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L'art de bien huer Alvis Hermanis


Commis l'erreur (en réalité, pas trop le choix pour diverses raisons) de réserver pour la première de la Damnation de Faust mise en scène par Hermanis.

Jamais entendu des huées pareilles, même en retransmission – les manifestations lors de la création de Déserts paraissent le fait de fractions nombreuses, mais localisables, du public. Aux baissers de rideau, des clameurs immenses (des dizaines de gens, au bas mot) couvrent largement les applaudissements. (Je mettrai un extrait pour vous le prouver quand j'aurai un instant.) Les insultes fusent à travers les balcons entre les spectateurs qui veulent les faire taire et les autres qui leur répondent, diversement subtiles.

Pendant le solo de cor anglais (magnifique en plus, des articulations très « vocales », préfigurant le texte, alors que je trouve d'ordinaire les vents de l'Opéra un peu pâles), les déjà fameuses projection de bisous d'escargots suscitent des huées (et des rires nerveux encore plus nombreux) sur le solo. Oui, je répète, sur le solo de « D'amour l'ardente flamme ». On se demande un peu pourquoi les gens se déplacent, s'ils tiennent à gâcher les moments de bravoure qui ont sans doute motivé leur venue… Parce qu'autant je doute que beaucoup partagent ma vénération pour le récitatif a cappella « À la voûte azurée », autant ce solo de cor anglais, on pourrait l'utiliser pour vendre de la lessive, il a tout pour fédérer le néophyte impressionnable comme l'esthète blasé.

De toute façon, vu le nombre et la projection des « hou », voyelle délicate (elle n'était pas déformée par une couverture excessive, c'étaient de vrais « hou » légèrement mixés, hommes essentiellement), je me figure que beaucoup choisissent la première à dessein pour bénéficier de leur petit frisson de corrida – discipline pour laquelle j'ai plus de respect au demeurant, vu son inscription dans des codes (profondément discutables, mais destinés à exalter et non à flétrir). La corrida pose beaucoup de questions sur la cruauté ; huer, c'est juste malpoli.

C'est vraiment la seule raison de choisir une soirée de première, de toute façon, parce que comme d'habitude l'orchestre est mou, les accompagnements de récitatifs largement décalés, et le détail est étonnamment peu propre pour un orchestre de cette trempe (et qui a joué combien de fois cette partition !). Dans les dernières, c'est le contraire en général : ardent, coloré, et d'une précision instrumentale fulgurante. Certes, on ne peut pas se pavaner en en ayant dit du mal avant tout le monde, néanmoins ça me semble un plaisir (réel mais) secondaire par rapport à la qualité de la musique entendue.

Le pays est à feu et à sang, l'armée est au loin sur des territoires qu'elle ne pourra quitter pendant des décennies, le chômage renverse la courbe des records, les libertés sont tour à tour suspendues par les élus de la Nation, on remet les clefs du territoire aux héritiers toujours racistes de la collaboration, on se prépare au pire casting présidentiel de tous les temps (depuis le choix entre Pétain et Pétain), on perd la jeunesse dans les trafics de rue et les théories du complot du Net, on ne se lève plus dans le métro pour les aînés, l'hiver arrive, on vend des cannelés en plastique dans les supermarchés, ma boulangère n'a plus de jésuites… et il y a des gens dont le loisir est de s'indigner pour une mise en scène ratée. Les ressources de l'oisiveté (et du mauvais caractère humain, ou du moins français) n'ont semble-t-il pas de limites. Bande de no life.

Alvis Hermanis a plus d'élégance et ne salue que très brièvement ; sans pavoiser, laissant les musiciens récolter les bravos.

Je peux en un sens m'expliquer ces huées, cela dit : le propos fait certes écho à l'œuvre (ainsi les follets séducteurs), mais de façon très lâche… on peut très bien trouver que ça n'a rien à voir – et, de fait, la superposition est assez arbitraire (et nécessite tout un résumé vidéo avant la première note de musique !). C'est le seul cas où je peux concevoir la justification de huées (goujaterie insigne) : si, vraiment, il existe une volonté délibérée de flétrir l'œuvre, de ne pas faire le travail (pour le Roi Roger de Warlikowski, la question pouvait sérieusement se poser)… et ici, même si ce n'est pas mon avis, une partie du public a pu le sentir ainsi. « Quel rapport ? » criaient certains. Je crains néanmoins que ce soient plutôt la laideur, le propos en décalage avec la littéralité et la semi-nudité qui aient motivé cette explosion de haine – quelle étrange fantaisie que de payer une place au spectacle, après une journée de labeur, pour s'offrir de telles émotions…

Cela dit, on n'égalera pas de sitôt le record de l'écœurement de cet épisode désormais fameux où le président d'une association contre la pauvreté des enfants, à l'origine du concert, se fait huer parce que son discours est jugé trop long. Ma tendresse (vaguement condescendante, je l'admets) pour les confréries glottophiles a grandement décru ce jour-là.

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Sur le contenu lui-même ?

Pas de quoi casser trois pattes à un mouton malformé. Tout part d'un présupposé simple : Hawking retrouve son agilité à grâce au projet de colonisation martienne, nouveau Faust. Les chœurs sont des laborantins qui font des expériences sur des humains en cage, le tout assorti de textes formulant un prêchi-prêcha simpliste sur la nécessité d'envisager Mars comme solution à nos problèmes terrestres.

