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Robert HOLL - liedersänger, liederkomponist

Plus le temps passe, et plus je m'attache à Robert Holl. Je me suis longtemps demandé - et je persiste à le faire - pourquoi, sans cesse distribué dans les rôles de basse les plus prestigieux de l'oratorio et du répertoire wagnérien à Vienne et Salzbourg, il rencontrait un tel succès auprès des plus grands chefs (Abbado, Harnoncourt, Boulez, Barenboim...), à part pour son étonnante solidité. La voix reste très ingrate, même si on s'aperçoit en regardant le texte, au lieu de contempler sa rustique barbe, que l'interprétation n'est pas dénuée d'intérêt.

Et au fil du temps, la familiarité, l'attachement naissent pour ce chanteur qui ne fascinera jamais les magazines par la brillance de son timbre et l'éclat de son aigu[1]. Une certaine musicalité, avec l'accoutumance, se révèle. Et aussi, lorsqu'on y regarde de plus près, une caractéristique assez admirable : il est l'un des seuls wagnériens aujourd'hui a pouvoir chanter correctement le lied, sans l'écraser sous un volume immense, un timbre dur et des flots d'approximations dans l'intonation. Sans être l'interprète ultime du lied[2], il y développe des qualités de musicalité tout à fait estimables, et son Winterreise que je louais abondamment pour l'accompagnement de Naum Grubert, n'est pas dénué de vertus, à défaut d'être fortement séduisant.[3] A défaut d'être séduisant, peut-être ; il s'agit cependant d'une valeur sûre en termes de musicalité.

Mais je découvre qu'il est également compositeur de musique pour piano et... de lieder ! Et quels lieder ! Dans la droite lignée des viennois décadents de la première moitié du vingtième, une engeance qu'on croyait disparue avec Krenek. On sent bien que la Seconde Ecole de Vienne est passée par là dans certaines discontinuités, certains sauts d'intervalles généreux, certaines 'antithèses' radicales d'accords successifs ; toutefois, le discours demeure tout à fait tonal et lisible, sombre mais juste raisonnablement sinistre. Très bien écrit pour la voix, à ce que l'on devine (je ne dispose pas encore des partitions), mais avec un piano d'une éloquence qui rappelle Medtner, Langgaard ou les meilleurs Korngold et Schreker. Robert Holl ose de superbes interludes au coeur même de cycles (mis à part le prélude et postlude des Poèmes de l'Intermezzo de Heine par Ropartz, je ne connais guère d'audaces de ce type dans un genre où le texte commande) ; il ne s'agit vraiment pas d'un chanteur qui écrit, mais bien d'un compositeur en tant que tel.

Je vous livre celui-ci, qui m'a particulièrement enthousiasmé :


Un des deux Interludes du cycle Frühlingsreise[4] de Robert Holl, par lui-même et Rudolf Jansen au piano.

Pour finir, on remarque que sur sa propre musique, il réalise d'assez belles nuances. Il existe bienheureusement trois disques qui reprennent ses compositions, à savoir les trois premiers volumes des neuf parus dans la Sonder-Edition, dont je donne ici le programme complet :


Robert Holl
Frühlingsreise
Zyklus für Bariton und Klavier
1 Am 17. Februar 1817, dem Geburtstag der Geliebten

2 - Zwischenspiel

3 Nimm mich auf, du Waldeinsamkeit!

4 Reise durch das Wesertal

5 - Zwischenspiel

6 Blick in den Strom

7 Aus "Die Nonne und der Ritter"

  Modeste Moussorgski
Ohne Sonne
Gedichte von Arseni Golenichtchev-Koutouzov


8 In den vier Wänden

9 Du hast mich nicht erkannt in der Menge
10 Am Ende eines vergeblichen Tages
11 Langweile dich
12 Elegie
13 Am Fluße



Hugo Wolf
Michelangelo- Lieder
14 Wohl denk' ich oft
15 Alles endet, was entstehet
16 Fühlt meine Seele

Robert Holl, Rudolf Jansen
1987, Casino Baumgarten, Vienne


Liederabend


Franz Schubert

1

Leiden der Trennung



2

Sonett I



3

Sonett 11



4

Sonett III



5

An den Mond in einer Herbstnacht




Piotr Illitch Tschaïkovski

6

Inmitten des rauschenden Balles



7

Ich habe nie mit ihr gesprochen



8

Die Liebe eines Toten




 




 



 

Modeste Moussorgski





 




 












9

Wo bist du, Sternlein?

