C'est très probable, mais ce n'est pas nécessairement un problème : les critères ne doivent simplement plus être ceux du progrès. La modernité et le génie ne se mesureront plus sur la capacité à dépasser les systèmes existants, mais il ne faut pas non plus les remplacer par un relativisme généralisé.
Je suis tout à fait d'accord avec ça, et le fait d'inclure la modernité dans la qualité d'une oeuvre a toujours été une erreur à mon sens - même si, bien évidemment, les génies peuvent être amenés à bouleverser les langages et les formes.
Pesson, c'est le compositeur d'après la mort de la musique française, une musiquette réduite à tous les stéréotypes de la musique française (élégante, précieuse, ludique, narcissique) réifiés en petites choses inoffensives et mortes-nées,
Si tu veux, mais effectivement le côté ludique et "fermé" me paraît tout à fait revendiqué, et réussit assez bien. Je trouve ça séduisant, sans être en désaccord avec ce que tu dis là (mais je ne le vois pas sous cet angle négatif).
Lachenmann c'est le retour de la grosse métaphysique allemande, avec sa morbidité douteuse et ses concepts à la con, sous la forme pseudo-nouvelle du gros barnum bruitiste,
Sur le principe, ok, mais dans les faits, je trouve ça finalement beaucoup moins dérangeant et prétentieux que ce que le projet pourrait laisser croire. Or on écoute une musique pour ce qu'elle produit, par pour ses intentions.
Mais j'en ai oublié un que je mettrais avant : Bruno Mantovani.
C'est cohérent, puisque c'est assez proche de Jarrell si on parle de musique symphonique. (En revanche, assez différent dans le domaine lyrique, où Jarrell s'appuie beaucoup plus sur la tradition, et donne la parole au texte bien avant la musique.)
Mais c'est symptomatique : écrire de la grosse musique "évocatrice" pour orchestre avec électronique, c'est facile, et ca ne rend absolument pas compte d'une quelconque capacité de compositeur. 90% des créations d'orchestre que j'entends sont de la poudre aux yeux.
C'est une question que je me suis mainte fois posée en effet, puisqu'à partir du moment où le langage n'est plus accessible à personne d'autre qu'aux quelques compositeurs de même école, le public ne peut plus percevoir que les textures et l'orchestration...
Faire de la musique de chambre avec un vrai discours, c'est effectivement bien plus rare. Mais à ce compte-là, j'aurais assez peu de nom à citer, je crois, surtout si on enlève les postmodernes comme Greif ou les néos comme Ducros. Katzer, Kurtág ou Yun, assurément, et puis d'autres plus ludiques que tu dois détester (Thierry de Mey), mais je n'en vois pas des légions.
De là à ce qu'ils nous jouent du baroque... reconstitué avec des erreurs de tempéraments microtonales historiquement justes calculées avec OpenMusic, bien sûr.
:)
Après, je ne trouve pas les choix honteux (à part Strasnoy), mais en choisissant Hersant, Dalbavie, Adès ou Salonen, je n'ai pas l'impression qu'on donne à entendre les prochains Debussy ou Ligeti.
Ca me paraît être l'évidence, mais ce genre de denrée est rare de toute façon. Qui a vraiment, avec toutes les transgressions autorisées et l'éparpillement des langages, la possibilité de produire l'équivalent de l'impact de Debussy (ou même Ligeti) ?
J'ai souvent l'impression (forcément trompeuse !) qu'on est arrivé au bout du chemin et qu'il n'y a plus rien à repousser ou dynamiter, si bien qu'il faut désormais faire de la musique avec le matériau existant. C'est peut-être du côté de la polytonalité (ou d'autres modes) et de la microtonalité qu'on a encore beaucoup de choses à écrire. Parce que les musiques autoréférencielles qui décrivent et mettent à distance leur propre forme en s'exécutant (de façon bien sûr parfaitement imperceptible pour l'auditeur ingénu), on finit par s'en lasser.
