samedi 8 août 2015
Saison 2014-2015 – Bilan statistique et subjectif
Juillet a été riche, août sera mort ; il est temps de proposer un petit bilan autour des choses vues.
D'abord, un retour sur les saisons précédentes.
- saison 2009-2010 (54 soirées), son bilan statistique, son bilan subjectif ;
- saison 2010-2011 (43 soirées), son bilan statistique, son bilan subjectif ;
- saison 2011-2012 (49 soirées), et ses bilans combinés.
- saison 2012-2013 (73 soirées) et ses bilans combinés.
- saison 2013-2014 (58 soirées) et ses bilans combinés
- saison 2014-2015 (69 soirées) et ses bilans ci-présents.
1. Liste des spectacles vus
Concerts, opéras, théâtre… En voici la liste, dans l'ordre de la saison (n'inclut pas les expositions en nocturne, évidemment). La plupart ont été commentés, avec un changement en fin de saison : comme chaque année, tentative de recentrer CSS sur des sujets de fond plutôt que sur l'écume des théâtres parisiens. Mais la tentation est tellement grande de témoigner des belles choses qui passent… Nous verrons pour la saison prochaine.
Cependant, chaque notule donne en principe l'occasion de dire un mot des pièces jouées, des styles à l'œuvre, en explorant parfois d'un peu plus près le livret ou la partition (par exemple pour Uthal, L'Elisir d'amore, Rusalka ou Nausicaa)… si votre curiosité vous pousse à les lire ou les relire, temps a été pris de remettre le chemin (pas toujours évident) pour chaque titre.
- Pleyel – Cinquième Symphonie de Tchaïkovski – Orchestre de Paris, Paavo Järvi
- Pleyel – Svetlanov, Youssoupov, Symphonie n°5 de Chostakovitch – Philharmonique de Radio-France, Kuokman
- Cité de la Musique – Grands Motets de Mondonville – Auvity, Mauillon, Les Arts Florissants, Christie
- Opéra Royal (Versailles) – Les Boréades de Rameau – Les Musiciens du Louvre, Minkowski
- Athénée – The Consul de Menotti – Collet, Pasdeloup, Oyón
- Billettes – Monologues italiens du début du XVIIe – Raquel Andueza, La Galanía
- Centre Culturel Tchèque – Mélodies de Bendl, Dvořák et Novák – Šašková, Urbanová
- Pleyel – Concerto pour violon n°1 de Szymanowski, Symphonie n°7 de Mahler – Baiba Skride, Philharmonique de Radio-France, Vassily Petrenko
- Pleyel – Frauenliebe, Dichterliebe et Kerner-Lieder de Schumann – Goerne, Eschenbach
- CNSM (salle d'orgue) – ECMA : musique de chambre (Haydn, Beethoven, Taneïev, Ravel…) – jeunes ensembles (Quatuor Hanson, Quatuor Akilone…)
- Opéra Royal (Versailles) – Scylla et Glaucus de Leclair – Baráth, Mutel Dahlin, Les Nouveaux Caractères, d'Hérin
- Chapelle du Lycée Henri IV – Motets de Pelegrini, Grandi, Cavalli, Sances, du Mont, Lorenzani… – Ensemble Clori e Tirsi
- Saint-Séverin – Motets pour femmes de Nivers – Ensemble Athénaïs
- Théâtre des Champs-Élysées – Cléopâtre de Massenet – Koch, Bernheim, Goncalves, Symphonique de Mulhouse, Plasson
- Billettes – Pièces baroques pour trios de cordes grattées (Sanz, Corbetta… pour chitarrone, théorbe, guitare baroque…) – Lislevand, Johnsen, Larsen
- Maison de la Radio (auditorium) – Symphonie de Franck – Philharmonique de Radio-France, Mikko Franck
- Théâtre du Nord-Ouest – Mary Stuart de Schiller – phalanstère du théâtre
- Athénée – Et le coq chanta… (d'après les Passions de Bach) – Lacroix, Rougier, Grapperon
- Philharmonie – Te Deum de Charpentier, Mondonville, Entrée des Sauvages de Rameau – de Niese, Beekman, Naouri, Arts Florissants, Christie
- Saint-Quentin-en-Yvelines – L'Elisir d'amore de Donizetti – Opera Fuoco, Stern
- Bastille – Ariadne auf Naxos de Richard Strauss – Mattila, Koch, Vogt, Gantner, Ph. Jordan
- Favart – Les Festes Vénitiennes de Campra – Carsen, Les Arts Florissants, Christie
