mardi 9 janvier 2018
2017-2018 [n°31] – L'Inde, « Ode Symphonie » (1872) de Wekerlin / Weckerlin
Ressuscité par la Compagnie de L'Oiseleur, dont la vidéo est désormais en ligne.
Musique peu complexe, mais de jolies atmosphères dans le goût des cartes postales coloniales de la musique française d'alors :

tels les appels de cor de la fin du mélodrame introductif (L'Oiseleur déclame extraordinairement), la Prière du Brahme (Ratianarinaivo capiteux !) soutenue et ponctuée par le chœur, les scènes opératiques récitatives surtout, très réussies sur leurs fonds couleur locale.
L'ensemble repose sur un assemblage de poèmes disparates : Hugo (La Captive), Lisle, Méry (le co-librettiste de Don Carlos, étonnamment les plus jolis poèmes de la sélection), Dovalle, Lottin de Laval, avec des scènes d'action ajoutées, créant une vague trame dramatique :

c'est un peu La Fuite de Gautier (inversée, la demoiselle a plus traditionnellement peur ici), traversant tous les passages obligés de la couleur locale. Mélodrames avec musique surtout alternée, mais les poèmes de Méry sont beaux (et bien dits) !
La Glorification de Brahma en guise de dénouement est très étrange, tout à coup Weckerlin se souvient de ce qu'il est l'immortel auteur de La Laitière de Trianon… et ponctue ses Brahma-Brahma, martelés comme l'unique mot d'un bréviaire de saint Ketèlbey, de gammes diatoniques très peu orientales, ressemblant plutôt aux Saint-Saëns ou Hahn qui imitent la Renaissance ! Quelle mouche l'a piqué ?
(En tout cas, jolie fresque à découvrir !)
En première partie, une poignée de mélodies rarissimes. Le Pierné est un ostinato rythmique *et* harmonique, une seul accord pour soutenir le plus mauvais Silvestre que j'aie entendu. À l'inverse, le Chant Hindou de Bemberg est une merveille, toujours élusif et modulant !

Il y aura d'autres Bemberg ce dimanche dans le bouquet alsacien de la Compagnie au musée Henner ! (Je serai hélas en train de répondre à l'appel souverain de LULLY – car tout doit céder dans l'Univers à l'auguſte Heros que j'ayme.)
Et comme toujours, quel entrain chez les artistes (plusieurs issus de récentes fournées du CNSM), quel engagement pour servir des pièces qui ne serviront pas leur carrière (ni leur bourse), juste la Musique !


Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Mélodie française a suscité :
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