C'est amusant, parce que tu cites dans ton message beaucoup de compositeurs que j'aime... Jarrell, j'aime même énormément. Sa musique dramatique (mélodrame ou opéra) est vraiment passionnante, parmi les rares choses d'aujourd'hui que je trouve aussi directement jubilatoires que la musique d'il y a un siècle. Et sa musique instrumentale me paraît très évocatrice...
Pesson, j'aime beaucoup aussi (même si je n'y reviens pas souvent), c'est toujours assez amusant, j'écoute ça sous une forme ludique.
Après, pour les autres, ça dépend : Lachenmann ne me déplaît pas (il y a même de jolies choses au piano, très loin de sa réputation de terroriste), je n'aime pas Connesson en général mais beaucoup Supernova en particulier, Strasnoy me laisse plutôt froid (mais avec une moyenne plutôt positive)... il n'y a que Parra (si tu parles bien d'Hector et non d'Arturo) qui effectivement m'ennuie assez (pas moche, mais à force d'accumuler les effets inutiles...), mais il faut dire que je ne l'ai écouté qu'en musique de chambre et en "opéra", deux genres où peu réussissent aujourd'hui...
Ton vainqueur Colin Roche, en revanche, jamais rien écouté.
(pour ce qui est de la diversité du corpus de Strasnoy, en 5 concerts j'ai entendu tout le temps la même chose, les même principes d'écriture (ce qui importerait peu s'ils étaient solides) et des tics en pagaille)
C'est étonnant, parce que j'ai au contraire toujours eu l'impression inverse, de quelqu'un qui avait de la difficulté pour trouver un style : entre le chambriste moderne gentil du Retour, le côté presque comédie musicale de Cachafaz, les semi-pastiches madrigalesques, le côté plus contemporain-tradi de sa musique de chambre... Je vois quelqu'un qui s'amuse à explorer différents styles, sans jamais me convaincre complètement, mais certainement pas monotone de ce point de vue.
Tu vises quoi comme procédés ?
Son dernier quatuor avec électronique joué à l'Ircam il y a un an, annoncé en grandes pompes comme une révolution, est l'une des choses les plus ridicules, consternante dans ses intentions et ses outils, et anachronique que j'ai entendu.
Evidemment, si tu vas écouter du quatuor, qui trouveras-tu de passionnant ? A plus forte raison Manoury qui s'est vraiment épanoui dans l'écriture orchestrale.
Personnellement, des quatuors d'après 1960 qui ne me cassent pas les pieds au bout de dix minutes, je ne dois pas pouvoir en citer beaucoup (ou alors des trucs ultra-néo).
Oh, je n'aime pas particulièrement,
Ca, je m'en doute !
je faisais juste remarque qu'on va jouer ce sale néo-tonalo-romantique à un festival de l'Ircam. Si on se met à écrire des accords classés à l'Ircam, c'est vraiment qu'il n'y a plus de valeurs ni de morale dans ce bas-monde.
Ils doivent effectuer le recrutement sur les aptitudes à diriger la musique baroque, son Rameau est à placer sur la même étagère c'est-trop-drôle-pour-faire-rire que les Haendel de Boulez.
Fedele, c'est joué régulièrement à l'IRCAM ou assimilés (et je trouve que ca rentre tout à fait dans la catégorie des médiocres cinquantenaires citée plus haut).
En 2004, c'était quand même assez peu à la mode, il me semble. Effectivement, ça a été plus joué pendant cette période. Et j'aime bien sûr beaucoup Fedele. :)
qui se veut provocateur
Tu es sûr ? Je n'ai rien remarqué de tel. Joueur, oui, mais provocateur ?
C'est rentré dans mon top 5 des compositeurs les plus détestables du monde.
Philip Glass, François Cattin, Olga Neuwirth... il me manque le cinquième. Mais je suppose que tu ne parles que des vivants, sinon il y a des légions entières que tu dois détester parmi les classiques mineurs ou les belcantistes, non ?
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Sur les changements de direction : Dusapin / Henze / Dalbavie, ça me paraît une transition en douceur, non ?