- Opéra Royal (Versailles) – Cinq-Mars de Gounod – Gens, Castronovo, Christoyannis, Foster-Williams, Radio de Munich, Schirmer
- Billettes – Airs de cour français de Lambert et Charpentier – Lièvre-Picard, Robidoux
- Gaveau – Lieder de Clara Wieck-Schumann, mélodies de Pauline Viardot – Yoncheva
- Abbesses – Lille Eyolf d'Ibsen – Les Cambrioleurs, Julie Bérès
- Billettes – Cantates italiennes du XVIIe siècle (Stradella, Brevi, Torelli…) – Galou, Dantone
- Temple du Luxembourg – Galathée de Massé – Compagnie de L'Oiseleur
- Philharmonie – Grand gala français (Gluck, Meyerbeer, Dietsch, Gounod, Poniatowski…) – Fuchs, Crebassa, Barbeyrac, Sempey, Courjal, Louvre, Minkowski
- Philharmonie – Water Music, Royal Fireworks Music de Haendel – Concert Spirituel et supplémentaires, Niquet
- Favart – Au Monde de Boesmans– Pommerat, Petibon, Beuron, Sly, Olsen, Davin
- Bastille – Pelléas et Mélisande de Debussy – Wilson, Tsallagova, Soffel, Degout, Gay, Ph. Jordan
- Philharmonie – Jeanne d'Arc au Bûcher – Cotillard, Blondelle, Orchestre de Paris, Yamada
- Théâtre des Champs-Élysées – Solaris de Fujikura – Erik Nielsen
- Hôtel de Birague – Nausicaa de Hahn – Compagnie de L'Oiseleur (avec Soare, Laurens, Cortez…)
- Billettes – Miserere de Lalande, Méditations pour le Carême de Charpentier – Lefilliâtre, Lombard, Goubioud, Dumestre…
- Favart – Le Pré-aux-Clercs d'Hérold – Ruf, Munger, Lenormand, Spyres, Gulbenkian, McCreesh
- Bastille – Rusalka de Dvořák – Carsen, Aksenova, Černoch, Hrůsa
- CNSM (salle d'orgue) – Récital de la classe de lied et mélodie de Jeff Cohen – Elsa Dreisig, Benjamin Woh
- Philharmonie – Sonate pour violon et piano de Medtner – Keisuke Tsushima, Jean-Michel Kim
- CNSM (salle d'orgue) – Récital de la classe de lied et mélodie de Jeff Cohen – Jean-Jacques L'Anthoën, Aurélien Gasse, Adam Laloum
- Philharmonie – Premier Concerto et Cinquième Symphonie de Tchaïkovski – National de Russie, Liss
- Amphi Bastille – Lieder de Schubert, Rudi Stephan… – Selig, Huber
- Cathédrale Saint-Louis-des-Invalides – Vespri del Stellario de Rubino – CNSM & Conservatoires de Boulogne et Palerme
- Cité de la Musique – Madrigali guerrieri de Monteverdi (Huitième livre) – Les Arts Florissants, Agnew
- Bouffes du Nord – La Révolte de Villiers de L'Isle-Adam – Marc Paquien
- Saint-Eugène-Sainte-Cécile –Musique sacrée rare du XXe siècle – Ensembles vocaux Mångata et Resonance of Birralee
- Bastille – Le Roi Arthus de Chausson (générale piano) – Vick, Koch, Alagna, Hampson
- Cité de la Musique – La Fiancée du Tsar de Rimski-Korsakov – Agunda Kulaeva, Elchin Azizov, ONDIF, M. Jurowski
- Bouffes du Nord – La Mort de Tintagiles de Maeterlinck – Podalydès
- Bastille – Le Roi Arthus de Chausson II – Vick, Koch, Alagna, Hampson, Ph. Jordan
- Théâtre des Champs-Élysées – Abdelazer de Purcell, Symphonie n°103 de Haydn, Fantaisie Tallis de RVW, Nocturne de Britten – Bostridge, OChb Paris, Norrington
- Musée d'Orsay – Arrangements de Mendelssohn et Schumann par Reimann, Schönberg n°2, Webern – Ziesak, Auryn SQ
- Théâtre des Champs-Élysées – Stuart de Schumann, Rückert de Mahler, Ariettes oubliées de Debussy, Poèmes pour mi de Messiaen – Kožená, Uchida
- Opéra Royal (Versailles) – Uthal de Méhul – Deshayes, Auvity, Bou, Les Talens Lyriques, Rousset
- Billettes – Sesto Libro di Madrigali de Gesualdo – Collegium Vocale Gent, Herreweghe
- Cité de la Musique – Lieder de Mahler (dont Wunderhorn rares) – Gerhaher, Huber
- Bastille – Le Roi Arthus de Chausson III – Vick, Koch, Todorovitch, Hampson, Ph. Jordan
- Maison de la Radio (studio 104) – Chœurs de Toch, Barber, Whitacre… – Maîtrise de Radio-France, Col. Jeannin
- Notre-Dame-du-Liban – Cavalleria Rusticana de Mascagni – Galvez-Vallejo, Ut Cinquième, Romain Dumas
