Où se situe Magdala ?
Par DavidLeMarrec, dimanche 22 janvier 2006 à :: Discourir :: #138 :: rss
Marie-Madeleine aurait tout pour l'opéra.
Ses deux facettes principales, l'impudeur charnelle et la pudeur lyrique, sont exactement ce que peut apporter le genre opéra.
Pourtant.
Elle est à la fois peu traitée par les librettistes et compositeurs (sujet glissant, sans doute), et, lorsqu'elle l'est, bigrement spiritualisée et affadie.
Je passe sur les oeuvres religieuses, comme Maddalena a piedi di Cristo de Caldara - qui présente conceptuellement les postulats qui se disputent Marie-Madeleine, à savoir l'amour charnel et l'amour spirituel.
Exemples ?
La Marie-Madeleine de Massenet, créée le 9 février 1903 à l'Opéra de Nice et reprise un siècle plus tard à Rome par Caballé, l'année de son retrait des scènes. La dimension toute élégiaque de la ligne, la pudique orchestration (qui rappelle les Nuits d'Eté et le Requiem de Berlioz) conviennent à merveille à ses moyens d'alors. Personnellement, j'aime beaucoup.
Le vase de parfums, de Suzanne Giraud sur un livret d'Olivier Py (2004, je crois). Je n'en ai entendu que de très brefs extraits à la radio. Je n'ai pas été très convaincu, parce qu'on sentait hélas le mal de l'opéra contemporain, à savoir la fragmentation du texte jusqu'à l'inintelligible, mais impossible d'émettre un avis valide avec si peu.
Le livret s'inspire vraiment de la lecture catholique, tout en l'assouplissant. Suzanne Giraud s'est défendue de pas mal de réserves sur le livret en expliquant les potentialités qu'il contenait et dont elle avait pu se servir.
Mais, dans toutes ces oeuvres, religieuses ou profanes, Marie-Madeleine, comble de l'ironie, devient, au prix d'un certain non-sens, une sainte des plus éthérées, en proie aux plus profonds vertiges métaphysiques, à la mélancolie la plus sainte. C'est presque son amour pour la réflexion théologique qui la mène, inévitablement, à voir Satan (de très loin, en tout bien tout honneur - un peu comme Méphisto qui épouvante Marguerite à l'église).
C'est moins vrai chez Py/Giraud, certes, mais tout de même...
Donc, même s'il y a une littérature opératique marginale autour de Marie-Madeleine, il reste encore beaucoup à faire.
Apparemment, on préfère Salomé, qui ne pose pas les mêmes problèmes, du fait de son statut de repoussoir. On peut la représenter complaisamment sans risquer d'attenter à quoi que ce soit - même pas à la pudeur, puisqu'on vous dit que ce qu'elle fait est mal...
Commentaires
1. Le samedi 28 janvier 2006 à , par Philippe[s]
2. Le dimanche 29 janvier 2006 à , par DavidLeMarrec
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