de Düsseldorf devenant sa résidence adoptive, même lorsque Clara partait en tournée pour faire bouillir la marmite de ses enfants. Elle se faisait forte de faire triompher, grâce aux succès éclatants qu'elle remportait partout comme interprète à cette époque, la musique du jeune homme. Et les deux firent assaut de reconnaissance. Aussi, on ne connaissait pas plus brahmsienne qu'elle.
Mais Brahms, d'abord jugé formaliste et rétrograde par les wagnéro-straussiens, est finalement renvoyé à son statut de symphoniste post-beethovenien mal dégrossi lorsque vient le temps du retour des grands symphonistes Bruckner, puis Mahler.
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Tout est affaire de partis et de vase communicants, en l'espèce, tant des inimitiés esthétiques (ou personnelles, quelquefois) déterminent la succession des courants et des positions. Ainsi le terrible nom de Hanslick, pourfendeur acrimonieux de Wagner, est-il cité dans les biographies comme un soutien auréolé de constance de la musique de Schumann.
Ainsi, également, des figures aussi essentielles et parentes, parfois amies, que Schumann, Liszt, Wagner et Brahms sont-elles opposées par leurs disciples et admirateurs, jusqu'à exclure les esthétiques rivales.
Clara a beaucoup été emportée, par son investissement personnel dans la vie d'un créateur, dans ces considérations : elle défendait le territoire de l'aimé. Si bien qu'elle s'y est quelque peu recroquevillée en laissant passer Wagner - dont la description de l'âme humaine ne sait pas, il est vrai, élever comme ce que l'art de Clara et Robert tendait à exalter. Différence de perspective aussi, puisque le Beau chez Wagner n'est pas forcément harmonieux ni moral, alors que le tourment a toujours quelque chose de consonant et de sublimé chez les deux autres.
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