À présent que je dispose d'un
agenda complété de toutes les grandes saisons 2023
qui viennent de paraître (Garnier, Bastille, Philharmonie,
Champs-Élysées, Radio-France, Versailles, Seine Musicale…), on se
plaint en me disant « mais il y a déjà trop de choix, comment choisir ?
».
Je tente donc de contribuer à votre bien-être avec cette petite
sélection rapidement commentée de concerts qui me paraissent
particulièrement prometteurs. Évidemment, je ne puis deviner ce que
chacun a entendu, il y a donc quantité d'œuvres et de concerts au
programme assez habituels qui seront très bien et auxquels vous pourrez
prendre beaucoup de plaisir si vous ne les avez pas déjà entendus vingt
fois…
J'ai tâché de l'organiser de la façon la plus claire possible, en
classant les genres du plus grandiose au plus intime, et à l'intérieur
de chacun, par ordre chronologique approximatif d'âge des compositeurs
ou de composition des œuvres. Comme cela, vous pouvez ne chercher que
le baroque ou le vingtième en regardant au début ou à la fin de chaque
genre, ou bien vous limiter à l'opéra, au lied, etc.
Puisque vous me lisez, vous le savez déjà, mais les meilleurs concerts
sont souvent les tout petits qui ne sont annoncés que deux semaines à
l'avance et qui permettent, pour un tarif très modique, d'être tout
près des interprètes dans une petite salle où l'on entend très bien,
dans une atmosphère de communion particulier et avec des propositions
souvent plus originales – on ne saurait trop recommander de tenter les
soirées du CNSM, notamment les ateliers lyriques qui sont de véritables
propositions scéniques souvent très supérieures aux mises en scène
dispendieuses mais assez statiques qui prévalent aussi bien chez les
tradi que chez les
regie…
Il vous faudra donc, pour en tirer le meilleur, jeter un œil régulier à
l'agenda pour ne pas les manquer… je les inscris dès que possible, mais
il m'arrive d'apprendre deux jours avant qu'un opéra inédit est joué
dans tel conservatoire, par telle institution pas du tout musicale ou
par telle micro-compagnie passée sous mon radar…
A.
Opéra scénique
Sacrati, La Finta Pazza par la
Cappella Mediterranea (3,4 décembre)
→ Opéra du XVIIe italien, donc primauté à la déclamation et action en
général plutôt statique. Je ne suis pas encore allé entendre celui-ci,
mais les critiques ont été absolument dithyrambiques.
LULLY, Armide par Pitoiset
& Le Poème Harmonique (12,13,14 mai)
→ Le chef-d'œuvre de LULLY, avec prononciation restituée et mis en
scène, par une très belle équipe.
Grétry, La Caravane du
Caire par Pynkoski et Le Concert Spirituel (9,10,11 juin)
→ Pynkoski réussit à chaque fois des tours de force scéniques (rendre
Richard Cœur de Lion palpitant !) ;
ce Grétry-ci, dont Napoléon a fait donner un extrait lors de sa prise
de Moscou, demande aussi à être mis en valeur et je suis très curieux.
(Le Concert Spirituel était électrisant dans
Richard, et la distribution reprend
beaucoup de chanteurs en commun.)
Stravinski, Poulenc : Le
Rossignol (en français !) et Les Mamelles de Tirésias par Les Siècles
(mi-mars)
→ Version prévue par Stravinski, elle n'existe que dans un vieil
enregistrement de la RTF, très bien chanté, mais où l'on entend mal
l'orchestre. Et sur instruments d'époques ! Avec les rares
Mamelles, une soirée de folie en
perspective.
Britten, Peter Grimes à l'Opéra
Garnier (février)
→ Pas donné depuis très longtemps à Paris, un drame original et prenant
autour des rumeurs dans un village – avec en sous-main, comme dans
Billy Budd, un propos sur
l'homophobie. Privilégiez plutôt les dernières dates, le temps que
l'orchestre se chauffe : ce n'est vraiment pas le même en fin qu'en
début de série !
Stockhausen, Freitag par Le
Balcon (14 novembre)
→ Suite du grand cycle
Licht.
