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Henry Purcell - Dido and Aeneas - discographie (exhaustive ?)


1. Pourquoi ?

Chaque année, les productions de cet opéra miniature se multiplient dans le monde. Il faut dire que, d'une veine mélodique assez heureuse, il réutilise les recettes de la tragédie lyrique française (importance du récitatif ponctué d'ariettes, divertissements dansés...) en moins d'une heure, avec une belle force. Les exigences vocales en sont minimes, et il comporte plusieurs moments très marquants et accessibles, en particulier l'acte de caractère des sorcières et bien sûr la passacaille-aria finale, devenue un immense tube.

Ayant fréquenté un nombre assez important des versions disponibles sur le marché, je propose ici un petit panorama, en essayant de mentionner le maximum de celles qui ont été éditées, et en ne commentant bien sûr que celles écoutées. [J'avoue que celles qui me restent, à part Parrott II et Wentz, et encore modérément, n'attisent pas insurmontablement ma convoitise, et que je n'ai pas de hâte particulière à les découvrir...]

Bien sûr, avec toutes les réserves d'usage : j'ai tâché de décrire la typologie des versions plutôt que de les hiérarchiser, mais la discographie, plus encore que les oeuvres, fait appel à beaucoup de subjectivité, et il ne peut s'agir que d'indications à relativiser selon les goûts de chacun - certainement pas d'un bréviaire inaltérable.

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2. Discographie

Date - Chef (Dido, Belinda, Enée, Enchanteresse)

Parmi les antiquités, j'avais mis la main il y a quelques années sur une bande radio avec Martha Mödl. Le problème étant que vu les tempi totalement distendus, l'écoute était réellement difficile : rien ne se passait.

1945 - Constant Lambert (Joan Hammond, Isobel Baillie, Dennis Noble, Edith Coates)

1951 - Geraint Jones (Kirsten Flagstad, Maggie Teyte, Thomas Hemsley, Edith Coates)

1952 - Geraint Jones (Kirsten Flagstad, Elisabeth Schwarzkopf, Thomas Hemsley, Arda Mandikian)
=> Dans cette version, Schwarzkopf tient aussi la seconde suivante de Didon, ainsi que l'esprit messager qui vient visiter Enée. Assez atypique pour être signalé. Sinon, c'est évidemment une lecture "monumentale" (avec en plus des voix que je n'aime pas, même si Schwarzkopf est réellement intéressante), que je suis un peu en peine de commenter, tant tout y paraît sans nerf.

1959 - Benjamin Britten (Claire Watson, Jeannette Sinclair, Peter Pears, Arda Mandikian)

1961 - Anthony Lewis (Janet Baker, Patricia Clark, Raimund Herinckx, Monica Sinclair)
=> A noter également : Dorothy Dorow (grande figure des premiers enregistrements de musique décadente, de lieder de Schreker à Erwartung de Schönberg) en esprit messager. Version très lente et lisse, mais pas dépourvue de charme, quelque chose d'un flux tranquille. Elle est surtout appréciée à cause de Baker - que je n'aime pas spécialement mais qui est en effet convaincante.

1965 - John Barbirolli (Victoria de los Angeles, Heather Harper, Peter Glossop, Patricia Johnson)

1967 - Charles Mackerras (Tatiana Troyanos, Sheila Armstrong, Barry McDaniel, Patricia Johnson)
=> Encore une version qui semble avoir été conçue uniquement pour faire chanter l'air final en contexte par sa chanteuse-star. En l'occurrence, une voix aussi ronde et robuste pour ce type d'ambitus (réduit) ne me paraît, personnellement, n'avoir aucun intérêt particulier.

1970 - Colin Davis (Josephine Veasey, Helen Donath, John Shirley-Quirk, Elizabeth Bainbridge)
=> Voilà qui fait déjà beaucoup plus envie sur le plan de la personnalité, mais je n'ai pas écouté.

1972 - Nicola Rescigno (Tatiana Troyanos, Graziella Sciutti, Jon Vickers)

1977 - Valentin Nesterov (Evgenya Gorochovskaya, Valentina Kozyreva, Nikolay Kaloshin, Nadezhda Vainer)

1977 - Raymond Leppard I (Tatiana Troyanos, Felicity Palmer, Richard Stilwell, Patricia Kern)

1978 - Steuart Bedford (Janet Baker, Norma Burrowes, Peter Pears, Anna Reynolds)

1981 - Andrew Parrott (Emma Kirkby, Judith Nelson, David Thomas, Jantina Noorman) => Premier version sur instruments anciens, assez gentillette et molle. Quand même deux points très forts : Emma Kirkby, qui contre toute attente irradie de charme - peut-être le seul enregistrement où elle s'incarne véritablement dans un personne - et magistralement encore ! Très en mots aussi. Second atout, la sorcière à la voix cassée de Jantina Noorman, très convaincante.