C'est quand même plus intéressant, pour un festival de musique contemporaine, de ne pas choisir que des grabataires ou des morts. Je ne suis pas scandalisé par les choix jusqu'à présent (même si Hersant ne me passionne pas toujours et que je n'ai visiblement entendu que le meilleur de Dalbavie), mais j'avoue que l'entrain m'a manqué pour Strasnoy, malgré la diversité de son corpus et l'intérêt des couplages.
pourquoi pas, mais on ne peut pas dire qu'ils aient depuis une dizaine d'années fait de très bons choix indépendamment des questions esthétiques.
On peut toujours faire mieux (et en effet ils auraient pu, même sans faire très original).
durant lequel outre les nullités habituelles (Manoury, Robin ou Staud), on jouera du Adès. Ca sent le désespoir.
J'aime beaucoup ce que fait Manoury actuellement. :) Depuis qu'il maîtrise l'électro-acoustique (ses premiers disques sont vraiment moches du point de vue des timbres), il produit vraiment des pièces cohérentes et évocatrices, ça fait partie des quelques-uns dont je suis l'évolution avec plaisir.
Pour Adès, c'est surtout très inégal : du ludique en musique de chambre idéal pour initier à la musique contemporaine, du post-Britten gentil (et très réussi) à l'opéra, et des bricolages assez peu aboutis à l'orchestre...
(le Requiem de Ligeti ou la quatrième de Lutoslawski ce n'est pas plus original que le mandarin merveilleux ou Stravinsky ?),
Si, bien sûr, et programmer Hillborg, c'est très bien aussi. J'avais surtout été frappé par le fait qu'il y avait des couplages assez invraisemblables, du Mozart et du Beethoven, il me semble. Ou alors c'était il y a deux ans ?
Dans l'absolu, je trouve dommage de toute façon de jouer autre chose que de la musique contemporaine dans un festival de musique contemporaine. Même en tant qu'auditeur, je trouve assez rude le contraste, et ça ne peut que décevoir le public de l'une ou l'autre moitié du programme.
Mais depuis que c'est devenu payant, c'est devenu la norme, alors qu'avant on avait droit à un vrai creuset de découvertes. Lors de l'année Henze, il avaient inclus Gundmundsen-Holmgreen, Rosing-Schow, Fedele... des compositeurs remarquables, assez peu joués en France, pour des inédits au disque, c'était vraiment stimulant.
Et le Pierrot, c'est supposé être rare, mais ca l'est tellement que je l'ai entendu 3 fois à Paris cette année.
J'en ai effectivement vu au moins trois concerts cette année, dont au moins un plus tard, donc ça doit faire quatre minimum.
Ce n'est pas tous les ans comme cela, mais les classiques du premier vingtième sont très bien représentés à Paris.
Globalement, je suis d'accord, avec en plus une dimension satirique qu'il n'y a pas chez Britten et qui fait plutôt penser aux opéras de Chostakovitch, un peu Berg aussi.
C'est vrai, mais ça reste une satire plus tendre que celles de Chostakovitch (même pour Le Nez) et Berg, il y a quelque chose de plus satirique que cruel, précisément.
J'ai récupéré la partition (500 et quelques pages)
Ca doit coûter particulièrement cher, je suppose...
Il y a une forme de refus du développement thématique au profit de pans sonores à l'identité très forte (sans pour autant recourir au stéréotype ou au collage)
Oui, parce que sans développer et tout en assumant des séquences, on a quand même une remarquable continuité, une poussée commune, même dans la transition d'un tableau à l'autre.
qui assume complètement ces transformations - les confusions, la vitesse, les pertes de signification - sans recourir à un repli sur la tradition ou à des principes passéistes, ou à toutes les poses intellectualistes, historiques, mythologiques, qui rendent caduques dès leur création les opéras contemporains, comme si l'opéra ne servait plus au compositeur qu'à étaler sa culture
Tout à fait, c'est un des grands maux de l'opéra contemporain, les compositeurs qui cherchent à tenir leur discours (souvent banal, inutile, étriqué et grandiloquent à la fois) sur l'Art, avec les livrets catastrophiques qui vont de pair. Même chose, ce que tu dis sur la nécessité de la forme, souvent le réceptacle de langages qui ne sont pas compatibles avec le drame ou la prosodie. Ici, Dean résout remarquablement tout cela. Outre 1984 de Maazel, ça m'évoque aussi (pas pour le langage) l'atmosphère de Vanessa de Barber, il y a cette forme de continuité d'atmosphères très diverses, au sein d'un objet bizarre mais attachant.
et qui agit de manière physique - et qui est donc partiellement perdu dans tout enregistrement.
