À nouveau, tandis que je construis patiemment la suite de la série biblicomusicale ou que je grimpe Vercors
et Cévennes à la recherche de chapelles romanes emblématiques et d'aqueducs cachés…
… une petite mise à jour des lecteurs audio d'une ancienne notule
(avril 2009 !) consacrée à la qualité de prononciation à l'Opéra, sur lesquelles
s'écharpent quelquefois les mélomanes.
J'y proposais quatre angles d'approche (articulation, accentuation,
aperture, accent) pour trier un peu les critères – et leur impact sur
l'interprétation. Avec les extraits adéquats – dont quelques petites
merveilles un peu rares.
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Intendance a suscité :
Suite à la perfidie d'Adobe et à l'intérêt persistant (merci
!) de mes lecteurs, me voici à reprendre une à une mes notules encore
utiles pour y inclure de nouveaux lecteurs audio – oui, je voudrais
automatiser ce travail, mais c'est moins simple qu'il n'y paraît.
Et comme les recherches pour nourrir CSS,
ainsi que la vie elle-même, réclament quotidiennement leur dû sur le
temps de rédaction disponible, je me contente aujourd'hui de vous
renvoyer vers la notule sur le vibrato
(de 2009 !), que j'ai légèrement amendée (en particulier sur ses
périodes d'usage dans le domaine vocal).
La voici désormais avec des extraits flambants neufs, pour essayer de
comprendre quels paramètres peuvent varier lorsqu'on entend une voix
vibrer, et essayer de les sérier. Il n'y est pas seulement question
d'aspect esthétique, mais aussi… moral. Car le vibrato induit des représentations
assez fortes – il n'est que de voir ce qu'il produit sur les néophytes,
stupéfaction, fascination… et plus souvent encore épouvante !
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Intendance a suscité :
L'idée de départ : proposer une découverte de la Bible à travers ses
mises en musique. Le but ultime (possiblement inaccessible) serait de
couvrir l'ensemble des épisodes ou poèmes bibliques jamais mis en
musique. Il ne serait évidemment pas envisageable d'inclure l'ensemble
des œuvres écrites pour un épisode donné, mais plutôt de proposer un
parcours varié stylistiquement qui permette d'approcher ce corpus par
le biais musical – et éventuellement de s'interroger sur ce que cela
altère du rapport à l'original.
Quelques avantages :
♦ incarner
certains textes ou poèmes un peu arides en les ancrant dans la musique
(ce qui devrait satisfaire le lobby chrétien) ;
♦ observer différentes approches possibles de cette matière-première
(pour les musiqueux).
Sur ce second point, beaucoup peut être appris :
D'une part le nécessaire
équilibreentre
♦ le langage
musical du temps,
♦
les formes liturgiques décidées
par les autorités religieuses,
♦
la nature même de l'épisode narré.
Sur certains épisodes qui ont traversé les périodes (« Tristis est
anima mea » !), il y aurait tant à dire sur l'évolution des usages
formels…
D'autre part le positionnement plus
ou moins distant du culte religieux :
niveau 1 → utilisé pour toutes les célébrations (l'Ordinaire des catholiques),
niveau 2 → pour certaines fêtes
ou moments spécifiques de l'année liturgique (le Propre),
niveau 3 → en complément de la messe proprement
dite (comme les cantates),
niveau 4 → en forme de concert sacré mais
distinct du culte (les oratorios),
niveau 5 → sous forme œuvres destinées à édifier le public mais représentées dans
les théâtres (oratorios hors églises ou opéras un peu
révérencieux),
niveau 6 → de libres adaptations
(typiquement à l'opéra, lorsque Adam, Joseph ou Moïse deviennent des
héros un peu plus complexes)
niveau 7 → ou même de relectures
critiques (détournements d'Abraham ou de Caïn au XXe siècle…).
À cette fin, j'ai commencé un tableau
qui devrait, à terme, viser l'exhaustivité – non pas, encore une fois,
des mises en musique, mais des épisodes bibliques. Il s'avère déjà que,
même pour les tubes de la
Genèse, certains épisodes sont très peu représentés – l'ivresse de Noé,
pourtant abondamment iconographiée, est particulièrement peu répandue
dans les adaptations musicales, y compris au XXe siècle où les
questions de bienséance se posent avec une moindre acuité.