- Gaveau – Chœurs de l'obikhod et chœurs russes populaires – Youri Laptev, Chœur Svenshnikov
- Cité de la Musique – Peer Gynt en 24 langues – Chorale Auberbabel, membres de l'OChb Paris
- Garnier – Alceste de Gluck – Py, Gens, Barbeyrac, Degout, Les Musiciens du Louvre, Rouland
- Maison de la Radio (auditorium) – Symphonies n°25 de Mozart, n°2 de Beethoven – Philharmonique de Radio-France, Koopman
- Bastille – Adriana Lecouvreur de Cilea – McVicar, Gheorghiu, D'Intino, M. Álvarez, Corbelli, Oren
- Hôtel de Soubise – 3 Chants de l'Atlantide de Connesson, Trio d'Ives, Trio n°2 de Brahms – Aya Kono, Alain Meunier, David-Huy Nguyen-Phung
- Garnier – La Fille mal gardée de Lanchberry – Ashton, Guérineau, Heymann, Orchestre de l'Opéra, Philip Ellis
- Hôtel de Beauvais – Octuors à vent de Mozart & Beethoven – Membres de l'OChb Paris
- Hôtel de Sully – Symphonie n°31 de Mozart, Concerto pour flûte et harpe – Bernold, Ceysson, OChb Paris
Pas que des raretés (quelques bien belles tout de même, comme Rubino, Leclair, Toch ou Connesson, et des premières mondiales dont Les Festes Vénitiennes, Uthal, Cinq-Mars, Au monde…), mais quasiment que des grandes soirées.
Un peu de statistiques à présent.
2. Commentaires manquants
¶ n°49 : La Fiancée du Tsar ; l'œuvre la plus romantique et la plus généreuse de Rimski-Korsakov, à mon sens. En tout cas, celle qui, tout en étant la plus proche des traditions, est la plus directe, et bien qu'expansive, dans un patron assez familier – livret impressionnant également. L'ONDIF, entendu en salle pour la première fois, était très impressionnant, aussi bien en technique et en style qu'en chaleur d'exécution, grande découverte. Chez les chanteurs aussi, avec des clivages étonnants entre Kulaeva (voix très impressionnante, très corsée, mais tout en bouche, donc concurrencée par l'orchestre) et Azizov (métal, solidité, ampleur et rage stupéfiants… pilier du Bolshoï, sans étonnement – voilà un chanteur taillé pour Bastille !)… l'excellence peut suivre différents chemins (les autres étaient superbes aussi, d'aileurs).
¶ n°57 : Le concert Gerhaher n'a pas été commenté, par excès d'ambition : une notule est toujours prévue, non pas sur le concert, mais sur les différents tuilages de techniques qui permettent à Gerhaher sa mobilité expressive hors du commun (couverture particulière, voix pleine ou voix mixte, vibrato ou non, effet anche ou non, etc., le tout pouvant être diversement combiné).
¶ n°62 : Peer Gynt en 24 langues, dans un arrangement pour sextuor (quatuor à cordes + piano + contrebasse) très bien fait et remarquablement joué. En revanche, sans texte de salle ni surtitres, et affreusement mâchonné (c'est une chorale d'amateurs qui s'amuse sympathiquement avec les langues, mais qui n'a pas vraiment de maîtrise de la question), avec des voix pas du tout projetées… le temps peut paraître long (surtout lorsqu'on a emmené des amis dont on peut prévoir qu'ils vous disputeront à la sortie…).
En revanche, le découpage du parcours express de Peer Gynt (la pièce, écrite en tableaux clos, s'y prête) est assez réussi, l'essentiel est là. Pour retrouver la musique de scène complète, bien jouée et bien dite, je renvoie à Wilson-Tourniaire.
¶ n°64 : Koopman et le Philharmonique de Radio-France forment une solide association. Les attaques deviennent plus fine sur un son allégé mais qui demeure large… Koopman met un peu à distance le caractère dramatique des œuvres, en ménageant peu de contrastes, d'une façon qui peu paraître un peu décorative… mais dans la Deuxième de Beethoven, son sens de la danse (scherzo inégalé !) emporte toutes les réserves, pour une vision de Beethoven beaucoup moins vindicative ou ardente qu'à l'accoutumée.
