Schönberg - Les Misérables (Châtelet 2010) : retour sur une évolution esthétique
Par DavidLeMarrec, mardi 6 juillet 2010 à :: Opéras français d'après le romantisme - Discourir - Genres - Musique de scène - Musiques du vingtième siècle - Saison 2009-2010 - Opéras des écoles du vingtième siècle - Comédie musicale :: #1565 :: rss
Le point de vue de l'amateur d'opéra.
Hier, les lutins se sont rendus, comme prévu, à la dernière représentation de ce spectacle musical qui se situe un peu hors du périmètre habituel de ces pages. Il faut dire que la gent korrigane est très admirative de ce qui a été réussi dans cette pièce.

1. Un sujet
Le choix est celui de vignettes qui parcourent amplement la fresque de Hugo, en en conservant les épisodes partagés dans la culture commune française. Plutôt que de choisir un fil narratif qui évolue de façon fluide, on privilégie les épisodes en forme de saynètes parfois très brèves, afin de reproduire le plus vaste nombre possible d'épisodes de ce qui est devenu une forme de mythe, avec sa puissance symbolique, son caractère fédérateur et la plasticité même de son intrigue. Il ne manque guère que la défiance initiale de Valjean à l'encontre de Pontmercy, tout y est.
On perd certes la langue de Hugo, et on entend quelques sentences un peu catégoriques qui sont très loin de l'art du balancier pratiqué par le poète dans ses raisonnements, qu'il résout par une forme de transcendance qui rend la voie évidente, et non pas par un réel choix. Néanmoins, contrairement à l'original français d'Alain Boublil et Jean-Mars Natel (à la fois précieux et d'une niaiserie assez ridicule), la version anglaise (Herbert Kretzmer) dispose d'une certaine élégance - nous ne nous nous serions pas déplacé, assurément, pour la version francophone.

2. Une adaptation digne de considération
2.1. Structure générale
Il y a quelque chose d'émouvant à voir cette foule assez populaire (à côté de la troupe joyeuse et farfadesque, une famille qui mettait les pieds pour la première fois au Châtelet) communier en présence, sinon de l'oeuvre elle-même, de sa marque sur l'imaginaire collectif.
C'est en effet un objet assez étonnant, qui transpose de façon tout à fait évidente les codes de l'opéra dans un format plus populaire :
- voix amplifiée ;
- orchestre d'une dizaine de musiciens traité en temps réel par un ingénieur du son, et complété par un synthétiseur (qui était quasiment seul à l'origine, mais l'orchestre a été ajouté lors de la refonte de l'oeuvre et au fil des succès) ;
- beaucoup de tubes ;
- pas de transitions entre les scènes, des "blocs" très identifiables.
Mais l'on conserve les récitatifs : comme dans la tragédie lyrique, ce peut être une forme de basse continue du synthétiseur, ou bien l'orchestre entier ou en partie qui soutiennent la déclamation, selon l'impact dramatique que l'on veut donner. Restent aussi l'ambition théâtrale, une nombre assez considérable de clins d'oeil à l'Opéra ("Don Juan", "mieux qu'un opéra", "nous battons-nous pour une nuit à l'Opéra ?", avec au besoin une ligne lyrique au hautbois qui imite la ritournelle introductive d'un grand air), et la construction complexe, qui échappe à l'alternance simple air / récitatif.
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2.2. Un drame postwagnérien ?
Car c'est assurément une oeuvre ambitieuse : non seulement il n'existe aucun passage parlé sans accompagnement, mais surtout, l'ensemble du discours est tenu par la présence de véritables leitmotive, et de leitmotive originaux, d'une façon qu'aucun farfadet n'a jusqu'ici ouïe dans aucun opéra, et qui n'a rien de pataude.
Ces motifs récurrents ne sont pas attachés, comme chez Wagner, qui en est l'un des plus virtuoses utilisateurs, à un objet ou à un sentiment d'un personnage, ni comme chez Strauss qui l'attache à un aspect de la psychologie d'un personnage, voire à un personnage, et encore moins comme Debussy ou Schreker, qui sont beaucoup plus nettement liés à un personnage précis (et donc moins riches de sens, en dehors de la structuration musicale de l'oeuvre).
