mercredi 13 décembre 2023
Sur la voie ferrée (en activité) de Mareuil-sur-Ourcq
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Carnets sur sol (boueux) - Vaste monde et gentils a suscité :
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mercredi 13 décembre 2023
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samedi 18 novembre 2023
Dafne Compositeurs : Schütz, Gagliano, Marini, Grandi & Roland Wilson Chanteurs : Werneburg, Hunger, Poplutz… Ensembles : La Capella Ducale, Musica Fiata Direction : Roland Wilson CPO 2022 (nouveauté) (coup de cœur) |
Si la reconstruction d’un opéra perdu peut paraître une pure opération de communication – la preuve, je me suis jeté sur ce disque alors même que je savais qu’il ne contenait pas une mesure de Dafne ! –, le projet de Roland Wilson est en réalité particulièrement stimulant. En effet, partant de l’hypothèse (débattue) qu’il s’agissait bel et bien d’un opéra et pas d’une pièce de théâtre mêlée de numéros musicaux, il récupère les récitatifs de la Dafne de Gagliano (qui a pu servir de modèle), inclut des ritournelles de Biagio Marini, un lamento d’Alessandro Grandi (ami de Schütz), et surtout adapte des cantates sacrées de Schütz sur le livret allemand qui, lui, nous est parvenu. (Wolfgang Mitterer a même fait un opéra tout récent dessus…) Le résultat est enthousiasmant, sans doute beaucoup plus, pensé-je, que l’original : énormément de danses très entraînantes, orchestrées avec générosité, un rapport durée / saillances infiniment plus favorable que d’ordinaire dans ce répertoire (même dans les grands Monteverdi…). Ce n’est donc probablement pas tout à fait cohérent avec le contenu de l’original, mais je suis sensible à l’argument de Wilson : c’est l’occasion d’entendre de la grande musique du temps que, sans cela, nous n’aurions probablement jamais entendue ! (Et dans un cadre dramatique cohérent, ajouté-je, ce qui ne gâche rien.) Les deux ténors sont remarquables, l’accompagnement très vivant, et surtout le choix des pièces enthousiasmant ! → Bissé. |
Le résultat |
Un disque a paru par l'Orchestre Beethoven de Bonn.
Si le procédé est techniquement impressionnant, car le résultat ressemble par son aspect général plus
ou moins à
une symphonie de Beethoven (en particulier le scherzo ; la forme du
rondo final est beaucoup plus élusive), artistiquement en revanche…
l'objet a laissé tout le monde assez perplexe. Dans le scherzo, le plus cohérent, passé le motif de base qui pourrait être beethovenien (et qui provient vraisemblablement des esquisses ?), tout le reste (harmonie prévisible, orchestration épaisse, absence de surprises) fait davantage penser au style des symphonies de Schubert – mais un Schubert sans l'inventivité harmonique, sans la séduction mélodique, sans la touche de mélancolie. Quelqu'un qui aurait entendu les inventions de Beethoven, mais n'en aurait pas vraiment compris la force et n'en aurait en tout cas pas du tout le talent. Pas très marquant donc. Quant au rondo-final, j'y entends tantôt des morceaux de Haydn (l'algorithme a manifestement mouliné le Concerto pour orgue en ut Hob. XVIII n°1, plutôt un maillon de la succession vivaldienne chez Haydn qu'une influence constitutive du style de Beethoven !), tantôt un langage romantique un peu lisse, plus tardif et presque postmoderne, évoquant un Brahms délavé, voire de la musique de film pas très inspirée. Quant à l'orgue solo : l'idée surprend et on a envie de lui laisser sa chance – mais que Beethoven, à la fin de sa vie, couronnant son œuvre démiurgique, ait écrit une symphonie concertante, genre passé de mode depuis plus plus de 20 ans, et pour ne rien en faire d'étonnant, de personnel, de saisissant, voilà un résultat hautement improbable. |
Limites |
La faiblesse provient peut-être
aussi du corpus retenu par
l'équipe d'Ahmed Elgammal,
le computer scientist
à la tête du projet : en entrant des œuvres antérieures comme
sous-couche (plutôt que des contemporains et successeurs), on se
retrouve nécessairement avec ce biais archaïsant. Je n'ai pas été
surpris d'y trouver du Haydn
après avoir entendu le final (mais je devine qu'il n'a pas uniquement
inclus le dernier Haydn le plus sophistiqué), davantage d'y trouver Bach
– qui n'est vraiment pas spécialement la base technique ou stylistique
de Beethoven, et de surcroît dans la période où sa musique a le moins
été à la mode. Il y avait beaucoup d'autres sources possibles, qui
auraient peut-être orienté le résultat de façon moins rétro,
chez ses compositeurs contemporains de Beethoven, quitte à ce qu'ils
soient un peu plus jeunes (Dupuy, B. Romberg, Czerny…). Ce n'aurait pas
produit un résultat exact non plus (Beethoven n'utilise pas toutes les
tournures des générations suivantes, bien évidemment), mais ça aurait
au moins eu des allures davantage de son temps. Un des aspects frustrants est que l'on sent aussi le poids d'œuvres existantes et précises de Beethoven dans le résultat final – le corpus est un peu petit pour que le modèle ait assez de liberté, je pense : le Scherzo a vraiment des allures de parodie un peu laborieuse des scherzos de la 5 et de la 9 (j'ai l'impression que le motif a juste été décalé dans ses intervalles), on reconnaît très bien le « pom pom pom pom » par exemple. Et c'est assez logique, la récurrence obstinée du motif de la Cinquième Symphonie a dû submerger l'algorithme et lui faire considérer que c'est une fondement important de tout Beethoven, à cause de sa surconcentration dans une seule symphonie. |
Quelques sources à lire (en anglais) sur le projet et sa réception : |
→ entretien d'Elgammal avec le
magazine BBC Science Focus ; → retranscription d'un autre entretien sur la radio publique étatsunienne (NPR) ; → éléments divers sur le sujet avec liens vers d'autres articles sur Classic FM ; |
→ recension par VAN Magazine ; → recension sur les carnets de Dynamic Piano Studio ; |
→ biographie
d'Elgammal ; → le site promotionnel du projet. |
Une histoire d'abord politique |
Le pays, depuis 1795 et les
partages successifs de la Pologne à
laquelle il était intimement lié, n'existe plus et se trouve absorbé
par l'Empire russe. Mais entre 1918 et 1941 (début de l'occupation
nazie, à laquelle succède en 1945 l'occupation soviétique), la défaite
russe permet la courte existence d'une République lituanienne
indépendante – régime présidentiel à une chambre – immédiatement
envahie par l'Armée rouge. Le Traité de Versailles y met un terme en
1919 et les Russes se retirent. Mais les Polonais revendiquent une
partie du pays (il y avait 50% de Polonais à Vilnius) et annexent la
capitale –
qu'ils nomment pour leur part Wilno, créant une République fantoche de Lituanie Centrale qu'ils
incorporent bientôt à la Pologne. En réalité, la Société des Nations avait demandé aux Polonais de se retirer de Vilnius, mais les garants militaires ne sont pas intervenus : la France parce qu'elle voulait conserver l'alliance polonaise contre une revanche allemande, le Royaume-Uni parce qu'il ne voulait pas se mouiller seul. |
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jeudi 18 août 2016
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mercredi 3 février 2016
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dimanche 13 décembre 2015
Je conserve d'ordinaire ce genre de révélation discutablement lumineuse pour moi-même, mais quelques spécialistes de la question fréquentant ces lieux, peut-être ma remarque me vaudra-t-elle quelques réponses éclairantes.
