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Claudio MONTEVERDI - Il Combattimento di Tancredi e Clorinda - vers une discographie commentée


Le sujet peut être intéressant à ouvrir, au vu de la diversité des options... et de la hiérarchie que chacun établit selon les différents paramètres. Pour les lutins, on le sait, les mots doivent claquer bien comme il faut, et on ne sera pas surpris du résultat.

Si on en parle, en réalité, c'est qu'avant de fréquenter Christie, chez qui Rivenq révèle combien on peut rendre justice au Tasse tout en conservant la mise en musique de Monteverdi, nous étions restés assez largement à la porte de cette oeuvre - fondamentale historiquement, mais qui ne nous apparaît toujours pas particulièrement comme un chef-d'oeuvre musical, surtout au vu de ce que les années précédentes ont pu produire, y compris chez Monteverdi d'ailleurs.


Réédition très économique (sans livret, mais il se trouve très facilement en ligne) de la version Christie.


On a essayé d'agencer tout cela par succession approximative de nos désirs de recommandation.

Vu que selon les sensibilités prioritaires de chacun, l'appréhension des différentes versions doit être bien différente (on ne peut pas objectiver de qualité technique comme critère, ici !), on invite vivement nos lecteurs à nous faire part de leurs fréquentations personnelles.


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A. Versions recommandées des lutins

Les deux versions qui nous comblent.

William Christie (1992). Cette version s'impose comme la plus inspirée, grâce à l'extraordinaire enthousiasme verbal du Testo de Nicolas Rivenq, qui façonne les phrases avec le naturel de la déclamation parlée et le pouvoir d'impact de la déclamation chantée. L'idéal que les inspirateurs de deux Camerate n'auraient osé rêver.
Par ailleurs, l'accompagnement très réduit (deux violons, luth, et viole de gambe), dans une acoustique agréablement réverbérée, produit l'épure parfaite qui sied à cette version où le texte est incontestablement premier. Arte a de surcroît diffusé en 2004 une version filmique très plaisante à regarder, mélangeant sans esprit de sérieux balade vénitienne et restitution.
Un extrait figure dans cette notule.

Guido Morini (2005). Marco Beasley y tient les trois parties. Avec un accompagnement présent mais plus poétique que combattif, on tient là une version rêveuse extrêmement prenante, grâce en particulier à la précision verbale de Beasley, qui se joue avec une aisance déconcertante de l'alternance des paroles. Le timbre est toujours aussi beau naturellement, et sa clarté (n'utilisant pas la couverture des voix d'opéras, ni leur formant) lui évite toute déformation du texte, tout alourdissement inutile. Le texte, nu.
Un extrait figure dans cette autre notule.

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B. (Très) bonnes fréquentations

Que, très franchement, on ne va pas entendre si souvent. Mais qui sont des valeurs qui n'abîmeront certes pas l'oeuvre.

Rinaldo Alessandrini (1998). Une très bonne version, dans un versant figuratif qui nous touche moins. Tempi très vifs, qui donnent de l'urgence, accompagnement figural très impliqué mais aussi très juste dans ses effets (jusqu'au battuto col legno !). Roberto Abbondanza, sans avoir les mots généreux des deux premières versions présentées, dispose de la rondeur d'un Orfeo idéal, et d'une très bonne diction. Une valeur sûre, disons - qui n'a pas le magnétisme des deux autres, mais qui fonctionne de bout en bout.

Reinhard Goebel (1978). La version avec laquelle les lutins ont débuté, tout réjouis en voyant Nigel Rogers figurer sur le disque (et par ailleurs Carolyn Watkinson sur d'autres plages), et bien persuadés de bénéficier, via le hasard, d'une belle référence méconnue, n'était pas forcément une bonne porte d'entrée.
Goebel reste extrêmement rectiligne, presque raide, essaie le figuralisme sans en avoir la conviction (tout en le martelant), et Nigel Rogers, étrangement, en essayant de sonner italien, trouve des accents plus napolitains que florentins ou mantouans (pour reprendre trois étapes de la vie du Tasse), avec des voyelles très ouvertes. Néanmoins, lui, fait du très bon travail, expressif et soigné, avec un timbre généreux, très ornementé, et c'est surtout la pesanteur du continuo qui, comme chez Loehrer, abîme sa prestation : Goebel exalte les figuralismes, mais sans leur donner vie, si bien que l'aspect carton-pâte de la mise en musique de Monteverdi (pardon) se trouve encore plus mis en évidence. (Par ailleurs, le Tancrède larmoyant de David Thomas est assez laid, dans la mauvaise tradition du chant anglais de ces années. L'opposition avec le Testo lumineux d'italianité de Rogers est éloquente de ce point de vue.)
Néanmoins, l'éloquence de Nigel Rogers rend cette version très intéressante, une fois qu'on a déjà pénétré l'esprit de l'oeuvre.