Temporalités distendues, dispositifs dramatiques / scéniques / musicaux
toujours surprenants, il y a toujours quelques longueurs, mais
l'expérience marque très longtemps, et la musique n'est pas si
difficile d'accès… c'est
autre chose,
et cela mérite complètement d'être essayé.
B. Ballet
Adès, The Dante Project,
ballet de McGregor (mai)
→
Si l'on s'intéresse à la musique dans le ballet, il y a fort longtemps
qu'on n'a plus trop de quoi se satisfaire à l'Opéra, où l'on a pourtant
eu dans les périodes pré-Dupont des ballets sur des musiques de Franck,
Copland, Rangström, Sauguet, Damase, Morton Gould… Cependant cette
proposition-ci paraît bien tentante, par un compositeur syncrétique et
souvent inspiré, auquel la forme variée et discontinue du ballet
devrait très bien fonctionner. Sur un sujet
a priori porteur de contrastes
spectaculaires.
→ On remarque au passage qu'il faut désormais « Project » dans le nom
pour vendre des musiques plus rares (Walton, Weinberg…), quand ce n'est
pas du « Beethoven project » pour refourguer deux sonates à titre !
C. Opéra en concert
LULLY, Thésée par Les Talens
Lyriques (22 mars)
→ L'opéra de L
ULLY qui a connu
le plus grand succès jusqu'en 1730 ! Contre
toute attente, car c'est probablement, après
Psyché II, le moins inspiré de son
auteur. Il a été plus souvent repris que, par ordre décroissant :
Atys, Amadis, Roland, Armide, Phaëton,
Cadmus et
Alceste !
→ Il n'a pas été redonné en France depuis Le Concert d'Astrée il y a
une quinzaine d'années (et auparavant, ce devait être le concert de fin
de stage à Ambronay il y a un peu plus de 20 ans, dirigé par Christie,
avec notamment Legay, d'Oustrac, Novelli et Immler dans la distribution
!), et ce n'est pas non plus une œuvre inintéressante : son premier
acte est une succession vertigineuse de combats audibles
hors scène, de prières, de récits de guerre…
une des pages les plus impressionnantes de toute
l'histoire du genre !
Jacquet de La Guerre, Céphale & Procris par A Nocte Temporis
avec Cachet et Mauillon (22 janvier)
→ Une des plus belles tragédies en musique du XVIIe siècle :
on attend avec une impatience ardente qu'elle soit remontée
(prononciation restituée, ici ? Mechelen la pratique avec son
ensemble, certes dans une perspective moins exagérément archaïsante que
Green-Lazar-Dumestre), le livret a un remarquable potentiel dramatique,
et la sophistication de la musique rend son écoute passionnante et
saisissante.
Charpentier, Médée par Le
Concert Spirituel (27 mars)
→ Œuvre qui contient à la fois les plus beaux duos d'amour de
l'histoire de l'opéra et la scène des Enfers la plus terrifiante de
toute la tragédie en musique. Ici, avec la prise de rôle tant attendue
de Véronique Gens ! (mais attention, le rôle est vraiment grave pour
elle, ça ne la flattera pas à son maximum).
Mlle Duval, Les Génies par
l'Ensemble Caravaggio (7 mars)
→ De Mlle Duval, on ne sait à peu près rien : aussitôt son
opéra joué, elle disparaît de nos radars : s'est-elle mariée, tout
simplement ? Très curieux de l'entendre (tout début
XVIIIe).
Philippe d'Orléans, La Suite
d'Armide par la Cappella Mediterranea (2 juillet)
→ Formé et aidé par Gervais, Philippe d'Orléans écrit des opéras dans
une veine hardie, qui doit beaucoup à l'influence italienne (tellement
que l'on soupçonne des fautes d'harmonies ou de copie…). Pas aussi
ébouriffant que
Penthée (et
livret bien plus sage, mais grand plaisir d'entendre pour la première
fois une version intégrale !
