Carnets sur sol

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mercredi 27 mai 2009

Apparition du hors-scène sonore


Les trois extraits musicaux de la notule. On les retrouve plus loin, un par un.

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Le théâtre chanté permet d'utiliser le hors scène d'une façon bien plus riche que la parole parlée : sa technique de projection vocale est bien supérieure, on peut donc comprendre des phrases entières, être fasciné par la musique, et aussi bénéficier d'un choeur tout entier, pour créer des atmosphères. [La musique de scène assez spectaculaire, dans le théâtre parlé, apparaît trop tard pour pouvoir créer cela.]

Le procédé est peut-être plus ancien qu'on ne pense tout d'abord. Mais revenons à nos classiques.

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Les Romantiques à l'Opéra ont usé et abusé - avec quelque raison, le procédé marche à tout coup - du hors-scène chanté, en particulier pour créer des contrastes expressifs avec ce qui se joue sur la scène.

C'est généralement dans le sens misérable de la souffrance de l'individu tandis qu'une foule en liesse s'ébat à l'entour, à peu près jamais l'inverse.

L'exemple le plus net et le plus réussi est peut-être l'acte de Fontainebleau de Don Carlos de Verdi : tandis qu'Elisabeth et Carlos viennent de recevoir la terrible nouvelle qui ruine leurs rêves de jeunes gens, celui d'un amour déjà bâti en rêve depuis des mois, et qu'il faut à présent que la princesse de France reporte sur le vieux roi Philippe, le choeur du peuple chante la gloire de la Princesse devenue reine et la saveur retrouvée de la paix.

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Georges Prêtre dirige l'Orchestre de l'Opéra de Paris en 1987 dans la version originale de l'oeuvre. Michèle Lagrange (Elisabeth de Valois), Martine Mahé (Le Page Thibault) Jean Dupouy (Don Carlos), Jean-Philippe Marlière (Conte de Lerme).


Après s'être vus pour la première fois, ils sont relevés de leur ravissement par l'entrée du page qui salue en Elisabeth la reine d'Espagne - les vers de Locle et Méry ont un poids assez terrible, puisqu'ils font tomber tous les titres à la rime, des couperets qu'on sent venir. Première expression du désespoir. Soudain, en coulisse, les choeurs joyeux a cappella retentissent. Deuxième contraste.
Puis entre l'Ambassadeur d'Espagne, Comte de Lerme, qui vient réclamer le consentement. Faiblement donné. Explosions de joie de la foule, mais d'une façon tendre et exaltée ; à cela se mêle le premier thème du désespoir (en triolets), mais en majeur, faute de pouvoir faire cohabiter les modes majeur et mineur ; mais le thème demeure reconnaissable et l'expression fonctionne tout à fait.
Elisabeth est enfin amenée, et les échos se taisent, laissant seul Don Carlos, abandonné, toujours incognito, et aussi profondément amer que possible.

Ici, la scène de foule est donc le moment d'un cruel contraste entre l'émotion collective (joyeuse) et le désespoir individuel ; la figure publique est révérée, l'humain souffre. Une dualité typique du théâtre de Verdi (Macbeth, Boccanegra, Otello par exemple), et très fréquente de toute façon à l'Opéra et dans le théâtre en général. Car la dissociation est à la fois très efficace dans le dispositif théâtral et très vraie psychologiquement.
Exaltation du personnage intime dans la grande figure historique, c'est un sport romantique très développé.

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Il convient peut-être de citer un contre-exemple célèbre.

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Vous retrouverez l'Orchestre de Covent Garden de l'ère Pappano (qui plus est toujours la prise de son EMI), mais il est ici dirigé (avec goût) par Mark Elder. Roberto Alagna dans « Nessun dorma » tiré de Turandot (Puccini).


« Nessun dorma » est l'un des rares cas où l'exaltation du héros contraste avec la misère qu'il entoure - et qu'il ignore superbement. Se fixant à lui-même une nouvelle épreuve de mort alors qu'il a vraincu lors des les cruelles épreuves imposées par la froide princesse, il condamne le peuple à souffrir et amènera plus loin ses amis à mourir ou à souffrir. Mais ce qui le préoccupe pour l'heure, c'est avant tout la jouissance de la certitude de sa victoire sur la femme convoitée, qu'il lance en quelque sorte à sa fenêtre et aux étoiles, sans qu'il puisse être entendu. Pendant ce temps, on entend le choeur se lamenter sur le martyre qui découlera de cette nouvelle épreuve (des massacres aveugles).
Un tel air d'exultation est rare dans le répertoire, et qui plus est il renverse le schéma habituel (où l'on compatit pour le personnage brisé) - mais Calaf n'est, définitivement, pas un personnage sympathique.