Federico Maria Sardelli (2005). Avec un accompagnement varié et discret, Sardelli (et peut-être surtout le studio) ne produit pas l'effet touchant de Julien Chauvin, encore plus sobre, moins inventif instrumentalement, mais peut-être bien la présence la plus émouvante de la discographie. La lecture d'Antonacci (dans les trois parties) désappointe d'une certaine manière, si on ne connaît ni son irrégularité, ni ses habitudes plus confortables en italien : le résultat n'est guère voluptueux, ni textuellement, ni vocalement. On retrouve ses petits problèmes de détimbrage (sans aucune importance ici), et sa Clorinde se manifeste même par une émission stridente censée mimer la voix de femme. Par ailleurs, la prononciation est très détaillée, mais au service d'une sobriété absolue.
Tout est misé sur l'intimisme, et selon les moments, on s'interroge sur le beau hiératisme presque indifférent et sur le côté parfois quasiment précautionneux vocalement - des paradoxes habituels chez elle.
Le résultat est néanmoins convaincant, malgré cette distance qui ne rend pas pleinement justice au texte - vu la nudité de la musique et son attachement complet au texte, il n'est pas possible de transiger sur la qualité de la déclamation. D'une certaine façon, on dispose ainsi de l'oeuvre brute, presque sans parti pris - et cela fonctionne.

Sergio Vartolo (1995). Version atypique, à l'opposé d'Alessandrini, qui opte pour des tempi extrêmement lents. L'accompagnement n'en est pas moins extrêmement précis et découpé, parmi les tout meilleurs, mais ne cherche pas vraiment le figuralisme.
Alessandro Carmignani (Testo) fait le choix d'une lecture en forme non d'épopée, mais de déploration. Dès les premières paroles s'amorce une longue plainte. Son implication dans le texte lui permet de soutenir à merveille ce choix. Une choix qui émane sans nul doute de Vartolo, tant il conditionne tout le reste : on se doute bien que le chef, surtout dans ce répertoire, n'a pas fait que composer l'effectif instrumental et leur battre ensuite la mesure selon les désirs des chanteurs - d'autant plus que ce type d'oeuvre est très facile à chanter techniquement et que Vartolo ne dispose pas tout à fait de stars internationales dont ce serait un récital privilégié.
La difficulté réside dans la longueur : 25 minutes, sachant que les autres versions s'étagent, de la plus vive (Alessandrini) à la plus molle (Goebel, l'une des premières et assez poussive), de 17 à moins de 21 minutes (sans conter le Prélude instrumental naturellement). Les seules à pouvoir rivaliser en durée sont celles de l'ancienne école, d'avant la révolution baroqueuse, qui s'obstinait à jouer ces pièces si faciles de façon extrêmement lente et contemplative, avec la prédominance de nappes de cordes statiques - comme du Górecki. Les interludes à ce tempo distendent totalement le discours général, si bien que l'on perd un peu le fil. Le ton un peu uniforme n'aide pas non plus.
Dommage d'une certaine façon, parce que la façon de tenir ce propos-là est extrêmement maîtrisée et réussie. On dispose aussi d'une distribution exceptionnelle, avec Roberto Abbondanza en Tancredi, futur Testo d'Alessandrini (belle promotion bien rare dans la discographie !), et surtout de Gloria Banditelli, la seule Clorinda de notre connaissance à disposer de ce relief dans la déclamation, de cette force de conviction dans les mots de défi - sur un rôle si court et fragmenté, une véritable composition, un personnage naît.