Rameau, Castor & Pollux
version 1737 par l'Orfeo Orchestra de Budapest (13 mai)
→ Version bien supérieure dans son économie dramatique (tout n'y est
pas joué d'avance, Pollux hésite bel et bien) à la version de 1754 (qui
dispose en sus de quelques moments musicaux très réussis), et qu'on
entend très peu. L'occasion de profiter de récitatifs assez
extraordinaires qui disparaissent en partie dans sa refonte. Le seul
opéra de Rameau qui dispose d'une telle tension dramatique – le
caractère décoratif ou indolent de ses livrets constituant la
principale faiblesse de son catalogue pour le public d'aujourd'hui.
Rameau, Zoroastre, par Les
Ambassadeurs (16 octobre)
→ Livret très désordonné, regorgeant de rebondissements
exagérés, qui a la particularité de mettre en scène le panthéon
zoroastro-mazdéen. Musicalement trépidant, très animé de bout en bout.
Gluck, Iphigénie en
Aulide, par le Concert de la Loge Olympique (7 octobre)
→ À la création, tout le monde pleurait dans la salle. Moins
tendu que son pendant de Tauride, de très beaux moments, un vrai sens
mélodique, avant que Gluck ne radicalise encore son style dépouillé –
qui conserve ici encore quelque chose des galanteries rococo de ses
prédécesseurs.
Mozart, Così fan tutte par la
Chambre de Bâle & Antonini (24 mars)
→ Mozart par cet orchestre et ce chef, voilà qui va ravir tous les
amateurs de crincrins et pouêt-pouêts !
Bertin, Fausto par Les Talens
Lyriques (20 juin)
→ Personne ne sait ce que cela vaut : Louise Bertin, fille du directeur
du Journal des Débats, à qui Hugo voulut complaire en écrivant un
livret (
La Esmeralda) tiré de
Notre-Dame de Paris, n'éblouit pas
trop dans ce seul opéra publié (mais dans des circonstances
imparfaites). On l'avait accusée ailleurs de laisser Berlioz écrire une
partie de l'œuvre – apparemment il n'aurait fait qu'aider à
l'orchestration, pas extraordinaire au demeurant. J'ignorais même
qu'elle avait écrit d'autres opéras, et n'ai eu le temps de chercher
aucune information sur ce
Fausto.
Quoi qu'il en soit, c'est du neuf absolu, par une compositrice de grand
opéra à la française (il n'y en a pas beaucoup !).
Massenet, Hérodiade par Car,
Borras, Semenchuk, Dupuis, l'Opéra de Lyon et Rustioni (25 novembre)
→ Réservoir d'airs très marquants pour toutes les tessitures
(les airs de soprano, ténor, baryton et basse sont toujours programmés
en récital depuis un siècle !), dans un opéra un peu démonstratif et
statique, mais qui fouetté par Rustioni devrait être particulièrement
séduisant.
Massenet, Grisélidis par le
National de Montpellier (4 juillet)
→ Mon Massenet chouchou (avec Cendrillon, Thaïs et Amadis), peut-êter
celui que j'aime le plus. Très récitatif, très dramatique, le Démon
tente une femme vertueuse et se joue du mari. Tout cela avec un humour
très français et une qualité mélodique qui se coule dans une forme
libre qui évite l'air. Très animé, un des meilleurs opéras de langue
française (et dans une très belle distribution).
Gilberto Gil, Amor azul (2,3,4 décembre)
→
L'opéra de Gilberto Gil est reprogrammé. Je n'ai aucune idée de l'angle
par lequel il aborde le genre, mais ce sera du neuf, probablement
imparfait et rafraîchissant.
D. Musique symphonique
Cherubini, Mercadante
et Boïeldieu symphoniques
par la Chambre de Paris (17 octobre)
→ Symphonies (et concerto pour harpe !) de compositeurs du
premier XIXe, très rarement donnés en concert, et par l'orchestre le
plus à même de leur rendre justice !
Farrenc, Symphonie
n°2 par
Insula Orchestra (29-30 septembre)
→ Le disque des 1 & 3 avait été une révélation pour un peu tout le
monde sur la qualité de ces œuvres (que je ne tenais pas en très haute
estime). Précieux de disposer aussi de la 2, et pas sûr qu'il y ait une
sortie de disque à la clef !
Bruckner (s4), Messiaen (Ascension) par l'OPRF
& Chung (17 mars)
→ Chung m'a très profondément marqué dans la Sixième, je courrai
l'entendre ici.