Pourquoi pas. Outre le fait que la progression de l'histoire visuelle reste toujours parallèle (et donc distante, peu touchante) à l'intrigue racontée par le livret, cela pose quand même au moins deux problèmes :

¶ l'agitation parasite l'attention sur la musique. Elle n'est pas du tout calibrée sur l'intensité musicale, si bien que le regard est inutilement sollicité à des moments où l'ouïe devrait primer, sur des climax ou des détails importants. On est obligé de ne plus regarder la scène pour suivre correctement l'intrigue et la musique ;

¶ la direction d'acteurs est fort pauvre ; les tableaux sont tous illustrés avec des danseurs, des dispositifs divers (pas trop mal faits et plutôt variés), mais les personnages restent à l'avant-scène quasiment immobiles, à commencer par le prestigieux danseur dépêché pour… tenir le rôle de Hawking dans son fauteuil (certes, il se lève vaguement à la fin). On devrait, décidément, interdire aux metteurs en scène d'utiliser des décors tant qu'ils n'ont pas fait leurs preuves sur plateau nu. Je ne plaisante pas.

Au demeurant, ce n'est pas très dérangeant. Inutilement distrayant, mais pas très nuisible, vraiment.

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Côté musique, le résultat est convaincant, en admettant le principe d'une distribution très internationale – il ne faut pas en attendre des émissions claires et des dégradés mixés, évidemment. Le français est bon, même si le lieu de son articulation n'est pas du tout typique de l'équilibre français (normalement assez antérieur), en particulier Terfel dont l'émission est toujours aussi grimaçante (nasalité de méchant, mais il fait pareil en allemand, c'est même légèrement pénible dans le lied).

Kaufmann, pas forcément le plus adapté au rôle mais constamment nuancé, donne surtout sa mesure dans « Nature immense », où son autorité naturelle fait merveille (et les aigus sont spectaculaires). Le contraste est piquant avec Terfel, qui sonne plus clair (alors qu'il chante couramment Wotan, quand même), doté de véritables graves mais avec un son qui a peu d'assise basse (un vrai baryton, en somme). Mais considérant les années passées à chanter Wagner, les aigus sont toujours là et la voix reste flexible – là encore, pas autant que j'aurais voulu, néanmoins pour passer la rampe de Bastille, chanter Wagner et faire aussi bonne impression dans un rôle aussi souple (même si je trouve ses récitatifs un peu amples et « chantés »), on peut lui garantir notre respect.

Koch opaque bien sûr, mais très frémissante (« D'amour l'ardente flamme » vraiment habité, ce qui n'est pas si facile).

La seule véritable réserve, c'est le chœur, vraiment atroce ce soir : basses baveuses (le début du dernier chœur, un unisson pourtant, était décalé et les timbres s'écrasaient dans une pâte grumeleuse et visqueuse), ténors braillards (pourquoi pas dans le pandæmonium, mais l'aigu final, c'était comme toujours trop fort, déséquilibré), et surtout les femmes – on aurait dit une chorale paroissiale en période de grippe (la justesse en plus, certes). Ça hulule, ça flageole, et bien sûr personne ne semble parler français, les nasales sont affreusement faites.
Le niveau individuel n'est pas en cause ; l'Opéra de Paris a le prestige suffisant pour embaucher les meilleurs. Il serait temps, peut-être, de s'interroger sur la logique de recrutement (voix solistes très sonores saturées en harmoniques) et sur la nature du travail (Verdi essentiellement, si j'ai bien suivi). Un peu de voix mixte, de souplesse (et, c'est dur à dire, des voix de femme moins lourdes ou plus jeunes), avec de l'entraînement de type oratorio. Manière de pouvoir faire des nuances. Ils semblaient un peu s'améliorer, mais ce soir, c'était vraiment hideux – pas catastrophique au sens technique (même si très en-dessous des standards d'une maison de ce niveau), mais vraiment difficile à écouter.

En somme, une belle soirée, mais qui devrait être beaucoup plus intéressante en fin de série, avec un orchestre bien chauffé.

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Mise à jour du 13 décembre 2015 :

Comme promis, la bande son des huées spectaculaires. 



Aux saluts, très courte apparition d'Alvis Hermanis et de son équipe, totalement couverte par les huées. Après avoir manifesté ses remerciements à la fosse et aux plateaux, le metteur en scène repart en coulisse avec les siens, manifestement pour ne pas gêner le succès des musiciens. La bande ne permet pas de percevoir complètement à quel point les applaudissements étaient couverts par les huées, mas on se représente déjà assez bien qu'elles étaient très nombreuses.


Premières franches huées : en guise de précipité, un intertitre entre les parties III et IV. Pendant ce temps, un texte de prêchi-prêcha sur l'avenir martien de l'homme défile, comme au début de la pièce. Vous pouvez aussi entendre quelques échanges délicats, à la gloire du public glottophile, que ma ligne éditoriale de défend de transcrire (mais que l'on entend très bien).


Le pompon : rires nerveux et commentaires pendant le solo de cor anglais. Mais pas pendant le chant, on n'est pas des sauvages non plus, chez les glottophiles : il faut quand même écouter les chanteurs si on veut pouvoir les huer honnêtement.


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Tenez, je retrouve ce petit vade mecum du spectateur, où il est justement question des huées.


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Commentaires

1. Le jeudi 10 décembre 2015 à , par Faust

Bonsoir,

Quelques mots en passant (et en rentrant de l'Orestie ...).

