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Une décennie, un disque – 1610


1610


gesualdo madrigaux


[[]]
Tu piangi, o Filli mia
(où l'on entend à la fois chromatismes et volutes)

Compositeur : Carlo GESUALDO
Œuvre : Sixième Livre de Madrigaux à cinq voix (1611)
Commentaire 1 : Gesualdo est l'auteur de six livres de madrigaux, publiés de 1591 à 1611. Les deux derniers le sont la même année, soit dans la période tardive du genre et constituent, de l'avis général, un sommet dans ce type de production. Lors de la redécouverte de sa musique au XXe siècle (il était resté connu, mais pour d'autres raisons, sur lesquelles je reviens en annexe), ce sont la richesse et l'audace de ses chromatismes, cette capacité à la soudaine sortie de route qui l'ont immédiatement rendu très sympathique – peut-être aussi parce que ce relief immédiat le fait accessible indépendamment de notre familiarité avec la forme du madrigal. On trouvera de nombreux hommages (déclarations ou œuvres) de la part de compositeuirs de notre temps.
    Outre ces soudains emprunts très violents d'accords étrangers, ces changements de direction inopinés (qui amplifient évidemment la force des contrastes lors de changements de strophes et/ou d'émotions), on peut aussi apprécier les harmonies assez sophistiquées (avec des notes étrangères osées) ou les volutes agiles qui tourbillonnent de façon très spectaculaire et figurative. Une sorte d'expressionnisme de la fin de la Renaissance, qui rend le rapport au texte d'autant plus évident, et l'écoute d'autant moins lassante.
    Sa musique sacrée est sensiblement différente, beaucoup plus conforme à la norme – même si ses Répons de Ténèbres demeurent de splendides modèles.

Interprètes : La Compagnia del Madrigale
Label : Glossa
Commentaire 2 :  Même remarque que pour leurs Marenzio, on est à la fois frappé par la lisibilité extrême de chaque ligne, la cohésion d'ensemble, la coloration individuelle et collective, l'intelligibilité du texte et le sens du mouvement, et tout cela sans souligner les effets, déjà rendus avec une grande vivacité. Grande lecture d'un grand corpus.
    Avec des qualités semblables (mais un peu plus de rondeur, un peu moins de mots), La Venexiana, chez le même label, propose un très, très beau Cinquième Livre, également indispensable.

Anecdotes :
    La mémoire de Gesualdo a d'abord survécu, à une époque où on ne le jouait même pas, grâce à l'exotisme de sa vie. Prince napolitain parmi les meilleures familles de toute l'Italie, apparenté aux rois normands et à deux papes (dont un saint – Charles Borromée), il surprend sa femme avec son amant, et exerce si bien sa vengeance qu'il doit se retirer dans ses terres à l'écart de Naples pour éviter le scandale. Contrairement à la légende noire qui a de beaucoup excédé la réalité, il semble que ses problèmes n'étaient pas tant dus à l'exercice de son droit de justice (le droit espagnol en vigueur à Naples permettait l'exécution des deux coupables), qu'au fait qu'il l'ait partiellement délégué à des valets ou hommes d'armes (les achevant lui-même, tout de même, on a sa fierté), ce qui était infamant pour des rejetons de nobles familles.
    Toujours est-il que le nom de Gesualdo, à la fois aristocrate, cocu assez peu empreint de charité, meurtrier et compositeur-expérimentateur le plus saisissant de son époque, résonne assez fortement au delà même de ceux qui en écoutent la musique – qui vaut pourtant la peine, ce Sixième Livre étant possiblement la porte d'entrée à la fois la plus accessible et la plus spectaculaire au genre du madrigal.


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