1982 - Nikolaus Harnoncourt (Ann Murray, Rachel Yakar, Anton Scharinger, Trudeliese Schmidt)
=> Bon enregistrement qui a vieilli et nous paraît un peu sage aujourd'hui. A noter tout de même, l'esprit messager de Paul Esswood, véritable friandise (même s'il a été plus inspiré ailleurs).

1983 - John Eliot Gardiner (Carolyn Watkinson, Ruth Holton, George Mosley, Teresa Shaw)
=> Très bonne version ! On trouve plus urgent plus tard dans la discographie, mais à cette date, l'enregistrement de Gardiner constitue un véritable saut qualitatif, qui bénéficie en sus du contralto authentique de Watkinson, l'une des Didon les plus accomplies de la discographie.

1985 - Raymond Leppard II (Jessye Norman, Patricia Kern, Thomas Allen, Marie McLaughlin)
=> Evidemment, c'est un peu lent, c'est assez lisse... mais la beauté des aplats et la splendeur du chant rachètent beaucoup de choses. Sans être forcément une version qui s'écoute souvent, elle se laisse découvrir avec beaucoup de plaisir.

1985 - William Christie I (Guillemette Laurens, Jill Feldman, Philippe Cantor, Dominique Visse)
=> Avec Agnès Mellon en seconde suivante et première sorcière. Christie emboîte le pas des trouvailles de Harnoncourt et particulièrement Gardiner, et entérine en quelque sorte ce qui sera ensuite le standard de l'interprétation de l'oeuvre : les sorcières qui chantent du nez dans un acte II volontiers hystérisant, les couleurs un peu sèches de l'orchestre, mais le rythme dramatique soutenu. Une excellente version de base, parmi les plus équilibrées - même si ce n'est ni la plus originale, ni la plus émouvante de mon point de vue.

1985 - Michel Corboz (Teresa Berganza, Danielle Borst, Per Arne Wahlgren, Glenys Linos)

1989 - Roderick Shaw (Rachel Ann Morgan, Camille van Lunen, David Barick, Myra Kroese)

1989 - Trevor Pinnock (Anne Sofie von Otter, Lynne Dawson, Stephen Varcoe, Nigel Rogers)
=> Pinnock est le premier de la discographie à distribuer (comme ce pouvait être le cas à l'époque de la création) l'Enchanteresse à un homme. Version qui vaut, comme souvent chez Pinnock par sa grande sobriété et sa grande justesse. Von Otter, au sommet de sa gloire vocale et verbale, donne le portrait le plus habité de la discographie, révélant nombre d'inflexions, exaltant sans cesse les mots et les lignes. On peut trouver l'ensemble un peu sage si l'on a dans l'oreille des versions plus extrêmes, mais elle fait partie, malgré tout, de celles qui fonctionnent le mieux, ne serait-ce que pour ses solistes de tout premier plan.

1992 - Ivor Bolton (Della Jones, Donna Deam, Peter Harvey, Susan Bickley)
=> Je ne crois pas avoir écouté celle-ci en entier, et j'ai quelque difficulté à lui associer des faits précis. Della Jones est bien sûr superbe, et même trop à l'aise - c'est même une limite, tant son aisance finit par diminuer les aspérités dramatiques du rôles - alors que ce n'est pas son habitude.

1993 - Christopher Hogwood (Catherine Bott, Emma Kirkby, John Mark Ainsley, David Thomas)
=> Version atypique, avec le "son Hogwood" (même texture des cordes entre l'attaque et la tenue du son). La principale surprise est que l'enchanteresse est tenue par une basse (fausse surprise lorsqu'on a écouté le baryton de Pinnock), mais dans l'ensemble le travail est très vivant et habité, vraiment une très bonne version.

1994 - Nicholas McGegan (Lorraine Hunt-Lieberson, Lisa Saffer, Michael Dean, Ellen Rabiner)
=> Très bonne version, dans une bonne moyenne. N'étant pas particulièrement ébaubi de ce que propose Hunt-Lieberson (le tracé n'est jamais très net, et la diction toujours un peu lâche - j'ai envie de comparer ça aux charmes et aux limites de Ferrier, sans bien sûr qu'on soit sur les mêmes cîmes) ; et par ailleurs n'étant pas très client de la façon qu'a McGegan de toujours tirer ses interprétations vers l'esthétique haendelienne, avec un côté assez "carré", je ne suis pas totalement ébloui. Cela reste excellent cela dit, de bons chanteurs et de très belles nuances, particulièrement soignées.

