Goût parfait - le lied avec orchestre ?
Par DavidLeMarrec, jeudi 17 septembre 2009 à :: Poésie, lied & lieder - En passant - brèves et jeux - Discourir - Genres :: #1356 :: rss
Ecoutez bien jusqu'à l'accordéon final... Et encore, on vous a épargné la guitare électrique (sans saturation) de l'introduction.
Le projet est intéressant, mais pas sûr que ça fonctionne. A force de tout explorer, la sensation de bricolage guette.
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Par ailleurs, le retour en grâce des arrangements orchestraux de lieder a quelque chose d'un peu absurde par rapport à l'essence de ce genre :
- soit une rencontre sans fard entre un texte et un compositeur, une badinage occasionnel ;
- soit un laboratoire personnel d'innovations diverses.
L'arrangement pour orchestre permet certes de toucher un plus vaste public et de faire briller des chanteurs célèbres (particulièrement lorsque leur format est un peu lourd pour se plier aux nuances d'un concert avec piano solo). Cependant il fait perdre le relief du piano au profit d'une pâte nettement moins évocatrice, plus grandiloquente. Il y a alors comme une distorsion entre l'esprit de la composition et son arrangement. Et, pour moi en tout cas, ça fonctionne mal, même avec des orchestrations talentueuses dans le genre de Reger.
C'est peut-être un biais important dans mon ressenti ; néamoins il me semble que concernant le lied, sans condamner le moins du monde la transcription vu ce que l'on sait à présent, l'ajout d'un orchestre change vraiment quelque chose de sa nature profonde.
Le lied avec orchestre est d'ailleurs un genre au cahier des charges assez distinct, où la musicalité et la qualité des lignes l'emportent sur le sens. Tous ne sonnent pas bien au piano solo : les Berg sont plus saillants encore lorsque réduits, les Strauss sonnent bien même sans orchestre, mais les Schreker, alors qu'ils étaient eux aussi initialement conçus sans visée orchestrale, gagnent considérablement - peut-être parce que leur écriture vocale s'apparentait déjà beaucoup au genre du lied orchestral.
Cela va aussi de pair avec l'évolution du lied, d'abord romance presque populaire (Mozart à Beethoven), ensuite rapport privilégié entre un poète et un compositeur (Schubert à Wolf - si on est généreux), enfin lieu d'expérimentations radicales, ou en tout cas prétexte à un épanouissement musical pur. Les Frühe Lieder de Webern, par exemple, prévus pour piano et chant seulement, chefs-d'oeuvre absolus de l'histoire du lied, entretiennent finalement un rapport (relativement) lâche, malgré leur poésie intense, avec les textes mis en musique.
Disons donc que le lied et le lied orchestral sont tout de bon deux genres distincts ; ou alors que le lied change à nouveau de nature après 1900, comme il l'avait fait après 1800. Comme on voudra.
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Vous avez écouté :
Hans Zender, Die Winterreise - Eine komponierte Interpretation
(« Le Voyage d'Hiver - Une interprétation composée »)
Hans Peter Blochwitz et l'Ensemble Modern, dirigés par Hans Zender lui-même (ESM). Il existe une autre version commercialisée, avec Christoph Prégardien et le Klangforum Wien dirigés par Sylvain Cambreling (Kairos), qui me paraît moins réussie, aussi bien concernant le tranchant de la direction que la poésie de l'interprète.
Chef et compositeur très intéressants par ailleurs, à l'esthétique à la fois sèche et assez généreuse. Ses Lô-Shu contemplatifs, quelque part entre Webern et Takemitsu, sans être les oeuvres les plus originales du monde, méritent d'être entendus.
Commentaires
1. Le samedi 19 septembre 2009 à , par Wolferl
2. Le samedi 19 septembre 2009 à , par Insula dulcamara :: site
3. Le samedi 19 septembre 2009 à , par DavidLeMarrec :: site
4. Le samedi 19 septembre 2009 à , par lou :: site
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7. Le samedi 19 septembre 2009 à , par DavidLeMarrec
8. Le samedi 19 septembre 2009 à , par Papageno :: site
9. Le samedi 19 septembre 2009 à , par DavidLeMarrec :: site
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