Mais en plus du tableau, de petits épisodes détachés avec un peu de
glose ne peuvent pas faire de mal. (Comme ils seront dans le désordre,
ils pourront ensuite être recensés dans le tableau ou une notule
adéquate.) Nous verrons combien je réussis à produire, et si cela revêt
quelque pertinence.
Abel & Caïn
Étrangement, le premier homicide connaît peu de versions populaires…
mais c'est aussi l'un des épisodes qui a été traité avec le plus de
diversité dans les approches. Commençons par cette copieuse entrée en
matière.
Texte énigmatique, qui montre Dieu se détourner sans cause explicite du
laboureur pour favoriser le berger, faisant naître la première rivalité
fraternelle au taux de létalité de 1.
La source
1. Or Adam connut
Eve sa femme, laquelle conçut, et enfanta Caïn; et elle dit : J'ai
acquis un homme de par l'Eternel.
2. Elle enfanta encore Abel son frère; et Abel fut
berger, et Caïn laboureur.
3. Or il arriva, au bout de quelque temps, que Caïn
offrit à l'Eternel une oblation des fruits de la terre ;
4. Et qu'Abel aussi offrit des premiers-nés de son
troupeau, et de leur graisse ; et l'Eternel eut égard à Abel, et à son
oblation.
5. Mais il n'eut point d'égard à Caïn, ni à son
oblation ; et Caïn fut fort irrité, et son visage fut abattu.
6. Et l'Eternel dit à Caïn : Pourquoi es-tu irrité ?
et pourquoi ton visage est-il abattu ?
7. Si tu fais bien, ne sera-t-il pas reçu ? mais si
tu ne fais pas bien, le péché est à la porte ; or ses désirs se
[rapportent] à toi, et tu as Seigneurie sur lui.
8. Or Caïn parla avec Abel son frère, et comme ils
étaient aux champs, Caïn s'éleva contre Abel son frère, et le tua.
9. Et l'Eternel dit à Caïn : Où est Abel ton frère ?
Et il lui répondit : Je ne sais, suis-je le gardien de mon frère, moi ?
10. Et Dieu dit : Qu'as-tu fait ? La voix du sang de
ton frère crie de la terre à moi.
11. Maintenant donc tu [seras] maudit, [même] de la
part de la terre, qui a ouvert sa bouche pour recevoir de ta main le
sang de ton frère.
12. Quand tu laboureras la terre, elle ne te rendra
plus son fruit, et tu seras vagabond et fugitif sur la terre.
13. Et Caïn dit à l'Eternel : Ma peine est plus
grande que je ne puis porter.
14. Voici, tu m'as chassé aujourd'hui de cette
terre-ci, et je serai caché de devant ta face, et serai vagabond et
fugitif sur la terre, et il arrivera que quiconque me trouvera, me
tuera.
15. Et l'Eternel lui dit : C'est pourquoi quiconque
tuera Caïn sera puni sept fois davantage. Ainsi l'Eternel mit une
marque sur Caïn, afin que quiconque le trouverait, ne le tuât point.
16. Alors Caïn sortit de devant la face de
l'Eternel, et habita au pays de Nod, vers l'Orient d'Héden.
17. Puis Caïn connut sa femme, qui conçut et enfanta
Hénoc ; et il bâtit une ville, et appela la ville Hénoc, du nom de son
fils.
Genèse 4:1-17, traduction de
Martin (1744).
Les
adaptations musicales
1567 Roland DE
LASSUS – Ubi est Abel
¶ Réutilisation littérale des versets
9 et 10 sous forme d'une polyphonie
à cinq parties. C'est-à-dire le dialogue avec Dieu, sommet du
potentiel dramatique de l'épisode, autour de la fameuse réplique «
Suis-je le gardien de mon frère ? ».
¶ Seule petite divergence : le verbe, « ait » dans ma vulgate
sixto-clémentine de de 1592, « dixit » chez Lassus, probablement une
question de version de la vulgate. Le verbe est en outre placé à la
fin, peut-être une intervention de la tradition pour placer dès le
début de la pièce musicale les mots importants.
¶ En effet, cet texte était utilisé depuis l'ère grégorienne comme répons
– chanté pendant un office à la suite d'une lecture de la Bible, avec
des effets de reprise en écho (vis-à-vis du verset du soliste).