10

Die Blätter rauschten ...

11

Brief, am Grabe gesprochen

Alexandre Borodine

12

Zu den fernen heimatlichen Ufern

Robert Holl
Nachtgesänge I - III

13

Nachtlied

14

Schweigen

15

An Novalis

16

Franz Schubert

17

Nachthymne


Robert Holl, Konrad Richter
10 mai 1975, Rittersaal,
Schloß Kirchbert an der Jagst

"Wie ist Natur so hold und gut ... "

 

Johannes Brahms

1

Nachtwandler



2

Ein Wanderer



3

Feldeinsamkeit



4

Mit vierzig Jahren



5

Steig auf, geliebter Schatten



6

Mein Herz ist schwer



7

Sapphische Ode



8

Kein Haus, keine Heimat



 

Hans Pfitzner



9

An die Mark



10

An den Mond



11

Die NachtigalIen



 

Armin Knab









 










 

 

 


 

 

12

Nachts

13

Wanderer

14

Zur Ruh, zur Ruh

15

Amsellied

Robert Holl

16

Im Walzer (Klavier solo)

17

Ein grünes Blatt

18

Herbst (Klavier solo)

19

Letzte Einkehr


Robert Holl, Rudolf Jansen
Juin 1990, Vienne



Parmi sa discographie assez fournie, et sur des domaines souvent très concurrentiels, je recommanderais en priorité son Sachs avec Barenboim, assez complet, même si la concurrence rend sa fréquentation dispensable. Non publié, mais à n'en pas douter cela viendra, un Gurnemanz vraiment bon malgré la qualité un peu ingrate du timbre, bien dit et d'une belle musicalité. La direction allante, limpide et dramatique de Boulez, quasiment debussyste, ainsi que l'engagement des partenaires (Endrick Wottrich, Michelle de Young, Alexander Marco-Buhrmester) et la prestation fabuleuse des choeurs de Bayreuth en font un incontournable. En outre, en l'état de la discographie, c'est-à-dire en l'absence des grands diseurs Alfred Reiter, Cesare Siepi et Martti Talvela dont circulent des bandes radio mais encore aucun enregistrement, les talents de conteur et la rigueur musicale de Robert Holl le font figurer parmi les Gurnemanz recommandables de la discographie. Malgré une étoffe de loin moins séduisante, le discours est plus captivant que celui d'un Gottlob Frick, par exemple.
Les autres enregistrements disponibles à la vente sont, pour de multiples raisons, bien moins engageants - rugosités lassantes dans l'oratorio, accents plus prosaïques en Charlemagne chez Schubert ou en Daland du Hollandais Volant.


Un extrait de l'acte III du de cette version Boulez III de Parsifal (Bayreuth 2004).


En somme, il est par-dessus tout recommandé de découvrir ses propres compositions, dont la valeur intrinsèque est très réelle ; c'est de surcroît le lieu où il brille le mieux.



Notes

[1] Absence d'éclat qui est en soi une malédiction moins grande que l'éclat : le monde entier se détourne en un instant des timbres instrumentaux qui l'ont fasciné aux premières flétrissures. Je l'entendais, encore récemment, de Barbara Bonney ou d'Agnès Mellon. Seconde malédiction de l'éclat : l'absence d'exigence sur la qualité du reste, comme c'est le cas pour Juan-Diego Flórez, qui joue abominablement mal, ne dit à peu près rien, ne nuance à peu près jamais.

[2] Celui-là, tout le monde le connaît.

[3] A tout petit prix, avec d'autres bonnes choses, chez Brilliant Classics. Achetez-le donc en Allemagne, c'est moins coûteux et évite de donner quelques sous au passage au distributeur français Abeille Musique dont les manières sont plus que cavalières.

[4] Non, aucun jeu de mots, pourquoi ?



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