Lorsqu'on constate que les électeurs n'ont aucune visibilité sur l'utilité arithmétique de leur vote (en l'occurrence, si l'on veut surtout éviter l'un des trois présents au second tour, pour lequel des deux autres faut-il voter ?), on s'intéresse un peu à la solution des systèmes de type Condorcet – pas seulement utopiques, l'Australie a le sien par exemple. Autrement dit, à un bulletin de vote établissant des préférences relatives, ce qui permet de mettre à distance les candidats ou les formations trop clivants.
Tout en me disant que ce serait bien pratique de temps à autre, je vois immédiatement quelques effets pervers :
¶ la favorisation du plus grand consensus, donc le risque d'une absence de prises de position audacieuses, voire de la démagogie (certes, les deux existent déjà largement) ;
¶ beaucoup d'électeurs n'ont pas forcément d'informations sur tous les partis, ce qui signifie que le milieu de leur liste serait hiérarchisé de façon très aléatoire ;
¶ surtout, le risque du dévoiement du système, qui repose sur la bonne foi des électeurs. On ne veut absolument pas tel parti, donc on le met dernier de façon à diminuer son score, en plus de voter pour quelqu'un d'autre, soit. Mais si l'électeur devient stratège (et nul doute que les partis diffuseront très bien ce genre de consigne), il peut être tenté de placer en fin de liste non pas le parti qu'il abomine le plus, mais celui qui est le plus directement en concurrence avec le sien. Donc un parti pas forcément repoussoir ou dangereux, et éventuellement un parti proche des convictions de celui qui vote.
Exemple simple : mettons que je veuille voter pour un parti conservateur. Je mets sur mon bulletin LR en première position, et je devrais mettre en bonne logique LO, LCR, PG et PCF en fin de marche. Mais, dans les faits, le succès de mon suffrage dépend plutôt de la distanciation de partis plus puissants et immédiatement contigus dans le spectre politique : FN, UDF, voire PS. J'ai donc tout intérêt à les mettre le plus bas possible dans mon bulletin, étant donné que LO n'atteindra jamais les 50%.
On peut encore raffiner la finesse, et se dire que les partis trop petits n'auront pas assez d'influence sur le vote : j'irais donc mettre PCF en deuxième position pour ralentir le PS. Sauf que, si tous les électeurs conservateurs appliquent cette logique, le PCF pourrait se retrouver plébiscité, si les électeurs de gauche ont été plus sincères dans l'expression de leurs préférences ! PC premer parti de France.
En fin de compte, le gain de lisibilité, dès que les électeurs se seront emparés de la logique, n'est pas si évident. Certes, ce serait plus ludique (possibilité de « déqualifier » certains partis) et encouragerait peut-être la participation, mais pour le reste, je doute que ce puisse lever les problèmes d'incertitudes autour de ce que l'on appelle le vote utile (les sondages le conditionnant de façon parasite, mais aidant aussi les électeurs à ne pas verser leurs suffrages dans un gouffre sans représentation).
Si des habitués du système Condorcet ont des lumières sur ces questions, qu'ils ne s'en privent pas.
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dimanche 15 février 2015
Entendu il y a quelque temps dans un média grand public :
Les Français ont reçu des messages de soutien de Nouvelle-Zélande, et même de Hongrie.
Belle leçon d'exotisme comparé — au moins en Nouvelle-Zélande, ils n'accentuent pas leurs mots au début et n'enferment pas leurs femmes derrière des portes.
Et ils n'ont pas les yeux bridés, et ils ne vénèrent pas les destructeurs de l'Europe…Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Vaste monde et gentils a suscité :
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mercredi 7 janvier 2015
La consolation de la journée, c'est de voir Al Jazeera essayer d'expliquer le positionnement de Charlie Hebdo et les nuances entre liberté d'expression, anticléricalisme et irréligion, en essayant de faire entendre qu'il s'agit d'une sorte d'esprit français pas du tout vindicatif.
L'attentat français monopolise d'ailleurs leur flux (sur un ton sans complaisance et même très empathique), alors que circulent en bandeau l'annonce de 38 morts au Yémen et 7 en Afghanistan. Idées reçues, bonsoir.
Dans ces cas, on serait tenté de croire que l'Univers s'esclaffe dans notre dos, mais je trouve assez touchant de voir le monde, à commencer par ceux que nous suspectons comme nos ennemis plus ou moins cachés, essayer de se figurer les spécificités de l'esprit français — et Dieu sait que pas grand monde, même en France, arrive à suivre celui de la niche Charlie Hebdo.
De cette très vilaine journée, qui va sans doute servir d'alibi à tous les agités du bocal (et, plus dangereux, à tous les opportunistes à l'intérieur du système), qui servira de mètre-étalon de la violence civile dans les prochaines années, on peut au moins retirer ces instants de compassion planétaire mêlée de curiosité un peu dubitative, presque amusante et plutôt émouvante — un de ces instants fugaces où l'humanité cesse de se diviser.
[Fin des bonnes nouvelles. À présent, vous pouvez retourner déprimer dans votre coin en attendant que l'acte de deux ou trois paumés ne nous serve d'alibi pour un patriot act maison.]
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mercredi 15 octobre 2014
Trompeusement dépaysant, cette fois.
Pourtant, il était tôt, j'étais pressé… mais en entendant ça, j'ai été frappé : toutes les expressions semblent provenir (exaltation par la proximité du terrain aidant, je suppose) des actualités de guerre… d'il y a longtemps.
Les ennemis cruels qui veulent « resserrer l'étau pour achever dans un bain de sang cette bataille », « surpris » car il n'avaient « pas compté », dans cette « zone stratégique », sur les « raids aériens de plus en plus précis » et, au sol, les « contre-attaques meurtrières » dues « au courage et à la détermination des combattants des Unités de Protection du Peuple » « résolus à se battre jusqu'à la première balle ».
On se croirait dans ces journaux de bonnes nouvelles qui racontaient toujours des victoires (ou des résistances héroïques et autres replis stratégiques astucieux et très temporaires) ; pas tant dans le contenu (qui évoque bien l'encerclement de la ville) que dans les mots utilisés, qui prennent très nettement non seulement le parti d'un camp (ce qui, en l'occurrence, peut se comprendre) mais expriment de surcroît davantage des espérances que des informations.