¶ En l'occurrence, celui-ci est prévu pour
le dimanche de la Septuagésime – c'est-à-dire le neuvième
dimanche avant Pâques, période entre le temps liturgique de Noël et
celui de Carême, caractérisé chez les catholiques par l'usage du
violet. Vatican II a supprimé cette période (devenu le temps ordinaire
qui suit l'Épiphanie), il est donc plus délicat de l'appréhender en
personne aujourd'hui, mais c'était une réalité tangible au moment de la
composition.
¶ Œuvre appartenant donc au Niveau 2 : interprété pendant la
célébration de certains jours spécifiques.
¶ Très belle œuvre pleine de fluidité et d'éloquence, comme toujours
chez Lassus.
[[]]
Un seul enregistrement à ma connaissance (Singer Pur, Ars Musici 2009).
Existe aussi une transcription pour consort de viole chez Delphian (par
The Rose Consort of Viols).
Ubi
est Abel : un répons musical au temps de la Réforme
Bien qu'à ma connaissance, la
version de Lassus (prévue pour le culte catholique), soit la seule qui
ait été gravée sur disque, nous sommes en possession d'au moins 4
autres mises en musique, toutes de la part de de compositeurs
luthériens : en 1543 Balthazar Resinarius
(un proche de Luther), en 1547 Nickolaus Kropstein (un pasteur, proche de
Luther également), en 1550 Lorenz Lemlin,
en 1556 Hollander…
Il faut dire qu'au cœur de la Réforme, la figure de Caïn a été un
emblème très utilisé dans la propagande.
§
Sur le plan de l'exégèse, d'abord, Luther,
dans ses Commentaires sur la Genèse,
développe l'idée que la question posée « Où est Abel ? » n'est pas réellement de Dieu (Caïn
aurait su qu'il était inutile de mentir) mais d'Adam inspiré par Dieu.
Il est possible, selon les commentateurs, que Luther ait pensé, en
écrivant cela, à un parallèle avec les procès expéditifs contre les
protestants, tandis que Dieu, lui, laisse toujours une voie ouverte
pour se défendre et se repentir.
§
Plus concrètement (et suivant une interprétation inverse), dans les chansons politiques qui circulaient,
on trouve souvent Abel comme représentant le protestant de bonne
volonté victime des moqueries des sophistes catholiques ou de la
persécution – assimilant les catholiques oppresseurs à Caïn.
Dans le culte luthérien, Ubi est Cain était utilisé à des moments distincts du culte
catholique, aussi bien à l'extérieur des célébrations proprement dites
qu'au cœur même du culte ordinaire.
milieu XVIIe Giacomo CARISSIMI – Offerebat Cain (milieu XVIIe)
¶ Extraits (coupés, simplifiés et réagencés avec quelques « connecteurs
logiques » simples) du texte de la Genèse
(débutant au troisième verset, les offrandes du cultivateur Caïn).
Narrateur en ténor solo ou par deux sopranos – ces narrateurs à deux
voix sont une caractéristique du milieu du XVIIe, et se
retrouvent à
l'autre bout de l'Europe chez Pfleger à la cour du Schlewig, par
exemple –, incluant les répliques Dieu (basse profonde avec
contre-notes
graves assez spectaculaires.
¶ Mélange de récits sobres et de virevoltantes volutes vocales (les
deux sopranos), avec un soupçon de stile
concitato (figuralismes de violences façon Combattimento de Monteverdi) pour
épouser la colère de Caïn (« iratusque
est Cain vehementer »), une version extrêmement condensée de l'épisode,
en ce qu'elle ne fait que six minutes, mais qui reprend l'essentiel du
texte biblique, y compris les instructions de Dieu pour épargner
Caïn.
Très beau et prégnant en tout cas, un des meilleurs Carissimi.
¶ Niveau 4 ? (une sorte de catéchisme ?)
[[]]
L'enregistrement des Paladins est remarquable. L'autre existant, de
l'ensemble Seicentonovecento, reste problématique (justesse des
solistes).
1671 Bernardo PASQUINI – Caino e Abele (oratorio)
¶ La seconde moitié du XVIIe siècle voit se développer le genre de
l'oratorio. En 1671 à Rome, Pasquini (une grande figure d'alors)
conçoit, pour la chapelle du Palazzo Borghese, ce Caïn & Abel. Dans les États
pontificaux, l'oratorio était un genre
très couru pendant la période de Carême où les événements
musicaux et théâtraux étaient interdits. Pour évêques et aristocrates,
commander une scène sacrée de ce genre permettait de contourner
l'interdit. Ils étaient exécutés aussi bien dans les églises que dans
les palais.