Oui, forcément, ce peut être un paramètre important.
Et je ne suis pas loin de penser que c'est à peu près du même niveau, au moins relativement au contexte de la création. Je ne vois pas quel compositeur, aujourd'hui, serait capable de faire mieux.
Sur le plan de la technique d'écriture de la qualité métaphorique de la construction, je ne suis pas encore assez familier de l'oeuvre (sans partition et suivant le livret d'oreille) pour en juger... (et puis, de telles comparaisons sont-elles objectivables ?)
Mais sans être l'oeuvre lyrique récente qui m'ait le plus enthousiasmé (d'autres syncrétiques comme Ekström, voire des passéistes comme Daniel-Lesur, m'ont plus complètement convaincu dans leur gestion de la forme), ça fait clairement partie de la petite poignée qui soutient la comparaison avec les grands titres du passé.
Et il est totalement inconnu en France.
On ne peut pas dire qu'il ne puisse pas acheter du pain sans être poursuivi par des hordes d'inconditionnels, c'est certain. Rien que pour lire son nom, il faut bien chercher (je ne crois pas avoir jamais vu son nom au programme, mais en même temps, la plupart des compositeurs vivants sont dans ce cas).
En attendant, je dois écrire dessus depuis 1 mois et demi, j'ai 10 pages de notes et pas la moindre idée de par où commencer.
Problème qui peut être contourné en l'abordant par morceaux, non ?
Il y a des compositeurs qui écrivent 20 minutes de musique sur des idées qui n'existent que pour deux mesures dans Bliss.
Certes, mais de ce point de vue, Beethoven peut faire une demi-heure sur un matériau qui n'occupe qu'une demi-mesure chez d'autres, le jugement qu'on porte sur cette densité ou cette "distension" dépend tout de même grandement du rsultat final.
Il n'y avait pas de grande différence entre Salomé (un opéra lourd, certes) et Bliss.
D'accord. Pour Salomé], ça dépend des moments : Jibé est compliqué mais pour la plupart des autres personnages, c'est relativement bien écrit à l'orchestre pour passer confortablement.
L'autre très beau moment était justement ce récit, avec un très bon Michael Müller-Deeken.
Alors nous sommes tout à fait d'accord.
En un mot, c'est extraordinaire.
De ma relativement jeune carrière de concertophage, c'est ce que j'ai vu de mieux à la fois en musique contemporaine et en opéra.
Tu le situes comment par rapport aux représentations de Sydney ?
J'ai vu il y a peu qu'une vidéo (celle de Melbourne, je crois) circulait, mais je n'ai pas pu mettre la main dessus. En audio seul, j'ai trouvé ça assez commode à suivre, et très plaisant, ça sonne très british-vingtième, une sorte de Britten beaucoup plus tranchant, avec la qualité d'orchestration d'un contemporain de Mantovani.
Ce n'est pas mon expérience lyrique la plus bouleversante, mais ça fonctionne remarquablement musicalement et dramatiquement : il y a de la poussée en permanence, des pôles, des rythmes pulsés, un véritable élan dans le flux musical de l' "intrigue", tout en maintenant une richesse en informations assez haute.
Ca m'évoque assez les moments les plus réussis (acte III) de 1984 de Maazel, en fait.
D'un point de vue pratique, je m'étais posé la question, aussi, si les voix passaient bien ? L'orchestre est toujours babillard en même temps que les chanteurs, certes par groupes légers, mais ce n'est pas complètement de l'accompagnement, plutôt du sous-discours simultané.
