Il est temps de nous attacher aujourd'hui à une autre figure considérable de l'opéra français au début du XXe siècle, et dont il n'existe strictement aucun témoignage discographique. Et dont on proposera, pour la première fois, des extraits sonores.
Ce sera de plus à travers l'un de ses ouvrages peu célèbres, La Damnation de Blanchefleur.
En trois notules :
1. Henry Février (1875-1957)
Fils de l'architecte Jules Février (en particulier célèbre pour ses ouvrages dans la plaine Monceau) et père du pianiste Jacques Février (créateur du Concerto pour la main gauche de Ravel et du Concerto pour deux pianos de Poulenc), Henry Février appartient au courant des compositeurs français qui ont pleinement transposé les acquis du wagnérisme (motifs, mouvances harmoniques, orchestration...) dans un langage spécifiquement français.
Alors qu'il a étudié avec Raoul Pugno, Xavier Leroux, Jules Massenet, André Messager, c'est surtout la parenté avec son maître Gabriel Fauré qui est la plus frappante. Les sombres harmonies postwagnériennes s'y mêlent d'une forme de grâce, de galbe très français, aussi bien dans la phrase musicale que dans la déclamation syllabique.
Bien qu'ayant pratiqué dans d'autres genres, ce sont surtout ses drames lyriques qui lui valent sa (désormais très relative) renommée. Dans ce cadre, c'est Monna Vanna (1909) sur le texte de Maeterlinck qui est resté le plus célèbre, immortalisé par Vanni-Marcoux dans un récital discographique, et par une vieille bande prise à Besançon en 1958, avec Suzanne Sarroca. Ce n'est cependant pas, et d'assez loin, ce qu'il a produit de plus intéressant.
- Le Roi aveugle (1906, Hugues Le Roux), opéra en deux actes créé à l'Opéra-Comique.
- Monna Vanna (1909, Maurice Maeterlinck), opéra en trois actes créé à l'Opéra de Paris et immédiatement repris à la Monnaie.
- Carmosine (1912, Caen et Payen d'après Musset), opéra en quatre actes créé à la Gaîté Lyrique.
- Gismonda (1918, Payen d'après Sardou), opéra en quatre actes créé à Chicago (!).
- La Damnation de Blanchefleur (1921, Léna), opéra en deux actes créé à l'Opéra de Monte-Carlo.
- L'Ile désenchantée (1925, Schuré), opéra en deux actes créé à l'Opéra de Paris.
- Oletta (1927, Choudens), créé au Grand-Théâtre de Bordeaux.
- La Femme nue (1932, Payen d'après Bataille), opéra en quatre actes créé à l'Opéra-Comique.
- Sylvette (1932), écrit en collaboration avec Delmas et créé au Trianon Lyrique.
De tout cela, bien que son nom demeure plus ou moins dans la mémoire collective, on ne dispose de rien du tout, à l'exception de quelques extraits de récitals (Journet, Vanni-Marcoux...) et de la bande privée de Monna Vanna.
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2. La Damnation de Blanchefleur (1920)
Mon attention a été bien plus retenue par La Damnation de Blanchefleur.
Suite de la notule.