mercredi 5 octobre 2016
Saint-Saëns – Mélodies persanes – Christoyannis, Cohen
Parution toute récente de quatre cycles jusque là inédits, me semble-t-il, chez Aparté, avec la subvention de Bru Zane. On peut l'écouter gratuitement, légalement et en intégralité là.
J'attendais depuis longtemps (depuis que je les ai partiellement mais régulièrement jouées/chantées, il y a une dizaine d'années) une publication officielle des Mélodies persanes. Leur qualité d'évocation puise à une sobriété qui s'appuie davantage sur la mobilité des couleurs harmoniques que sur des mélismes orientalisants. Les poèmes tirés des Nuits Persanes d'Armand Renaud démontrent les mêmes qualités : touches de couleur locale dans un vocabulaire riche, des situations sans contorsions superfétatoires. « La splendeur vide », la seule mélodie du cycle à être jouée de loin en loin, est particulièrement réussie de ce point de vue – et puis ces calmes palpitations, qu'on retrouve dans « Au cimetière », ont quelque chose de tellement persuasif.
J'ai
construit dans mon âme
Un merveilleux palais,
Plein d'odeurs de cinname,
Plein de vagues reflets.
Un merveilleux palais,
Plein d'odeurs de cinname,
Plein de vagues reflets.
Les Cinq Poèmes de Ronsard laissent affleurer les mêmes qualités : absence de spectaculaire, évidence mélodique (sans viser du tout l'earworm), justesse de la prosodie et du climat. Exactement la juste mesure de toute chose, la touche de talent en sus.
J'ai été moins sensible aux Vieilles Chansons et à La Cendre Rouge, mais là encore, des inédits pour documenter le large legs mélodique de Saint-Saëns, ce n'est jamais de refus.

Le français exemplaire, la vaillance et le goût des mots de Tassis Christoyannis sont bien sûr parfaits pour rendre l'éclat comme la poésie de ces pages. Accompagné par un Jeff Cohen beaucoup plus détaillé et incisif qu'à l'ordinaire – son meilleur disque à mon sens !
À signaler pour ceux qui ne l'auraient pas, la monographie de François Le Roux et Graham Johnson, l'une des rares jamais publiée, mérite le détour, malgré toutes ses étrangetés. Au sommet, il y a bien sûr la chanson à boire de Nicolas Boileau !
Allez,
vieux fous, allez apprendre à boire ;
On est savant quand on boit bien,
Qui ne sait boire ne sait rien !
On est savant quand on boit bien,
Qui ne sait boire ne sait rien !
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Mélodie française a suscité :
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