J'ai eu principalement deux avis sur la mise en scène : une spectatrice qui m'a dit avoir vu une mise en scène informe, morne et incompréhensible,
Morne, ça m'étonnerait, il s'inspire des bariolages d'une ''commedia dell'arte'' fantasmatique. Informe, oui, ça peut donner cette impression, mais c'est généralement très cohérent au fond, avec une personnalité forte (dans le cas de la Flûte, j'avais trouvé ça plus envahissant qu'insuffisant).
et une jeune chanteuse de la production qui m'a fait part des difficultés que l'on a à chanter correctement quand on est déguisée en grosse dinde.
Mais c'est toujours comme ça chez Freyer, les personnages sont toujours grotesquement affublés (et parfois de façon encombrante en effet, c'était le cas de Papageno dans sa version de Schwetzingen...).
Chez Meyerbeer, la danseuse passe aussi sur le canapé après le (ou en guise de) désert ?
Touchante ingénuité. A ton avis, pourquoi on était obligé de mettre des danses dans les spectacles lyriques subventionnés par les vieux financiers lubriques ? Les mécènes pouvaient ainsi, à l'issue de l'acte III, faire sauter les protégées sur leurs genoux pendant les IV et V. Les loges de Garnier ont même reproduit, avec leurs rideaux cramoisis et leurs fonds sans visibilité, l'atmosphère chaleureuse et festive du lupanar.
Le plus grand mérite de l'œuvre, sans doute, m'avoir tellement émue que j'ai enfin lu Pouchkine...
Que ne diffère pas beaucoup au niveau de l'action, mais considérablement quant au ton. Quelle traduction ?
M'en vais découvrir ce vampire, tiens.)
Outre le lien que j'ai indiqué (pas optimal, mais gratuit et légal), on en trouve de bonnes versions dans le commerce (Neuhold et Rieger, les autres étant ou tronquées ou très imparfaites). Le livret n'est pas souvent présent dans les coffrets (acte I seulement pour Neuhold chez Hommage... !), mais il existe en ligne, au moins le bilingue allemand-espagnol sur Kareol.es.
Non, je trouve ca affreux là
Ouf, j'ai eu très peur d'avoir basculé dans une dimension parallèle. C'est quand même terrible de mettre ça en promo, même s'ils avaient joué plus ou moins de cette façon...
sans doute le meilleur moment de la partition du reste.
Musicalement, non, mais si on le joue comme c'est prévu, en soutien du texte, oui, ce peut être le plus grand moment. Autre endroit saisissant, le grand récit de Ruthven ("du mußt es saugen, das teure Blut").
Non, j'y allais pour Bliss de Brett Dean,
Oh, mais c'était en novembre ça, tu as dû y rester longtemps si j'ai bien vu les dates de la prod du Vampyr ?
C'était comment, alors ?
Zauberflöte était le soir suivant, étant donné les échos catastrophiques de la MES j'ai préféré aller voir Der Vampyr.
Je n'ai pas vu toutes les mises en scène de la Flûte par Freyer, mais en principe, c'est assez plaisant (sans être vertigineux). Cela dit, tu attends peut-être plus que moi. Et puis le Vampire, dans l'absolu, c'est plus enthousiasmant que la Flûte, non ?
Oui, les "célébrations" ont couvert une saison plutôt qu'une année (par exemple, l'intégrale Gergiev a commencé en septembre 2010). Inversement, il n'y a pas eu de symphonies de Mahler sur le début de la saison 2011-12 en dehors de la fin du cycle Gatti. Enfin, pour ce qu'on en a à faire, de ces histoires !
Oui, je ne suis pas bien tout ça, j'étais persuadé de ne pas avoir vu de Mahler pendant l' "année", et en fait c'était plus complexe que ça.
Voyons, les danseuses, ca ne mange jamais...
Si, si, ça fait semblant, pour faire plaisir au mécène.
Ce n'est rien, c'est l'abus de Meyerbeer qui pèse lourdement sur mon imaginaire...
