Carnets sur sol

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dimanche 30 décembre 2018

[Sélection lutins] – Les plus belles œuvres pour piano solo – mise à jour n°2


ann southam au piano
Ann Southam au piano.

Une petite mise à jour de la proposition de liste de 2012, pas mise à jour depuis 2013. Vous retrouverez l'ensemble des œuvres ici.

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Mise à jour du 29 décembre 2018 :  ajout de Dupont, Magnard, Ropartz, Mariotte, Wolpe, Protopopov, Zaderatski, Kabalevski, Messiaen, Southam ; nouvelles pièces de Brahms, Koechlin, Mossolov ; arrangements de Wagner.



Les Français entrants disposent d'un sens extraordinaire des atmosphères.
Dupont est en quelque sorte le grand ancêtre, avec la lumineuse ''Maison dans les dunes'' ou les délires morbides des Heures dolentes.
Magnard, pas le plus profond, propose une promenade parmi quelques-uns des plus beaux lieux de balades franciliens (Saint-Cloud, Saint-Germain, Trianon, Rambouillet…), dans une belle écriture typique de son temps.
● Chez Koechlin, j'ai ajouté le très séduisant Nocturne Op.33, mais aussi des cycles pianistiques moins connus que les Heures Persanes : la paix de L'Ancienne Maison de campagne, et les Paysages et Marines, mieux connus dans leur version de chambre, mais qui mettent ici à nu tous les raffinements de leur écriture rythmique et harmonique.
● Le Prélude Dominical de Ropartz est quant à lui une petite merveille, en réalité une suite et non un prélude, dont les harmonies étranges et d'une lumière intense évoquent fortement Koechlin.
● Enfin les cycles de Mariotte constituent également une réelle surprise par leur hardiesse, en particulier les Impressions urbaines, figuralismes de bruits mécaniques transfigurés par la poésie de son univers pianistique – comment ne pas songer au Berlin de Meisel ?

Chez les Russes, il faut bien sûr souligner tout l'intérêt des écritures disjonctives, des strates empilées avec furie chez Protopopov et Mossolov ; c'est un peu moins le cas pour Zaderatski, un peu plus lyrique sans doute (toutes proportions gardées), et presque aussi passionnant. Kabalevski est d'une autre génération, le retour à un calme romantisme presque néoclassique, et pourtant ses pièces, commen souvent (ses symphonies !) ont quelque chose d'immédiatement prégnant, qui dépasse l'apparente simplicité de ses moyens.

Ann Southam est une comprositrice minimaliste. Ses Rivières occupent plusieurs récueils (des « Livres »), toujours sur le même principe des boucles tournoyantes, et pas toujours inspirées ; mais j'aime particulièrement cette Huitième Rivière du Troisième Livre, à la fois très vraie figurativement (des entrelacs de confluent, des enthousiasmes de gave !) et très persuasive musicalement.

J'ai aussi référencé l'une des pièces les plus marquantes de l'étonnant Wolpe (qui naviguait quelque part entre le cabaret d'avant-garde et les langages décadents des compositeurs d'opéra de son temps…), les Messiaen (tout le monde inclut les Regards, mais je fais partie de la petite minorité qui trouve le même charme suspendu et éclatant aux Catalogues d'oiseaux – qu'il ne faut pas forcément écouter en blocs, mais qui recèlent tant de beautés dans les consonances paradoxales des modes extra-tonals employés par Messiaen !), les arrangements de Wagner en indiquant les arrangeurs (en l'occurrence, ce peut changer pas mal de choses, car il faut faire des choix !).



Pour prolonger, vous pouvez aussi vous reporter à cette présentation (incomplète) de grands cycles du piano français, assez absents des concerts et rares au disque, considération la domination germanique assez absolue sur ce répertoire, hors Debussy et Ravel. Et pourtant, il y a là de quoi parler à une tout autre sensibilité, de même qu'avec les Soviétiques…

Et pour davantage de sélections et suggestions d'écoute, un chapitre entier y est consacré sur CSS. Bons voyages !

mardi 25 décembre 2018

L'Histoire de la Musique en schémas – n°6 – grand public & mélomanes


La fin de l'année est une belle occasion pour reprendre notre série de grandes infographies permettant une approche rigoureuse et objective des phénomènes musicaux, grâce à nos diagrammes de corrélation scientifiquement établis.

Les précédents épisodes :

  1. Qu'est-ce qui fait un grand compositeur ?
  2. Audace & renouvellement
  3. Génie & vilenie
  4. Mort atroce & génie
  5. Santé & notoriété

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(Cliquez sur l'image pour l'afficher à la taille de votre choix.)

dimanche 16 décembre 2018

Une décennie, un disque – 1720 – le motet polychoral allemand en gloire


1720


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Singet dem Herrn ein neues Lied
par le Scholars Baroque Ensemble