Claude-Michel Schönberg a choisi des motifs (et en a développé la récurrence lors de la révision de la partition) qui ont un lien avec des concepts, mais des concepts libres, qui peuvent voguer d'un personnage à l'autre, et innervent ainsi d'une façon assez saisissante le drame. Ce qui est d'autant plus impressionnant que la musique en elle-même est assez peu subtile : toujours les mêmes rythmes de type croche-croche-noire (la seconde croche étant sur le temps), et des harmoniques habiles, avec des progressions agréablement tendues (notamment des frottements délicats en faisant bouger la basse), mais assez peu riches - bien qu'assez au-dessus de la moyenne du genre.
On en a relevé quelques uns :
- Les damnés de la terre : ce motif pesant apparaît à chaque fois qu'une masse populaire, harassée par la pauvreté, le travail, l'injustice de la société, apparaît. Bagnards, filles des rues, mendiants, peuple de Paris...
- La justice : ce motif consiste en une résolution harmonique implacable. Il est le plus souvent attaché à Javert (Honest work, just reward / That's the way to please the Lord), à cause de sa rectitude dans l'application de son devoir. Mais il est intéressant de remarquer, et cela, nul autre opéra qu'on ait de notre côté lu, entendu ou vu ne l'a essayé, que ce motif apparaît pour la première fois dans la bouche du personnage très positif de Monseigneur Bienvenu. Ce motif qui représente le respect des normes n'est donc ni positif ni négatif, il indique simplement une sorte de légitimité formelle du discours. Et cela rejoint admirablement le livret qui insiste sur le caractère foncièrement honnête de Javert, que lui reconnaît Valjean en lui laissant la vie sauve sans conditions.
- L'identité : ce motif est plus spécifiquement attaché à Valjean, et resurgit à chaque questionnement sur son nom, sur son destin, sous la forme d'un flux de parole haché, comme hébété, avec une thématique assez banale.
- La bonté : un motif tournoyant qu'on entend dès que Valjean commet un acte altruiste.
- Les rêves passés : ce motif est d'abord attaché à Fantine, et innerve son fameux air I dreamed a dream in time gone by, mais on le trouve également vis-à -vis de Valjean, et pas seulement lorsqu'il évoque la mère de Cosette ; à chaque allusion voilée au passé, il est susceptible de resurgir.
- Révolution : Une sorte de slogan collectif (Rouge et noir) qu'on retrouve évidemment lors de la bataille des barricades, avec une apothéose cuivrée qui figure le panache plus que la victoire, évidemment.
- Le monde nouveau : Ce motif est d'abord attaché à la Révolution (Do you hear the people sing, singing the song of angry men ?), mais réapparaît lors du grand final de l'acte II, pour annoncer un monde nouveau qui est celui d'un idéal plus vaste, pour ne pas dire d'un au-delà . En somme, c'est assez la façon dont la Rédemption par l'amour dans le Ring de Wagner passe d'un acte isolé de Brünnhilde vers Sieglinde à la salvation de l'humanité tout entière dans son seul retour, à la toute fin du cycle.
- Les étoiles : Plus anecdotique, ce motif aigu et diaphane débute le premier air de Javert qui leur est consacré, et se trouve cité sous forme d'allusion musicale dans le second, sans que le texte y fasse référence.
Et ainsi, alors que les va et vient des personnages s'y prêtaient très bien, Schönberg évite la facilité de thèmes liés de trop près aux personnages. Valjean en a bien un ou deux qui lui sont très fortement liés, mais les autres personnages ne sont pas caractérisés de cette façon, ce sont plutôt les concepts mis en jeu par le texte qui miroitent à travers ce tourbillon de motifs.
Et lorsque plusieurs se superposent comme dans l'affrontement de Javert et Valjean au chevet de Fantine, c'est assez impressionnant, et très rare dans le domaine de la "musique populaire".
[L'autre aspect wagnérien réside dans la qualité limitée de l'humour : souvent du comique de caractère bien lourd et guère drôle comme pour Beckmesser, Mime ou alors des exagérations à peine plus amusantes comme la fameuse Chevauchée des Walkyries - qui est réellement conçue par Wagner comme quelque chose de souriant.]
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2.3. Quel statut ?
Par ailleurs, on y trouvera d'assez beaux climats, qui ont fait avec quelque raison le succès des airs isolés passés à la célébrité.
Pas de longueurs, une collection de situations par ailleurs très efficacement résumées, et une musique qui touche juste.
Le type même d'oeuvre qui ne peut que confondre ceux qui veulent cloisonner les genres dans une forme de morale (l'opéra c'est ennuyeux, la musique populaire c'est pauvre, etc.).
