Carnets sur sol

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Les pochettes de disque les plus belles (et les plus dingues) – 2 – Les références décalées


Ici, des pochettes dont la pochette est en lien avec le contenu, mais de façon souvent très partielle ou drolatique.

Je commence par les plus évidentes, quelques-unes qui au contraire pourraient être qualifiées de « références claires et légitimes ».

Aparté en a commis d'assez réussies : la clef du cabinet interdit de Barbe-Bleue (dont j'ai dit quelques mots ici, vu que j'en ai écrit la notice), le paon d'Argus qui surveille Isis, le moucharabieh du harem où est détenue l'épouse de Tarare… L'évocation tient un seul objet : à la fois symbole de l'intrigue et élément visuel fort assez aisé à identifier dans un bac ! (Les trois couvrent par ailleurs, pour ne rien gâcher, des œuvres majeures dans de merveilleuses réalisations musicales.)

↓ Quelques-unes apportent même un peu de complexité : un visage sculpté détruit ; symbole du passage de la sculpture vers l'animation ? Témoignage de l'iconoclasme nécessaire pour se protéger de la malédiction de Pygmalion ? En tout cas quelque chose d'un peu plus mêlé et complexe qu'une statue pleine et entière – et qui met en scène, déjà, des tensions comparables à celles du mythe.

↓ Celle-ci est sans hésiter ma pochette préférée du label. Par le détour d'un jeu connu de tous, évocation très élégante de l'intrigue, où la Reine meurt pour sauver le Roi. (J'aurais personnellement plutôt mis la reine en noir, puisque c'est elle qui descend aux royaumes sombres, mais c'est un détail.) Le résultat visuel est à la fois beau, dramatique, et parfaitement représentatif du sujet – alors qu'aucun personnage ou objet concret de l'intrigue n'y figure.

↓ On verra plus loin qu'Arte Nova, dans ses éditions et rééditions des années 2000, a eu tendance à explorer la pure photo d'art gratuite, sans lien avec son sujet… mais on trouve tout de même quelques pochettes très explicitement en lien avec le contenu du coffret.

↑ Ici, deux amants dans l'horloge de la Gare d'Orsay pour le Quatuor pour la fin du Temps, jolie allégorie très évidente mais particulièrement bien réalisée.

↓ Dans les années soixante (et plus ponctuellement suivantes), les grands labels osaient volontiers des illustrations originales, un peu cliché, mais d'une identité visuelle forte (et compatible avec un public enfant).

↑ J'avais dit un peu cliché.
(UCJ, propriété d'Universal.)

↓ Quelquefois avec un brin plus d'abstraction.

↓ Quelques pochettes singent aussi le cinéma.

↑ Bon, ça a une forme de violon, ça compte ?
(Rendez-vous plus bas pour les gaillarderies de toutes sortes.)

↑ J'ai mis des années à comprendre qu'il y avait le mot Ayres dans le titre ! (Et quatre ventilos.)
Coup de génie, j'adore.

↑ J'imagine que c'est sensiblement la même idée ici.

↑ C'est un autre vent qui souffle.

↓ Ce peut aussi être en rapport avec le sujet des œuvres.

↑ Assez sage, la bougie symbolise l'écoulement des nuits.

↑ Celui-ci est plus amusant, avec son artefact réduit en poudre – comme le Walhalla.

↑ Plus cohérente, et même un peu trop directe, avec un côté horreur série B.

↑ Ça finit mal pour le Loup.

↓ Les pochettes de Beauty Farm, (excellent) ensemble spécialiste des œuvres vocales sacrées de la Renaissance, sont conçues avec des mannequins, en général de façon assez abstraite , mais celles-ci évoquent des postures de bénédicité (1), de port-de-croix (2,3), de saint Sébastien (4), fréquentes dans l'iconographie.

↓ À votre avis, que se passe-t-il la nuit (chez Boult) ?

↓ D'autres se contentent d'opérer un point de connexion avec la nationalité des compositeurs :

↓ Et puis il y a carrément les illustrations méta- – impossible de trouver le nom des interprètes, d'ailleurs, de ce disque General Electric (!).

↓ Plus irrévérencieuse, la musique sacrée de Puccini figurée par les étals de marchands de produits dérivés catholiques. Ce n'est que notre début de chemin parmi des fantaisies de plus en plus étranges.