¶ n°66 : Connesson, Ives et Brahms à l'Hôtel de Soubise. L'organisation la plus désordonnée de tous les temps (pour un festival de plein air, aucune solution de repli, des spectateurs doivent écouter le concert dans la pièce d'à côté !), mais un très beau programme. En particulier les Chants de l'Atlantide pour violon et piano, où Connesson ne fait pas le catalogue de ses talents (comme quelquefois…) mais utilise au plus précis sa connaissance incroyable de tous les ressorts de la musique tonale (élargie) pour servir un programme très détaillé (on voit s'approcher l'île sous le soleil, au delà des Colonnes d'Hercule, puis on assiste à des danses, etc.). Des formules récurrentes, de superbes couleurs harmoniques, tout est réuni pour ne pas perdre les ingénus et pour satisfaire le public qui veut du neuf ou du profond.
¶ n°67 : La Fille mal gardée à Garnier. Toujours une jubilation particulière à cette œuvre ; Lanchberry réutilise très adroitement les nombreux états de la partition, réorchestre, compose des pastiches… ce n'est pas un modèle pour les classes d'écriture ou d'orchestration, mais c'est simple et grisant. De même pour la chorégraphie facétieuse d'Ashton. Côté pieds, je n'ai pas pu voir Marc Moreau, et si Mathias Heymann me séduit par sa maturité héroïque (pas forcément le Colas attendu, mais c'est impressionnant), je suis en revanche un peu frustré par le sérieux papal d'Éléonore Guérineau (dans le rôle le plus primesautier du répertoire…), avec des effets un peu trop appliqués pour amuser tout à fait. [Peu importe, toujours fantastique à voir et entendre.]
¶ n°68 : Octuors à vent dans la cour de l'Hôtel de Beauvais. Cadre exceptionnel, et musique de plein air (avec des bijoux que je rêvais d'entendre en vrai depuis longtemps, en particulier pour la Onzième Sérénade de Mozart)… moment où tout était adéquat.
¶ n°69 : Symphonie n°31 et Concerto pour flûte et harpe de Mozart dans le jardin de l'Hôtel de Sully. Là aussi, formidable décor, avec un contrechant permanent, depuis la vigne rampante, d'oiseaux exaltés à la tombée du jour… Un peu perplexe, pour un concert d'une heure, sur la coupure de la réexposition dans la symphonie (déjà en trois mouvements). Mais là aussi, enchanté de pouvoir entendre ma symphonie chouchoute de Mozart en vrai, et a fortiori dans ces conditions !
3. Statistiques : lieux fréquentés
Malgré une sixième saison parisienne, on ne s'encroûte pas : pour 69 dates, on a 32 lieux, dont 10 nouveaux ! Une moyenne de deux concerts par salle, donc, et d'une nouvelle salle sur trois. (Ces découvertes figurent en gras.)
Opéra Bastille IIIII II
Philharmonie de Paris IIIII I
Cité de la Musique IIIII
Opéra Royal de Versailles IIII
Église des Billettes IIII
Pleyel IIII
Théâtre des Champs-Élysées IIII
CNSM (salle d'orgue) III
Opéra-Comique III
--
Bouffes du Nord II
Athénée II
Nouvel Auditorium de la Maison de la Radio II
Gaveau II
Oratoire du Louvre II
Opéra Garnier II
--
Centre Culturel Tchèque I
Chapelle du lycée Henri IV I
Saint-Séverin I
Théâtre du Nord-Ouest I
Saint-Quentin-en-Yvelines I
Temple du Luxembourg I
Théâtre byzantin de l'Hôtel de Birague I
Théâtre des Abbesses I
Amphi Bastille I
Cathédrale Saint-Louis des Invalides I
Auditorium du musée d'Orsay I
Studio 104 de Radio-France, rénové I
Notre-Dame-du-Liban I
Saint-Eugène-Sainte-Cécile I
Petit salon de musique de l'Hôtel de Soubise I
Cour de l'Hôtel de Beauvais I
Jardin de l'Hôtel de Sully I
Cette année, les chiffres sont assez logiques de ce point de vue : lieux d'opéra, de baroque français, de lied & mélodie, de musique de chambre un peu rare, et en général d'exhumations ou de concerts un peu alternatifs (concerts a cappella).
Malgré ce qui a pu être dit (par moi-même y compris) sur la saison de Bastille (fort peu aventureuse), j'y ai semble-t-il tout de même trouvé mon compte – certes, 3/7 sont des soirées Arthus… Et bien sûr, entrée fracassante, à l'échelle d'une demi-saison, de la Philharmonie.