Cet objet constitue en réalité une oeuvre extrêmement cohérente, très dense (ses épisodes très courts ne sont pas des facilités, ils ont véritablement du caractère), qui comporte même, malgré ses personnages taillés à la serpe et son langage musical relativement rudimentaire, l'un des usages les plus intéressants des leitmotive que les lutins aient entendu.
Ainsi, au delà du panache, des trépidations et des climats, même en la considérant avec les critères de la musique savante, l'oeuvre est aussi intéressante.

Ruines d'un aqueduc.
3. En salle
Plusieurs choses sont frappantes pour l'amateur d'opéra dans cette salle. Tout d'abord le public, pas habillé (certes, on est un dimanche et les gens ne sortent pas du travail, mais d'habitude, au concert, même un dimanche...), une moyenne d'âge beaucoup plus basse (beaucoup de trentenaires et quadragenaires, et très peu au-dessus), et très décontracté, d'un abord très bon enfant, discutant volontiers entre voisins, nullement crispé par l'événement (qui est pourtant considérable si l'on considère la durée à attendre pour revoir cette oeuvre-culte par rapport à un Don Giovanni).
Lorsque la musique débute, une clameur s'étend pour exprimer la joie d'être là à entre cette musique. La musique n'étant pas essentiellement à ce moment-là , c'est une manifestation assez sympathique (qu'on retrouve, plus discrètement, pour saluer certains bis célèbres dans les récitals classiques, en particulier d'opéra). Les airs sont applaudis, parfois les actions (alors qu'il ne se passe pas grand'chose musicalement, le retrait de Cosette de l'auberge des Thénardier est ovationnée !), mais pas les décors si le moindre aigu, la moindre action.
On a d'ailleurs été très agréablement surpris qu'à la fin des airs, le public attende, sinon la fin de la résonance, la fin de la musique pour applaudir, ce qui n'est pas toujours le cas à l'Opéra (c'est même plutôt l'exception). Même les discussions pendant le spectacle ont été finalement très rares, à peine plus fréquentes que pour un concert classique.
Il a simplement marqué son enthousiasme à certaines fin de parties, en couvrant de fort beaux interludes. [A ce propos, l'orchestration du final du II est beaucoup plus impressionnante en salle, vraiment spectaculaire, et pas vraiment de mauvais goût, en réalité.]
La sortie des spectateurs est aussi accompagnée par la reprise d'un pot-pourri des thèmes du concert, on est au cinéma plus qu'au théâtre.
L'amplification n'était pas désagréable, le volume tout à fait raisonnable. En revanche, faute de gestes suffisants des interprètes (nous étions loin et ne pouvions entendre le point de départ de la voix contrairement à Magdalena, qui comportait de toute façon uniquement des chanteurs lyriques, plus modérément sonorisés), la localisation du chanteur était difficile dans les scènes de groupe puisque le son provenait des baffles et non du personnage.
On a tout de même noté l'égalisation des dynamiques par le potentiomètre : lorsqu'un chanteur passe dans le grave (par exemple le couplet modulant au centre du grand air de Fantine), alors qu'on entend que la voix se tasse, l'amplitude sonore demeure strictement identique. De plus, les tessitures étant écrites assez basses par rapport à une voix projetée d'opéra (aussi parce qu'il faut que chaque membre du public puisse chanter cela aisément en rentrant chez lui), la voix serait véritablement très peu audible sans amplification. Certains interprètes qui chantent à la fois opéra et comédie musicale s'en plaignent quelquefois : leurs nuances dynamiques changent la couleur de la voix, sa texture, mais absolument pas la dynamique et le volume entendus par le public.
Le nombre de décors est quant à lui proprement hallucinant, avec quantité de changements à vue... C'est une petite fortune que cela doit représenter en conception, construction et transport. D'où le nombre assez important de représentations, sans doute, et surtout le nombre d'années de tournée d'une production... mais la salle n'était pas pleine du tout (dernier étage vide).
En somme, un public très agréable et attentif, et un cadre d'écoute assez confortable.

4. Une représentation
4.1. Mise en scène
Visuellement, une jolie mise en scène littérale assez animée, plutôt spectaculaire. On relève surtout l'excellente idée de placer en fond des projections inspirées de dessins de Hugo ou d'encres réalisées dans son style. Dans les égoûts de Paris, il y a en plus un défilement, sous trois angles différent, qui donne réellement l'impression de cheminer dans une étrange cathédrale sorti de l'imaginaire hugolien. Un épisode visuellement assez magistral, et tout à fait poétique en plus.