Compositeur : Johann-Sebastian BACH (1685-1750)
Œuvre : Singet dem Herrn ein neues Lied « Chantez au Seigneur un chant nouveau » (1726 ou 1727)
Commentaire 1 : À mon sens, les motets incarnent le sommet de l'art de Bach, le lieu où sa science contrapuntique sans exemple (quantité de doubles et triples fugues dans ces motets à double chœur) rencontre une sensibilité moins évidente pour moi dans ses œuvres les plus ambitieuses, dont l'objet paraît plus formel. Quelque chose du frémissement des meilleurs moments des Passions intégré dans une hymne à la polyphonie la plus expansive.
    Et au sommet de ce corpus figure Singet dem Herrn, d'une folie musicale étourdissante, mais aussi d'une gourmandise prosodique qu'on ne connaît pas souvent à ce degré chez Bach – les volutes du mouvement d'entrée, les réponses « chantez ! » (les ensembles les plus inspirés utilisent le troisième temps pour faire claquer les « t » finaux de « singet ! » comme cithares et cymbales !), les vocalisations de voyelles et les tourbillons de consonnes, les appuis des entrées fuguées sont très étudiés, et secondent véritablement le texte. Tout en chantant le chant et la danse, le chœur crée du chant et de la danse, invite au chant et à la danse.
    Deux psaumes (149 et 150, Cantate Domino et Laudate Dominum, dans leurs déclinaisons latines habituelles) pour les fugues aux extrémités, avec fusion des deux chœurs dans la dernière. Au centre, une partie apaisée avec un choral sur un cantique de louange (mais évoquant la mort) de Poliander (de 1548, le premier jamais écrit pour le culte luthérien !), auquel répond un chant de type aria, le tout en alternance entre les chœurs (qui chantent tous deux des chorals et des arie). Même la structure générale, donc, alternant les Écritures et les textes de célébration semi-récents, l'homorythmique et le contrapuntique, les groupes séparés et réunins, dit quelque chose du texte, de la religion.
    Je trouve, dans ce corpus, avec le même vertige d'aboutissement formel que pour ses plus grandes œuvres, une générosité avenante, immédiatement accessible et grisante, plus que dans n'importe quelle autre pièce de Bach.

Interprètes : Anna Crookes, Kym Amps (sopranos), Angus Davidson, David Gould (contre-ténors), Robin Doveton, Julian Podger (ténors), Matthew Brook, David van Asch (basses) ; Jan Spencer (violon), Pal Banda (violoncelle), Terence Charlston (orgue positif) ; le tout nommé Scholars Baroque Ensemble, « coordination artistique » par David van Asch  (Naxos, 1996).
Commentaire 2 : Au sein d'une discographie évidemment fort généreuse, quelques critères de choix. Je trouve que le chant à « un par partie » (dont la véracité historique fait l'objet d'âpres débats, et je crois plutôt en perte de vitesse), c'est-à-dire à quatre chanteurs pour un chœur (donc huit chanteurs pour les motets à double chœur, chacun tenant une ligne spécifique) apporte un avantage décisif par rapport à n'importe quelle autre grande version, même à deux par partie : le texte est articulé par un individu et quitte cette abstraction collective, chaque inflexion devient personnellement expressive. Dans les chorals, ce n'est pas spécialement un enjeu, mais dans les fugues, cette singularité des voix (qui rend en outre les lignes plus audibles) a un prix très particulier, que je ne suis pas prêt à céder.
    Cette version, outre d'être très bien chantée et dite, avec une réelle saveur, jouit d'un atout supplémentaire : pas de doublures instrumentales – qui, là aussi, tendent à occulter les chanteurs et à accaparer les couleurs. Seulement une basse continue (violoncelle et positif), et déjà je m'en passerais volontiers – mais il n'existe pas de versions discographiques sans (croyez bien que j'ai activement cherché). Ce qu'on en sait historiquement est, là aussi, en faveur de doublures des parties vocales lorsque des instruments étaient disponibles – et rationnellement, cela rend les lignes plus lisibles et évite aux chanteurs de dévisser dans les parties les plus difficiles solfégiquement. Mais en termes de résultat, celle-ci l'emporte, hymne au Verbe triomphant !
    Seule toute petite réserve : les ténors et surtout les contre-ténors (là aussi, un bon choix pour éviter des femmes dans leurs mauvaises notes, et proposer des timbres bien différenciés) sont un peu pâles, pas très colorés.

Un peu de contexte : le genre du motet
    Le mot de cantate ou de motet ne recouvre pas le même genre selon les aires stylistiques, au début du XVIIIe siècle : les Français ont essentiellement des cantates profanes, les Italiens les deux (les cantates sacrées étant souvent des paraphrases des écritures par des librettistes, façon Brockes-Passion), les Allemands aussi (les cantates sacrées ont une structure en forme de mini-opéra, avec ouverture, récitatifs, airs, chœurs figuratifs, chorals, dans lesquels peuvent se combiner des Écritures et leur paraphrase / commentaire / reconstitution dialoguée).
    Il en va de même pour le motet : il s'agit en réalité d'une composition plus libre, hors de l'ordinaire de la messe. En France, il est presque toujours en latin (en général des Psaumes ou en tout cas des textes de la grande tradition des prières « officielles »), tandis que dans l'Allemagne réformée où exerce Bach, ce sont des pot-pourris de textes tirés des Psaumes, des Épîtres, d'hymnes plus récemment écrites… Qui peuvent être assemblés par le compositeur lui-même – bien que ce point soit sujet à débat chez Bach.
    Les témoignages laissent à penser qu'on en a perdu un assez grand nombre chez Bach. Ceux qui nous sont parvenus et dont nous connaissons l'occasion sont liés à des événements funèbres(obsèques, funérailles, commémorations…).