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Mais ce dispositif est-il réellement propre à l'ère romantique ?

Non, non, on en trouve trace dès Quinault. Pour Thésée (1675) [1], tout le premier acte se déroule avec des clameurs de combat en coulisse, tandis que les affects des personnages se dévoilent sur scène, suscités ou ponctués par ces événements.

Il y a fort à parier qu'il n'en existe pas d'exemple antérieur : ce type spectaculaire, cette musique dansante et dynamique étaient alors le propre de la musique française (et le baroque français demeure sans doute son lieu privilégié aujourd'hui encore...). On imagine mal les contemporains de Francesca Caccini ou Cavalli, dans leur psalmodies, introduire ce genre d'effets. Peut-être plus dans le pré-seria du type de Legrenzi, mais on voit mal pourquoi (et comment !) faire un tel crochet esthétique entre les deux genres assez hiératiques que sont le premier opéra et le seria (même si Giovanni Legrenzi est incontestablement plus mobile dramatiquement).

Il existe bien, dans Alceste (1673), un siège contre le ravisseur Licomède, mais il occupe en réalité toute la scène, et les assiégés sont censés être visibles sur le rempart, sans compter les sorties contre les assiégeants. Le dispositif ici n'est pas un dispositif expressif destiné à révéler ou à exalter des affects. La vue d'Admète blessé n'est pas attendue, c'est une surprise d'Alceste après le départ d'Alcide victorieux. [2]

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Sophie Karthaüser (Aeglé), Aurélia Legay (Dorine), Salomé Haller (la prêtresse de Minerve), Nathan Berg (Arcas). Le Concert d'Astrée et Emmanuel Haïm, qui font mieux que rendre justice à cette partition, qui en exaltent grandement les qualités et en masquent tous les déséquilibres.


Vous pouvez suivre le livret ici. Nous avons pratiqué quelques coupures pour ne pas être trop long dans le cadre de cette notule.

On voit ainsi que le choeur des combattants caché suscite l'effroi, ponctue l'affliction et l'inquiétude d'Aeglé pour Thésée, contraste avec la tendresse comique du duo de valets [3], suscite les prières de la communauté, fait écho à l'horreur des mourants, annonce une victoire dont les coeurs amoureux ne savent s'il faut s'en réjouir pleinement ou se préparer à pleurer leur héros.
Le contrat est donc pleinement rempli par rapport à l'effet recherché. De plus, alors que les paroles du choeur évoluent de la lutte à la victoire, la musique de guerre conserve son unité thématique du début à la fin, et donne toute sa cohérence à l'acte entier.

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On peut donc, pour une fois, dater très précisément le procédé à 1675.

Dans toute la tragédie lyrique, cette configuration sera reprise. On peut songer à l'affrontement final de l'Ulysse de Jean-Féry Rebel, calqué en cela sur Lully comme en bien d'autres points [4], même si le livret de Guichard demande plutôt deux côtés de la scène qu'une coulisse (mais Pénélope souffre en attendant). Et bien sûr au combat mortel de Castor dans la version de 1753 (on l'entend crier comme le combattant mourant de Thésée), qui s'interrompt à l'entracte pour déboucher sur la déploration et les jeux funèbres.

Notes

[1] Notre présentation est antérieure à la parution de la première intégrale discographique et aux représentations du Concert d'Astrée. L'oeuvre avait été donnée à la fin des années 90 par William Christie dans plusieurs villes de province, mais on se fondait uniquement sur la partition.

[2] Le montage du librettiste par rapport au texte d'Euripide est d'ailleurs fort intéressant (et même franchement inspiré), ce sera pour une autre fois.

[3] Jusqu'à Isis (fausse séduction entre Iris et Mercure) et la disgrâce très temporaire de l'indispensable Quinault, on trouve des figures comiques dans les opéras de Lully et Quinault, y compris dans les dépits amoureux d'Atys, où les valets sont pourtant absents.

[4] Qu'on s'était promis de détailler un jour, il y a déjà longtemps.

lundi 25 mai 2009

Evolution



Frontispice de l'édition de Ballard à l'occasion de la seule reprise (22 et 29 octobre 1763).


Où l'on se retrouve en pays de connaissance, comme on le verra plus loin.