4. Statistiques : genres écoutés
- Opéra : 25 (dont français 17, italien 3, anglais 2, allemand 1, tchèque 1, russe 1 ; dont tragédie en musique 5, classique 2, romantique 8, grand opéra 1, décadent 4, début XXe 5, cœur vingtième 1, contemporain 2)
- Lied & mélodie : 14 (dont allemand 8, français 5, italien 4, tchèque 2, anglais 1 ; dont madrigal 2, air de cour 2, symphonique 1, cabaret 1)
- Musique vocale sacrée : 9 (dont baroque italien 2, baroque français 5, baroque allemand 1, obikhod 1, début XXe 1, chœurs contemporains 1)
- Symphonique : 8 (dont baroque 1, classique 3)
- Musique de chambre : 7 (dont octuor à vent 1, contemporain 3)
- Chœurs profanes : 5
- Théâtre :4 (Schiller 1, Ibsen 2, Maeterlinck 1)
- Spectacle musical : 4 (dont musique de scène 2)
- Ballet : 3 (dont baroque 1)
- Récital d'opéra : 1
- Clavecin : 1
- Orgue : 1
- Chanson : 1
- Jazz : 1
- Pop : 1
Les proportions reflètent finalement assez bien ma vision du monde. À l'exception du théâtre, où je n'arrive vraiment pas à trouver l'offre qui me fait déplacer, malgré la pléthore hallucinante de maisons. Faute de temps, certes, mais pas seulement.
Une bonne année pour la diversité linguistique à l'opéra, ce n'est pas comme ça tous les ans, hélas.
5. Statistiques : époques musicales
- XVIe2 I
- XVIIe1 IIIII
- XVIIe2 IIIII IIII
- XVIIIe1 IIIII III
- XVIIIe2 IIIII IIIII I
- XIXe1 IIIII IIIII II
- XIXe2 IIIII IIIII IIIII IIIII I
- XXe1 IIIII IIIII IIIII IIIII II
- XXe2 IIIII IIIII II
- XXIe IIIII I
Exactement comme chaque année : cet indicateur n'est pas tant révélateur de mes goûts que de la disposition de l'offre… on arrive très vite à râcler ce qui se fait aux XVIIe et XVIIIe. Le gros de l'offre se concentre aux XIXe et première moitié du XXe.
Par ailleurs, pour le répertoire symphonique, les œuvres de cette période sont en général celles qui ont la meilleure plus-value sonore en salle (les mahléro-straussiens par exemple), ce qui incite bien sûr au déplacement.
6. Orchestres et ensembles
Nouvelle catégorie cette année.
20 formations différentes, dont 8 découvertes (les premières écoutes en salle sont en gras).
- Orchestre de l'Opéra de Paris (6)
- Philharmonique de Radio-France (5)
- Orchestre de chambre de Paris (4)
- Les Arts Florissants (4)
- Les Musiciens du Louvre (3)
- Orchestre de Paris (2)
- Radio de Munich
- Orchestre National d'Île-de-France
- Orchestre Ut Cinquième
- Orchestre Pasdeloup
- Orchestre Symphonique de Mulhouse
- Orchestre National de Russie
- Orchestre de la Fondation Gulbenkian
- Ensemble Intercontemporain
- Les Nouveaux Caractères
- Opera Fuoco
- Le Concert Spirituel
- Les Talens Lyriques
- Le Poème Harmonique
- Ensemble ad hoc des Conservatoires de Paris, Palerme et Boulogne-Billancourt
Là aussi, les retours tiennent plus de contraintes structurelles : si on va voir de l'opéra et du ballet, on tombe forcément sur l'Orchestre de l'Opéra, sur le Philharmonique (ou l'Orchestre de Paris) pour un certain type de répertoire orchestral décadent ou rare, sur les ensembles spécialistes lorsqu'on remonte dans le temps…
L'Orchestre de Paris est désormais à son faîte, et (à l'exception notable du Philharmonique de Slovénie) doit être le plus bel orchestre que j'aie entendu en salle, et sur un nombre de soirées plutôt impressionnant. Contrairement à d'autres phalanges beaucoup plus prestigieuses et virtuoses (et malgré le caractère proverbialement exécrable – ce n'est pas un ragot, je l'ai personnellement vérifié – d'un nombre significatif de ses membres éminents !), il dispose d'une plasticité incroyable à travers les styles. Corollaire négatif, il peut bien sûr devenir assez terne et ennuyeux s'il n'est pas un minimum stimulé, mais on n'a pas l'impression d'entendre toujours la même chose – il serait difficile à identifier à l'aveugle, à mon avis.
Sinon, découverte émerveillée du parent pauvre munichois, l'Orchestre de la Radio de Munich (à part le Concertgebouworkest, je ne crois pas avoir entendu en salle d'orchestre techniquement aussi sûr), qui n'est pas celui de la Radio Bavaroise, mais manifeste un sens du style étonnant dans Cinq-Mars, pourtant très loin de son univers habituel. Et quel investissement chaleureux pour un orchestre de radio !
Spécialisé dans la transmission envers tous les publics, l'Orchestre National d'Île-de-France, itinérant et abordable, m'a impressionné par sa générosité dans une partition (Rimski-Korsakov) qui met vraiment à nu le potentiel d'un orchestre… Il y a plus coloré ou plus virtuose, mais l'entrain (et la maîtrise au-dessus de tout reproche) de ces musiciens, à qui l'ont fait à mauvais droit une réputation de seconde zone, me les fait davantage aimer que les orchestres superlatifs et paresseux.