J'étais déjà dubitatif, lors de la guerre en Afghanistan de 2001, sur son automaticité et sa légitimité, du moins par rapport à nos standards habituels — renverser un régime parce qu'un terroriste a élu domicile dans son pays, on ne l'a pas fait pour des nuisances beaucoup plus sérieuses et structurelles, en s'appuyant justement sur la sacralité de la souveraineté.
De même ici, l'insistance à nommer, chez les meilleurs spécialistes, terroristes des combattants réguliers (manifestement auteurs de crimes de guerre, voire de crimes contre l'humanité, mais qui ne répondent pas à la définition du terrorisme), le refus obstiné d'appeler État un territoire contrôlé par une armée et un semblant d'administration (même s'ils nous déplaisent plus que farouchement), de se contenter de désigner comme barbares marginaux un groupe qui semble tout de même relativement large (et non dépourvu d'amis) rappelle à quel point, même dans une démocratie pacifique et vraiment pas nationaliste, il est facile d'être intoxiqué par la propagande de guerre.
Et là, franchement, en entendant les prêches de journaux de qualité qui annoncent que grâce à leur dévouement et à leur juste cause, nos alliés désarmés vaincront une armée riche et solidement fournie, on a l'impression de revivre des époques qu'on n'a pourtant pas vécues.
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Une affiche après une élection municipale dans une ville du val d'Oise, en 1908 (les caractères sont grassés sur l'affiche) :
Chers concitoyens,
Vous avez approuvé, dimanche dernier, à une très imposante majorité, les décisions prises au cours des quatre dernières années par la majorité du conseil municipal sortant.
Vous avez affirmé, une fois de plus votre volonté de ne placer à la tête de l'administration communale que des Républicains sincères.
Vous ne vous êtes pas laissé prendre aux manœuvres cléricales et déloyales de dernière heure.
[Etc.]
Ça dépayse joliment, on croirait retrouver les diatribes de Bottazzi.
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mardi 24 juin 2014
[À propos du vol, de la contrefaçon & des malversations en politique.]
Dans un registre où CSS ne s'est pas aventuré depuis longtemps, quelques remarques sur des choses entendues ces derniers temps — où le sophisme le plus grossier semble très en cour.
Il a tapé dans la caisse, mais après tout il n'y a pas eu d'enrichissement personnel.
Étonnant comme les journalistes & commentateurs, voire les honnêtes gens avec qui l'on parle (non pas que les précédents ne soient pas honnêtes, bien sûr), peuvent gober cet argumentaire larmoyant de prétoire, tout juste bon à faire semblant de brouiller le jugement d'un jury.
Outre le fait que voler — même un petit pot de beurre pour sa mère-grand qui est malade, dit-on — reste illégal, on ne peut que remarquer que cet argent sert à favoriser le camp du voleur. Ce qui est non seulement tricher (et tout le monde conviendra que c'est mal ; a fortiori lorsqu'il s'agit de prendre possession d'un pays supposément régi par des règles démocratiques), mais aussi se servir tout aussi directement qu'avec un enrichissement personnel : si le parti obtient un bon score, alors l'homme politique obtient un bon poste, ce qui lui importe plus que l'argent (mais va généralement de pair avec un bon salaire, de toute façon).
Bref, ce n'est peut-être pas un enrichissement direct, mais ça le devient très vite — ou ce serait prétendre que la chevillette n'a rien fait à la bobinette.
Certes, il a racketté des entreprises privées, mais au moins il n'a pas volé d'argent public.
Ici encore, c'est se rassurer à peu de frais : à regarder de plus près mère-grand, elle a de bien grandes dents.
Sans même aller considérer ce que de semblables avantages peuvent coûter à la collectivité en surfacturation, en dissimulation d'impôts, il reste deux faits auxquels un parti politique ne peut se soustraire, une fois qu'il a fait entrer le peuple dans son lit.
D'abord, toute tentative d'améliorer frauduleusement la visibilité du parti (puisqu'il est beaucoup question de comptes de campagne dernièrement), ce qui a potentiellement un impact sur le vote par rapport aux concurrents de moindre notoriété, aboutit à l'extorsion de fonds publics destinés au financement de la vie politique — et qui ne seraient donc pas forcément allés à celui-ci. On a beau mettre un bonnet, les oreilles dépassent toujours.
Plus pernicieusement encore, lors de l'invalidation de comptes de campagne, les contributions individuelles spontanées, au-dessus de tout soupçon, ne sont pas plus dénuées de conséquence que cueillir des noisettes ou courir après des papillons sur le chemin. Car, tout don étant défiscalisable, l'impéricie et la malhonnêteté des comptes seront finalement compensés par une subvention collective financée par les impôts de tous. Les remboursements ont beau être suspendus, à la fin des fins, c'est toujours le contribuable qui paie indirectement ; et tous les détours mènent à la fin à la même bouche.
MORALITÉ
On voit ici que d'honnêtes votants,
Font mal d’ouïr nombre de charlatans ;
Et que ce n’est pas chose étrange,
S’il en est tant que le Loup mange.
Je dis le Loup, car tous les Loups
Ne sont pas de la même sorte ;
Il en est d’une humeur accorte,
Sans bruit, sans fiel et sans courroux,
Qui privés, complaisants et doux,
Suivent les électeurs candides
Jusque dans les maisons et dans les cerveaux vides ;
Mais hélas ! qui ne sait que ces Loups doucereux,
De tous les Loups sont les plus dangereux.
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dimanche 20 avril 2014
Du fond de l'abîme, aux confins de l'oppression la plus noire, nous appelions un héros. Il est venu.
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie En passant - brèves et jeux - Discourir - Vaste monde et gentils - Pédagogique - L'horrible Richard Wagner - Vienne décade, et Richard Strauss a suscité :
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mercredi 9 avril 2014
Je n'ai malheureusement pas pu entendre l'original derrière le doublage, mais voici la traduction du commentaire d'Angela Merkel sur l'Ukraine, au Bundestag :
Nous avons suivi les événements de ces derniers jours, et malheureusement à de nombreux endroits il est difficile d'évaluer dans quelle mesure la Russie contribue à l'apaisement des tensions.
Si la traduction est exacte, cette déclaration tient du chef-d'œuvre, celui qu'il faudra citer dans tous les cours de rhétorique pour les quarante prochaines années – alors que plus personne ne se rappellera ce qu'est l'Ukraine, vraisemblablement.
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Vaste monde et gentils a suscité :
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jeudi 30 janvier 2014
Considérant que je l'ai suggéré sensiblement avant qu'ils ne le disent, je me considère favorablement pour le poste de consultant, si quelqu'un veut me faire un pont d'or.
Et hop, un recyclage de notule.
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mercredi 22 janvier 2014
Avec un bon titre comme cela, si vous n'ouvrez pas la notule, c'est à désespérer des bienfaits du racolage.
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Discourir - Vaste monde et gentils - Portraits - Domaine symphonique - Discographies - Saison 2013-2014 a suscité :
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dimanche 19 janvier 2014
Nous vivons, sans même nous en apercevoir, un processus assez fascinant, et relativement peu fréquent à l'échelle d'une décennie.