Holmès : Andromède, Pologne,
Nuit & Amour… par le National de Metz (4 février)
→ Les grands poèmes symphoniques d'Augusta Holmès, d'une veine marquée
par Wagner – à l'écoute, il y a pas mal de points commun avec les pages
symphoniques de Lekeu.
Bertin, Farrenc, Holmès, Danglas,
Bonis, Grandval, Jaëll : pièces symphoniques et concertantes par
la Chambre de Paris (23 juin)
→ Programme de compositrices symphoniques : ce que j'en connais n'est
pas le sommet du répertoire symphonique, mais ce sera assurément
différent et stimulant.
Mahler 9 par Chung (9
décembre)
→ Mêmes raisons que précédemment : très envie d'entendre à nouveau la
maîtrise de Chung dans de grandes pages symphoniques très
architecturées.
Sibelius (s1), Salonen (cc violon), Lindberg (Feria) par l'ONDIF
(14 mars)
→ Très beau programme original et au contenu musical dense, qui ira à
merveille à l'un des orchestres les plus engagés et enthousiastes de la
scène française.
R. Strauss : 4 interludes d'Intermezzo, Légende de Joseph,
Monologue de Chrystothemis… par Asmik Grigorian / OPRF / Franck (1er
avril)Weill :
Symphonie n°2 par l'Orchestre de Paris (8-9 février)
→ Raretés de Richard Strauss : la Légende de Joseph n'est pas le
chef-d'œuvre des chefs-d'œuvre, mais Intermezzo et Chrysothemis, je
prends très volontiers. Comme tout ce qui est neuf. Et puis le
décadentisme germanique est l'un des meilleurs répertoires du Philhar',
où le luxe de ces cordes homogènes et lyriques fait merveille.
Bartók (Prince de Bois
intégral), Brahms (cc
piano 1) par Trifonov / ONF / Măcelaru
→ Măcelaru change tout en or, alors dans des œuvres aussi riches, d'un
format plus ambitieux que celles qui sont traditionnellement jouées par
le National, je suis très curieux.
N. Boulanger
(violoncelle-piano), Copland
(symphonie avec orgue), Piston
(Prélude), Carter
(Concerto flûte) : pièces symphoniques et chambristes rares par Pahud /
OPRF / Franck (11 janvier)
→ Programme étrange, mais la Symphonie de Copland (remaniée ensuite en
n°1 en réorchestrant les parties dévolues initialement à l'orgue), le
concerto de Carter ou le Prélude de Piston sont très rarement donnés,
et issues de gens qui savent écrire pour l'orchestre.
Stucky, Barber (cc violon), Sibelius (s5) par SFSO &
Salonen (10 mars)
→ À nouveau un programme qui sort des sentiers battus, même si le
concerto de Barber reste un concerto pour violon…
Rihm (Jagden und Formen) et Varèse (Déserts) avec vidéos de
Viola, par l'EIC (22 janvier)
→ Deux pièces majeures du XXe siècle, le grand cycle motorique et très
accessible de Rihm qui fait la part belle aux bois et les interludes
avec cuivres varésiens de Déserts, de quoi se vautrer dans l'orgie de
la virtuosité orchestrale et des tuilages atonals infinis…
E.
Musique sacrée
Allegri Rossi A. Scarlatti, motets… par
Alarcón (6 octobre)
→ Italiens qui couvrent tout le XVIIe siècle, dans des
styles s'étageant de la fin de la Renaissance aux débuts du
seria, par l'un des meilleurs (et
plus inventifs !) spécialistes.
Antonio
Draghi, Le Don de la vie
éternelle par la Cappella Mediterranea (3 juillet)
→ Oratorio italien de la seconde moitié du XVIIe siècle
(qu'entendra-t-on dans la Chapelle Royale, dont l'acoustique est
mauvaise ?).
Lenzi, Boffi, Couperin & nos contemporains :
Lamentations et Méditations par l'Escadron volant de la Reine (31 mars)
→ Italiens rares et Troisième Leçon de Couperin (pour le Mercredy) à
l'occasion du Vendredi saint à Radio-France.