" On devrait interdire aux metteurs en scène d'utiliser des décors (et des animaux ?) tant qu'ils n'ont pas fait (durablement ?) leurs preuves sur un plateau nu ... ". Il m'arrive de rêver de mises en scène d'opéra minimalistes comme cela se fait - parfois avec beaucoup de réussite - au théâtre.

J'approuve pleinement votre proposition qu'il serait sans doute judicieux d'imposer sans délai à Lissner !

La bronca anti-Gégé de la première d'Iphigénie n'était pas mal non plus !

Ma plus grande honte aura quand même été d'entendre le public de l'opéra huer un extrait de la projection (en dehors de toute musique) d'Allemagne année zéro de Rossellini que Warlikovski avait cru devoir insérer avant le dernier acte de Parsifal. Ce soir-là, je n'avais pas trouvé le public de Bastille bien glorieux !

Mais, il ne faut jamais oublier que le public - même d'opéra ... - est aussi une foule et qu'il en a tous les comportements y compris ceux qui sont les plus haïssables.

2. Le vendredi 11 décembre 2015 à , par David Le Marrec

Bonsoir !

Ce que j'ai lu de l'Orestie de Castellucci a achevé de ne pas m'intéresser, mais est-ce que ça vaut quand même la peine à votre avis ?

Je crois que l'absence d'ancrage temporel et de symboles exhibés serait non seulement révélateur des impostures, mais surtout (parce que je ne crois pas que nous ayons majoritairement des impositeurs sur ces scènes) que les metteurs en scène seraient incités à investir pleinement leur talent dans l'essentiel, au lieu de se reposer sur des dispositifs qui attirent l'œil et font les gros titres des pages spécialisées. Le lavomatic, les lavabos et déambulateurs, la chaise roulante à la Défense, les bains de minuit initiatiques, la cuisine RDA, le gorille et Marilyn, la piscine du sacre et les Mickey hallucinogènes, le taureau à cachet, les escargots galants, tout ça marque l'histoire événementielle de l'institution. Évidemment, une direction d'acteurs fine est plus difficile à valoriser dans un plan de communication s'adresser au plus large public. (Un peu de la même façon que les vieux chanteurs, même diminués, continuent à remplir davantage que des jeunes plus en forme mais dont les noms n'attirent pas les mêmes foules. On va toujours voir Dessay, pas encore Dreisig.)

Oui, cette querelle de Parsifal, justement, entre dans les moments célèbres du lieu.

Je crois que c'est pire qu'un comportement de foule, d'ailleurs (même si le nombre, le noir, l'impunité le rendent plus facile) ; ça tient aussi à la psychologie individuelle du spectateur d'opéra – aisément sûr de sa supériorité. Tenez, mon voisin de la Damnation, à qui je ne demandais rien, m'expliquait doctement qu'on ne pouvait pas chanter cette partition en voix mixte dans les chœurs ou que Bryn Terfel était l'absolu du style français, et devant une objection polie, me retorquait que si j'avais écouté, je serais d'accord avec lui. Et lui ne huait pas, c'est dire la force de conviction qui peut résider chez ceux qui le font.
L'anecdote d'Armand Arapian qui avait rencontré des gens même pas intéressés par l'œuvre ou la distribution, venus exprès pour le huer et le décourager de revenir chanter à Marseille, et le lui expliquant très simplement à la sortie des artistes, est assez édifiante sur les profils assez déviants qui peuplent certaines travées des opéras.

3. Le dimanche 13 décembre 2015 à , par Faust

Bonjour

Que vous dire ? En ayant des interrogations similaires aux vôtres, je suis quand même allé voir l'Orestie de Castellucci ...

C'est différent - même s'il y a des convergences - de son Moses. Je me suis vraiment ennuyé avec son Moses. Ce n'est pas le cas avec son Orestie revue et corrigée même si la seconde partie est assez statique et si la première, vers la fin, est moins pesante - pour moi - puisqu'il remplace les bruits divers et variés - ceux des " technologies mécaniques et pneumatiques " comme il l'écrit dans les notes du programme - dont il nous gratifie par des extraits de Tristan ...

Il faut d'abord savoir que ce n'est absolument pas l'Orestie d'Eschyle qu'il met en scène. Il est recréateur de l'oeuvre et metteur en scène. Mais, vous allez me dire que je joue sur les mots car on peut très bien recréer une oeuvre pour mieux l'éclairer ou la comprendre. Si vous lisez les notes du programme, il ne parle d'ailleurs que de l'Orestie d'Eschyle ... Il a tout réécrit et inséré, par exemple, des extraits d'Alice au pays des merveilles (pourquoi pas ?). Mais, il n'y a pas tromperie : c'est l'Orestie (une comédie organique ? ) d'après Eschyle.

Il ne voit dans l'Orestie que violence et cela lui sert d'unique fil directeur pour sa mise en scène. Il présente - plus qu'il ne met en scène, me semble-t-il - des tableaux qui illustrent la perte des différences qui fait qu'il n'y a - selon lui - plus de différences entre l'homme et l'animal. La plupart des actrices et acteurs sont d'ailleurs " monstrueux " ou présentés comme des monstres (ce qui ne signifie évidemment pas que ce sont de mauvais interprètes des fantasmes de Castellucci, bien au contraire !) Il écrit dans les notes du programme qu'il y a " un effet indistinct entre violence purificatrice (sacrifice) et violence impure (délit) ". Je ne suis guère convaincu ...