Alternatives discographiques :
    Mon idéal existe, mais pas au disque. Complètement a cappella par Voces8 lors de ce concert filmé lors du festival de Vaisons-la-Romaine. La vivacité, la typicité des timbres (même si, la aussi, surtout vrai pour les sopranos et les basses), le sens du rythme (ils font beaucoup d'arrangements jazzy, filmiques, etc.), et, donc, l'absence de toute interférence instrumentale, l'émotion verbale et vocale brute.
    Sans surprise, donc, les versions que je trouve les meilleures sont celles à un par partie : le disque de Voces8 précisément, avec les Senesini Players (Signum), que je recommande vivement, une explosion de saveurs (grâce aux doublures instrumentales très réussies ; difficile arbitrage avec le disque Naxos pour cette présentation du disque de la décennie), la seconde version de Kuijken (chez Challenge Classics), celle de Kooij (moins vive), Junghänel (peut-être à 2PP, à vérifier)…
    Ensuite viennent d'excellentes versions en petits ensembles, Norwegian Soloists, Hermann Max ou même en grands chœurs : Gardiner bien sûr, mais aussi, plus étonnants, Sourisse (très, très convaincant), Hiemetsberger (Chœur Sine Nomine), Holten (Radio Flamande)…
    Je ne suis pas là pour dire du mal, mais signale tout de même que, si jamais vous étiez attirés par la promesse de leur nom, Harnoncourt, Bernius, Fasolis, Higginbottom, Jacobs, Reuss, Herreweghe ou Ericson ne sont pas forcément au niveau de leurs meilleurs standards (sans être infâmes, je les ai trouvés un peu trop épais et en tout cas pas tellement touchants). Reuss, Suzuki, Herreweghe II, voire Jacobs (mais attention avec grand chœur, acoustique très réverbérée et exécution un brin molle…) restent cependant très agréablement écoutables, mais je crois qu'on peut réellement trouver mieux, même avec grand chœur.
  

dimanche 9 décembre 2018

Une décennie, un disque – 1710 – l'empire de l'opera seria


1710


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« Venti, turbini, prestate
Le vostri ali a questo piè ! »
Renaud (Vivica Genaux
) court sauver Almirène,
la fille de Godefroy et sa promise, enlevée par Armide,
en commençant par un duel épique contre un bassoniste insolent.


Compositeur : Georg-Friedich HÄNDEL (1685-1759)
Œuvre : Rinaldo
Commentaire 1 : Outre son statut historique particulier (cf. infra), Rinaldo est aussi l'un des meilleurs titres de tout Haendel, et de tout le répertoire de seria. Galerie de tubes très variés et brillants, sur un livret nettement plus caractérisé que la moyenne, qui évite notamment les statismes (et les plaintes omniprésentes…) de Giulio Cesare, son opéra le plus joué avec Alcina. Le rôle-titre est particulièrement bien servi, avec sa rage (« Abbrucio, avvampo » et ses allitérations, « Il tricerbero » en unisson), ses élans (« Venti, turbini » avec concertato de basson), ses éclats (« Or la tromba ») et bien sûr sa grande plainte, une des plus senties de tout Haendel (« Cara sposa »). De même pour les méchants – airs d'Armida avec hautbois obligé, duos de clavecins solos, d'Argante avec trompettes et timbales… À cela s'ajoutent des inhabituelles Sirènes en duo, mage chrétien, symphonies de bataille ; on ne fait pas plus varié dans ce répertoire, et au meilleur niveau d'inspiration.

Interprètes : Vivica Genaux, Inga Kalna, Miah Persson, Lawrence Zazzo, Christophe Dumaux, James Rutherford, Dominique Visse, Freiburger Barockorchester, René Jacobs (Harmonia Mundi, 2003)
Commentaire 2 : Ce n'est à la vérité pas un véritable disque coup de cœur comme les autres, davantage un document incontournable. Mes disques de seria fétiches (Haendel-Ariodante-Minkowsi,Vivaldi-Motezuma-Curtis, Graun-Cleopatra-Jacobs…) renvoyaient tous à des dates où d'autres disques, d'autres genre me paraissaient plus fondamentaux. Mon choix s'expliquera mieux après lecture, plus bas, de la mise en perspective discographique, mais il se résume assez simplement : la version Jacobs est la plus instructive dans le cadre d'un parcours découverte, car les chanteurs exécutent de réelles diminutions très riches lors des reprises (Jacobs les écrit très précisément, à rebours de l'esprit improvisé d'époque, mais cela assure aussi une réelle richesse qu'on ne retrouverait pas si aisément – et à en juger par les traités d'époque, Jacobs, pourtant assez radical, se montre plutôt économe en réalité), et même les instrumentistes dans certaines ritournelles.
    Par ailleurs, pour qui voudrait aborder ce répertoire, la variété des timbres instrumentaux (usage très généreux des flûtes à bec, du violon solos, des archiluths) peut rompre la possible monotonie. Chanteurs par ailleurs remarquables : Genaux, moelleuse et agile comme personne, la jeune Persson, ou encore le timbre délicieux de Lawrence Zazzo (l'un des rares falsettistes dotés d'un minimum de fruité et de diction). Jacobs ajoute aussi quantité d'effets, de bruitages, qui ne sont pas arbitraires mais inspirés des témoignages sur les représentations.
    C'est donc une très belle version, au-dessus de tout reproche, même si, passé l'enchantement de la découverte, je lui trouve un petit côté contrôlé et « studio », guère dansant ni furieux, accentué par la prise de son un peu confortable, qui présente pas les instruments d'époque comme à distance, sans toute leur franchise rugueuse.