Emmanuelle Haïm (2006). Une très belle version dans le registre expansif. Haïm, comme d'habitude, semble hériter de Nikolaus Harnoncourt une imagination sans limites pour l'instrumentation monteverdienne, toujours heureuse. Avec un effectif assez nombreux, elle assure ainsi des colorations variées, dans une visée relativement illustratif.
Le Testo de Rolando Villazón a fait verser beaucoup d'encre dubitative. C'est en somme à l'image de son dernier récital (Haendel) : très impliqué, une bonne déclamation italienne (comme quoi il peut surpasser le Maître en certaines occurrences), une grande force de conviction. Le contraste avec le Tancredi bien plus léger de Topi Lehtipuu est assez surprenant, puisque le personnage ne peut atteindre, malgré ses efforts, la véhémence très concernée du narrateur...
Ensuite, il s'agit bien sûr d'une option très lyrique, voire très vocale : toutes les notes sont pleines, les césures sont brouillées, l'émission un peu lourde atténue l'effet des chromatismes soudains, rend difficile l'articulation sillabando des passages les plus véloces sur notes répétées, et l'expression de la tendresse peut revêtir quelques aspects vaguements pucciniens, avec ce legato dont il peine à se départir.
On retrouve certaines étranges choses extrapolées dans l'aigu déjà permises à Dessay dans la Musica du Prologue de l'Orfeo, et assez totalement hors-style, comme une fugace concession bizarre aux philoglottiques verdianisants dans un océan de monteverdéité savoureuse.
Le résultat, quoique alourdi (et un peu fatigant) par toutes ces options lyriques, demeure prenant.

Stephen Stubbs (1992). La version, peu prenante orchestralement, fait le choix (pertinent) du baryton pour déclamer le Texte, mais la noirceur de Cesare Righetti, sa vaillance surtout, rendent le propos un peu fatigant : sans cesse éclatant, sans cesse fort, on manque peut-être bien les fragilités du texte, malgré une très belle réalisation énergique.
De surcroît, le ton est parfois presque didactique, ce qui, sans cesse à pleine voix, renforce cette impression d'insistance. Point intéressant : son Tancrède, Douglas Nasrawi, dispose d'un timbre très proche. Très bonne version au demeurant, du moins en ce qui concerne le chant.

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C. Versions plus problématiques

Nikolaus Harnoncourt (1984). Dans un ton similaire à son Orfeo, on retrouve les inspirations géniales de l'instrumentation, les couleurs proprement extraordinaires de l'orchestre voulu par Harnoncourt. Beaucoup de variété et de présence.
Malheureusement, les chanteurs ne sont pas du tout familiers de l'italien autrement que par le goût tedesco dans lequel l'on jouait alors Mozart, certes en langue originale, en Autriche. C'est-à-dire avec un accent terrible et un style... douteux, plus proche des Noces d'Erich Kleiber que de la poésie du Tasse. Werner Hollweg en Testo est particulièrement compliqué à supporter dès lors qu'on a le texte dans l'oreille ou un point de comparaison au disque.
Par ailleurs, le choix de la dramatisation est peut-être un rien outré : chantée comme de l'opéra, la pièce déborde d'effets théâtraux plus ou moins heureux, allant jusqu'au cri, avec des caractères très accusés qui dialoguent véritablement entre eux, quitte à mettre en péril la logique très intégrée du texte.
Kurt Equiluz (Tancredi) défend en revanche très bravement son rôle, en faisant mine de barytonner de façon menaçante, toujours très convaincant. Dans l'équipe de l'Orfeo, pourquoi, précisément, ne pas avoir embauché l'éloquence de Lajos Kozma (rôle-titre) ? Parce qu'il était sans doute tard, l'essentiel de sa carrière se situant dans les années soixante-dix ; mais pour ce type de voix et ce type de rôle, quarante-six ans, ce n'est pas franchement tard. Il y avait aussi Nigel Rogers (Berger II et Esprit I), dont la voix s'était abîmée cela dit, et qui avait déjà tenu ce rôle chez Goebel. Ou bien, ou bien... le fantastique Max van Egmond (Berger IV, Esprit III, Eumée), voix claire et ronde, éloquente, capable de chanter aussi bien les ténors que les basses, aussi bien l'italien que le français (dont aucun n'était sa langue maternelle) et dont, pour le coup, la carrière était à son zénith. Mais il l'avait enregistré en 1969 avec Leonhardt. Etrange choix, vraiment, que les grimaces expressionnistes de Hollweg, très désappointant vu la qualité qu'on perçoit par ailleurs dans cette version.