Je trouve cette vision bien mince et réductrice. Sa conclusion est aussi sans appel : la troisième partie - les Euménides - montre Oreste obsédé par les figures du passé. On tourne en rond.

Comme d'autres metteurs en scène, j'ai un peu le sentiment qu'il définit un concept et qu'il faut, ensuite, que l'oeuvre se plie à ce concept. Sa mise en scène impressionne, parce qu'elle est éprouvante pour le spectateur. D'où le moment de répit que constitue la musique de Tristan (mais, ce n'est certainement pas pour cela qu'il a mis cette musique !).

Je ne sais pas s'il faut le qualifier d'imposteur (c'est peut-être lui faire trop d'honneur ...). Je trouve que sa vision de l'Orestie est plutôt, au final, réductrice et, pour cela, pas très intéressante (disons que cela ne m'a rien appris d'essentiel).

Il est fort possible que je n'ai rien compris au film ! J'observe quand même que les critiques positives mettent principalement l'accent sur les tableaux qu'il présente sur scène plus que sur les significations profondes de l'oeuvre (qu'à mon avis il ne parvient pas à faire ressortir).

J’ai vu par le passé deux autres " productions " de Castellucci : Paradisio, une « installation » à l’église (heureusement désaffectée) des Célestins à Avignon … On faisait une longue queue en plein soleil pour accéder par petits groupes à l'oeuvre du Maître … Il sait parfaitement mettre en scène ses propres mises en scène ... (sans rire, l'Odéon a cru devoir préciser dans le programme de l'Orestie que " des effets spéciaux sonores et visuels sont susceptibles de surprendre les spectateurs " ... ) Je crois me souvenir qu’un malheureux piano trempait dans l’eau dans l’église … L'ensemble n’était pas laid à voir. Mais, tout cela ne servait pas à grand-chose.

Beaucoup plus élaboré : « The Four Seasons Restaurant » inspiré d’Hölderlin et de Rothko au Gymnase Aubanel (pas dans la Cour d’honneur, seulement pour « happy few », bien évidemment !). Il paraît que les trous noirs peuvent faire du bruit. Donc, cela avait été reconstitué et était diffusé : assourdissant (on distribuait généreusement des bouchons pour se mettre dans les oreilles, comme pour l'Orestie de l'Odéon d'ailleurs) et cruel, c’est le souvenir que j’en ai gardé.


En regardant attentivement le programme, je vois que l'Odéon a inventé un nouveau métier dans les équipes de mise en scène : le " conseiller animalier " qui s'occupe donc de la ménagerie convoquée par Castellucci : 6 singes, 2 chevaux et 1 poney (+ le lapin). On peut penser qu'ils sont plus utiles que les " dramaturges " qui, ces derniers temps, fleurissent à l'Opéra de Paris ...


4. Le dimanche 13 décembre 2015 à , par David Le Marrec

Bonsoir Faust !

Merci pour tous ces détails.

Il faut d'abord savoir que ce n'est absolument pas l'Orestie d'Eschyle qu'il met en scène. Il est recréateur de l'oeuvre et metteur en scène.

Oui, c'est ce que j'avais lu dans le programme – sinon, j'aurais peut-être pris une place (probablement pas, mais peut-être). Non pas que je sois un partisan farouche de l'authenticité et de l'exactitude (vu d'excellentes adaptations d'Onéguine, de Guerre & Paix, ou des versions modernisées, réduites, etc.), mais ce type de retouche est général à la fois fantaisiste et inférieur à l'original.


Il présente - plus qu'il ne met en scène, me semble-t-il - des tableaux qui illustrent la perte des différences qui fait qu'il n'y a - selon lui - plus de différences entre l'homme et l'animal.

Hé bien, entre le prêchi-prêcha extra/exoterrestre de Hermanis et ces profondes assertions sur l'évolution de la nature humaine, les curetons des idéologies font un grand retour ! Ça ne fait pas envie, effectivement.


Comme d'autres metteurs en scène, j'ai un peu le sentiment qu'il définit un concept et qu'il faut, ensuite, que l'oeuvre se plie à ce concept.

Oui, c'est hélas souvent le cas… et les œuvres sont parfois têtues, n'est-ce pas… Cela dit, Castellucci ne ment pas sur la marchandise, il est présenté comme plasticien, ce qu'il fait tient en général davantage du dispositif que de la mise en scène, ce qui est une forme d'art en tant que telle, assez distincte du théâtre (et qui m'intéresse moins, ce qui ne veut pas dire qu'elle soit moins légitime).


le " conseiller animalier " qui s'occupe donc de la ménagerie convoquée par Castellucci : 6 singes, 2 chevaux et 1 poney (+ le lapin). On peut penser qu'ils sont plus utiles que les " dramaturges " qui, ces derniers temps, fleurissent à l'Opéra de Paris ...

Je ne vous voyais pas si méchant ! :)

Je me figure, moi, que les dramaturges sont plutôt des nègres pour metteurs en scène surchargés, un peu comme les « orchestrateurs » à Hollywood et dans les productions grand public. Mais je suis peut-être méchant moi aussi.


Merci pour tous ces détails, beaucoup plus parlants que ce que j'ai pu lire jusqu'ici (sous forme abstraite et lyrique…).

5. Le dimanche 13 décembre 2015 à , par Faust

Je ne sais si j'ai raison ou non ! ce n'est qu'un avis parmi d'autres. Je crois que son idée de base est fausse : la crise sacrificielle ramène la paix. Je reprends ici les analyses de Girard que je crois beaucoup plus justes. Or, si je comprends bien ses notes de mise en scène, il met tout sur le même plan.