Il faut cependant reconnaître que la nouveauté de la nouvelle production de Laurence Connor & James Powell n'est pas conceptuellement vertigineuse par rapport à l'ancienne de Trevor Nunn & John Caird... On reste dans un spectacle littéral et agréable à l'oeil. Mais on a aussi le droit à quelques trouvailles, comme l'entrée et la présence des amis tombés au combat lors de la déploration Empty chairs and empty tables.
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4.2. Orchestre
Dans la fosse, une dizaine d'instrumentistes solistes (on entend beaucoup le violoncelle, le hautbois, les deux cors - et même occasionnellement les pains), un synthétiseur, un chef à baguette (Peter White), et une immense cabine de traitement du son en temps réel. Les spectateurs semblent très impressionnés par la présence de véritables instruments acoustiques dans cette adaptation de John Cameron (alors que, dans le cas des lutins, c'est évidemment plutôt le reste qui intrigue).
[Le tempo est très traditionnel et on n'a pas annoncé le remplacement du chef, ce doit donc bien être une modification de conception par rapport aux premières représentations, plus lentes que la moyenne, que signalait Laurent. Peut-être tout simplement pour des questions de fatigue des chanteurs, qui ont pu se plaindre - c'est dans leur statut.]
Le rendu est assez naturel, même si on reconnaît bien sûr les aplats de cordes synthétiques et les quasi-boîtes à rythme. Ce n'est pas moche en tout cas, on est très loin de la première mouture de l'oeuvre aux synthétiseurs telle qu'elle a été fixée dans les premiers disques (proprement inécoutable pour des farfadets ingénus).
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4.3. Chanteurs
Faute de fiche de distribution, les interprètes d'Enjolras et Javert sont sujet à caution, une annonce à précisé leurs noms, et il y avait donc peut-être bien remplacement ou alternance, mais je n'en ai pas trouvé trace en ligne - d'autant que le site du Châtelet n'indique même pas les noms des interprètes (!).
On est avant tout frappé par la diversité des techniques présentes sur scène, comme à l'Opéra d'ailleurs : selon le répertoire principal, les voix peuvent être de nature et de construction très différentes.
Ashlay Artus (Thénardier) semblait assez fatigué lors de cette dernière. La voix peine à être émise, comme étouffée. Peut-être un forçage pour accentuer les aspects de caractère de son rôle (lourdement soulignés par la mise en scène, mais le personnage est ce qu'il est dans cette adaptation du roman...). En revanche, danseur émérite.
Assez réservé aussi sur Madaleno Alberto (Fantine), qui chante avec un peu de souffle ostensible dans sa voix, sans réellement opérer le choix entre cette posture et une voix de variété plus traditionnelle. On imagine l'habitude de choses plus graves et plus toniques, mais la voix semble au contraire un peu molle ici, peut-être un contre-emploi. La lecture qu'elle fait de l'air a cependant sa propre originalité, ni explication d'une tragédie depuis sa catastrophe comme Rutie Henshall, ni émerveillement radieux devant le passé, le temps d'un souvenir, comme Gunilla Backman : ici, c'est plutôt la frustration qui est exprimée (le regard admiratif des hommes perdu), et Fantine a quelque chose d'une jeune fille qui a réellement, comme le dit le texte d'ailleurs, goûté à tous les plaisirs sans trop de scrupules.
Ce n'est pas forcément la lecture la plus attachante, mais il est d'autant plus méritant de la soutenir qu'elle est moins payante.
Jon Robyns est un peu décevant en Enjolras : la voix est claire et juvénile, un peu trop candide, et surtout la technique d'émission des aigus se fait dans une position pleurnicharde qui n'est pas très belle, et manque surtout singulièrement de panache. Le timbre se déforme, de plus, dans cette configuration, avec quelque chose de légèrement vert qui n'est pas toujours gracieux.
Cependant, l'ensemble est amplement correct, mais il est étonnant qu'un rôle qui recèle autant de tubes (le Posa local, en somme) ait été confié à une voix assez peu dans le caractère.
Lynne Wilmot (Mme Thénardier) est au contraire assez en voix pour un rôle de caractère, proprement chanté, avec une voix relativement pleine, même si le rôle, ici encore, ne peut pas donner plus que ce qu'il recèle sur la partition et surtout dans le 'livret'.