Un peu de contexte : a) la naissance de l'opera seria
    Lorsque, à Florence, la Camerata Bardi projette de redonner vie au principe de la tragédie musicale à la grecque, le projet est celui d'une parole mélodieuse, rehaussée de musique pour plus d'expression. Et, de fait, dans les premières décennies de l'opéra, hors quelques ariettes où la musique prend clairement le pouvoir (rien que chez Monteverdi, on peut songer à « Vi ricordi, o boschi ombrosi » d'Orfeo, « Lieto camino » d'Ulisse ou « Pur ti miro » de Poppea), la musique demeure sobre, essentiellement une notation de rythmes et de hauteurs sur une harmonie assez simple, sorte de déclamation codifiée, avec un ambitus et des effets, grâce au chant, simplement exagéré par rapport à la déclamation parlée standard.
    Pourtant, très vite, la fascination pour la voix humaine et ses possibilités (d'ambitus, de couleur, d'agilité) va conduire vers une pente plus hédoniste, jusqu'à devenir l'exact inverse du recitar cantando, une fête purement musicale et vocale, où l'agilité est reine, sur des textes-prétextes où les héros de l'Antiquité et des romans de chevalerie s'expriment dans les mêmes métaphores stéréotypées. Dans un premier temps, la génération de Legrenzi (dernier quart du XVIIe siècle) propose des œuvres où la musique est en même temps plus variée et audacieuse qu'auparavant (témoin l'oratorio de Falvetti que je recommandais pour la décennie 1580).
    Mais, au bout du compte, les opéras d'Albinoni en témoignent dès les années 1690, le XVIIIe siècle voit le triomphe de l'air à da capo (qui persiste jusque dans le style classique et, d'une certaine façon, dans le belcanto romantique) : deux strophes courtes, dont la première, reprise, est ornée de variations spectaculaires (appelées diminutions car les traits sont en général plus rapides et donc les durées des notes plus courtes). Les récitatifs ne sont que des ponts utilitaires destinés à faire progresser l'action, tandis que les airs clos (qui peuvent régulièrement côtoyer les 10 minutes sur 8 vers à partir des années 1730), qui expriment les émotions paroxystiques des personnages constituent le clou du spectacle ; au moins autant à cause de leur virtuosité technique (longueur de souffle ou rapidité des coloratures) que de leur expressivité exacerbée.

Un peu de contexte : b) Haendel à Londres
    Lorsque Händel (Handel pour les anglophones, Haendel pour les francophones) arrive à Londres en 1710, après avoir déjà fait ses preuves en Allemagne et étudié en Italie, Bononcini vient de composer et de faire représenter le premier opéra intégralement en italien jamais donné sur une scène anglaise. Le jeune compositeur propose alors son Rinaldo, dès 1711, qui lui fait immédiatement une place de choix sur la scène britannique, et contribue à y installer le seria italien pour longtemps – puisque c'est paradoxalement par lui que l'opéra en langue s'impose, à partir des années 1730, comme un divertissement de premier plan (il en a toujours existé, mais sans le prestige des productions italiennes, à ce qui m'en a semblé dans mes lectures – je ne suis pas spécialiste de la question).
    Rinaldo n'est pas le seul à emprunter à la matière médiévale, mais il appartient à la minorité d'opéras qui y puisent au lieu des figures historiques de l'Antiquité romaine ou, déjà moins nombreux, mythologiques grecques. Il en existe un certain nombre d'exemples postérieurs (Ricardo Primero, Amadigi, divers Orlando…), mais je ne suis pas certain qu'il y en ait beaucoup avant. En tout cas le livret fut sujet de débat – puisque régidé non à partir de l'original, mais d'une traduction anglaise du Tasse.
    De surcroît, sa matière use d'une source assez récente et non d'un véritable roman de chevalierie (la Jérusalem délivrée de Tasso), qui a déjà fait les beaux jours de l'opéra français (Tancrède de Danchet & Campra – 1,2).