Il y a un peu plus de dix ans, on pouvait ne pas très bien voir le rapport entre une dizaine de paumés qui réussissent, par une succession de défaillances et de chances successives, un gros attentat, et l'invasion d'un État. Du moins ne pas voir en quoi il s'agissait d'une évidence, pour ne pas dire d'une équivalence (peut-être parce que « nous » aussi, on aurait des raisons de tuer des civils pour faire valoir nos opinions ?).
Néanmoins, on voyait très bien de quel côté se trouvait le mal : ces gens qui voulaient nous détruire, alors qu'on ne leur avait rien fait, juste parce qu'on était différents et tolérants. Pendant des années, même si tout le monde n'était pas d'accord sur les solutions, personne ne soutenait le point de vue des terroristes – ce qui, d'une certaine façon, marquait une profonde nouveauté après des années de minorités militantes dans les deux blocs idéologiques.
Et puis voilà qu'adviennent, il y a peu, des soulèvements dans des pays musulmans, secondés par les mêmes terroristes qui détestent notre liberté, mais qui se mettent à abattre les tyrans. On commence par se rassurer en se disant qu'ils cherchent à profiter cyniquement d'un mouvement d'émancipation pour imposer leur propre domination – et le constat est loin d'être erroné, naturellement.
Mais l'on voit nos gouvernements hésiter à désavouer les dictateurs (pour toutes sortes de bonnes raisons, puisqu'on ne peut pas converser qu'avec ses semblables). Et l'on découvre que, loin de se chercher à venger sur nous, la franchise terroriste la plus célèbre concentre toutes ses forces sur les contrées syriennes, pour atteindre son but le plus profond : établir un État-modèle qui ferait triompher leurs idéaux. Une sorte de Commune tenue par la droite religieuse.
Pour la première fois, on commence à être informés des projets réels de ces gens. Non, leur but n'est absolument pas de nous détruire ; et peut-être même pas, ultimememnt, de nous convertir. La logique est simple, pourtant : ils veulent se « libérer » (selon une norme discutable, mais qui est la leur), et nos gouvernements, qui sont plus forts qu'eux, soutiennent les régimes qui tiennent leur peuple, leur terre, ou ce qu'on voudra. Dans leur histoire, on a quand même donné leur terre pour draîner notre culpabilité.
Ils ne peuvent donc que mener une guerre asymétrique, certes injuste, pour mener les peuples « occidentaux » à protester contre les puissants, de la même façon que l'abeille pique la main pour activer les pieds d'un agresseur.
On découvre qu'en fait d'Antéchrist, le projet ultime de cette organisation aux contours lâches n'a jamais été de raser la surface de la terre, et que l'offensive envers « nous » n'a été une priorité qu'épisodique, liée à des circonstances géopolitiques. Pour odieuse et méprisable que soit l'atteinte aux civil, cela rapproche donc tout à fait ces diables du militantisme d'extrême-gauche telle que l'Europe l'a connu... et humanise grandement ces hommes en leur conférant une logique. Non, ce ne sont pas des ogres ; ils ont un idéal que nos relations extérieures, pour satisfaire notre confort, piétinaient allègrement. N'a peut-être pas lancé la première pierre qui croit.
Ce n'est pas tant une justification des principes (j'en suis loin : je ne suis pas en extase en évocant les Résistances européennes, justement à cause d'opérations assassinant de pauvres conscrits allemands qui seraient volontiers restés chez eux – mal nécessaire sans doute, mais vu depuis une société en paix, j'ai peine à parler de héros malgré tout) qu'une prise de conscience de l'aveuglement de chacun lorsqu'il s'agit de morale. Ou plus exactement, car nous le savions, à quel point cet aveuglement peut être radical, au point d'affecter pendant dix ans un hémisphère entier. Jusqu'à ce que nous nous retrouvions du même côté et que nous nous rendions inévitablement compte que, non, notre destruction n'était pas leur but ultime – et, plus grave encore, que nous ne sommes pas le centre du monde.
Cette expérience de décentrement complet, jusqu'à nous voir comme nous voyaient nos ennemis il y a dix ans, remet vraiment l'église au milieu du village : nous sommes les amis d'Assad, les amis des tyrans, les amis des répressions totalitaires – pour satisfaire nos commodités commerciales et notre petit train de vie privilégié, en laissant le reste du monde s'écharper pour des frontières que nous avons mal tracées ou pour des denrées que nous leur vendons à prix d'or en les ayant rendus dépendants.
Sans rien justifier de ces poignées de parasites incultes qui manient sabre et goupillon pour éviter de se frotter à la vraie vie, le miroir que nous nous tendons nous-mêmes laisse songeur.
Plus profondément, cela ne laisse pas de nous interroger sur l'importance de la morale elle-même. Si elle est tellement trompeuse, tellement divergente d'une année à l'autre, comment lui faire confiance ? Et pourtant, comment mener nos vies si nous n'avons pas ce repère-là, cette certitude, fût-elle erronée ? Les Romains n'étaient pas meurtrier en exposant leurs enfants aux bêtes sauvages, et dans notre société certains considèrent qu'un embryon n'est pas non plus un être humain complet, d'autres au contraire qu'il s'agit d'un meurtre aussi insupportable que celui d'un nourrisson. C'est une question d'une gravité fondamentale, et pourtant la réponse a une date d'expiration.
Je suppose qu'à l'échelle de notre espèce, l'essentiel est le consensus social – nous avons davantage conscience de ces disparités du fait de la simplication des voyages et communications, mais nous ne pouvons pas nous dispenser pour autant de ces normes. Elles sont impermanentes et manifestement rien moins qu'absolues, mais il faut s'en contenter.
À défaut d'avoir rien dit de profond ou d'apporter une doctrine qui nous sauvera tous par l'amour, j'aurai contribué à vous délester de quelques minutes où vous n'aurez pas eu à tester votre sens moral.
... sauf si vous me lisez au boulot ou si le petit dernier a pleuré depuis « on découvre qu'en fait d'Antéchrist » (je suis tellement palpitant à lire), auquel cas votre conscience vous aura torturé également, et vous aurez, cette fois, tout à fait perdu votre temps.
Bon lundi.
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Vaste monde et gentils a suscité :
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jeudi 26 décembre 2013
Dans la généalogie proposée par Don Rosa, et destinée à remettre du sens dans les innombrables aventures et parentés accumulées par différents auteurs depuis Carl Barks, il demeure un problème.
Tout à son allégorie ansériforme, on y croise les Goose, Grebe, Coot (foulque), Gadwall (chipeau), Gander (jars), Mallard (colvert) – on remarque la variété de becs et de faciès, congruents avec l'espèce d'origine. On passe sur la coïncidence du clan écossais McDuck s'alliant à leur arrivée en Amérique avec la souche américaine Duck, peut-être le symbole des vagues d'immigrations (je ne crois pas que l'origine des Duck soit jamais explicitée chez Don Rosa). Malgré la virtuosité du collage et de la restitution, Don Rosa n'a pas pu tout résoudre :
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie En passant - brèves et jeux - Vaste monde et gentils - L'horrible Richard Wagner - Citations passantes a suscité :
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dimanche 8 décembre 2013
Du fait de l'efficacité de la propagation virale des informations sur la Toile, les organisateurs de concert visent depuis une poignée d'années (deux ou trois, guère plus) les relais d'opinion qui permettent de faire une promotion gratuite.