Autre ravissement, plus inattendu, l'orchestre amateur Ut Cinquième, d'une justesse parfaite, et capable de s'investir, de phraser, de tenir un tempo ambitieux… non seulement c'est techniquement meilleur que bien des orchestres de cacheton, mais c'est beaucoup plus convaincant que bien des soirs d'orchestres professionnels.
Il ne faudrait pas croire que, pour autant, tout soit beau… Le National de Russie m'a paru tellement international (à part le cor solo), et de surcroît totalement à la dérive avec l'annulation de son chef (mais pourquoi le violon solo n'a-t-il pas dirigé au lieu de dépêcher un chef si peu à l'aise avec les habitudes de l'orchestre ?). C'était un cas particulier, mais le profil de l'orchestre ne pas séduit pour autant.
Quant à l'Orchestre de la Fondation Gulbenkian, vu son épaisseur et la difficulté de le discipliner à de simples figures légères d'accompagnement, je me suis figuré qu'il devait avoir un effectif plus mouvant que je croyais (cacheton massif ?). Il ne haussait pas la partition, en tout cas.
7. Chœurs
Là aussi, une nouvelle catégorie. 19 ensembles, dont 11 découvertes en salle.
- Les Arts Florissants 4
- Chœur de l'Opéra de Paris 4
- Chœur de l'Orchestre de Paris 3
- Chœur de la Radio Bavaroise
- Accentus
- Chœur des Musiciens du Louvre
- Chœur national russe Svenshnikov
- Chœur de Chambre de Namur
- Aedes
- Chœur des Nouveaux Caractères
- Conservatoires Paris-Palerme-Boulogne-Billancourt
- Mångata (ensemble féminin)
- Athénaïs (ensemble féminin à 6)
- Tirsi e Clori (ensemble à 4)
- Resonance of Birralee (liturgique-variété-pop)
- Saint-Quentin-en-Yvelines (amateur)
- Choeur russe de Paris-Zmamenie (amateur)
- OpéraLyre (amateur)
- Chorale Auberbabel (amateur)
Là aussi, nécessairement fortuit (sauf l'absence du Chœur de Radio-France, que j'évite très soigneusement pour des raisons esthétiques et pratiques mainte fois exposées). Néanmoins, toujours un plaisir de croiser certains d'entre eux (Accentus et le Chœur de l'Orchestre de Paris, en particulier).
Cette année, la star était incontestablement le Chœur de la Radio Bavaroise (qui officie avec les deux orchestres de la maison) : glorieux mais souple, en particulier du côté du pupitre de ténors, capable de vaillance comme de superbes dégradés de voix mixte dignes des meilleurs chœurs de chambre. Jamais de saturation harmonique désagréable comme dans les chœurs de maisons d'opéra (ou Radio-France), et une aisance linguistique impressionnante (en l'occurrence leur français, dans Cinq-Mars), sans même considérer que ce répertoire constitue tout sauf leur pain quotidien !
Le Chœur national russe Svenshnikov (mêlant des chanteurs à techniques lyriques robustes à d'autres dotés techniques « traditionnelles » de voix très pures et moins projetées, en particulier chez les femmes) figurait aussi parmi les grands enchantements de la saison – volupté de l'écriture par vague dans les mises en musique de l'obikhod.
Chez les petits ensembles, Athénaïs mérite vraiment le détour au disque comme en vrai, et Mångata explore toujours les œuvres liturgiques insolites du XXe siècle, issues de parties négligées du monde musical (Hongrie, Amérique latine…).
8. Remise de prix
C'est vain, mais c'est rigolo.