¶ L'oratorio de Pasquini demeure très
proche de la prosodie, essentiellement sous forme de récitatifs
un peu mélodiques, ménageant en sus quelques ensembles polyphoniques
(chœur à 5) qui réunissent les différents chanteurs : narrateur, Adam,
Abel, Caïn, Ève, Satan, Dieu. En une heure, le livret se contente de
développer sous forme de dialogues (plus quelques récits, pas tout à
fait des traductions littérales, mais souvent proches de l'original) le
contenu des versets de la Genèse.
¶ Caïn y est présenté comme un libre
penseur, ne reconnaissant que sa propre volonté, et comme tel
ressentant les conseils de vertu d'Abel comme de la malveillance et de
l'hypocrisie, le tout culminant dans un duo en stichomythie où l'on assiste directement à la mort d'Abel
(qui n'est pas aussi précisément évoquée dans la Bible).
¶ Parmi les bizarreries, l'intervention de Satan (tout à fait absente
des sources) pour motiver Caïn, et plus encore l'évocation de toute une
mythologie païenne : le narrateur parle de l'Averne et de Pluton, Satan
du Cocyte, et Eve elle-même met Dieu (la paix) en balance avec Pluton
(la guerre) ! Sacré mélange, témoin de la pensée d'alors – on le
retrouve dans la peinture, où l'excuse donnée à la représentation
abondante de scènes mythologiques tient dans l'équivalence mystique
donnée pour chaque élément avec les Écritures.
¶ La conclusion est elle aussi d'un fort parti pris, advenant après les
reproches de Dieu et la déréliction de Caïn : le chœur final insiste
sur la dimension du destin (le Ciel décide de notre mort), s'achevant
sur la
miséricorde de Dieu… tempérée par la justice – « chacun meurt comme il
a
vécu ».
¶ Niveau 5. (Et même par certains aspects fantaisistes Niveau 6.)
¶ Trois extraits : stichomythie et mort d'Abel, questions de Dieu,
chœur polyphonique qui célèbre la crainte de Dieu par les cœurs
coupables.
[[]]
[[]]
[[]]
Enregistrement intégral par De Marchi chez Pan Classics, avec un
soprano d'allure très enfantine pour Caïn, assez déroutant. Continuo un peu raide et
parcimonieux, mais l'ensemble fonctionne tout à fait bien. Le monologue
du désespoir de Caïn peut aussi s'entendre, avec lirone, par Headley
chez Nimbus Alliance.
1707
Alessandro SCARLATTI – Il primo
omicidio, overo Cain («
Le premier meurtre, ou Caïn », oratorio)
¶ Oratorio créé à Venise en 1707 (à l'occasion de son séjour parrainé
par les Grimaldi), le Scarlatti correspond déjà aux formats de l'opéra seria avec ses
alternances très identifiables d'airs et de récitatifs. Néanmoins on y
rencontre quelques récitatifs plus travaillés (comme la plainte
liminaire d'Adam sur ses fils condamnés à la dure vie hors d'Éden) et
même quelques récitatifs accompagnés par l'orchestre, comme dans
l'extrait ici retenu (les questions de Dieu en recitativo secco sont suivies de
ses imprécations en recitativo
accompagnato).
¶ Cette temporalité lente favorise
l'expression de sentiments plus
tendres et édifiants : les conseils d'Adam, la dévotion des
frères…
¶ Mêmes personnages que chez Pasquini, à l'exclusion du narrateur, absent – chez Scarlatti
les airs émotifs remplacent la glose du Testo qui complétait l'action des
personnages, chez Pasquini. Autre détail amusant et troublant, Satan est ici nommé Lucifero – ce
qui constitue un mélange assez déroutant ; en effet Lucifer est issu
d'interprétations des livres d'Ésaïe, Ézéchiel ou encore Hénoch (ce
dernier uniquement retenu dans le corpus de la Bible éthiopienne), et
donc absolument anachronique pour désigner le démon hébraïque nommé
Satan… qui n'apparaît déjà pas du tout dans l'épisode d'Abel et Caïn
! Exemple aussi bien du caractère syncrétique des références
(chez Pasquini, nous avions carrément Pluton !) que de la superposition
quasiment parfaite de Lucifer avec les autres figures démoniaques
hébraïques plus anciennes.
