[Vidéo du jour] — La tradition esthétique des claquettes obligées
Par DavidLeMarrec, mercredi 22 octobre 2014 à :: Son & Lumière du jour :: #2545 :: rss
Disposant d'un petit stock de vidéos incontournables parues ces jours-ci, autant les écouler au jour le jour.
Nous commençons par un grave sujet. Comment les claquettes sont-elles ajoutées dans une composition musicale ?
Commençons avec un exemple que vous avez peut-être vu passer, France Musique ayant mis en ligne hier une charmante vidéo (Presto de la « Sonate en ré » d'Albéniz, pour harpe et claquettes) :
Sonate en ré d'Albeniz pour harpe et claquettes... par francemusique
Marielle Nordmann et Fabien Ruiz sont de vieux complices habitués de ce dispositif, témoin cette Danse du Corregidor de Manuel de Falla, il y a vingt ans :
Mais ce qui vous aura sans doute frappé, c'est à quel point le morceau d'Albéniz paraît archaïsant, quasiment une variation sur les fameux Canarios de Gaspar Sanz (1640-1710) :
(Vous pouvez retrouver le duo d'Anna Kowalska et Anton Birula dans d'autres « standards » brillamment improvisés, notamment les Folías Gallegas de Santiago de Murcía.)
… et pour cause. Il s'agit d'une composition de Mateo Albéniz (1755-1831) ; inutile, donc, de fouiller fébrilement dans le catalogue d'Isaac pour trouver cette Suite de danses dans le style ancien comme en ont écrit, à la même époque, Vincent d'Indy (plusieurs œuvres dans ce genre se trouvent sur l'excellent disque Timpani avec les solistes du Philharmonique de Luxembourg), Albéric Magnard, Gabriel Pierné (Chaslin chez Timpani, couplage avec l'incontournable Sophie Arnould) ou Raoul Laparra (Suite du temps de don Quichotte, inédite) et pas mal d'autres.
Néanmoins, pour un classique, voire un romantique, son style reste très archaïque, et évoque plutôt, dans le meilleur des cas, sa date de naissance que sa date d'exercice. L'aspect mozartisant qu'on perçoit est davantage dû à la couleur de la harpe — d'ailleurs, il écrivait essentiellement pour le clavecin et le pianoforte… et cette Sonate en ré est à l'origine prévue pour clavier, bien que rendue célèbre en particulier par des transcriptions pour guitare, auxquelles elle se prête à merveille (on y entend vraiment le babil hispanisant de Sanz et de ses contemporains et successeurs).
L'émission de France Musique, qui ne touche pas un mot de la musique, ne donne que le prénom du compositeur (sans insister sur son identité). Rien sur l'époque, la démarche, le fait qu'il s'agit d'une transcription.
C'était déjà en baisse de mon temps, mais c'était quand même pas comme ça.J'en viens maintenant à mon sujet : il est une constante en matière d'adjonction de claquettes à des morceaux classiques. On pourrait croire à une forme de dialogue et de contrepoint (fût-il amélodique), mais presque toujours, les claquettes ne font que doubler le rythme existant, avec éventuellement quelques petits effets ornés, de temps à autre, sur les temps forts. C'est joli, mais je suis étonné que peu d'arrangeurs (car les originaux ne sont pas légion) aient été tentés de faire quelque chose de plus dialogué ou faussement contrapuntique.
Quoi qu'il en soit, c'est rafraîchissant, et c'est pourquoi nous faisons tourner.
Commentaires
1. Le jeudi 23 octobre 2014 à , par Joël :: site
2. Le jeudi 23 octobre 2014 à , par David Le Marrec
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