Le rôle de Javert, très central, n'est pas très difficile, et l'on peut aussi bien le distribuer à une voix claire qu'à une voix sombre (puisque c'est plus ainsi, un peu comme pour les femmes à l'ère baroque, que l'on distribue les voix dans ce type d'oeuvre) et un peu plus grave. Earl Carpenter n'est pas spécifiquement sombre, et l'interprétation de son rôle payant n'est pas spécialement originale, mais tout à fait opérante, même si l'on pouvait attendre un peu plus de panache.
Viennent à présent ceux qui ont fait forte impression.
Le Pontmercy de Gareth Gates est remarquablement chanté de bout en bout, avec beaucoup de soin et d'élégance à défaut de charisme, exactement ce qu'il faut ici. Les Marius sont de toute façon toujours choisis avec beaucoup de soin pour les représentations des Miz.
Dans un rôle de faire-valoir, Katie Hall (Cosette) ménage de superbes allègements dans un aigu lumineux, et sans pour cela que le timbre soit trop frêle ou trop aigre. Vocalement de toute beauté, même si, évidemment, ce n'est pas dans un tel rôle qu'on peut donner toute sa mesure.
John Owen-Jones (Jean Valjean) est celui qui fait montre de la maîtrise technique la plus impressionnante : alors qu'il ne recule pas devant les raucités dans le grave (surtout lors de son vagabondage avant la révélation Bienvenu), son belting [1] est tonitruant, son aigu insolent, son fausset (lors de la prière) très plein et extrêmement maîtrisé. Grande technique, et belle expression de surcroît.
Rosalind James dépareillait volontairement le plateau en Eponine, puisque sa technique américaine lui procurait une voix avec beaucoup plus de pulpe et de densité que ses collègues. Alors que ses parties, dramatiquement et musicalement, sont moins essentielles, elle leur procurait un véritable relief, avec une voix dans laquel le désir du cri semblait toujours couver sous une tessiture grave. Très beau.
A signaler également, l'excellent niveau des étudiants comprimari [2]
Bien, il est évident que l'on a joué au glottophile chichiteux en faisant mine de bouder notre plaisir (on se paie le luxe de la cuistrerie, vu qu'on ne parle à peu près jamais de ce répertoire sur CSS...), mais à l'exception d'Artus un peu fatigué, l'ensemble du plateau était de très bon niveau, rien qui gêne l'écoute. [Et c'est accessoirement l'intérêt d'écrire des lignes musicales chantables - voilà un point de divergence avec Wagner !]
[Précision discographique : il faut privilégier l'arrangement avec ensemble acoustique, donc écouter le disque du concert dirigé par John Cameron (superbement distribué) à l'occasion de la tournée du dizième anniversaire. Sinon on risque grandement d'être déçu.]
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Mais réellement, l'oeuvre a de quoi faire méditer les amateurs de cloisonnements génériques. C'est du très bon spectacle populaire, efficace et trépidant, mais c'est aussi du très bon opéra en fin de compte. Double ration de plaisir, et la joyeuse troupe des lutins en est sortie enchantée.
Notes
[1] Le belting est une technique de chant dans l'aigu utilisé dans certaines musiques populaires. Il produit un son strident très tonique dans l'aigu, en conservant le larynx haut. On pourrait, pour donner une idée, le comparer au chant du muezzin, qui doit certainement utiliser un type de configuration phonatoire assez voisin. Ce n'est donc ni de la voix de poitrine, ni de la voix mixte, ni de la voix de fausset.
[2] Comprimario : Dans les opéras italiens, nom qu'on donne aux rôles utilitaires ne prononçant que quelques répliques secondaires (Annina dans La Traviata, Ruiz dans Il Trovatore, etc.).
Commentaires
1. Le mardi 6 juillet 2010 à , par T-A-M de Glédel
2. Le mardi 6 juillet 2010 à , par DavidLeMarrec
3. Le mercredi 7 juillet 2010 à , par Arnaud Bellemontagne
4. Le mercredi 7 juillet 2010 à , par DavidLeMarrec
5. Le mercredi 7 juillet 2010 à , par fannick
6. Le mercredi 7 juillet 2010 à , par DavidLeMarrec
7. Le jeudi 8 juillet 2010 à , par lou :: site
8. Le vendredi 9 juillet 2010 à , par David
9. Le samedi 21 juin 2014 à , par CAVALLO Gaby
10. Le samedi 21 juin 2014 à , par DavidLeMarrec
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