Alternatives discographiques :
    Le choix est assez étendu au disque, et dans de bonnes versions. Pour autant, le choix est difficile. Si l'on laisse de côté les versions anciennes loin du style (où brille par exemple Marilyn Horne, mais dans un entourage moins glorieux, et dans un style qui paraît désormais tellement monumental, assez lourd et plat à la fois), on a vu éclore depuis le renouveau baroqueux un assez solide nombre d'intégrales valables de Rinaldo, sans même mentionner les bandes de concert aisément disponibles.
    Mon véritable coup de cœur va à l'une des premières intégrales d'opéra sur instruments anciens, où je retrouve un esprit similaire au fameux Orfeo de 1969 d'Harnoncourt : certes, on a appris depuis, et fait plus mobile… pourtant il y a là une ferveur, un frémissement de la rédécouverte, une sorte de vérité de l'émotion, du plaisir, qui me rendent cette version plus présente et touchante qu'aucune autre (ou presque, j'y reviens). Malgoire en 1977, avec des grains de voix comme on n'en fait plus : Watkinson, Scovotti, Cotrubas (!), Esswood, Brett, (Ulrik) Cold, Arapian ! La grande réserve pour l'auditeur qui voudrait explorer le répertoire transversalement comme dans cette série, c'est que les da capo ne sont pas variés (et une reprise est même coupée à cause du manque de place sur le vinyle !), ce qui fait perdre de vue l'un des piliers de ce répertoire, la fascination pour la virtuosité et l'inventivité vocales : Malgoire vaut en lui-même comme un merveille, mais je doute qu'il ouvre les portes de la compréhension de ce répertoire.
    Très habité et fonctionnel, Hogwood (avec Daniels, Orgonašová, Bartoli, Fink, Taylor, Finley…), que j'ai écarté un peu pour la même raison : les da capo sont timidement ornés. Plus récent, Kevin Mallon manque un peu de contrastes mais reste irréprochable stylistiquement, et sans falsettistes (c'est son Israel in Egypt qui est fabuleux !). Plusieurs DVDs également (dont Harry Bicket avec David Daniels, très réussi musicalement, mais le visuel bigarré de Christopher Alden peut incommoder, et j'ai essayé de parler de disques ici).
    Il existe cependant une version quadrature du cercle, sans falsettistes (pas vraiment adaptés à ce répertoire, et en tout cas pas du tout les équivalents physiologiques et vocaux des castrats), avec diminutions étourdissantes, chanteurs inspirés, continuo généreux, musiciens survoltés, et un sens du texte sans effet mais toujours électrisant ; Václav Luks, qui a été capté, mais pas commercialisé. La vidéo se trouve néanmoins en ligne, et c'est peut-être par là que vous devriez commencer.
   

dimanche 2 décembre 2018

Tarare de Beaumarchais & Salieri – V – Tarare et les religions


Pour rappel : épisodes I & II (livret, onomastique, création, reprises, place politique), III (pourquoi écouter Tarare ?), IV (impressions après les représentations.

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Esquisse de costume d'Atar pour la création.

Une chose me frappe aussi, dont je n'ai pas fait état jusqu'ici : je ne parviens pas trop à déterminer si Atar est lui aussi hindou, ou musulman. Il est d'abord sultan, donc un titre de souverain musulman, mais les termes orientaux étant utilisés avec beaucoup de libéralité, il pouvait être considéré comme sultan hindouiste par Beaumarchais. Cependant il parle aussi avec beaucoup de distance de la pratique religieuse de ses sujets, et du grand prêtre – « le plus vil animal est nourri de ta main » (je le comprends comme une référence au respect des animaux, dont les porcs).

Cela rajoute une couche de complexité à un tableau très complexe, où il est difficile de déceler une thèse hors de celle explicitée dans le prologue. Certes, Calpigi, chrétien, passe l'opéra à dispenser ses bienfaits et à tâcher de réparer les torts de son maître ; cependant il n'est qu'un personnage secondaire, et c'est un eunuque – donc, on peut le supposer, pas exactement un modèle absolu pour la plupart des spectateurs. Tarare, lui, le modèle de vertu, est hindou, et prie Brahma sur scène (« Ô Brama, tire-moi de cette nuit profonde ») ou l'invoque en sa colère (« Brama ! BramaAAAA ! »). Aux yeux d'un auteur du XVIIIe assez violemment anticlérical (le grand-prêtre est l'emblème du cynisme de tous les gens de pouvoir), une religion aux dieux multiples doit apparaître comme une superstition plus divertissante que respectable, cependant, et on sent bien la sympathie exercée par la figure chrétienne de Calpigi.

Pourtant le royaume est menacé par des hordes d'envahisseurs, qui se révèlent de « sauvages chrétiens » (donc des chrétiens qui pillent et tuent, ou du moins apparaissant en armes plus qu'en charité). Je me demande s'il faut les percevoir comme l'antithèse d'Atar, comme des Européens qui vont apporter les Lumières et mettre à bas la tyrannie… mais le temps qu'ils arrivent, c'est Tarare, qui a fait vœu de les pourfendre, qui est au pouvoir. Alors, vont-ils renverser le souverain éclairer Tarare ? Ou bien va-t-il repousser les chrétiens qui sont alors bel et bien une figure du barbare ?

Ce flou est assez stimulant, et procure des arrières-plans assez riches, très inhabituels à l'opéra. (Quel plaisir aussi qu'un auteur ne nous tienne pas la main pour déterminer le bien du mal, et ce malgré des personnages qui sont clairement des archétypes !)

Indécent décembre


Encore une fois, sélection personnelle dont le ressort est souvent la rareté ou la bizarrerie. Pour une sélection plus transversale et moins triée, l'Offi et Cadences sont assez complets (tout en ratant certaines de mes propositions, considérant les recoins où je râcle des pépites et ma veille généralisée des clubs interlopes). Et bien sûr France Orgue pour les concerts de pouêt-pouêts à tuyaux, ce n'est pas exhaustif, mais de très loin ce qu'on trouve de plus complet !