Je me trompe peut-être sur le rôle exact des dramaturges. On vit dans une société où les " experts " sont rois. Alors, il faut sans doute les affubler d'un titre qui fasse sérieux. Et puis, il se passe des choses un peu bizarres à l'opéra de Paris ces derniers temps ... Mais, avouez que la formule de " conseillers animaliers " est assez drôle !

6. Le lundi 14 décembre 2015 à , par David Le Marrec

Ah, parce qu'il faut lire les notes pour suivre, en plus ! Pour un opéra, c'est dommage, mais pour une pièce de théâtre, c'est un peu une faute professionnelle, non ?

Je me trompe peut-être sur le rôle exact des dramaturges.

Tous les entretiens (ou propos sur) des dramaturges que j'aie lus (ou qu'on m'ait raconté) laissent sentir l'absence absolue de contour de ce rôle… Quelquefois, il font vraiment le boulot à la place du metteur en scène (qui cite quelques trouvailles ou fixe quelques lignes, tandis que les recherches et la réalisation sont laissées à ce nègre/assistant/esclave chic) ; d'autres fois, ce sont des copains avec qui le metteur en scène aime bien bavarde, et si c'est payé par la maison qui accueille, pourquoi s'en priver ? Je n'ai moi non plus, cela dit, pas assez de sources pour vérifier tout cela.

Mais, avouez que la formule de " conseillers animaliers " est assez drôle !

J'avoue, comme disent les moins-de-mon-âge.

7. Le lundi 14 décembre 2015 à , par Faust

Bonsoir

Je suis un esprit simple et je dois donc confesser mon incapacité à comprendre les savantes (?) constructions de Castellucci et de quelques autres ...

Si je comprends bien les notes du programme, il me semble être en opposition assez forte avec l'Orestie conçue par Eschyle et ce qu'il tente de reconstruire à partir de là ne me paraît pas très convaincant.

" si c'est payé par la maison " ?

Mais, enfin, c'est vous et moi qui payons pour l'essentiel ces personnages qui me semblent souvent être des parasites !

On paye même plusieurs fois : au travers des impôts (la subvention de l'Etat représente 55 % du budget de l'Opéra de Paris en 2010), des billets que l'on achète (28 %) et du mécénat qui bénéficie aussi d'importants avantages fiscaux (on appelle cela pudiquement des dépenses fiscales, le reste étant répercuté dans le prix des produits et services des entreprises qui font des dons, c'est-à-dire sur le consommateur ; cela ne fait que 4 % du budget).

Concernant les conseillers animaliers, il me semble qu'un lapin, sorti d'Alice au pays des merveilles, finit assez mal ... Mais, cela reste à vérifier !

8. Le mercredi 16 décembre 2015 à , par David Le Marrec

Bonsoir Faust !

Je parlais bien sûr du point de vue du metteur en scène, pas du contribuable…

Je ne vois pas la répartition des coûts de la même façon : le fait que les impôts (et les abattements fiscaux, sorte de co-financement mixte pas inintéressant mais bien sûr sujet à discussion) financent les spectacles veut plutôt dire que c'est le quidam qui ne va jamais à l'Opéra qui me subventionne. J'ai donc plutôt l'impression de payer une demi-fois, puisque tout le monde sa proportion de l'impôt, même sans y aller.
C'est d'ailleurs pourquoi les billets trop chers (dont je perçois, certes, la nécessité) me paraissent dérangeants d'un point de vue moral : ils interdisent l'accès au spectacle de gens qui, pourtant, on contribué (à la hauteur de leurs moyens) au financement de ces institutions.

9. Le vendredi 18 décembre 2015 à , par Faust

Bonsoir

Je n'avais pas tout lu ... attendant de voir la Damnation ce soir. Vous étiez particulièrement énervé !

Ayant oublié l'heure de début de la réservation, je me suis retrouvé à la loge 8 ... sur le côté. Donc, une quasi version de concert ... L'orchestre m'a paru excellent ce soir. L'équipe de mise en scène s'étant abstenue de paraître, pas de huées à la fin et surtout rien pendant la représentation (sauf un tout petit peu au début).

Si Hawking n'avait pas droit à une sorte de résurrection à la fin, j'aurais trouvé cela d'assez mauvais goût (mais, je n'arrive décidément pas à le voir en Faust). Ce qui m'a le plus étonné, c'est que si vous enlevez les cages en verre (très à la mode en ce moment ; ce soir, les déplacements faisaient vraiment beaucoup de bruit ! mais, je crois que je préfère ce que fait Castellucci ... avec ses cages pour l'Orestie ! évidemment, c'est un peu plus " osé " !), les déplacements très convenus du choeur, la pseudo chorégraphie, il ne reste à peu près rien ! On peut se demander s'il y a un metteur en scène. Le malheureux Kaufmann erre comme une âme en peine sur l'immense plateau. On aime voir les dames en vert à l'opéra en ce moment : après Barbe Bleue, c'était ce soir autour de Sophie Koch. Etant sur le côté, je n'ai pas tout lu dans ce qui était projeté et puis les mots ou les phrases que l'on projette sur un écran, je commence à en avoir un peu assez !

Oui, bien sûr, en tant que contribuable si vous ne voulez pas contribuer pour rien à la bonne centaine de millions dévorée (chiffres 2010) chaque année par la " Grande Boutique ", il faut y aller le plus souvent possible. Et plus vous êtes loin, plus cela coûte cher en frais de déplacement et d'hébergement ...