1994 - William Christie II (Véronique Gens, Sophie Marin-Degor, Nathan Berg, Claire Brua)
=> Christie propose le pari très stimulant d'une version pour ensemble très réduit. Malheureusement, cela ne s'accompagne pas de beaucoup de tension de sa part, et l'ensemble paraît assez fade. Gens n'est pas non plus totalement épanouie dans le rôle, peut-être à cause de la langue. Et puis de la tessiture basse, mais elle ne lui pose étrangement pas du tout de problème dans le répertoire français - allant jusqu'à chanter dernièrement le grand air de Fidès du Prophète (un rôle de mezzo profond !), et sur scène !

1995 - Richard Hickox (Maria Ewing, Rebecca Evans, Karl Daymond, Sally Burgess)
=> Le meilleur disque baroque de Hickox. Etonnamment, lorsqu'on a l'habitude de ses interprétations des britanniques vingtième, une lecture parmi les plus dramatiques, assez nerveuse même. Le continuo, comme toujours, est un peu littéral, mais l'élan est remarquable, et le chant très beau. Une des plus belles versions de la discographie.

1996 - Andrew Parrott II (Emily von Evera, Janet Lax, Ben Parry, Haden Andrews)

1996 - Martin Pearlman (Nancy Maultsby, Susannah Waters, Rusell Braun, Laura Tucker)

1997 - David van Asch (Kym Amps, Anna Crookes, David van Asch, Sarah Connolly)
=> Montée en grade de Kym Amps, qui jouait les utilités quelques années aupravant ! Le Scholars Baroque Ensemble part du principe de l'ensemble choral réduit comme toujours, mais si son Messie ascétique était très saisissant, ici la mollesse prévaut. Très décevant.

1998 - René Jacobs (Lynne Dawson, Rosemary Joshua, Gerald Finley, Susan Bickley)
=> Pour ceux qui le redoutent, Robin Blaze tient le rôle de l'esprit messager... Version admirablement synthétique de ce qui a pu être proposé, et qui a séduit la critique et les mélomanes immédiatement. Il faut dire que tout est complètement léché et maîtrisé de bout en bout, avec beaucoup de rondeur et d'énergie à la fois. Etrangement, exactement comme pour ses Saisons... je n'adhère pas totalement. J'admire la plastique de l'ensemble, mais les chanteurs très lisses et l'audible maîtrise me paraissent trop sophistiqués pour cette musique sans détours - je ne suis pas réellement touché par ce qui se passe. Version excellente cela dit.

2000 - Hervé Niquet (Laura Pudwell, Salomé Haller, Peter Harvey, Laura Pudwell)
=> Parti pris intéressant de faire jouer la Sorcière comme le double de Didon. Niquet joue cela dans son style propre, avec son continuo très riche, sa rondeur de son, sa progression cursive assez puissante (même si moins qu'ailleurs), et jusqu'à un certain nombre d'ornementations françaises caractéristiques (l'Ouverture tisse vraiment clairement le lien). Les chanteurs n'ont pas énormément de rayonnement, même Haller. Je dois dire qu'après l'enthousiasme de la découverte, j'ai été assez déçu lors de mes dernières réécoutes. Oui, personnel, assez français, mais un peu le même défaut que Jacobs : très sophistiqué et finalement assez "studio". Restent les danses à la française, sublimes, vraiment les plus belles de la discographie.

2001 - William Christie III DVD (Stéphanie d'Oustrac, Sophie Daneman, Nicolas Rivenq, Michel Puissant)
=> Avant de voir le DVD, vu en salle. Et j'avoue être resté un peu tiède : lecture très peu colorée, assez sèche (ensemble instrumental réduit et peu chaleureux). Le charme de Stéphanie d'Oustrac (pas encore à son faîte) et surtout de Nicolas Rivenq reste pâle dans ce contexte. Pas vraiment convaincu. Le dernier enregistrement de l'ère "grisaille" de Christie, ai-je envie de dire.