1. Rétroviseur & remise de prix

Faute de temps, repoussé à une prochaine notule qui les rassemblera dès que possible, peut-être simultanément avec les concerts de décembre. La publication de cette notule ayant pris une semaine de retard par rapport aux prévisions, voici venu le temps des ris, des chants, de la… :



2. Sélection officielle

Cette fois, j'ai tout mis, plus commode pour vous je suppose, sur un PDF avec des pastilles de couleur.

En violet : immanquable.
En bleu : très rare et/ou prévisiblement exaltant.
En vert : tentant (distribution ou rareté).

Et comme je n'ai relevé que ce qui m'intéressait personnellement (et pas tout ce qui m'intéressait, d'ailleurs), le reste aussi est conseillé / conseillable. Comme d'habitude : issu de mon agenda personnel, n'hésitez pas à demander le
sens des abréviations ou les programmes complets.

http://operacritiques.free.fr/css/images/2018_decembre.pdf


26 (novembre)
Bacilly : second XVIIe, auteur d'un traité de chant. Le seul auteur dont nous soient parvenues, je crois, les diminutions écrites pour les reprises des airs. Et elles sont très abondantes et rapides, à un point qu'on n'imagine pas – il faut se figurer Bartoli qui aurait un peu trop forcé sur le Romanée Conti. Une notule lui avait été consacrée à l'occasion d'un précédent concert, en 2010 (un disque a paru depuis).


28 (novembre)
Tarare. Multiples notules, donc celle de mercredi. N'y revenons pas, mais allez-y.

29 (novembre)
Bernstein, Songfest. Recueil de mélodies orchestrales assez lyriques (un brin sirupeuses sans doute, très sympathiques). Couplage avec le Concerto pour violon n°1 de Martinů (pas aussi fondamental que son Premier Concerto pour violoncelle dans ses deux états, mais toujours du bel orchestre à entendre) et un peu de Barber.
Lotti, Giove in Argo. Mieux connu (si l'on peut dire) pour sa musique sacrée (un Requiem en majeur…), plus archaïsante et sophistiquée, c'est ici un opéra seria tendance pastorale. Cela ressemble à du Haendel pastoral ( donc pas le plus grand Haendel). Mais dirigé par García-Alarcón avec les chanteurs du CNSM, ce peut être très bien dans le cadre original du Grand-Palais. C'est gratuit mais ce doit être complet. (Sinon il vous reste la possibilité de solliciter mon intercession. Mandats cash international acceptés,  offres en nature envisageables.)

30 (novembre)
Les Leçons de Couperin par Lombard, Champion et Correas. Très rarement donné pour ténors, et par quels ténors, deux spécialistes, dont Jean-François Lombard, qui n'a pas d'égal dans la musique sacrée française – un vrai ténor, mais qui monte avec souplesse dans des registres habituellement tenus par des contre-ténors (comme s'il bâtissait sa voix pleine à partir du mécanisme léger et non l'inverse).
Déjà entendus dans un programme similaire (avec Poulenard à la place de Champion). C'est un peu loin, mais c'est l'occasion de visiter l'une des extraordinaires églises d'Étampes (même c'est c'est en priorité Notre-Dame et Saint-Basile qu'il faut voir, et qu'aucune église n'est ouverte à la visite le même jour !!).

1er
Musique baroque mexicaine : beaucoup de compositeurs espagnols, tels qu'ils ont pu être joués pour les festivités de l'inauguration de la cathédrale de Mexico en 1667.
→ Inspiré de la pièce d'origine, une version pour un seul acteur du Procès de Monsieur Banquet, dans le château d'Écouen. Gratuit sur réservation (ce doit être complet à présent, j'aurais dû prévenir le mois précédent).
→ Un peu cher pour une œuvre pas si rare (45€ en dernière catégorie, où l'on voit cependant fort bien), mais Pygmalion de Rameau est une merveille absolue, l'Atelier de Toronto de très bonne tenue, le metteur en scène Pynkoski fait de très belles choses avec peu de moyens. Si vous ne connaissez pas, ça se tente.

2
Symphonie n°1 de Zeegant « Chemin des Dames », également une Messe co-écrite avec Karol Kurpiński (dont on donne aussi un poème symphonique « varsovien »), diverses œuvres polonaises et françaises des XIXe & XXe très rares. Pas de la musique très saillante en revanche, de jolies choses très traditionnelles, malgré les sous-titres. Dans l'acoustique infâme de la cathédrale des Invalides, pas persuadé du caractère indispensable de l'expérience.
Marin Marais au théorbe seul. Buraglia a des difficultés de projection, mais c'est un fin musicien, et il n'y aura aucun enjeu de ce genre dans cette petite cave. Réservation indispensable en revanche, microscopique jauge (une trentaine de personnes musiciens compris).

4
Hofstetter fait des miracles hors des répertoires habituels de ce spécialiste du baroque : ses Verdi sont passionnants (très peu de rubato, droit au but, très fins), je suis très curieux de ses Haydn, en plus une symphonie peu donnée.

5
Bernstein & Copland. Très original, avec en particulier la Missa brevis de l'un, le Lincoln Portrait de l'autre (avec Lambert Wilson, qui excelle dans ces exercices de récitant, contrairement à la plupart des autres vedettes qui s'y frottent). Radio-France n'a vraiment pas proposé grand'chose d'original cette saison, mais pour Bernstein, les choses ont été faites très sérieusement.