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1. La place historique et esthétique de Scanderberg

Scanderberg, créé le 27 octobre 1735, constitue un jalon important dans l'histoire de la tragédie lyrique et on peut par conséquent s'étonner qu'il n'ait pas encore été représenté ou enregistré depuis le retour en cour de ce genre, il y a à peine plus de vingt ans.

Il s'agit en effet de la première fois que la tragédie en musique exploite un sujet si proche temporellement (XVe siècle). Or, le genre, bâti comme en miroir de la tragédie classique, se fonde très largement sur le dépaysement et le merveilleux. Là où le théâtre parlé commandait une cohérence entre les lieux, le genre chanté multiplie au contraire les déplacements les plus spectaculaires ; là où l'on attendait un vraisemblable (éventuellement de nature extraordinaire chez certaines fortes têtes à noms d'oiseaux), on ne réclame que le merveilleux le plus éblouissant.
Ce qui était encore possible avec les enchantements du Moyen-Age (Amadis de Gaule et Armide de Quinault, bien sûr, mais aussi Tancrède de Danchet) devient plus délicat ici.

Le dépaysement a lieu par l'éloignement tout relatif d'une époque révolue, celle de la lutte contre les puissances musulmanes, sous forme de croisades ou sous forme de résistance à la conquête ottomane : même après la bataille de Vienne (12 septembre 1683) les Balkans ne sont rétrocédés qu'en 1699 à l'Autriche-Hongrie, par le traité de Paix de Karlowitz.
Il a lieu aussi par le caractère oriental du cadre - on s'est beaucoup souvenu du décor de Servandoni pour le cinquième acte (une mosquée).

Il faut dire que l'orientalisme est alors nourri de la fascination pour les Contes des Mille et une Nuits traduits par Antoine Galland, et se teinte donc de connotations merveilleuses d'une façon plus systématique qu'on pourrait le penser aujourd'hui. Voilà donc pour notre merveilleux - le sérail, déjà, a quelque chose de furieusement inconcevable, sans doute.

Par ailleurs, la rhétorique du merveilleux demeure, même si aucun événement ne peut réellement lui être attribué :

L'AGA DES JANISSAIRES, alternativement avec le Choeur
Le Sultan dans tes mains a remis son tonnerre
Sous ses lois, fais trembler la terre.

En plus de cette fin de l'acte III, le cinquième acte voit apparaître un muphti censé apporter des révélations inspirées, mais qui demeure rien de plus qu'un accessoire dont on ne sait guère le sérieux. [Même si on n'est pas encore, comme dans le Zoroastre de Cahusac, dans le doute sur les divinités - Abramane y manipule à son gré les oracles face à un peuple crédule. On voit aussi cela dans Les Indes Galantes de Fuzelier, où le prêtre Huascar mystifie les Péruviens pour servir ses amours personnelles.]

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2. Scanderberg, réussite historique de La Motte

Un sujet nouveau, donc, mais ce n'est pas la seule raison pour laquelle Scanderberg doit être considéré comme historique. Il s'agit peut-être bien du meilleur livret d'Antoine Houdar de La Motte - et de son dernier, il lui a fallu le temps. Après avoir ruiné tant de superbes musiques, c'est une jolie chose qu'il nous livre là, bien de son temps avec ses galanteries de sérail, et même plutôt précoce. On y trouve de très belles tirades qui demeurent plus psychologiques que décoratives et qui, mises en musique par des musiciens de la trempe de Francoeur & Rebel, devaient produire un grand effet. [Dans les mois à venir, CSS devrait avoir l'occasion de se pencher sur la partition, affaire à suivre.] Les ballets demeurent assez en fin d'acte ne vampirisent pas hors de mesure l'action comme La Motte le fait pourtant très souvent.

On pourrait penser, au vu de la date, que l'oeuvre s'inspire grandement de la Zaïre voltairienne (1732), mais en réalité, La Motte nous ayant abandonné en 1731, il n'en est rien. [C'est le coût des prétentions scéniques de La Motte qui ont, semble-t-il, retardé la présentation de l'ouvrage.] En tout cas, La Motte se situe ici plutôt en pointe, puisque cette veine du sérail, déjà à la mode, perdurera ensuite longuement avec l'Enlèvement de Gottlieb Stephanie / Mozart (1782) et même le Tarare de Beaumarchais / Salieri (1787).