Cette promotion a une diffusion fortement aléatoire, mais elle est en revanche qualitativement plus forte qu'une affiche ou un flyer, parce qu'elle se pare à la fois de l'autorité de celui qu'on a l'habitude de lire et de l'indépendance de l'amateur qui n'est pas rémunéré par la salle.
Aussi, les carnets musicaux ont été progressivement sollicités lorsqu'il s'agit de finir de remplir une salle.
Mais, m'émerveillant, de la maladresse de certains départements de communication, j'ai fini par prendre la plume lorsqu'un semblable courrier a atterri chez moi.
À la relecture, je crois que je j'ai probablement paru un peu cassant, mais je suis parti du principe que je rendrais plus service à un professionnel en lui exposant sans ambages l'effet produit par ce type de courriel (plutôt indignation qu'attendrissement), qu'en lui dorant la pilule. Ce n'était peut-être pas suffisant, j'ai un peu honte de montrer ce que j'ai dit... quelques arrondissements d'angles n'auraient peut-être pas été superflus, on a beau être professionnel, on n'en est pas moins homme.
Nous organisons le concert du jeune violoniste F*** qui aura lieu Salle V*** le mardi xx décembre prochain, et nous vous serions ravis si vous pouviez communiquer sur cet événement sur votre blog. Vous trouverez ci-dessous les informations utiles, et en pièce-jointe le visuel.
Ce qui produisit :
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dimanche 1 décembre 2013
Le monde musical bruisse d'une nouvelle exaltante : on a enfin reconstruit un (autre) instrument inventé par Léonard de Vinci lui-même. Plus encore, ce travail n'avait jamais été mené à bien par son créateur ni par personne d'autre.
Le matériau relayé par les sites d'information (essentiellement la reprise des dépêches d'agence) étant un peu allusif, l'envie prend de regarder l'objet de plus près. (Extraits sonores plus bas.)
Dans le Codex Atlanticus de Leonardo da Vinci, le plus vaste recueil de l'auteur, on trouve quantité d'esquisses sur des sujets incroyablement divers, dont les plus célèbres concernent les machines de vol ou de guerre, mais qui contient également des recherches mathématiques ou botaniques, notamment. Et aussi des projets d'instruments de musique.
La légende prête déjà à notre bon génie l'invention du violon en collaboration avec un luthier de son temps. Il faut dire que la concordance des dates est assez bonne : Vinci meurt au moment (1519) où les premiers protoypes de violon européen apparaissent. Le potentiel premier violon d'Amati, qu'on suppose fait en 1555, n'était pas forcément le premier : Montichiaro, dalla Corna, de' Machetti Linarol, de' Micheli, Fussen sont aussi sur les rangs, et certains proposent même de confier le rôle de père du premier violon à Gasparo da Salò, donc à une date plus tardive (né en 1542). Quoi qu'il en soit, ce premier violon avait été précédé, dès les années 1510, de nombreuses autres tentatives mêlant déjà rebec, vièle à archet et lira da braccio (parente des violes, mais dont la caisse approche déjà grandement de la forme du violon), par exemple des violette (pluriel de violetta, « petite viole ») à trois cordes, ou encore les lire (pluriel de ''lira) vénitiennes.
On peut supposer que la grande manœuvrabilité du violon, ses possibilités techniques, son son éclatant lui ont permis de s'imposer sans partage – ainsi que, sans doute, des contingences plus matérielles et des jeux d'influence : une fois tous les grands interprètes convertis au violon, on aurait beau avoir eu de meilleurs instruments, ce n'aurait rien changé.
Toujours est-il que la postérité richissime de l'instrument fait naître un besoin d'origines qu'on puisse nommer et célébrer ; Vinci était le client parfait, dans sa fin de vie, pour en être le parrain, une sorte de legs ultime, agréablement concordant avec son génie visionnaire. Nous n'en avons évidemment aucune preuve.
Mais cet instrument-ci, nommé viola organista, existe bel et bien dans les feuillets du Codex Atlanticus (et quelques-uns du Second Codex de Madrid), avec diverses études mécaniques préparatoires en forme de croquis isolés, qui détaillent des fragments de la mécanique. Pas suffisant pour construire un instrument complet, mais assez pour lancer un projet.
Son facteur, Sławomir Zubrzycki (un pianiste soliste également versé dans d'autres aventures instrumentales, comme l'usage extensif du clavicorde) ne dit pas autre chose :
En plus de ce qu'il évoque, il existe quelques détails épars sur certains mécanismes de l'instrument :
En réalité, Sławomir Zubrzycki (prononcez : « Souavomir Zoubjétski ») a surtout réalisé un superbe exemplaire, en joue très bien, et l'a admirablement vendu, avec sa réunion semi-publique (petite salle forcément favorable, mais belle prise vidéo), en forme de dévoilement d'une preuve nouvelle du génie de Vinci – jouer du violoncelle avec un clavier !
En revanche, ce n'est absolument pas le premier exemplaire. Au vingtième siècle, plusieurs tentatives de reconstruction ont eu lieu, en particulier celles d'Akio Obuchi (quatre tentatives depuis 1993 !). La version d'Obuchi n'a clairement pas la même séduction sonore, l'instrument est encore très rugueux et geignard, et mérite sans doute beaucoup d'ajustements pour être audible en concert.
On y entend toutefois avec netteté la possibilité de jouer du vibrato sur le clavier, selon la profondeur d'enfoncement de la touche, ce que ne montrent pas les extraits captés de Zubrzynski (mais son instrument le peut).
Plus profondes, plusieurs objections musicologiques ont surgi, car la réalisation de Zubrzycki évoque un instrument tout à fait documenté, et qui a existé en plusieurs exemplaires : le Geigenwerk (peu ou prou l'équivalent de « simili-violon » ou « le machin qui fait crin-crin », la notion péjorative en moins), inventé en 1575 par un organiste de Nuremberg (Hans Heiden/Heyden) et construit au moins jusqu'au milieu du XVIIe siècle. Cet instrument était une alternative au clavecin avec un son qui pouvait être soutenu indéfiniment (comme l'orgue) et la possibilité de vibrato.
Ainsi, plusieurs musicologues ont objecté que Zubrzycki aurait en fait construit une version nouvelle du Geigenwerk, entreprise pas beaucoup plus méritoire que copier un clavecin historique comme le font couramment les facteurs, et en tout cas fort distante de la prouesse de co-inventer un instrument ébauché par Vinci.