@David : Tu veux parler du plaisir de voir le regard offusqué de l'interlocuteur, à la fois sidéré et vaguement honteux de dialoguer avec un amateur de Théodore Dubois (c'est qui, d'ailleurs?). Je n'y résiste pas non plus.
Tout à fait. Je me suis fait sur ce point une petite réputation dans le milieu du trollage. :)
Il y a quelque chose de délicieux dans cette stupéfaction parcourue de rictus scandalisés. Il est vrai que je n'ai pas de pudeur particulière pour dire ce que j'aime ; et si la Passion selon Marc de Keiser me touche plus que celles de Bach, sans rien retirer à la gloire du second, ça peut toujours attirer l'attention sur le premier.
Mais ça peut quelquefois paraître si outrecuidant que le soupçon de pose ou de snobisme n'est pas loin. :)
Peu importe, la délectation reste intacte, même sous les regards soupçonneux. \o/
(je lui pardonnerais tout, à mon Niko. Je vais fouiner un peu, je suis curieuse de lire ce qu'il a pu dire sur Lully que tu trouves si vexant)
Il me semble qu'il avait plus ou moins déclaré que c'était pauvre ou n'avait pas grand intérêt. Mais je crois qu'il se plaçait essentiellement du point de vue de la musique "pure", or la musique baroque française est totalement conçue dans la perspective de s'entrelacer avec un texte. Si on y cherche les trouvailles de Monteverdi ou Bach, on risque grandement d'être déçu. (De toute façon, Harnoncourt n'a pas enregistré abondamment d'autres compositeurs dans le baroque.)
(hiiiiiii, des histoires de vampires chantées. Oh, que ça a l'air sympa!)
C'est même tout à fait épatant (du moins si on aime l'esthétique Freibüche Hollandaise), le livret de Wohlbrück remanie Polidori-pseudo-Byron avec pas mal de bonheur. Il y a un certain nombre de notules autour du sujet, avec notamment un lien vers une version libre de droits qu'on peut télécharger gratuitement en ligne.
(houlala, si on commence à comparer la place de la musique dans la vie culturelle en Allemagne et en France, on n'est pas rendu. J'ai bien failli m'évanouir en feuilletant l'équivalent du musique-classique-scope berlinois en octobre dernier : je suis tombée sur un Concert-éveil pour gamins, au programme : Apollon Musagète. Tiens, vlan !)
Il suffit d'aller entendre les orchestres universitaires français : les chefs de pupitre sont des étudiants allemands. :) La différence d'imprégnation culturelle et de niveau de jeu est absolument considérable.
A Hambourg, dans une minuscule salle qui joue d'habitude des réductions d'opéras italiens (et où on mange et on boit entre les actes) : http://www.alleetheater.de (j'ai entendu la version avec Michael Müller-Deeken dans le rôle principal).
Ah oui, MMD est membre de la troupe, j'aime beaucoup le décalage entre sa voix parlée assez profonde et son chant clair et libre.
C'est en Allemagne, je suis rassuré. En valeur absolue, l'Allemagne donne six fois plus de représentations d'opéra que la France ; même en le rapportant au nombre au nombre d'habitants, ça reste une proportion qui fait basculer dans un autre univers... Et en plus, avec une diversité dans le choix des oeuvres et une qualité musicale incroyable dans des villes de quelques milliers d'habitants...
Je viens d'aller voir la vidéo annonçant le Vampyr présente sur leur site... ça ne joue quand même pas bien nerveux ni bien juste, l'extrait du mélodrame du serment d'Aubry. Ca sonnait vraiment comme cela sur scène ?
Ca ne me dérange pas atrocement, mais toi qui es si sévère avec les musiciens les plus aguerris ?
Je m'attendais à un truc au rabais (surtout après deux soirs à l'opéra de Hambourg),
Tu as vu Hänsel et l'une des Zauberflöte de Freyer, je suppose ? (Le Don Carlos d'Andrew Edwards était attirant aussi, pour d'autres raisons, mais je doute que tu y sois allé, si ?)