Edwin Loehrer (1962). Une version non-baroque (nécessairement, à cette date). Mais on échappe ici à tout protoverdisme : le Testo de Laerte Malaguti, quoique doté d'une très belle technique lyrique, énonce le poème avec une ineffable douceur, dans un murmure constant. Trop, peut-être, parce que ce magnifique murmure plein fait peu de place aux contrastes du texte. Et, ajouté à la grande lenteur des nappes de cordes vibrées qui accompagnent, on perd facilement le sens de l'urgence, et peut-être le fil du drame.
Ce n'est donc pas recommandable en tant que tel, mais c'est magnifique (Luciana Ticinelli Fattori est par ailleurs une sublime Clorinde, assez fascinante de beauté vocale et de sentiment).

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D. Versions qui font envie

=> Max van Egmond avec Gustav Leonhardt (1969), juste pour l'entendre dire tout ça.

=> Philip Pickett (1995), chef déjà tout à fait intéressant, mais avec le Testo de John Mark Ainsley, à la fois liedersänger de talent et solide haute-contre à la française, la version a tout pour mettre en appétit.

=> René Clemencic (1988) avec Zeger Vandersteene en Testo, ce qui, au vu des quelques instants entendus, a l'air fort bien.

=> Jean-Claude Malgoire (1988), parce que malgré toutes les faiblesses techniques, CSS a beaucoup de tendresse, quand ce n'est pas d'enthousiasme, pour son travail. L'instrumentation est semble-t-il originale (chitarrone plutôt que clavecin). (Isabelle Poulenard en Clorinde et Philippe Cantor en Tancrède.)

=> Claudio Cavina (2005), qui semble disposer comme d'habitude d'un continuo poétique en diable (et d'un rythme dramatique plus ténu). (Avec Mario Cecchetti en Testo, qui paraît présent, versant plutôt rond des Testi.)

=> Françoise Lasserre (2004), pour entendre Guillemette Laurens en Clorinde, même si le vibratello léger et irrégulier de Jan van Elsacker risque rapidement irriter, surtout que le mot est rond plus qu'incisif (dans la tradition d'Abbondanza / Carmignani plus que de Rivenq / Rogers, disons).

=> Ian Honeyman, superbe taille expressive, en Tancredi (malheureusement) chez Aapo Häkkinen (2003, avec l'Orchestre Baroque de Helsinki, qui a opéré la recréation mondiale de l'Ulysse de Rebel, avant Hugo Reyne). Pour ceux qui ne connaissent pas Ian Honeyman, voir la recommandation ici.

=> Kent Nagano (2002) avec Kresimir Spicer (le radieux Ulisse de Christie), ce qui peut être contenir le meilleur, mais aussi se montrer très douloureux ; bref, intrigant.

=> Luigi Alva (Testo) et Heather Harper (Clorinda) chez Raymond Leppard (1970), manière de s'amuser. Et plus encore le Testo de Giulietta Simionato (!) à Naples avec Nino Sanzogno (1952).

=> Gabriel Garrido (1997), malgré Furio Zanasi qui ne sera ni le plus beau ni, malgré sa sensibilité incontestable, le plus éloquent, peut se montrer intéressant orchestralement.

On se dispensera de nommer les versions qui font moins envie - les procès d'intention ne sont permis que lorsqu'ils sont positifs...

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E. Quelques clefs ?

La réussite semble, pour nous, se concentrer sur deux points essentiels :

  • plus que l'originalité ou la présence forte du continuo (on n'aime pas démesurément le figuralisme par ici, de toute façon, ou alors avec une certaine stylisation à la Schubert), c'est l'ardeur de la déclamation du Testo qui fait véritablement le prix d'une version. Dans notre panel, il n'y a guère que Nicolas Rivenq, Marco Beasley et Nigel Rogers qui manifestent ce talent à un degré supérieur ;
  • pour obtenir la tension nécessaire, une voix de baryton est souvent une bonne idée. Ou de mezzo pour Clorinde, comme le montre la grande réussite de Gloria Banditelli, loin des sons aigrelets qui peinent à se stabiliser dans le médium, pour la plupart des interprètes de la discographie. Etrange qu'on ait tant préféré les voix aiguës pour une tessiture si centrale - et un sérieux réel du propos, qui n'appelle ni clarté ni lyrisme particuliers.