Le seul Geigenwerk historique qui subsiste est un modèle de 1625 de Raymundo Truchado, conservé au MIM (Musée des Instruments de Musique) de Bruxelles ; il était vraisemblablement prévu pour des enfants à la Cour d'Espagne, et en plus de son assise très basse, il est, contrairement à l'original de Haiden, mû par une manivelle à l'arrière d'un instrument – ainsi que les grandes orgues d'autrefois, il fallait donc être plusieurs pour pouvoir jouer l'instrument.
Cet instrument n'est plus jouable (complètement muet), aussi l'on se représente assez mal à quoi pouvait ressembler le son, en dehors de descriptions forcément très évasives (lorsqu'on voit les écarts entre les critiques faites par des musicologues d'aujourd'hui beaucoup plus aguerris, et la réalité...). Une immense part du vocabulaire de la critique musicale réside dans des métaphores visuelles (aspects, couleurs... « son pointu », « voix blanche », « couleurs chaudes »...), et contient donc une très large part de subjectivité, chez celui qui écrit comme chez celui qui lit.
Bref, spécificités techniques exceptées, il est difficile de dire ce qui ressemble à quoi et qu'il aurait fallu faire.
Par ailleurs, Sławomir Zubrzycki ne nie absolument pas cette filiation, et laisse au contraire dans ses écrits une trace assez précise des éléments manquants chez Vinci (un projet global et des détails de mécanique, pas de manuel complet), des réalisations ultérieures. Il mentionne ainsi les avantages techniques qu'il emprunte au Geigenwerk ; également la présence au XIXe siècle du Claviolin (surnommé « piano bossu » par son facteur, à cause de l'emplacement des cordes autour des roues) du père Jan Jarmusiewicz (musicien, facteur, théoricien et même peintre) à l'origine de ses recherches, dont il ne reste aucun exemplaire ; et même les expériences de l'autre constructeur vivant (Obuchi, audible ci-dessus), dont il salue la recherche autonome mais relève l'absence d'adaptation au concert.
Certes, la presse internationale ne mentionne pas ces étapes (manque de place, et il n'est pas son intérêt de relativiser ses nouvelles), mais les commentaires laissant planer le doute sur l'honnêteté intellectuelle de Zubrzynski n'ont guère de fondement : il fournit lui-même tous les éléments utiles à la remise en perspective de son instrument.
Par ailleurs, son instrument est réellement le seul exemplaire vraiment jouable qui ait jamais été donné d'entendre à n'importe quel homme vivant aujourd'hui. En cela, l'événement n'est pas factice, Léonard ou non !
Outre les variantes Geigeninstrument ou Geigenclavicymbel pour désigner l'instrument de Heiden, j'aime beaucoup la dénomination astucieuse adoptée par C.P.E. Bach, Bogenklavier (« clavier à archet », l'exacte traduction de l'ambition de l'instrument).
Toutes ces discussions sont intéressantes si l'instrument construit est d'un intérêt médiocre : on s'interroge alors sur sa qualité historique.
Qu'en est-il ?
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9 roulades :: sans ricochet :: 6693 indiscrets
samedi 30 novembre 2013
Nous vivons une période passionnante. Faute d'avoir des solutions immédiates sur le réel (quand les élections, elles, sont toutes à court ou moyen terme), il faut bien se résigner à l'habiller de mots pour convaincre de sa réussite.
Les gourmands de la langue, à défaut des autres, en ont donc pour leurs impôts.
Je m'avoue complètement fasciné par l'inversion de la courbe du chômage. Le genre de syntagme soigneusement préparé à l'avance pour pouvoir concorder avec toutes les situations possibles.
Qu'est-ce que ça voudrait dire, inverser la courbe du chômage ? Faire une courbe en miroir, avec un nombre négatif de chômeurs ? Changer 3000000 chômeurs en 1/3000000e de chômeur ?
Je ne crois pas que ça ait un sens mathématique, ce qui fait toute l'astuce : on est forcément mené à en faire une interprétation plus littéraire, pour ne pas dire métaphorique. L'inversion de la courbe du chômage, c'est quand ça va un peu moins mal.
Car j'ai essayé de me demander (à dessein sans le secours des économistes, qui ont tous leur petite idée là-dessus), en toute ingénuité, ce que ça pouvait vouloir dire, simplement, pour le français qui vote (moi, en somme).
2000 chômeurs en moins en novembre => 2000 autres chômeurs en moins en décembre => 2500 chômeurs en moins en janvier
C'est évidemment ce qu'on veut essayer de nous faire croire. Et ce serait l'idéal. Mais avec cette formulation, on peut s'estimer satisfait à moins.
1000 nouveaux chômeurs en novembre => 800 nouveaux chômeurs en décembre => 550 nouveaux chômeurs en janvier
Le chômage continue néanmoins d'augmenter. Rien ne permet de dire si la situation est celle d'un retour vers la création d'emplois, ou simplement d'un avancée moins rapide vers la catastrophe : si vous êtes à 200 m du précipite et que vous faites du 20 km/h, passer à 10 km/h ne va vous sauver qu'à très court terme.
1000 nouveaux chômeurs => 2000 nouveaux chômeurs (x2) => 2950 nouveaux chômeurs (x1,5)
Ou encore, comme ici, non seulement le chômage continue d'augmenter, mais en plus le nombre de nouveaux chômeurs chaque mois est plus important que le mois précédent. Néanmoins, le facteur de multiplication du nombre de nouveaux chômeurs baisse d'un mois à l'autre, ce qui fait toujours un événement positif (!) sur lequel communiquer.
Évidemment, tout cela n'est que de l'apprêt communicatif : une situation économique ne se mesure pas à la nécessaire variation de chiffres (davantage ceux du nombre d'emplois que du nombre de chômeurs, au demeurant) d'un mois sur l'autre, mais à une direction générale sur le long terme. Et il est tellement facile de changer une ligne du mode de calcul à telle ou telle échelle (ou de faire des emplois aidés), pour que les données soient grandement altérées.
Par ailleurs, indépendamment de cette sémantique chiffrée, il possible de segmenter le nombre (il a été question de l'inversion de la courbe du chômage des jeunes – pourquoi pas la courbe du chômage des membres honoraires de l'Amicale Laïque du Point-de-Croix de Saint-Léon-sur-Vézère sud ?) voire d'ignorer les paradoxes économiques (baisse du nombre de chômeurs, mais augmentation du nombre d'emplois détruits).
Bref, le réel étant désespérant, l'action impossible et les chiffres incertains, les mots habillent le monde. La situation est triste, certes, mais son spectacle peut être jubilatoire.
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dimanche 27 octobre 2013
Cela n'a pas toujours été abondamment relevé dans les journaux européens, mais la crise aux États-Unis a menacé très directement les institutions artistiques. Le modèle, fondé sur le mécénat, est instantanément soumis aux fluctuations de richesses, contrairement aux budgets institués par la collectivité publique, dont il faut discuter puis voter la suppression, et qui disposent d'une inertie (au sens cinétique) rassurante, garantie d'une certaine stabilité.