Charpentier, Méditations pour
le Carême par Les Arts Florissants (31 mars)
→ L'une des œuvres les plus sidérantes de toute la musique sacrée.
J'avais présenté la
Deuxième ici, et Les Arts Florissants vont en
donner l'intégralité ! Expérience toujours bouleversante, déjà
vécue à l'Oratoire du Louvre en 2015 (par Le Poème Harmonique).
Gilles, Requiem par Helsinki BO
et Chantres CMBV (8 décembre)
→ L'Introït absolument ineffable (avec ses pointés et ses
silences) et le tuilage de l'Offertoire (parmi mes
boucles favorites) rendent cette œuvre
profondément marquante, parmi d'autres beautés. Il est rarement donné,
il faut se précipiter.
Lalande, Campra, Bernier, Gervais
: motets par Chantres CMBV & Haïm (17 novembre)
→ Très bel attelage de compositeurs sous influence
ultramontaine (pour les trois derniers), sensibles au contrepoint et
aux explorations harmoniques, et peu joués.
Gervais, grands motets par Les
Ombres (23 novembre)
→ Le maître de chapelle et professeur de Philippe d'Orléans,
programme dévolu à ses seuls grands motets (donc avec dialogues entre
solistes et chœurs), un petit événement !
Beethoven, Missa Solemnis par
Le Concert des Nations (22 mai)
→ Considérant le succès de leurs symphonies, assez enthousiaste
d'entendre ce haut chef-d'œuvre dans une version crincrinnante avec un
orchestre recruté parmi les meilleurs spécialistes.
Verdi, Requiem par Heever,
Semenchuk, Tetelman, Teitgen, Orchestre de Paris, van Zweden (26-27
avril)
→ Ça, c'est souvent donné, mais le plateau est hallucinant, on a
regroupé quatre des voix les plus insolentes du marché vocal actuel
! Et c'est payant ici. Avec en plus le Chœur de l'OP qui excelle
dans cette œuvre avec sa douceur et sa netteté, et van Zweden qui
paraît-il anime toujours de façon très convaincante cet orchestre,
promesse de moments assez intenses !
F. Chœur
Reinecke & Schubert :
pièces pour chœur et quelques instruments par le Chœur de
Radio-France et Ruf en récitant (20 décembre)
→ Reinecke est connu pour ses pièces pour flûte d'un romantisme très
apaisé, mais il a aussi commis des symphonies beaucoup plus
tempêtueuses, dans un style très premier-XIXe quoiqu'elles soient
contemporaines de Brahms ! (Il faut dire que l'histoire-bataille
telle qu'on nous l'enseigne, en musique, néglige les œuvres qui
représentaient les courants majoritaires, en général moins hardis. Tous
les compositeurs du second XIXe ne sont pas wagnériens !)
→ Cette pièce a l'air très originale, renforcée d'instruments isolés,
et bénéficiant d'un récitant.
Mendelssohn : Christus,
Première Nuit de Walpurgis par Accentus et Insula Orchestra (16 mars)
→ Christus est une très belle cantate digne des grands Mendelssohn
choraux, tandis que la Nuit de Walpurgis, mieux connue, est une sorte
de messe profane, d'oratorio de théâtre qui ressemble assez, par ses
aspects plus massifs que le Mendelssohn habituel, à un compromis avec
l'univers schumannien. (Sur instruments anciens et avec un beau chœur,
miam.)
Mendelssohn Schumann Reinberger
Saint-Saëns par la Maîtrise de RF (14 octobre)
→ Quelques-uns des meilleurs compositeurs pour l'
a cappella, dans des œuvres à
chœurs multiples, et pas l'un des meilleurs chœurs d'enfants du monde.
●
Massenet, Farrenc, Paladilhe, Roussel,
Chausson, Saint-Saëns, Chabrier, Sohy, Chaminade, Bonis par la
Maîtrise de Radio-France (16 mai)
●
Chœurs de
Grandval, Guilmant, Saint-Saëns,
Renié, Dubois, Bonis, Caplet, Duparc, La Tombelle, Labole, Boëllmann,
Sohy, Delibes, Chaminade et Gounod par le Chœur de Radio-France
(19 juin)
●
Duparc, Bonis, L. Boulanger, Schmitt,
Fauré, Castagnet : chœurs et arrangements choraux par le Chœur
de l'Orchestre de Paris (17 janvier)
→ Trois programmes français qui fréquentent à la fois la fin XIXe
siècle et le début du XXe, avec des grands représentants de l'époque,
donc un programme plutôt consacré aux arrangements pour chœur : ce sera
la grande fête !