¶ Contrairement à Pasquini, le dénouement ne s'arrête pas au châtiment
de Caïn mais fait revenir Adam pour lui promettre une nouvelle
descendance, et de nouveaux espoirs. Ainsi l'épisode ne représente pas
nécessairement l'humanité d'aujourd'hui, qui procède plutôt de
l'expérience positive retirée de cette catastrophe.
¶ Niveau 5.
[[]]
[[]]
La version Alessandrini-Biondi de 1992 n'étant plus disponible, reste
la version Jacobs, très léchée.
1732
Antonio CALDARA – La morte d'Abel
figura di quella del nostro Redentore (« La mort d'Abel, symbole de celle
de notre Rédempteur », oratorio)
¶ À la fin de sa vie, alors que le Vénitien Caldara exerce comme Vize-Kapellmeister pour la Cour
impériale à Vienne, il écrit cet oratorio dont le projet est explicité
jusque dans le titre : Abel, c'est ici la figure de l'innocence, et
même davantage, celle de l'innocence qui expie les péchés de tiers, le
bouc émissaire, l'agneau pascal. L'une des multiples interprétations
qui ont eu cours, annoncée d'emblée, et qui se retrouve dans l'unique
air qui en a été gravé à ce jour : « Quel buon pastor son io » – « Je
suis ce bon berger ».
¶ Le format en est très caractéristique du seria des années 1730, dont
les airs s'allongent considérablement, atteignant régulièrement les dix
minutes – ce qui accroît encore, d'un point de vue dramaturgique, la
suspension de l'action au profit de la voix, de la musique, des
méditations et affects proposés dans les airs.
¶ Sa Sinfonia d'ouverture a,
avec beaucoup d'autres écrites par Caldara, été regroupée en recueil
et réutilisée comme musique instrumentale autonome avec ou sans
remaniements, ce qui lui a permis d'être très souvent enregistrée. Vous
en trouverez beaucoup de (bonnes) versions, mais cela ne vous avancera
beaucoup sur le sujet biblique, l'écriture instrumentale des ouvertures
étant assez interchangeable entre les sujets.
¶ Niveau 5.
[[]]
Bartoli et Il Giardino Armonico, 2009.
On est bien sûr loin d'avoir épuisé le sujet, mais vous disposez ainsi
de quelques exemples d'approches de la figure de Caïn du XVIe au XVIIIe
siècle : du texte littéral de la Genèse traité en polyphonie, à peine
dramatisé (XVIe-début XVIIe), à des intrigues dramatiques totalement
recréées, ajoutant quantité de détails (et mêmes des personnages
mythologiques…) pour en faire un opéra déguisé. Bon moyen de suivre
l'évolution de l'intérêt pour les voix et pour le rapport au texte au
fil des décennies.
Le plus étonnant demeure cependant, à mon sens, la diversité
d'interprétations du mythe que l'on couvre ainsi : énigmatique épisode
brut d'origine, Caïn comme rappel en creux de toutes victimes qui n'ont
pas eu un procès aussi équitable, Abel comme victime d'un camp ennemi,
Caïn comme rappel de notre propre aveuglement et de la rigueur de la
justice de Dieu, Abel comme premier présage de la figure du Christ… !
Au XIXe siècle, la figure
pourtant hautement contrastée et compatible de Caïn me paraît avoir
moins rencontré la faveur des compositeurs – je n'ai d'ailleurs trouvé
aucune œuvre enregistrée à ce sujet. C'est pourquoi je reparlerai de
ses avatars en abordant directement le
XXe siècle, où se débusqueront un
certain nombre de compositions aux contours assez étonnants –
musique de chambre, suites d'orchestre à plusieurs mains autour de la
Genèse, opéra en hébreu, et même un opéra psychanalysant des années
1910, assez critique sur les personnages bibliques (et peut-être même
Dieu)…
Cet aimable bac à sable accueille divers badinages :
opéra, lied,
théâtres & musiques
interlopes,
questions de langue
ou de voix...
en discrètes notules,
parfois constituées en séries.
Beaucoup de requêtes de moteur de recherche aboutissent ici à propos de questions pas encore traitées.
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