Puits sans fond
Par DavidLeMarrec, mardi 20 décembre 2011 à :: Citations passantes - Littérature - Vaste monde et gentils - Poésie, lied & lieder - Musiques du vingtième siècle :: #1882 :: rss
Un peu d'actualité.
A Grecian lad, as I hear tell, / Un gars en Grèce, comme on m'a dit,
. . One that many loved in vain, / Un gars du genre à se faire adorer,
Looked into a forest well / A jeté un oeil dans une source de la forêt,
. . And never looked away again. /Et ne l'a jamais retrouvéEt ne s'en détacha jamais.
Alfred Edward Housman (1859-1936), A Shropshire Lad ; tiré de la seconde strophe du poème « Look not in my eyes ».
Trois bonnes raisons pour le citer.
1) Le ton de naïveté très rafraîchissant de l'ensemble du recueil mérite vraiment la lecture. L'anglais n'en est pas bien difficile, donc il est conseillé d'éviter les traductions qui pourraient affaiblir sa malice et ses raffinements. Par exemple, en accentuant délibérément le côté désinvolte du texte, j'ai trahi le ton du deuxième vers, qui regarde clairement vers une poésie plus classique, ce qui augmente encore le nombre des décalages multiples présents dans cet extrait ("Aimé de beaucoup en vain" aurait été plus exact, à défaut de rendre le ton élégant de l'anglais à ce moment-là).
2) L'occasion de mentionner sa fréquente mise en musique : Lennox Berkeley, John Ireland (A Grecian Lad, pièce pour piano solo où ce quatrain figure en exergue) et bien sûr George Butterworth (Songs from « A Shropshire Lad »). Ce à quoi il faudrait ajouter, pour d'autres extraits du recueil, Moeran, Grier, Orr - pour s'en tenir à ceux qui sont aisément disponibles au disque, sans quoi on pourrait encore étendre la liste à Cripps, Sumsion, Raynor, Branson, Williamson ou Thaddeus Gorecki...
Le cycle de Butterworth doit être, avec les Songs of Travel de Ralph Vaughan Williams (et les Shakespeare de Korngold ?), le cycle de mélodies de langue anglaise le plus enregistré, à juste titre au demeurant, l'ensemble est fort beau. On en avait déjà touché un mot ici.
3) Enfin, lire cela aujourd'hui est assez piquant, tant l'impression que la tardive vertu grecque & associée ne fait que plonger chaque jour plus complètement l'ensemble du groupe des vertueux dans le puits sans fond d'un engloutissement sans cesse repoussé à demain. [Et si quelques-uns ont bien suggéré de renverser la table, personne ne semble concevoir de renverser une source, ce qui serait assez exotique en effet.]
Pour le plaisir, le poème complet :
Look not in my eyes, for fear
. . They mirror true the sight I see,
And there you find your face too clear
. . And love it and be lost like me.
One the long nights through must lie
. . Spent in star-defeated sighs,
But why should you as well as I
. . Perish ? Gaze not in my eyes.A Grecian lad, as I hear tell,
. . One that many loved in vain,
Looked into a forest well
. . And never looked away again.
There, when the turf in springtime flowers,
. . With downward eye and gazes sad,
Stands amid the glancing showers
. . A jonquil, not a Grecian lad.
La chute est vraiment charmante.
Version recommandée :
Roderick Williams et Ian Burnside (Naxos). Comme le texte anglais (seul) n'y est accessible que sous forme numérique, en principe ; on peut aussi se tourner vers une autre très bonne version Thomas Allen / Malcom Martineau, chez le label Wigmore Hall, où le texte est présent sous forme physique, et traduit en allemand et en français. Il doit exister peu de versions avec traductions françaises, je suppose (anglais seulement chez Chandos aussi).
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