Poulenc (Assise), Villette, Britten : Motets par Accentus
(30 juin)
→ Les plus beaux chœurs de Poulenc avec quelques autres vignettes
toutes de dépouillement, par un chœur qui les connaît très bien. Beau
cadeau !
Schnittke (Concerto pour
chœur), Rachmaninov
(Vêpres) par MusicAeterna (25 mars)
→ Peut-être les deux plus grands jalons du patrimoine choral russe,
mais le concert est suspendu pour l'instant – MusicAeterna étant
largement financé par une banque russe, ses fonds risquent de se tarir,
et ses autorisations de déplacement risquent de se faire plus
difficultueuses, de part et d'autre.
Tormis : chœurs par le Chœur de
l'Orchestre de Paris (14 mars)
→ Tormis est le grand représentant letton d'une veine chorale qui puise
aux sources du folklore : il était à la fois musicologue collecteur et
compositeur, et sa musique, simple et dansante, reflète ces influences.
Parfois des arrangements ou recréations de chansons existante. Très
accessible, mais pas sans richesse, il est très rare non seulement de
bénéficier d'un concert qui lui soit entièrement consacré, et de
surcroît par un chœur français – sans doute une première !
G.
Musique de chambre
Lassus, Gabrieli, Rossi, Bassano,
Marini, Falconieri, Monteverdi, Merula… passacailles avec des
membres de l'OCP (26 novembre)
→ Passacailles en folie du premier XVIIe siècle italien !
Lombardi Sirmen, Quatuor n°5
par des membres de l'OPRF, couplé avec des concertos pour piano de
Haydn et Mozart (9 juin)
→ Compositrice passionnante dont les duos pour violon et les quatuors,
à la fin du XVIIIe siècle, portent à leur sommet une sophistication
inhabituelle dans le répertoire galant. Parmi les pièces de chambre les
plus marquantes de cette période, à mon sens.
→ Couplage étrange, pourquoi jouer ceci dans un concert marketté comme
à la gloire du pianiste Piotr Anderszewski ? (Ces fous vont me
contraindre à aller entendre un concert de concertos pour piano
classiques…)
Haas, Krása, Webern : quatuors
par les meilleurs membres de l'OCP (Hughes, Parruitte, Cardoze…) (10
décembre)
→ Quatuors décadents très rarement entendus en France par
des membres de l'Orchestre de Chambre de Paris, qui ont de véritables
qualités de chambristes (Olivia Hughes est l'ancien violon 2 du Quatuor
Ardeo) : à les entendre, on croirait un quatuor constitué !
Chostakovitch, Symphonie n°14
pour deux pianos et percussions (7 novembre)
→ Proposition très originale, qui fait fort envie (les deux
solistes sont là également). C'est à la Philharmonie, mais Radio-France
propose, du même arrangeur, la n°5 pour un effectif similaire (ce dont
la nécessité m'apparaît moins impérieuse… qui aime la Quinzième de
Chostakovitch ?).
Messiaen, Chants d'oiseaux par
Boffard et… les chanteurs d'oiseaux (30 mars)
→ Dans le Musée de la Musique, idée stimulante de tisser les Catalogues
d'oiseaux et autres intégrations de Messiaen… avec une évocation de
leurs originaux.
Nancarrow & Ligeti par le
Quatuor Béla (4 mars)
→ Les deux quatuors de Ligeti et un quatuor de Nancarrow
(très fortement admiré de Ligeti, qui le mettait au niveau d'Ives et
Webern…), promesse d'une soirée qui change des standards du répertoire
et de leurs équilibres habituels.
H.
Lied & mélodie
Airs de
cour de Guédron, Boësset,
Lambert, Le Camus par Les Arts Florissants (27 mai)
→ Le concert d'airs de cour annuel de la Cité de la Musique, par
quelques-uns des meilleurs spécialistes.