Le contenu du programme m'a semblé assez faible ... Il faut dire que disserter longuement sur l'idée du metteur en scène, c'est un peu dur ! Petite remarque en passant : le même préposé à la dramaturgie (qui, cette fois, n'a rien écrit) est toujours là : après Moïse, La Damnation ...

Sur le prix des places : d'accord, ce n'est pas très moral ... Mais, n'oubliez pas qu'il y a pas mal de personnes qui y vont pour se faire voir ou pouvoir en parler ensuite dans les lieux de pouvoir ou les lieux mondains (cela se recoupe !). Ceux-là ont les moyens de payer, surtout lorsque c'est la société dans laquelle ils travaillent qui règle la note ...

10. Le samedi 19 décembre 2015 à , par David Le Marrec

Énervé, ce n'est pas trop mon genre… Mais un peu consterné, en effet… Que dans l'état où est le monde, certains trouvent l'énergie de diriger leur haine contre une mise en scène imprécise, ça dépasse un peu mes capacités d'empathie. Certes, dans le noir, sans risque, en groupe, c'est sans doute plus confortable, et probablement un « crime d'opportunité », pas sûr que ce soient pas ailleurs de grands révoltés, mais tout de même, c'est étrange : ça veut dire qu'on va voir un opéra comme un combat de gladiateurs, pour décider de qui a le droit de se produire, et pas pour se détendre ou se nourrir d'art…

Autant je peux me figurer que dans certains cas particulièrement répugnants visuellement, idéologiquement ou tout simplement tellement éloignés, on puisse se draper dans sa dignitié de spectateurs, autant pour ressentir de l'enthousiasme, même négatif, il fallait vraiment être motivé vu le plateau servi par Hermanis. Ça me donne plutôt envie de bâiller et de repartir pas trop tard, moi.


L'orchestre m'a paru excellent ce soir.

Et la mollesse de Jordan commence à se dissiper ? C'est en général le cas dans le dernier tiers des représentations, là que ça devient vraiment intéressant…


On peut se demander s'il y a un metteur en scène.

C'est comme du Giancarlo Del Monaco, c'est plutôt de la mise en décor… Pourquoi pas, mais ensuite, en effet, il ne se passe à peu près rien.


Etant sur le côté, je n'ai pas tout lu dans ce qui était projeté et puis les mots ou les phrases que l'on projette sur un écran, je commence à en avoir un peu assez !

Être obligé d'écrire ses concepts, pour un metteur en scène, c'est quand même un peu la honte, oui. Pour Moïse, ça entrait en résonance avec la scène et n'était pas du tout explicatif – et puis, s'il y a bien une œuvre où il est légitime de mettre en avant le Verbe… mais pour Alceste, c'était plat et superflu, et ici vraiment une béquille, nous tenir par la main pour nous dire tout ce qu'on ne pourrait pas suivre si on ne faisait que regarder…


Et plus vous êtes loin, plus cela coûte cher en frais de déplacement et d'hébergement ...

À une époque pas si lointaine, avant la billetterie en ligne, il était d'ailleurs quasiment impossible d'obtenir des places abordables (uniquement accessibles au guichet), ce que je trouvais absolument scandaleux, vu que les provinciaux financent aussi…


Sur le prix des places : d'accord, ce n'est pas très moral ... Mais, n'oubliez pas qu'il y a pas mal de personnes qui y vont pour se faire voir ou pouvoir en parler ensuite dans les lieux de pouvoir ou les lieux mondains (cela se recoupe !). Ceux-là ont les moyens de payer, surtout lorsque c'est la société dans laquelle ils travaillent qui règle la note ...

Je n'en ai pas beaucoup croisé, même à l'époque (pas si lointaine, dois-je souligner) où l'accès aux tarifs nourrissons me permettaient de les côtoyer… Ça ne se trouve pas plutôt dans les vernissages ou dans les cocktails que pendant les représentations (où il faut être assis et attendre en silence, moins valorisant) ?

Mais là, je parle d'un univers qui m'est tout à fait étranger, donc…

11. Le dimanche 3 janvier 2016 à , par Benedictus

J'ai pour ma part assisté à la représentation du dimanche 27 (l'après-midi).

Déjà, musicalement, j'ai été très, très agréablement surpris par l'orchestre, remarquablement précis et détaillé, avec de belles couleurs, et une direction certes peu véhémente pour du Berlioz mais pas molle non plus. Les chœurs saturent vite, en effet, mais étaient nettement moins inintelligibles que je ne le redoutais.

Côté solistes, les voix n'étaient pas exactement de celles que je préfère - mais j'ai été plutôt satisfait.

J'ai vraiment beaucoup aimé Terfel: les efforts d'allègement (il parvient à une couleur vraiment claire, surtout eu égard à son répertoire habituel) et de diction m'ont paru vraiment remarquables, sans rien sacrifier de son impact; en outre, il fait montre d'un abattage dont on regrette qu'il n'ait pas été mieux mis à profit par une direction d'acteurs digne de ce nom, et d'une subtilité de caractérisation qu'on ne lui a pas toujours connu (son Méphisto est tantôt insinuant et séducteur, tantôt vraiment inquiétant et impressionnant, bien plus complexe que ne l'était, par exemple, son Don Giovanni pochtron lubrique).

