André LHOTE - I - présentation rapide et oeuvres figurativo-cubistes
Par DavidLeMarrec, vendredi 31 août 2007 à :: Pictural :: #703 :: rss
CSS s'est rendu mercredi à l'exposition André Lhote au musée des Beaux-Arts de Bordeaux. Evidemment, il s'agissait par cet événement[1] de promouvoir l'oeuvre d'un enfant du pays, surtout connu pour avoir fréquenté la fine fleur des arts, visuels ou littéraires, du temps ; mais, par bonheur, Lhote vaut mieux que cela. Non pas qu'il ait inventé quoi que ce soit en cette époque (1885-1962) d'innovations radicales ; au contraire, Lhote construit son oeuvre comme un creuset kaléidoscopique, qui réunit ou juxtapose, d'un tableau à l'autre, de nombreux courants, avec une fraîcheur et une maîtrise vraiment délectables.
Comme la construction d'une note complète serait sans doute longue et malcommode, avec l'accumulation de vignettes et de commentaires, on se propose d'égrener plutôt notre visite à coup de notulettes.
On peut répartir la production de Lhote, de 1910 à 1960, en plusieurs courants, schématiquement. Par exemple :
Notes
[1] L'exposition, pas notre venue.
- L'influence cubiste. Parfois sensible seulement par les traits anguleux de ses sujets (qui restent alors tout à fait figuratifs), parfois réellement la présentation d'un réel impossible. En grand nombre dans les années 1910-1920. Ces oeuvres suprennent souvent par les coloris très audacieux et mêlés pour former les reliefs (à contempler d'assez loin, donc).
- Le type Gauguin. Couleurs très vives, perspective très plate. Plutôt dans les années 1940-1950.
- Un style plus classique et sévère, presque néo. On y retrouve des angles « intranquilles » cubistes, une représentation applatie, presque en deux dimensions, des surfaces chromatiques très homogènes. Beaucoup cependant outrepassent le réalisme et laissent une impression d'instabilité.
- Des illustrations de concepts, souvent avec clins d'oeil sous-jacents.
Débutons par une oeuvre qui évoque les tonalités chromatiques de Braque ou Gleizes, mais parfaitement figurative et calme, presque banale :
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On le voit, le caractère « cubiste » que l'on accole à Lhote dans toutes les biographies rapides est rien de moins que schématique ![1] Une oeuvre presque "décorative", mais dans laquelle le sujet principal est déformé de façon à rendre l'impression et non l'aspect qu'il présente au regard, dans le réel. Lhote, qui était également théoricien, l'avait formulé très simplement en évoquant sa venue à la peinture, découvrant que la mission de de l'art était de fixer des mirages plutôt que copier des objets.
Certes, déformé à partir de solutions visuelles anguleuses. En réalité, la plupart du temps, Lhote utilise certaines techniques cubistes (figures anguleuses, perspectives brisées et impossibles à démêler, représentation simultanée de points de vue successifs...) dans des oeuvres globalement très figuratives, ce qui rend sans nul doute son travail très accessible, en plus de sa grande diversité.
Lorsqu'il s'en écarte, on sent comme un jeu, ou du moins un exercice appliqué, qui laisse entrevoir un recul certain sur sa propre pratique. Je ne puis m'empêcher de percevoir un certain second degré dans ce tableau en marge de sa production.
Nature morte cubiste, 1917.
Comble de l'ironie :
- la plupart des contours y sont arrondis ;
- la représentation se fait quasiment en deux dimensions, comme non pas dans ses oeuvres cubisantes[2], mais plutôt comme dans ses oeuvres réalistes ou gauguinisantes...
N.B. : Ces notes seront illustrées par des reproductions laissées sur la Toile, certaines de qualité vraiment très moyenne ; ce sera donc simplement à titre d'indication, et non de représentation.
Notes
[1] On a cédé aux sirènes de cette jolie locution, mais on le sait, c'est mal. "Rien de moins" étant l'équivalent d' "au moins" (= tout à fait), et "rien moins" celui d' "impossiblement moins" (= pas du tout), mais comme on omet fréquemment "de" dans la première locution, c'est vite la panique... Cela dit, Chateaubriand (avant 1878, la distinction n'existait pas), Proust et Péguy se sont pris les pieds dans le tapis, et pas CSS, alors on a bien le droit de frimer un peu, en passant, n'est-ce pas ?
[2] Aux contours au contraire particulièrement saillants.
Commentaires
1. Le vendredi 9 mai 2008 à , par steffy
2. Le vendredi 9 mai 2008 à , par DavidLeMarrec :: site
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