Clérambault,
Dandrieu, Dornel, Louis Antoine Lefebvre, Montgaultier et Louis Antoine
Travenol, cantates par Le Consort (29 novembre)
→ Cantates françaises (inédites !) par le meilleur ensemble
spécialiste.
Schubert, Der Schwanengesang
par Boesch & Martineau (15 mars)
→ Au disque, la version que je trouve la plus marquante de ce cycle
apocryphe. La voix de Boesch sonne bien en salle, il n'y a pas de
raison que ce ne soit pas grand aussi en cocnert !
Schubert, lieder orchestrés (et
extrait d'Alfonso und Estrella) par les Prégardien et l'OCP (9 février)
→ Le petit plus réside dans
Alfonso,
un chef-d'œuvre dont les airs et duos méritent le déplacement
indépendamment du programme. Et puis, quitte à écouter du lied
orchestré, autant le faire avec un orchestre agile et avec les
meilleurs spécialistes du chant expressif allemand…
Lieder de
Schubert, Schumann, Wagner,
Loewe, Wieck, Brahms, Wolf, Reger, Pfitzner, Sommer, par Marlis
Petersen (14 juin)
→ Programme très varié d'une très belle voix.
Beethoven Schubert Rihm par
Nigl et Pashchenko, piano Gebauhr 1855 (15 février)
→ Le programme du disque paru chez Alpha : la voix si
particulière (très mixée) de Nigl (qui sonne comme un ténor moelleux)
lui permet une expressivité hors du commun. Bouleversé par sa Meunière,
passionné par ses Schubert ; le cycle de Rihm ne me paraît pas le
meilleur de ce qu'a produit le compositeur, mais c'est l'occasion
d'entendre un récital varié, et accompli à un degré à peine concevable.
Sur piano d'époque, pour ne rien gâcher.
Nadia & Lili Boulanger par
Richardot & Fornel (20 mars)
→ L'une des voix les plus marquantes de notre temps dans ces mélodies
ciselées et très peu données en concert.
J'espère que tout ceci vous fournira les repères nécessaires pour
effectuer les bons choix de vie et ne pas être lassé à la fin de la
saison en décrétant que, décidément, vous avez tout entendu et que les
saisons sont toutes les mêmes. C'est largement vrai, mais… la
multiplicité de l'offre permet, en glanant la marge de chaque salle, de
s'amuser assez vivement !
Pour le reste (en particulier en musique de chambre et mélodies, mais
aussi en symphonique avec les orchestres van Lauwe, Elektra, Ut5,
COSU…), il faudra guetter les annonces tardives des petits ensembles et
des conservatoires.
À
bientôt pour de nouvelles aventures : expérimentations de tragédie en
musique, nouvel épisode
biblique, exploration des usages des thèmes
patriotiques français, suite des
anniversaires, ou du panorama des compositeurs
ukrainiens tiennent la corde.
(On me réclame aussi une notule sur les
représentations musicales du coït – ce qui constitue une occasion
tentante de reparler de la terrible
Mona Lisa
de Schillings –, mais je ne suis pas tout à fait sûr d'obtempérer : la
constitution, partition en main, des exemples musicaux assortis du
visionnage des différentes positions traditionnelles pour le viol – car
ne nous mentons pas, dans le théâtre lyrique, je ne vais pas rencontrer
beaucoup de représentations sonores du consentement éclairé – risque
d'occuper un peu trop inconfortablement mon loisir.)
Dans l'intervalle, j'ai été mandaté pour écrire le programme
de mon festival préféré : mon rythme de publication en sera peut-être
temporairement affecté, mais je tâcherai au moins de vous nourrir en
matériau ukrainien. Et les
commentaires d'écoutes restent complétés au
quotidien.
--
P.S. : Malgré tout le soin mis à la confection, le passage de mon éditeur à la version définitive a ménagé des sauts de ligne intempestifs. Je ne vais pas avoir le temps de tout corriger, il faudrait refaire la mise en forme manuellement pour chaque entrée (alors que j'y ai déjà passé beaucoup de temps). Mes excuses pour l'inconfort de lecture.