6
Antigone en ukrainien & russe. Je me méfie assez du théâtre à l'Athénée, où je n'ai jamais eu de bonnes expériences (en général assez statique et expérimental), mais il y a là une réelle motivation à réentendre cette intrigue rebattue sous des apprêts sonores nouveaux !

7
Symphonie n°1 de Méhul par Insula Orchestra & l'Akademie für alte Musik Berlin, sans chef. (Couplé avec la Cinquième de Beethoven). Méhul est souvent désigné comme le Beethoven français, non sans fondement, même si le langage de ses symphonies demeure à la fois plus français (mélodies galantes, ruptures d'une logique plus dramatique que musicale) et plus typé classique. Rarissime en concert, des œuvres assez abouties et qui seront indubitablement très bien servies !
Extraits du Grand Macabre. Pas forcément avenant, discutable san sdoute, mais incontestablement original et déstabilisant.

12
Mélodies finlandaises (Kuula, O. Merikanto, Melartin, Sibelius !), par Galitzine et Dubé (excellents musiciens). Programme rodé depuis plus de six mois, troisième ou quatrième fois qu'il est donné dans cette salle au fil des mois.

13
Rilke-Lieder de Clemens Krauss, le chef d'orchestre créateur d'opéras de Richard Strauss, co-auteur du livret de Capriccio… Il écrivait donc aussi des lieder orchestraux. Certes, reste de programme plus traditionnel, et Petra Lang n'incarne pas forcément la grâce la plus absolue qu'on peut espérer dans ce type de page, mais comme j'ignorais même que cela existât jusqu'à la publication du programme, je me garderai bien de bouder (et j'irai !).
13 & 15
→ Programme de noëls espagnols (Guastavino, etc.) qui n'attire peut-être pas l'attention, mais par le Chœur Calligrammes, putto d'incarnat du meilleur concert deux saisons de suite (!), il faut faire confiance au goût musical très sûr des chefs pour le choix des pièces, ainsi qu'à la qualité de la réalisation des choristes.
13 au 16
Pratthana, spectacle de Toshiki Okada (auteur-metteur en scène de Five Days in March), en thaïlandais. Évocation de l'histoire de la Thaïlande au XXe siècle à travers des scènes sensuelles entre couples devisant. Assez intriguant, mais après avoir trouvé Five Days assez décevant sur l'arrière-plan censé transcender les détails du quotidien (certes, ça parlait de la guerre en Irak, mais juste parce qu'ils traversaient une manifestation pour aller jusqu'au train, sans s'y mêler). Par ailleurs, je trouve que le thaïlandais n'a pas l'empire immédiatement physique du japonais sur des corps d'acteurs, et les extraits disponibles laissent percevoir que ce n'est pas très impérieusement déclamé non plus. Pas sûr que ce soit bien, donc, mais avouer que c'est terriblement tentant.

14
Quintettes de Koechlin et de Caplet aux Invalides… mais à 12h15, donc réservé à ceux qui travaillent à proximité et ont des horaires flexibles, ou aux retraités, ou aux étudiants qui sèchent. Je me demande aussi si le programme copieux annoncé sous-entend l'exécution d'une partie seulement du Quintette du grand Charles.
Le Nozze di Figaro à Massy, par une équipe de jeunes chanteurs de qualité. Rien d'immanquable (pas de chouchous absolus hors Matthieu Lecroart, mais en Bartolo seulement), mais un beau spectacle en perspective. Il y a trois dates. Je n'ai pas vérifié, mais il me semble qu'il s'agit de la production de Saint-Céré, où les récitatifs sont remplacés par des dialogues issus de la pièce de Beaumarchais.
14 & 15
→ Sibelius 2 et Nuit sur le Mont Chauve par l'excellent orchestre Ut Cinquième.
14,15,16
→ « Carnaval baroque » à Versailles, par le duo de géniaux metteurs en scène Cécile Roussat et Julien Lubeck. Pot-pourri de musiques du XVIIe (italiennes surtout, je crois – au moment où cette notule a été préparée, il y a plus d'une semaine, je ne disposais pas d'informations précises sur le programme) par le Poème Harmonique.

15
Quatuor n°1 de Jadin (je n'ai pas noté lequel des deux, mais du classicisme sophistiqué, plutôt hardin, mérite le détour). L'Orchestre de Chambre de Paris est l'un des rares orchestres permanents (probablement le seul en France, en tout cas) à avoir une réelle culture de la musique de chambre, et à tenir son rang dans l'exercice extraordinairement exigeant du quatuor à cordes, très différent de la culture d'orchestre (j'ai toujours été très déçu, comparé à des formations considérées moyennes de quatuor, par le résultat vraiment global des quatuors issus d'orchestres, que ce soit l'Opéra, le National de France, l'Orchestre de Paris…).

16 à 27
Hamlet de Thomas. Chef-d'œuvre qui réussit la conversation d'un matériau spécifique (le drame emblématique de Shakespeare) en un opéra à la française très cohérent et réussi. Il existe une série autour de l'œuvre sur CSS, réunie dans ce chapitre. Distribution au cordeau, comme toujours à l'Opéra-Comique.