↑ Certes, Water Music est une musique d'eau, et prévue pour la Cour, mais le robinet doré dénote un petit manque de respect. (Il y aura une catégorie spécifique pour ces positionnements. Celui-ci reste encore du côté de l'amusement léger.)

↓ À présent que vous vous êtes échauffés, nous allons pouvoir entrer dans le cœur des allusions un peu plus distendues.

↑ En fait de « musique d'eau », je vois surtout des rochers… certes marqués par l'érosion. Soit elle n'est pas très visible sur la pochette, soit j'imagine qu'il faut déduire l'eau de son empreinte, de son négatif. Sophistiqué.

↓ Plus épuré encore, la Cinquième de Beethoven par Karajan, réduite à son minimum.

↑ Je ne trouve pas la réalisation très belle, avec sa sculpture réalisée en DAO et son ciel bleu trop étalonné ; toutefois la simplicité du concept – qui remet bien l'œuvre, particulièrement emblématique, au cœur du sujet – me plaît.

↑ Biber (beaver en anglais), c'est le castor. (Je ne sais pas s'il l'utilisait lui-même comme symbole – mes recherches en ce sens n'ont rien donné – ou si le graphiste est un germaniste facétieux.) L'illustration provient en tout cas d'un ouvrage de naturaliste écossais publié en 1836.

↑ Tous les éléments du titre y sont !

↑ Les belles au bois dormant sont deux, pioncent dans la neige et font la taille d'un double Gulliver. (Trouvaille de Jérôme Bastianelli.)

↓ Chez Arte Nova, pour les compositeurs qui ont connu la guerre, on trouve des rues un peu désolées dans des ambiances années trente-quarante.

↑ Marteau et faucille (à cordes) pour un titre qui mentionne Russie plutôt qu'Union Soviétique, et qui contient notamment L'Oiseau de feu de Stravinski – qui a passé l'essentiel de sa vie à l'Ouest… Référence facile mais pas très claire.

↓ Et si vous aviez cru que c'était la plus simpliste figuration de la Russie, attendez un peu :

↓ … référence nationale, certes, et sans qu'on en comprenne toujours bien le détail :

↓ Quelquefois, c'est simplement le chiffre qui compte. Et les possibilités sont alors infinies…

↑ [Si vous n'arrivez pas à lire : Concerto pour violon, violoncelle & piano de Beethoven par Kogan, Rostropovitch et Gilels.]
Certes, ils sont trois, et Beethoven était grognon.

↑ Version mignarde du précédent.

↑ Ce geste un peu désinvolte, quatre chaises-longues pour quatre cordistes, juste posées là, m'amuse assez. Effet assez poétique, même – évocation-absence.

↓ Quelquefois, il faut se contenter d'un rapport (encore) moins précis.

↑ Ici, le bout d'un décor de feuilles de chêne XIXe, probablement un relief d'église, pour un Requiem du premier XVIIIe siècle.

↑ Autre évocation partielle : certes, c'est vraisemblablement l'hiver… mais la solitude, les villages, les chemins de terre ?

↑ Ici, c'est plus minimal encore : Chostakovitch vs. la mort.

↑ En lien avec son lied Die Lotosblume, qui ne figure même pas sur le disque?

↑ Je termine avec ma pochette préférée – d'un disque qui figure par ailleurs parmi les meilleurs publiés dans l'univers du lied. J'ai longtemps pensé qu'il s'agissait d'une abstraction dont Arte Nova est coutumière – vous le verrez dans le chapitre qui est consacré à cette approche –, mais à présent j'y perçois une possible allégorie du lied : les fleurs fanées posées dans leur vase comme les sentiments ranimés par le chant ; l'oiseau empaillé comme ces mélodies transmises depuis les générations passées, ou depuis la sphère populaire vers la sphère savante avec la mise en partition.
Je ne suis pas persuadé du tout que ce soit le projet, considérant que la plupart des pochettes de cette collection paraissent assez arbitraires, mais cela ajoute à la poésie que j'y sens.



À bientôt pour le troisième épisode – les actualisations !


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Commentaires

1. Le dimanche 12 octobre 2025 à , par DavidLeMarrec

Je découvre celle-ci :



Assez merveilleuse évocation prosaïque du cycle de la vie pour les Saisons. J'aime beaucoup le décalage entre la métaphore sophistiquée et la platitude concrète de la captation de l'objet.

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David Le Marrec

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