(Sont nommés seulement les plus beaux…)
Meilleur concert baroque de la saison, sont nommés : Andueza & La Galanía, Lislevand & friends, Huitième Livre par Agnew, Vespri de Rubino
Attribué à : Vespri de Rubino
Meilleur concert symphonique, sont nommés : Tchaïkovski par P. Järvi, Szymanowski-Mahler par V. Petrenko, Haydn par Norrington, Beethoven par Koopman
Attribué à : Tchaïkovski par P. Järvi
Meilleur opéra en version de concert, sont nommés : Les Boréades par Minkowski, Cinq-Mars par Schirmer, anthologie française de Minkowski, Nausicaa de Hahn, La Fiancée du Tsar par M. Jurowski
Attribué à : Cinq-Mars par Schirmer
Meilleur opéra en version scénique, sont nommés : Les Festes Vénitiennes par Carsen-Christie, L'Elisir d'amore par Stern, Rusalka par Carsen-Hrůsa, Au Monde par Pommerat-Davin
Attribué à : Rusalka par Carsen-Hrůsa
Meilleur concert de lied ou mélodie, sont nommés : Elsa Dreisig, Franz-Josef Selig, Magdalena Kožená, Ruth Ziesak
Attribué à : Elsa Dreisig
Meilleur concert de musique de chambre de la saison, sont nommés : ECMA, Auryn Streichquartett, Kono-Meunier-Nguyen-Phung, Octuor à vent de l'Orchestre de Chambre de Paris
Attribué à : ECMA
Théâtre, sont nommés : Lille Eyolf d'Ibsen par Bérès, La Mort de Tintagiles de Maeterlinck par Podalydès, Knox & Coin
Attribué à : Tingagiles
Œuvre en première mondiale (re-création), sont nommés : Les Festes Vénitiennes de Campra, Uthal de Méhul, Cinq-Mars de Gounod, Nausicaa de Hahn
Attribué à : Cinq-Mars de Gounod
Œuvre en première mondiale (création) : Solaris de Fujikura, Au Monde de Boesmans
Attribué à : Au Monde de Boesmans
9. Ressenti
Quelques moments d'éternité :
- la Cinquième de Tchaïkovski par l'Orchestre de Paris et Paavo Järvi, évidence et ardeur hors du commun dans les structures, les phrasés, la chaleur ;
- la résurrection de Cinq-Mars de Gounod, sa meilleure œuvre à mon avis ;
- les Vespri del Stellario di Palermo de Buonaventura Rubino, un enchaînement ininterrompu de cantiques jubilatoires d'une heure et demie, irrésistible ;
- Rusalka dans la mise en scène par Carsen (un sommet de féerie et d'adresse), et par une distribution de feu (Aksenova, Kolosova, Diadkova, Černoch, Ivashchenko, Axentii, Gnidii !), chacun incarnant quasiment un absolu.
- La mort de Tintagiles de Maeterlinck mis en scène par Podalydès, avec la musique de Knox et Coin. Terrifiant. Je n'ai jamais été saisi comme cela au théâtre, et la musique (très homogène malgré ses origines très disparates, du XVIe jusqu'à Berio en passant par de gentils romantisants comme Clarke) est magnifique.
Cinq spectacles au sommet de ce que j'ai pu voir dans ma vie de spectateur.
Et puis des soirées exceptionnelles, comme on en voit peu :
- la restitution tant attendue des Festes Vénitiennes de Campra ;
- le Premier Concerto de Szymanowski et la Septième Symphonie de Mahler par le Philharmonique de Radio-France, Baiba Skride et Vasily Petrenko : parmi les musiques qui gagnent le plus à être entendues avec les équilibres et l'impact physique de la salle… et avec un investissement et un abandon étourdissants ;
- ensembles de musique de chambre européens au CNSM, où l'on pouvait entendre des raretés, et surtout des jeunes formations qui éclipsent la plupart de leurs aînés (Hanson, Akilone, Arod…) ;
- la Fiancée du Tsar de Rimski-Korsakov (et là encore, servie de quelle façon !) ;
- l'Elisir d'amore, ce petit monument de plénitude primesautière, sur instruments d'époque, et remarquablement distribué ;
- liturgie russe à Gaveau par le chœur Svenshnikov ;
- Purcell, Haydn, RVW et Britten, sans vibrato, par Norrington… programme original, varié, exécution passionnante (même si discutable – à part dans Haydn, où c'est souverain, sans discussion) ;
- la Fille mal gardée à Garnier, sa simplicité inestimable faisant mouche à chaque fois.
Par ailleurs, beaucoup d'autres soirées d'où, pour les œuvres ou pour les interprètes, et souvent les deux, on ne pouvait ressortir que profondément enchanté : voir enfin le Roi Arthus de Chausson, le Pré-aux-clercs d'Hérold ou Nausicaa de Hahn, le récital français de Minkowski, les premiers baroques d'Andueza, Ariadne avec Mattila, les motets de Nivers par l'ensemble Athénaïs, le concert à trois guitares (baroques) Lislevand & friends, les classes de Jeff Cohen, Webern par les Auryn, les cycles de lieder de Mendelssohn et Schumann arrangés par Reimann (avec Ziesak !), les Poèmes pour Mi par Kožená et Uchida, Schubert et Rudi Stephan par Selig et Huber, Adriana Lecouvreur, cantates italiennes du XVIIe avec Galou et Dantone, la Deuxième de Beethoven par Koopman, les Boréades par Minkowski, le Huitième Livre de Monteverdi par Agnew, les Wunderhorn rares par Gerhaher, Mångata, les Chants de l'Atlantide de Connesson, Au Monde de Boesmans et encore pas mal d'autres choses…
Il y a eu quelques frustrations, mais la plupart étaient finalement plus liées aux conditions pratiques qu'à la qualité des concerts : la salle littéralement mortifère du Théâtre du Nord-Ouest, l'équilibre amateur-pro pas très réussi pour Peer Gynt, le remplacement de dernière minute de Pletnev pour le concert Tchaïkovski du National de Russie, l'acoustique du bas de l'auditorium de la Maison de la Radio pour la Symphonie de Franck, celle des côtés du second balcon à la Philharmonie pour les Royal Fireworks (et la misère de la « création lumières »), le choix d'œuvres sucrées dans les catalogues des compositeurs et la traduction anglaise de la Fugue de la Géographie de Toch (par ailleurs excellente soirée)…
Je ne vois que deux choses vraiment ratées : la Cinquième de Chostakovitch dirigée par Kuokman (rarement autant ennuyé, il ne se passait rien) et La Révolte de Villiers de L'Isle-Adam (parce que la pièce est sans intérêt autre qu'idéologique, et qu'aujourd'hui le combat est sacrément d'arrière-garde).