Mais on nous voit déjà venir... Sans doute va-t-on perfidement sous-entendre que le chef-d'oeuvre de La Motte doit largement son accomplissement à ce qu'il a été complété par Jean Louis Ignace de La Serre, poète aux vertus déjà plus fermes, auteur du Pyrame & Thisbé que l'on sait pour une musique des mêmes compositeurs.
Cependant il n'en est rien, et nos lecteurs nous déçoivent d'avoir pu nous prêter cette vilaine intention ; La Serre s'est contenté de travailler le Prologue et le cinquième acte, ce qui laisse pas mal de moments de bravoure authentiquement dus à La Motte.

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3. O tempora, o mores !

Suite de la notule.

mercredi 20 mai 2009

Charles MOUTON (v. 1626-1710)



Suite de la notule.

vendredi 8 mai 2009

Le baryton - III - une histoire sommaire (b) : apparition et lexicographie



Episodes précédents :

  1. une (difficile) histoire sommaire ;
  2. de la tragédie grecque à l'opéra seria


On rappelle, donc, qu'à l'époque du seria, le baryton n'existe pas : les rares voix non aiguës sont des basses nobles ou bouffe, et un peu plus tard des ténors. Mais, simultanément, il se passe des choses en France, dès le dernier quart du XVIIe siècle et le règne de Lully.

6. La musique baroque française et l'apparition du baryton

La musique française, plus riche en subtilités, en polyphonie et en recherches psychologiques que ses contemporaines européennes, va ressentir le besoin de créer cette catégorie intermédiaire, et de la désigner par un mot. Ce sera furtivement, mais ce sera.

6.1. Nomenclature

On rappelle la nomenclature des voix françaises, de l'aigu au grave :

  1. dessus (= soprano)
  2. bas-dessus (= mezzo-soprano : en réalité la tessiture est presque exactement la même, c'est surtout une question de couleur, qui ne doit pas être la même pour Aeglé que pour Médée !)
  3. haute-contre (= ténor)
  4. taille (= ténor grave, dans la musique religieuse essentiellement)
  5. basse-taille (= basse)
6.2. La taille, ténor grave ou premier baryton ?

La voix de taille, présentée autrefois, correspond à une tessiture de baryton, surtout au diapason à 390 Hz utilisé à l'époque de Lully (soit à peu près un ton au-dessous du 440 Hz standard aujourd'hui). Mais on a conservé l'habitude de le faire chanter par des ténors assez centraux, à plus forte raison puisque les basses-tailles sont souvent tenues par des barytons au bas-médium dense (Jérôme Corréas, Bertrand Chuberre, ou même Nicolas Rivenq qui a débuté en basse).

En plus de la musique religieuse, elle est utilisée, de façon marginale, dans les tragédies lyriques, pour tenir des rôles d'opposants tempêtueux, qui doivent avoir à la fois une couleur plus sombre que le jeune premier et un éclat arrogant que l'écriture pour basse, épousant très souvent la ligne de la basse continue chez Lully, ne procure pas. C'est le cas pour Epaphus dans Phaëton, pour Méduse dans Persée et bien sûr la Haine dans Armide. Ce sont des rôles hauts pour un baryton à 440 Hz, mais parfaitement centrés à 390 Hz. Ce sont des doubles vocaux plus sombres des hautes-contre.

6.3. Le concordant, un non-emploi mais un vrai baryton

Suite de la notule.

mercredi 6 mai 2009

[fragment] Deuxième école



Le combat de Tancrède et Clorinde par Ambroise Dubois.


En plus d'un aspect musical bien particulier, l'école de tragédie lyrique des Destouches, Desmarest et Campra a aussi ses spécificités dramaturgiques. Et contrairement aux deux périodes qui l'encadrent (Lully et Rameau, disons), les divinités sont mises à l'écart, et le drame est uniquement humain, sans espoir divin. C'est aussi ce qui les rend si touchantes, cette solitude humaine dans un univers si codifié, dont le Deus ex machina demeure cependant absent.

C'est bien sûr à nuancer très largement. La première version de Callirhoé, par exemple, comportait une intervention finale de Bacchus au lieu du suicide décisif de Corésus.

Il faudrait confronter rigoureusement l'ensemble du corpus. Idoménée ne convient pas parfaitement, vu la forte intervention divine, mais ici la noirceur, l'abandon des humains par les puissances qui peuvent les protéger rendent précisément ce drame très humain.

D'une manière générale, la magie ne tient pas la même place décisive, et l'optimiste du propos est beaucoup plus diffus - voire absent, comme pour Tancrède, Idoménée et Pyrame et Thisbé (on peut l'inclure comme oeuvre de jeunesse de Francoeur & Rebel, encore très imprégnés de ce style).

Suite de la notule.

David Le Marrec

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