mercredi 1 juin 2011
[Première mondiale] André CAMPRA - Hippodamie (1708) - fin de l'acte I (Pélops)
1. Une oeuvre emblématique
Hippodamie est le second ouvrage, après Philomèle (1705) de Louis de La Coste, sur un livret du même Pierre-Charles Roy, à initier une grande période de tragédie en musique à la fois noire et italienne.
On a longuement développé ces deux catégories dans :
- la notule introductive à la série autour de Philomèle (historique de la tragédie lyrique réellement tragique) ;
- la notule qui présente le sens de l'italianisme musical dans la France baroque.
Si Philomèle marquait l'imposition d'un genre librettistique, Hippodamie constitue une rupture par l'italianisme de sa musique et la grande place faite au récitatif. Vous pouvez remarquer, au demeurant, les contrechants à l'orchestre pendant cet air (style "concertant" à l'italienne), ainsi que son caractère très récitatif, en particulier la fin qui ne suit plus une courbe mélodique conjointe, et ce au profit d'une grande vérité prosodique, pour mettre en valeur la déclamation.
On entend aussi fort bien l'hésitation entre majeur et mineur, caractéristique de ce langage français depuis Lully, mais particulièrement poussé ici, et même une hésitation entre plusieurs modes mineurs (avec ou sans sensible) - autrement dit, les gammes sont comme instables.
De façon inhabituelle, le héros (Pélops, fils de Tantale) est tenu par une basse alors que sa renommée n'est pas plus héroïque que galante. D'ordinaire, on réserve la voix de basse à Roland, Hercule ou Tancrède, qui sont, eux, traditionnellement des basses-tailles - malheureux en amour et souvent dupés, au demeurant. Lorsque le héros est amoureux et triomphe (si l'on excepte l'essai de Cadmus, un rôle de type taille, comme Tancrède, donc en clef de fa mais plus aigu), on a plutôt, d'ordinaire, comme Bellérophon, Persée ou Amadis, une haute-contre pour les héros amoureux, même lorsqu'ils produisent de hauts exploits. Question également abordée ici.
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2. Enregistrement inédit
On situe ici à la fin de l'acte I (vous en entendez les dernières notes), où Pélops envisage, malgré la cérémonie funèbre pour les derniers prétendants à la main d'Hippodamie, de se confronter à l'épreuve équestre imposée par le roi Œnomaos.
L'image est tirée de l'édition manuscrite faite par Philidor.
Précision habituelle à apporter : l'enregistrement que je propose est un document, pas un produit fini qui serait exempt de défaut. Je m'accompagne en même temps que je chante, sur un instrument de plus totalement inadéquat : aussi il s'agit plus de donner accès à l'aspect général et à l'esprit de l'oeuvre que d'en fournir une version complètement honnête et aboutie.
Et cette fois-ci, je travaillais en lisant six portées (voix + 5 à réduire à vue en 2 pour le clavier) et assez loin de ma tessiture, ce qui ne facilitait évidemment pas la tâche pour un rendu exemplaire.
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3. Livret
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Baroque français et tragédie lyrique - Lutin Chamber Orchestra a suscité :
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