Sophie Koch, vraiment pas mon type de voix avec son placement très en arrière et son timbre opaque, compense tout cela par une musicalité remarquable et un bel engagement dans dans sa Ballade du roi de Thulé que dans un "D'amour l'ardente flamme" frémissant; dommage là aussi qu'une aussi belle présence scénique n'ait pas été mieux mise en valeur.

Brian Hymel m'a plutôt décontenancé (je l'entendais pour la première fois). Sa voix m'a paru belle mais complètement voilée et d'émission un peu molle jusqu'à l'entracte, puis n'a cessé de gagner à la fois en ampleur et en précision dans les troisième et quatrième partie, jusqu'à un un "Nature immense" vraiment somptueux. De toute manière, son timbre assez clair m'a séduit - bien davantage a priori que n'aurait pu le faire Kaufmann. En revanche, il ne m'a pas semblé très grand acteur - campant un Faust plus passif qu'autre chose (ce qui après tout peut se défendre), mais surtout semblant totalement désemparé en l'absence d'une vraie direction d'acteurs (gestes, postures, mouvements assez erratiques et peu susceptibles de faire sens).

Quant à la mise en scène, bon... Seule chose vraiment notable: on avait apparemment fini par renoncer à la vidéo de gastéropodes en plein coït. Pour le reste, ainsi que cela a déjà été signalé et que je l'ai déjà mentionné à propos des chanteurs, ce qui est vraiment gênant, c'est pour moi cette absence de scénographie et de direction d'acteurs, ce Faust aux bras ballants qui fait les cent pas, ces mouvements d'ensemble un peu anomiques, ces ballets pas très bien réglés, ces chanteurs qui restent à l'avant-scène...

Après pour le côté conceptuel de la chose, ça m'a surtout fait penser à une production de TPE (ceux qui ont été examinateurs au bac comprendront): une problématique qui mêle vulgarisation littéraire et scientifique ("Dans quelle mesure Stephen Hawking est-il le Faust de notre temps?"), un "dossier documentaire" richement documenté mais qui ne sera feuilleté que d'un œil distrait (le programme), une vidéoprojection avec des images pas toujours en rapport avec le sujet traité et une "production finale" sous forme scénique un peu capillotractée et pas très rigoureuse quant à la mise en place.

Enfin, ce qui est déjà bien, c'est que mon épouse, qui assistait là à sa première représentation d'opéra, n'en a pas non plus été traumatisée, et a du moins apprécié la composante musicale du spectacle (et le ballet des feux-follets). Preuve que cela ne valait pas non plus la peine de faire un tel foin. (Mais bon, les glottos, hein...)

12. Le mercredi 6 janvier 2016 à , par David Le Marrec

Bonjour Benedictus !

Merci pour ce compte-rendu. On voit la différence d'assister aux dernières représentations… je n'ai pas remarqué ça chez d'autres orchestres, mais je ne peux comparer un aussi grand nombre de représentations qu'avec des ensembles en tournée (et c'est un peu différent, parce qu'un programme leur dure beaucoup plus longtemps, ce qui fait qu'ils arrivent avec une meilleure cohésion à la première représentation, je suppose – et pour des œuvres, concernant le baroque, quand même moins exigeantes techniquement, moins différentes les unes des autres, etc.). Je n'ai jamais eu l'occasion de faire la comparaison dans d'autres grosses maisons d'opéra entre la première et la dernière. Mais en tout cas, la différente est en générale abyssale : gourd, épais, empesé à la première ; coloré, précis, virevoltant à la dernière. La différence entre le déchiffrage et le meilleur orchestre du monde, quasiment.

Les chœurs, non, vraiment (et eux ne changent pas), c'est pas possible de présenter ça déjà dans l'absolu (agressifs et monochromes, incapables de demi-teintes), mais devant un public francophone, on est à la limite du manque de professionnalisme. Certes, ce n'est pas la faute des chanteurs individuellement, mais clairement, le recrutement de grosses voix (d'ailleurs, il doit y avoir assez peu de francophones, je n'ai pas vérifié, mais ça ne m'étonnerait pas), et la nature de leur travail de préparation sont à revoir. À cela (et c'est plus compliqué) s'ajoute, et j'ai honte de le dire, l'âge des dames : les meilleurs chœurs sont ceux qui ont des ténors qui mixent et des pupitres de femmes jeunes… c'est horrible, mais c'est une réalité physiologique et technique difficile à dépasser. Les voix mûres « bougent » davantage, ce qui peut être sans modulable individuellement, pas en groupe où les vibratos incompatibles et les petites tensions s'additionnent.

J'ai eu l'impression que Terfel ne cherchait pas à éclairer mais que c'est sa voix, en fait. Ce qui me rend beaucoup plus curieux de ses Wotan, qui peuvent paraît un peu gras en retransmission, mais si c'est avec cette clarté… Je n'ai pas de réponse là-dessus, mais je n'ai pas eu le sentiment d'un effet d'émission, plutôt de la découverte de la nature de la voix en vrai. Tu l'avais déjà entendu ?
Effectivement, c'était bien, surtout eu égard aux rôles qu'il a fréquentés. Dans l'absolu, j'aurais plutôt voulu une voix claire et naturelle (Théruel !), plus souple, mais pour un spécialiste de Wagner et des gros diables, on pouvait difficilement trouver mieux (et dans un français encore meilleur qu'à l'accoutumée).


[quote)bien plus complexe que ne l'était, par exemple, son Don Giovanni pochtron lubrique[/quote]Hihi. Oui, d'où le contraste, en effet. Ce qu'il faisait ressemblait plus à son récital Mozart avec Bartoli (voix très claire, plus proche de Roux que de Mars).