Le New York City Opera, institution beaucoup plus modeste (et sensiblement plus audacieuse) que le Metropolitan Opera, et qui faute de prestige draine beaucoup moins les sympathies des riches mécènes, l'a ressenti vivement ces dernières années.
Depuis 2003, les difficultés financières s'accumulent. À l'automne 2008, avec des effectifs déjà réduits au minimum, il avait dû annuler la venue et les projets de Gérard Mortier, trop coûteux – ce qui nous a entre autres privés d'une reprise d'Einstein on the Beach dans la production de Wilson, d'un nouvel opéra de Glass sur Disney (ô désespoir !), d'une adaptation de Brokeback Mountain pour Wuorinen, d'une version de concert d'Anthony and Cleopatra de Barber, et de la première scénique américaine de Saint François d'Assise de Messiaen. Mortier souhaitait rénover l'acoustique de la salle et enhardir la programmation. Tout cela à partir d'un budget de 36 millions de dollars (source : Los Angeles Times en 2008) – ce qui représente, à date égale, une somme plus petite qu'à peu près n'importe quelle maison d'Opéra en France, et environ un dixième du budget de l'Opéra de Paris.
Mais l'argent manquait malgré les licenciements et restrictions ; tout a été annulé. Mortier, lui, s'est sans difficulté trouvé une solution de repli (Madrid, en l'occurrence).
En 2011, le NYCO quitte sa salle habituelle au Lincoln Center – résidence également du Metropolitan Opera, du New York City Ballet, du New York Philharmonic Orchestra –, à cause de coûts fixes trop élevés (source : New York Times). En 2012, le chœur et l'orchestre perdent 80% (!) de leur salaire.
Or, il y a à peine quelques jours, le New York City Opera vient d'annuler sa saison et de se déclarer en faillite. Il manquait 7 millions de dollars pour soutenir la saison (source : Business Insider), ce qui n'est pas énorme pour une telle institution ; pourtant la situation était si désespérée qu'une page Kickstarter avait été ouverte en vue de collecter 1 million. Kickstarter est l'un des sites de référence du crowdfunding, qui ne valide les dons que si la somme définie pour mener à bien le projet est atteinte : ce n'est ni plus ni moins qu'un appel à la générosité publique. 301000 dollars ont été offerts (source : Wall Street Journal). Pas assez.
Et pourtant, sur la page du projet Kickstarter, Plácido Domingo lui-même est convoqué, rappelant l'importance accordé aux jeunes chanteurs, et comment sa propre carrière en avait, en son temps, bénéficié. Les parrainages les plus prestigieux , les motifs les plus nobles et les arguments les plus émoustillants n'ont pas été épargnés.
... ainsi qu'en témoigne l'artwork de la page.
Au demeurant, musicalement, l'Anna Nicole de Mark-Anthony Turnage est une très belle chose, de l'opéra contemporain accessible, lyrique et expressif, assez dans la veine des post-britteniens/berguiens/chostiens programmés à Covent Garden (où l'œuvre à été commandée et créée, avec Westbroek dans le rôle-titre), un peu comme The Tempest d'Adès, Sophie's Choice de Nicholas Maw, 1984 de Lorin Maazel qui y ont vu le jour, et à proximité Heaven is Shy of Earth de Julian Anderson (création aux Proms en 2006). De l'atonalité douce, pas dépourvue de tension ni de consonance (aussi bien musicale que verbale). Et une belle orchestration assez chatoyante et variée.
Les taux de remplissage, dans cette maison réputée pour ses prix abordables, a même été fort bon pour cette œuvre récente, donnée jusqu'en août dernier. Seulement – et c'est ici que le système de mécénat joue son rôle décisif –, c'était un (très) mauvais choix en interne, du côté du financement.
Car le plus gros mécène de la maison est David H. Koch (des immenses Industries Koch), qui a donné son nom, après en avoir financé la restauration, à la salle du City Opera au Lincoln Center. George Steel (le General Manager, qui avait quelques autres projets passionnants dans sa besace), allant le solliciter pour sauver la maison, s'est rendu compte, sans doute avec horreur, que le mécène avait pour actionnaire à 16% James Howard Marshall II, magnat du pétrole. Ou plutôt ses héritiers, puisque James Howard Marshall II est décédé en 1995... deux ans après avoir épousé Anna Nicole Smith, héroïne de notre opéra.
Or, la lutte assez violente pour la succession a laissé d'assez mauvais souvenirs à la famille du défunt, et l'empathie apportée envers l'héroïne par le livret de Richard Thomas, ainsi que le ridicule général qui frappe les différents personnages, ont dû être (indépendamment même de la désagréable impression de revoir le trépas d'un proche) assez peu agréables aux héritiers. Le New York Times rapporte (édition du 5 octobre) que David Koch aurait évoqué le lien de cause à effet entre la programmation de cet ouvrage et le déplaisir qu'il causerait à ses actionnaires en continuant de financer la maison.
Quelle ironie... un titre audacieux musicalement, mais choisi pour remplir largement, est possiblement à l'origine de l'arrêt définitif d'une institution déjà en posture délicate.
Voilà qui repose évidemment la question du modèle de financement : on pourrait se dire que le principe du mécénat garantit la conformité de la programmation aux œuvres du public, mais cela explique aussi pourquoi les maisons d'Opéra d'Amérique du Nord répliquent si souvent les mêmes titres, et même les grands classiques du vingtième siècle en sont largement absents – essayez de voir un Strauss rare, un Schönberg, un Berg, un Ligeti, un Henze... le sommet de l'audace se rencontre à peu près avec Le Château de Barbe-Bleue, présent de temps à autre. Et puis les compositeurs anglophones accessibles : Britten, les minimalistes (Glass, Adams) et les « folkloristes » (je veux dire ceux qui écrivent dans un style américain lyrique et assez tonal, comme Previn, Susa, Picker).
Cela induit donc aussi une certaine mollesse conformiste de la programmation, pour ne pas déplaire aux mécènes – qui, du fait de leur métier rémunérateur, ont des responsabilités qui ne leur laissent peut-être pas à tous le temps d'être des esthètes réceptifs aux styles les plus exigeants.
Un fait révélé à son paroxysme par cette anecdote qui, dans une fiction, paraîtrait furieusement invraisemblable : comme par hasard la famille de l'héroïne de la fiction détient justement le capital du bon mécène...
Cela ne résout pas pour autant la question du coût et de la pertinence parfois discutable du théâtre et de la musique subventionnés – qui, en voyant des expérimentations spécieuses et médiocres devant une salle clairsemée, ou tout simplement en ouvrant une brochure du Théâtre de la Ville farcie de références absconses et prétentieuses ne s'est pas senti pénétrer d'une petite ivresse poujadiste ?
Mais cela éclaire assurément sans complaisance le système du mécénat majoritaire.