On peut difficilement faire des généralités de Hambourg, en tout cas en négatif, tout ce que j'ai vu était extrêmement intéressant, par l'oeuvre, la mise en scène ou le plateau. Ensuite, forcément, si tu es allé voir Cenerentola, tant pis pour toi. :)
combinées à une mise en scène totalement adaptée au cadre et qui jouait autant le second degré qu'un respect sincère de l'oeuvre.
Le livret s'y prête assez bien finalement (le pastiche de Don Giovanni et la scène de ménage, à l'acte II, on peut relire toute l'oeuvre avec ce type de distance amusée).
Et il n'y avait je crois aucune coupure.
Dans les dialogues, ça me paraît difficile à mesurer. Dans la musique, il n'y en a généralement pas dans les ouvrages à "numéros". Parce que je suppose qu'ils n'ont pas arrangé l'arrangement de Pfitzner (qui a ajouté des récitatifs) ?
"Et moi aucune. :)"
Bah si, la deuxième de Nézet-Séguin.
Mais c'était en 2010, et il me semble qu'on a célébré l'année suivante (les 100 ans de la mort et non les 150 de la naissance). Les deux sont possibles, cela dit... c'est pour ça qu'on a eu des intégrales Mahler réparties sur deux saisons au delà d'une seule année civile ?
Si on étend ainsi les critères, il faut ajouter le Klagende Lied (avec les Lieder eines Fahrenden Gesellen) de Gatti.
De ceci (on ne plaisante pas avec l'Enfer), il dérive que pour aller au concert, en général mes soussous restent dans ma popoche [...] et pour l'Orchestre de Paris il faut m'offrir la place et me payer le restaurant après.
C'est la révélation du jour : en fait, tu es danseuse, c'est ça ? :)
(Pardon, je plaisante même avec l'Enfer, c'est mal.)
Et on y retourne de temps en temps pour pouvoir dire que c'est n'importe quoi, et que les gens feraient mieux d'aller entendre autre chose.
Je crains que ça ne me convainque pas tout à fait. :)
Cette saison, je vais beaucoup plus "ailleurs", et je m'en porte beaucoup mieux.
J'ai même vu Der Vampyr de Marschner donné dans une version de chambre par un ensemble qui jouaient comme des morts de faim et des chanteurs obscurs mais brillants à la prononciation parfaite. Ca y est, tu es jaloux ;-) ?
Ah, là oui ! :)
Raconte, c'était où, par qui ?
C'était la version de chambre déjà donnée à la radio néerlandaise ? (Pas génialissime sur le plan de l'adaptation, mais ça conservait l'essentiel des équilibres... déjà énorme si ça permet à cette musique d'être jouée.)
Je n'y vais pas tant que ça, surtout Beethoven que j'évite généralement (surtout quand c'est Vienne/Thielemann). Je connais des gens qui sont soit à Pleyel soit au TCE à peu près tous les soirs, ce que j'évite avec application.
Oui, il y en a (pareil pour l'ONP), certains contents à peu près tous les soirs, et d'autres qui empilent jour après jour "c'est le pire concert de ma vie". Mais enfin, tous les soirs, il faut vraiment, indépendamment des moyens, avoir très envie. (Ca signifie quand même entendre dix Cinquièmdebétove par an...)
un buzz pour pouvoir dire que comme d'habitude tout la presse inculte et le public béat se trompe, ou quand il y a rien d'autre à entendre cette semaine.
C'est dans ces deux cas que tu es très courageux.
Et puis, je n'ai entendu qu'une vingtaine de symphonies de Mahler durant l'année Mahler.
Et moi aucune. :) Et pourtant j'aime beaucoup Mahler, mais il y a tellement d'autres choses à voir. Il est vrai qu'à ton rythme de consommation (et sans le pan baroque et lyrique-grand-répertoire), tu as la possibilité d'en faire quelques-unes.
Mais je suis d'accord avec tout ce que dit, fait, écrit, dirige Harnoncourt, de toute façon
Toi, tu n'as jamais entendu son Castor & Pollux...
Une tragédie à tous les sens du terme.