19
Cendrillon d'Isouard, suite de la série des contes lyriques explorés par la Compagnie de l'Oiseleur (Le petit Chaperon rouge de Boïeldieu, La Colombe de Bouddha de R. Hahn, Brocéliande de Bloch, La Belle au bois dormant de Lioncourt). Des découvertes fulgurantes (André Bloch !) et à chaque fois des surprises devant des œuvres qui changent notre perception de ce qui était réellement joué à une époque, et qui se limitent, même en sollicitant abondamment le disque, à quelques titres épars, pas forcément représentatifs – car on garde, évidemment, ceux qui sont parmi les meilleurs et/ou ont une certaine personnalité. En exhumant d'autres bijoux qui, pour diverses raisons (conditions de création défavorables, évolution du goût…) n'ont pas pu se maintenir à l'affiche jusqu'à nous, la Compagnie de L'Oiseleur effectue un travail salutaire, d'intérêt public.
    [Ils sont par ailleurs à la recherche de partenariats avec des collectivités, prêts à explorer le répertoire propre à une ville, à une région, à un auteur, à une thématiques… Ils ne bénéficient d'aucune subvention, donc tout contact, tout donateur permettrait, vu les miracles qu'ils font sans aucun financement, outre de vivre un peu plus décemment de leur art, de décupler leur potentiel de défrichage. Denk' es, o Seele.]
    Ce que j'ai entendu d'Isouard, le grand compositeur emblématique de Malte, ne m'a jamais paru jusqu'ici excéder l'ordinaire de l'opéra comique tardif… Mais je n'ai pas lu cette partition, et ce ne serait pas la première fois que je serais surpris par les trouvailles de L'Oiseleur (témoin le récent Massé, un coup de tonnerre dont je parlerai très prochainement, dès que j'aurai pu en enregistrer quelques extraits).
    Distribution de voix amples et sonores, assez différentes des voix plus fines présentes dans les dernières productions ; pas mon esthétique, mais enfin, de grandes professionnelles (Marie Kalinine !) à qui l'ont peut faire confiance pour la maîtrise technique… et évidemment l'engagement, toute cette entreprise philantropique étant largement, pour les interprètes, à fonds perdus.
Programme de Noël baroque français avec l'ensemble de Reinoud van Mechelen. Ce qui est un peu rond et homogène pour moi à l'opéra ou dans les cantates peut bien fonctionner, surtout dans l'acoustique diffuse de la Chapelle Royale. (N'hésitez pas à regarder les tarifs, Versailles n'est pas hors de prix – 25€ en dernière catégorie, qui reste décente, ici, et il existe même moins cher pour d'autres concerts.)

20
→ Aliénor Feix, voix peu ample mais très adroite dans le lied, dans un programme original et grisant : Donizetti, Tchaïkovski, Cilea, Zemlinsky, Hahn, Schreker, Lili Boulanger, Séverac, au milieu de choses plus traditionnelles, Mozart, Schubert, Duparc, Fauré, Poulenc… Le midi.
→ Déambulation dans Orsay avec des micro-concerts des lauréats de la Fondation Royaumont… des valeurs extrêmement sûres.
Les Fâcheux de Molière avec musique de scène à la Sorbonne.
→ Un nouveau concert du duo Gens-Manoff. Très, très hautement recommandable pour le programme comme l'interprétation – c'est en revanche un peu cher pour du récital de mélodies. Enfin, pas cher si on a l'habitude des premières catégories dans les grandes salles, mais cher si on a l'habitude de prendre de l'entrée de gamme… 35€ tarif unique.
20 jusqu'à janvier
Opérettte Azor de Gabaroche. De l'opérette très légère, avec accompagnement façon mickeymousing, ce devrait être parfait pour les fêtes de fin d'année.

21,22,23
Marivaux, Le Triomphe de l'Amour mis en scène par Podalydès. La recommandation tient au fait que c'est Christophe Coin qui assure la musique, et que ses montages dans La mort de Tintagiles étaient l'une des choses musiques les plus bouleversantes que j'aie entendues… Évidemment, ici, il ne pourra pas se reposer sur la beauté du répertoire Bartók-Kurtág pour violon-violoncelle, mais on peut lui faire confiance pour laisser beaucoup de place à la musique, et de façon intelligente.

4-5 janvier
Star Wars IV & V en ciné-concert, c'est-à-dire l'intégralité de la musique jouée, par l'ONDIF en plus !  L'occasion de s'immerger complètement dans les inspirations prokovio-richardstraussiennes de John Williams, et d'entendre enfin tous ces détails masqués par le bruit des dialogues et bruitages, et pas reproduits sur disque (enfin, cela dépend des épisodes). J'aurais bien signé pour une version avec le film en muet, craignant que la sono ne concurrence un peu trop l'orchestre – moi je serais venu, même et plus encore sans la projection !  Mais en attendant une proposition conforme à mes souhaits, une grande symphonie sur les motifs de Star Wars, voire un opéra, ou simplement des portions musicales qui excèdent les tubes et les Suites d'orchestre existantes… je m'en satisferai très bien.

… et toutes les autres choses qui apparaissent sur l'agenda. Remplissez votre fin d'année, ainsi qu'on en fait sur l'Avon, comme il vous plaira. 

David Le Marrec

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