Saison particulièrement généreuse, donc. Merci Paris, merci Île-de-France !
10. Chanteurs
Et, comme chaque année, beaucoup d'interprètes exceptionnels dont je ne peux pas forcément parler à chaque fois… Leurs noms sont rassemblés, et je fais une petite remise de prix.
Légende :
¶ Formidable comme d'habitude
¶ Opinion améliorée par rapport à une précédente expérience (pas forcément devenu inconditionnel, mais impressionné par l'évolution)
¶ Première audition en salle
Sopranos : Elsa Dreisig, Julie Fuchs, Barbora Sojková-Kabátková, Dagmar Šašková, Emmanuelle de Negri, Raquel Andueza, Véronique Gens (2x), Sarah Tynan
Je voudrais insister sur Sarah Tynan, vraiment à suivre. Dans la partition très difficile de Fujikura, elle impose une maîtrise instrumentale et même un grain de timbre qui forcent l'admiration. Un lyrico-dramatique qui promet beaucoup.
Mezzo-sopranos : Guillemette Laurens, Alisa Kolosova, Agunda Kulaeva.
Alisa Kolosova dégage une présence magnétique, aussi bien scéniquement que vocalement, avec une largeur et un feu peu communs. Elle est encore très jeune. Si la voix n'évolue pas trop vide, un des gros potentiels de demain (enfin, chanter un grand rôle à Bastille, on peut considérer que le potentiel est abouti – mais je parle même d'un potentiel de starisation).
Contre-ténors, falsettistes : lol
Ténors : Jean-François Lombard, Marcel Beekman, Cyril Auvity, Serge Goubioud, Cyrille Dubois, Marcus Farnsworth, Tom Randle, Michael Spyres, Alexey Tatarintzev, Stanislas de Barbeyrac, Pavel Černoch, Benjamin Bernheim, Yann Beuron
Barytons : Marc Mauillon, L'Oiseleur des Longchamps, Christian Gerhaher, Mathieu Dubroca, Oded Reich, Mathieu Lécroart, Igor Gnidii, Philippe Sly, Andrew Foster-Williams, Frédéric Goncalves, Martin Gantner, Elchin Azizov
(barytons-)Basses : Lisandro Abadie, Cyril Costanzo, Dimitry Ivashchenko, Nicolas Courjal
¶ Difficile de remettre un prix à une seule personne… Outre les qualités exceptionnelles de timbre, de diction, d'investissement de Véronique Gens (encore plus à l'aise dans le rôle romantique de presque-mezzo chez Gounod que dans Alceste !), toujours cette douceur très déclamatoire, il y a tellement à faire chez les ténors et les barytons : la suspension extatique incroyable de la voix mixte très légère de Jean-François Lombard, la vaillance et la maîtrise absolue de plusieurs techniques par Benjamin Bernheim, la clarté mixte très typée et très bien projetée du tchèque Pavel Černoch (mon chouchou cette année chez les ténors) ; et puis chez les barytons, on a le grain très dense de Philippe Sly, rien de sombré ni de forcé, une émission très directe, les harmoniques très serrées de l'ukrainien Igor Gnidii (qui chante comme s'il parlait, avec des mots qui coulent, une évidence et une autorité verbales comme on n'en a plus entendu depuis les russes des années 50) ou à l'inverse la rondeur extraordinaire de Martin Gantner, qui épanouit son son avec une sorte de voix mixte qui porte jusqu'au fond de Bastille et lui permet de déclamer simultanément avec puissance et proximité.
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Je tâcherai de faire un bilan sur les déccouvertes des autres années, n'ayant jamais pris le temps de le faire… mais il y a déjà assez de quoi occuper les vacanciers désœuvrés avec ces petites listes !
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Saison 2014-2015 a suscité :
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