Sinon, j'aime énormément Harnoncourt aussi, dans Monteverdi et Mozart bien sûr, mais également dans les répertoires où il est moins attendu et très amusant (Johann Strauss ou Verdi très réussis). Pour Beethoven, Schubert et Mendelssohn, je suis plus partagé, la segmentation du discours est quand même extrême, le côté "en tranches" est souvent un peu frustrant.
En revanche, pour les déclarations, j'avoue ne pas avoir pardonné les remarques sur Lully. Quand a passé le plus clair de son temps à jouer les métiers Jacquard pour un obscur kapellmeister saxon, on ne fait pas le rigolo en critiquant le chantre rayonnant du plus grand des Rois.
Pour en revenir à "l'attente de commotion, de soirée historique", je te rejoins tout à fait, cette attente est réelle. C'est dommage, car aller au concert sans attentes demesurées, pour tout simplement découvrir une oeuvre ou se détendre un soir (comme on irait au ciné) n'est pas un pensum.
Au contraire, c'est la voie la plus courte pour être agréablement surpris !
On a tous eu des expériences de commotions dues non pas à la qualité forcément si supérieure du concert, mais à sa disproportion d'avec nos attentes modestes. :)
Même le Concertgebouw peut, un jour sans, donner un concert parfaitement mis en place et ennuyeux comme la pluie, et un orchestre plus modeste se surpasser un soir, avec couacs inclus
J'ai de toute façon plus d'intérêt pour les orchestres pas-trop-bons, parce qu'il y a chez eux une tension audible qu'il manque souvent (sauf les grands soirs) aux orchestres les plus virtuoses. Un petit Brahms qui dérape un peu, ça peut donner du caractère là où l'opulence maîtrisée nous paraîtrait finalement banale.
Toutefois, je doute que le concert d'un mauvais soir du Concertgebouw puisse réellement être ennuyeux. Moins exaltant qu'un concert de l'Orchestre Universitaire de Thulé touché par la grâce, c'est certain (la preuve), mais ça resterait quand même sacrément convaincant, non ?
Je dis ça tout en n'ayant jamais entendu le Concertgebouw en vrai, ils jouent toujours des scies lorsqu'ils sont en tournée. Dommage, d'ailleurs, parce que ce type d'orchestre remplirait les salles même en jouant un programme Huré, Gurlitt, Brimer et Zhivotov (oui, ils existent). Le Philhar, lui, fait des choses un peu plus originales en tournée (à défaut d'éviter systématiquement La Mer...).
Quant à Colonne, j'admets que ce n'est pas le meilleur orchestre en région parisienne, mais je les ai toujours entendu donner de bons concerts, quand ce n'est pas de très très très très bons, avec Pavel Kogan et Xavier Philliiiips en novembre dernier, par exemple. A vrai dire, je soupçonne certains balletomanes d'être influencés par qq "leader d'opinions balletiennes" qui ont décrété sans appel que Colonne était incapable de faire autre chose que massacrer des partitions.
Je l'ai entendu de façon plus large que chez les amateurs de ballet (amateurs d'orchestre aussi), et je n'y croyais absolument plus depuis que j'ai entendu les Pasdeloup, que tout le monde décrit comme les pires et que j'ai trouvés très bons.
Mais un certain nombre de mélomanes réclament une commotion, une soirée historique à chaque concert - ce qui par définition ne peut pas arriver. Et il est vrai que l'offre est tellement immense en quantité et en qualité à Paris qu'on peut avoir l'illusion que c'est possible, ou que c'est un devoir.
Je dois avouer une certaine accoutumance à la perfection depuis ma première saison parisienne...
En tout cas, c'est un régal de lire une chroniquette de ballet vue par la lorgnette musicale.
Merci ! J'ai eu l'impression, en parcourant les chroniques en ligne ces dernières semaines, que ce n'était effectivement pas l'axe majoritaire. Sensiblement comme lorsqu'on parle d'opéra, mais ici, la production étant fixée "une fois pour toutes" par le chorégraphe, on ne parle même pas de la mise en scène... :)
Entre les glottophiles et les ballettomanes, les rues ne sont plus sûres de nos jours...