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mardi 6 août 2013
Il est des moments où une phrase anodine révèle davantage sur une société que toutes les exégèses. Ainsi, il y a quelques jours, en entendant Desmond Tutu rendre hommage à Nelson Mandela :
He makes us feel more tall.
j'ai pris conscience avec une violence particulière du caractère tout à fait éclaté des langues dans cette nation. On pourrait croire que l'anglais sert de ciment entre les autres groupes linguistiques, mais si un archevêque ouvert sur le monde et sans cesse sollicité, anglican de surcroît, ayant fait des études supérieures et même formé comme instituteur, n'a que cette maîtrise rudimentaire, je sous-estimais sans doute le cloisonnement linguistique en Afrique du Sud.
Étonnant comme un tout petit détail syntaxique, sans aucune importance sur le fond, pose une question vive et révèle peut-être quelque chose.
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jeudi 11 juillet 2013
On vous l'a toujours dit, et vous avez toujours cru que les Chinois tête en bas tenaient d'un bizarre préjugé qui négligeait à la légère les réalités physiques. Ou émanaient d'une crainte supersticieuse de la vindicte des Tasmaniens, c'est selon.
Il n'en est rien.
Règle n°1 : on ne peut pas leur faire confiance. Non, pas parce qu'ils sont jaunes et sournois (autre préjugé, veuillez le noter). Mais parce qu'à leurs yeux ceci :
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dimanche 23 juin 2013
Je n'en suis pas sûr ; et le pire, c'est que c'est manifestement le cas depuis très longtemps.
Petit citadin élevé pour partie dans la campagne profonde, je n'avais jamais ressenti aussi nettement, pour ainsi dire dans ma chair, le paradoxe rural.
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samedi 25 mai 2013
Il a déjà beaucoup été question, en ligne et ailleurs, du tweet de Pascal Nègre, patron d'Universal :
Avec Georges Moustaki c'est une des dernières légendes , artiste et poète , qui disparaît ! Ses plus grands succès sont chez Universal ! RIP
On dit moins qu'il avait commencé à s'entraîner quelques heures auparavant, créant un véritable style tripartite (faute d'orthographe au nom concerné en sus).
L'occasion de ne pas participer tout de suite à son lynchage - on se réservera pour le jour où les majors du classique sombreront dans l'abîme ouvert par leur cupidité.
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samedi 18 mai 2013
Je n'ai pas souvent l'occasion d'être exposé à la publicité - du moins en comparaison avec ce que je devrais être, vivant dans la société dans laquelle je vis ; mais cette fois, j'ai pris peur.
Vu par hasard un spot télévisé vantant un jeu Facebook gratuit. Le vertige m'a saisi.
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Le lieu a enfin ouvert, après des années de retard - certaines utiles, comme l'ouverture au public de cette bribe de quartier romain au moment de l'établissement des fondations, qui laisse augurer des vestiges qu'on pourrait retrouver en rasant le centre-ville (pas de l'ordre de Pompéi, mais sans doute un ensemble d'une richesse comparable à Ostie, par exemple). Et ouverture, alors qu'il n'était pas correctement terminé, témoin le parquet pas encore verni et abîmé lors de l'inauguration.
L'horrible Palais des Sports, une des pires acoustiques de la planète - un lieu entièrement gris et bétonné, peuplé de sièges en plastiques, et où le son s'évanouit dès les premiers rangs, devenant une sorte de bruit tout aussi puissant que la source, mais complètement diffus -, peut donc enfin être relégué à l'endroit qui sied parmi les instruments de torture antiques, aux côtés du lit de Procuste et de la chaise à clous.
Fait assez rare pour être relevé, la salle reçoit son nom d'un compositeur vivant - Henri Dutilleux. Au train où allaient les choses, je devine que quelques-uns auront craint une ouverture posthume - et son âge n'est pas en cause !
L'événement ne peut être correctement commenté qu'après avoir éprouvé les qualités du nouvel espace, dans différentes condigurations. C'est pourquoi il est temps à présent. Après avoir entendu divers échos pas toujours concordants, Carnets sur sol a humblement prié un témoin privilégié de nous faire part de son sentiment, après avoir assisté aux premiers opéras, ainsi qu'aux premiers récitals symphoniques et baroques.
Voici ce qu'Olivier Lalorette, auteur du très-clairvoyant site de conseils discographiques Discopathe Anonyme, nous écrit. Nous ne saurions trop le remercier pour avoir assumé cette mission périlleuse malgré ses exigeantes activités :
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mercredi 10 avril 2013
Une brassée d'amusettes trouvées dans les journaux et sur la Toile, qui auront peut-être échappé à mes honorables lecteurs.
Bizarreries, bien public et bonne musique sont au programme.
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mercredi 3 avril 2013
Extrait de l'oeuvre de Jean-Claude Boulard (maire du Mans) et Alain Lambert (président du Conseil Général de l'Orne, et lorsque député à l'origine de la fameuse LOLF) : la République est peut-être en danger, mais les règlementations n'en rendent pas tout à fait compte.
Ce rapport (dont le dessein de sobriété est excellent) permet de se repaître de douces extases poujadistes autour de la clairvoyance du législateur et des régulateurs, à qui nous confions nos destins (et surtout nos sous). Par les temps qui courent, il n'y a pas de petits plaisirs. \o/
Rapport intégral (oui, on a les lectures qu'on peut pour se divertir) disponible sur le site de l'auteur. Evidemment, c'est moins le détail des recommandations que l'esprit général qui est important, la fin de la mitose des normes baveuses.
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mercredi 6 mars 2013
Non, rien de profond à dire (un peu plus structurant, il y a ceci), mais un brin d'émerveillement devant quelques tendances (respectivement comique, préoccupante et futile).
Hier, à l'occasion du décès de Jérôme Savary, étonnamment relayé avec une certaine abondance dans les médias généralistes :
Bonjour [Quel-qu'ait-été-son-prénom], vous êtes en direct de l'Opéra-Comique.
C'était mardi, 15h. Evidemment la place était vide, on ne pouvait pas même interroger le spectateur ébaubi.
La mode de l'hendécaplex est très sympathique, mais aller jusqu'à dépêcher un journaliste pour couvrir une rubrique nécrologique en direct d'un lieu désert où le défunt ne travaillait plus depuis près de six ans, c'est peut-être pousser le zèle un peu loin.
A l'inverse de cet ultra-professionnalisme, il semble que Twitter soit devenu un alibi formidable pour faire dire tous les gros mots et toutes les outrances qu'on ne peut en principe jamais proférer à l'antenne ou dans les journaux. Le temps passé à lire, ou la place occupée par les captures d'écran, émanant d'anonymes qui ont seulement l'heur de parler avec excès (ou d'avoir la même opinion que celui qui écrit le papier), devient particulièrement pénible.
Il faut dire que c'est commode, par le pouvoir de la citation, on peut traîner les gens dans la boue en donnant en pâture des déclarations à l'emporte-pièce (souvent sans intérêt, et de toute façon pas conçues pour être lues à grande échelle), sans bien sûr n'avoir rien dit soi-même. Le chef-d'oeuvre de la prétérition. Le comble simultané de la complaisance et de la lâcheté.
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