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F. Prolongements

Pour parler de l'oeuvre :

  1. Leçons de Clorinde
  2. Repons de Clorinde



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Commentaires

1. Le mercredi 10 juin 2009 à , par Lavinie :: site

Je te déteste.
Tu me rappelles toujours des choses que j'ai étudié à la fac. Et que j'ai oublié, une fois l'examen passé. Et que je vais donc forcément oublier à nouveau. *sigh!*

2. Le mercredi 10 juin 2009 à , par DavidLeMarrec

Me détester, ça reste ma foi raisonnable, après le troll que je viens de lâcher dans tes forêts. :-)

3. Le jeudi 11 juin 2009 à , par Morloch :: site

Je trouve que la version Sardelli/Antonacci est ici traitée de façon trop cavalière. Enfin une interprète qui tranche avec le gentillet qui semble être le mot d'ordre des interprètes spécialistes de Madrigal. Monteverdi New Age, contemplatif mou à la façon Arvo Pärt ou musique d'ambiance de fond sympa comme la compil Buddha Bar n°72. Tous ces Christie et Alessandrini et autres Haïm ne me paraissent viser comme idéal artistique suprême que de faire la bande son d'un de ces documentaires écolos consensuels avec des images de nuages dans le ciel et d'insectes qui muent dans des gouttes d'eau au ralenti. Rien à voir avec Monteverdi, ce type est quand même un des plus grands compositeurs de tous les temps, ce qu'on aurait tendance à oublier.

Antonacci utilise une voix très austère presque rauque, avec des accents méditerranéens et des passages lyriques. Mais tout est fait avec une telle subtilité et un tel dépouillement que ça paraît simple, avec une théâtralité directe, pas celle de ceux ou celles qui gesticulent hystériquement ou roulent des yeux pour faire croire à un engagement, mais de celles qui trouvent instinctivement l'émotion juste, le phrasé parfait, sans en faire trop.

Pour moi, le grand disque de Madrigal publié.

4. Le vendredi 12 juin 2009 à , par DavidLeMarrec

Oui, je suis d'accord, comme elle détimbre en permanence, ça donne un petit côté mi-chorale corse amateur (pour l'aspect théâtralité méditerranéenne), mi-expériental postboulézien (pour l'aspect intellectuel de Monteverdi le grand génie jamais égalé).

Et comme ça n'est même pas volontaire, elle préfigure déjà chez les madrigalistes la découverte de la musique ouverte.

Génial.

C'est vraiment aussi bien qu'un concert de musique contemporaine, on ronfle un peu discrètement entre les strophes, et on en sort le teint tout frais.

5. Le vendredi 12 juin 2009 à , par Philippe D :: site

Le hiératisme, l'obsession du son propre de William Christie me semblent fondamentalement incompatibles avec la rhétorique monteverdienne. Je ne supporte pas d'écouter du Monteverdi agencé et ordonné comme un jardin à la française (dont raffole le chef de la Nouvelle Angleterre) où il n'y a pas une feuille qui dépasse de chaque allée et où on a l'impression que le jardinier passe tous les quarts d'heure au cas où la nature avait eu l'idée saugrenue de reprendre le dessus. Je préfère de très loin la noirceur engagée et dérangeante d'un Harnoncourt mais surtout la lumière, certes avec peu de rugosité, d'un Garrido. Chez Harnoncourt, la ferveur de Kurt Equiluz est en effet remarquable et cela fait passer la relative inadéquation du phrasé au second degré. La version récente de Lasserre est intéressante car confirme à une certaine prise de risque et homogène. Elle souffre malheureusement d'un travers de cet ensemble à savoir une forme d'autorité, de caractère un peu trop démonstratif un peu pénible sur la durée. Bien à vous. Philippe.

6. Le vendredi 12 juin 2009 à , par DavidLeMarrec

Bonsoir Philippe !

Merci pour ces impressions d'écoute.

Le problème étant qu'Equiluz n'intervient que fort peu par rapport à Hollweg.

Je n'ai pas du tout cette impression chez Christie en général, et particulièrement dans cet enregistrement qui est quand même d'une folie verbale assez impressionnante.

Mais ça dépend effectivement de l'endroit où l'on souhaite mettre le curseur. Pour moi, très clairement, surtout vu la nature effacée de cette musique, c'est la mise en valeur du texte du Tasse qui est primordiale pour que l'ensemble fonctionne.

Ce dont l'on déduit, par exemple, que malgré le raffinement extrême de son instrumentation et de ses articulations musicales, le hors style de Hollweg (avec ses cris quasiment véristes) et surtout son absence de naturel linguistique posent de grosses difficultés pour la réussite globale de la version Harnoncourt.

Bonne fin de soirée !

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David Le Marrec

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