Sophie Koch, vraiment pas mon type de voix avec son placement très en arrière et son timbre opaque,

Ça ne me paraît pas si arrière que ça, mais comme c'est très couvert, le son reste un peu « en dedans » avant de sortir (émission à haute impédance, mode particulièrement pénible chez les voix d'hommes en ce moment).


Ce que tu dit de Hymel est assez différent de ce que j'ai entendu jusqu'ici (déjà dans ce rôle, à Pleyel ; et puis dans divers disques et retransmissions) : là aussi, la voix est vraiment fabriquée à l'intérieur et manque un peu de brillant, mais la mollesse, ça ne m'a vraiment jamais frappé. Et « timbre clair », j'aurais dit tout le contraire, tant il me semble tirer le maximum de sombrage possible sans faire basculer l'édifice. Un format moins large que Kaufmann peut-être (et encore, à débattre), mais je trouve sa voix nettement plus sombre – Kaufmann chante avec un mécanisme très lourd, mais la couleur obtenue n'est pas si sombre en fin de compte.
Ne l'ayant vu qu'en version de concert, je ne peux pas juger l'acteur, mais même Kaufmann était un peu perdu…


Seule chose vraiment notable: on avait apparemment fini par renoncer à la vidéo de gastéropodes en plein coït.

Oui, à partir de la troisième représentation, hélas : le seul moment de conjonction entre musique et scène, quasiment.

Très bien vu, le côté problématisation transversale des programmes avec tâche finale impliquant une réalisation concrète par une actualisation des connaissances dans le cadre d'une ouverture au monde.

Ce qu'on peut trouver un peu maigre pour l'un des metteurs en scène les plus en vogue (et supposément un radical…), mais difficilement révoltant, je suis d'accord. Après, on peut juger que la paresse est une faute professionnelle quand on a de tels moyens à disposition (et je ne suis pas forcément en désaccord avec ça), mais ce n'est étrangement pas la raison des huées…

13. Le mercredi 6 janvier 2016 à , par Benedictus

Je ne maintiendrai pas mordicus mes impressions, du moins sur les chanteurs: je ne suis pas assez glotto, du moins glotto live: j'ai besoin de réécouter et de comparer (en tous cas pour des chanteurs que je connais aussi mal que ceux-là, et dans une œuvre que je fréquente aussi peu) pour livrer autre choses que des impressions imprécises.

Quant aux chœurs, je n'ai pas dit que je les avais aimés, seulement que ça saturait beaucoup et que leur articulation m'avait paru moins inintelligible que ce que je redoutais.

Et puis, cette représentation m'a donné envie de réécouter l'œuvre, ce qui n'est pas rien. J'ai vu que tu recommandais surtout Markevitch (la seule version que j'ai, en fait, effectivement formidable d'évidence musicale et dramatique) et Davis (que j'ai eu, mais à laquelle je n'ai jamais accroché, malgré Bastin). Pourrais-tu s'il te plaît me recommander de bonnes versions récentes et bien captées (plutôt pour une écoute prolongée et répétée au casque, pas toujours confortable avec Markevitch)?

14. Le mercredi 6 janvier 2016 à , par David Le Marrec

Je ne dis surtout pas que tu n'as pas pu entendre cela, ni même qu'il n'en était pas ainsi, je relève seulement l'écart, et me demande à quoi il peut être dû (et ce n'est pas forcément notre différence de perception, vu que nous avons vu la production à un mois d'écart !).

Si j'ai réagi sur les chœurs, c'est que « moins inintelligible que » n'est pas compatible : ils sont l'Abomination, l'annonce de la Fin de la Civilisation, le cinquième Cavalier, etc.

Pour la Damnation, à part ces deux-là que j'écoute toujours en priorité, je vais généralement dans les bandes qui me plaisent (Rattle-Berlin, tiens, Ozawa-Paris, Monteux-Crespin-Turp-Roux, Solti avec K. Lewis, ou encore, officiel celui-là mais pas compatible avec ta demande, Furtwängler en allemand…).

Parmi les bonnes choses récentes, il y en a plein, mais aucune que je trouve aussi frémissante que les bandes qu'on trouve ou que Markevitch et Davis 73 : si, étrangement, j'aime beaucoup Barenboim 78 (en volapük, mais très tendu). J'ai à peine pu survoler Ozawa 73, qui semble assez parfait orchestralement, et j'aimerais beaucoup pouvoir entendre Neuhold 90.

Sinon, il y a beaucoup de justes milieux très sympathiques : Prêtre 69 (peut-être encore un peu ancien ?), Nagano 94 (impeccable, mais un peu rond et amène), Dutoit 94, Chung 95 (Terfel pas du tout aussi délicat), Casadesus 2003 (prise de son Naxos, peut-être un peu blanche). Mais ce n'est pas non plus le grand frisson.

Vu tes goûts, la bizarrerie de Barenboim ne te déplairait peut-être pas ; sinon, Nagano, Dutoit ou Casadesus devraient d'apporter un confort sonore et linguistique suffisant (à quelques détails près).

15. Le mercredi 6 janvier 2016 à , par David Le Marrec

Ah, je n'ai pas mentionné un Bertini assez électrisant avec le Philharmonique d'Israël, mais là aussi, le son n'est pas forcément confortable (sorte de réverbération asymétrique) et la distribution est bizarre.

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