2003 - Emmanuelle Haïm (Susan Graham, Camilla Tilling, Ian Bostridge, Felicity Palmer)
=> Comme toujours avec Haïm, version accueillie froidement par la critique, alors qu'il s'agit ici, comme pour Jacobs, d'une version synthétique, mais beaucoup plus vivante, avec des couleurs plus chaleureuses, moins étudiées. Mis à part Graham dont l'épaisseur est sans doute un peu large pour ce type de rôle (mais qui demeure meilleure que la moyenne des Didon discographiques de ces années-là), l'ensemble est remarquablement chanté.

2004 - Jed Wentz (Nicola Wemyss, Francine van der Heyden, Matthew Baker, Helena Rasker)
=> Appétissant, vu ce que produit habituellement ce chef. Mais pas encore écouté.

2007 - Valentin Radu (Julianne Baird, Andrea Lauren Brown, Timothy Bentch, Tatyana Rashkovsky)
=> Une des versions qui m'ont le plus touché. Aux antipodes de la sophistication extrême de Niquet et Currentzis : un continuo très littéral (et des cordes pas toujours totalement justes dans l'aigu), mais il y a là justement une simplicité sans fard - et surtout un anglais incroyablement limpide de la part de ces américains qui font plus british que les british ! Il y a de quoi être conquis ; de surcroît Julianne Baird est rompue à la manière "air de cour" de ce rôle, et Tatyana Rashkovsky brûle les planches en sorcière. Bien sûr, il ne faut pas chercher le spectaculaire dans cette version - vous n'en trouverez aucun.

2007 - Teodor Currentzis (Simone Kermes, Deborah York, Dimitris Tiliakos, Oleg Ryabets)
=> Version décrite comme terriblement subversive et puissamment originale. Peut-être exagérément, parce qu'à l'écoute, je n'y ai pas entendu de génie du dynamitage. J'y ai même été un peu déçu par une façon de traiter cette musique de façon assez musicalement contemplative.

2009 - Elizabeth Kenny (Sarah Connolly, Lucy Crowe, Gerald Finley, Patricia Bardon)
=> Une des versions les plus avancées dans les innovations avec Niquet, mais beaucoup plus vivante, dans un très bel anglais. Le continuo et les effets sont très étudiés (même la musique atonale à la fin de l'acte II sonne très naturellement !). A noter, l'étrange chaconne de guitares solos à la fin de l'acte I. Une forme de quadrature du cercle, entre nouveautés et poussée dramatique.

2010 - William Christie IV DVD (Malena Ernman, Judith van Wanroij, Christopher Maltman, Hilary Summers)
=> Entendu et vu seulement des extraits. Avait l'air magnifique à tout point de vue. La grande friandise est Wanroij en Belinda, mais je suis frappé de la façon dont Christie parvient à étendre le ton de la passacaille finale à toutes les interventions de Didon.

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3. Le choix des lutins

Qui n'a de valeur qu'idiosyncrasique, mais pour clarifier peut-être les remarques faites au fil des versions, et aider éventuellement à choisir (quitte à le faire à rebours de mes choix si vos priorités divergent d'avec les miennes) :

Fantastique
- Valentin Radu 2007 => Pour la simplicité, pour l'anglais surtout. Mais à ne pas mettre entre toutes les mains, ce n'est pas une version "virtuose".
- Elizabeth Kenny 2009 => Pleine d'idées et de vie, et un remarquable anglais aussi.
- Richard Hickox 1995 => Pour le drame.
- Emmanuelle Haïm 2003 => Chatoyant en tout point.

Très bon / excellent
Pinnock 92, Niquet 2000, Hogwood 93, Gardiner 83, Christie 85, Jacobs 98

Bon
Currentzis 2007, McGegan 94, Christie 2001, Christie 94, Leppard 85

Mou mais agréable
Parrott 81, Harnoncourt

Plutôt ennuyeux
van Asch 97, Anthony Lewis 61, Geraint Jones 52, Mackerras 67

Etonnant, parce que ce sont surtout des versions dont je n'attendais pas beaucoup (sauf Valentin, parce que le label Lyrichord fait un travail fabuleux sur cette période) qui m'ont le plus touché, finalement.

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4. Prolongements

En fin de notule, un mot sur un des enjeux du livret.


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Commentaires

1. Le samedi 29 octobre 2011 à , par Jorge :: site

Je vois que tu connais plus de versions que moi de mon opéra fétiche ! Je n'ai trouvé nulle trace de la version de Radu Valentin, c'est chez quel éditeur (ou est-ce une bande radio ?) ?

D'accord avec toi dans l'ensemble, notamment sur Haïm et Jacobs. Par contre, je mettrais tout de même Currentzis quelques coudées au-dessus des mollesses faussement alanguies des deux versions Christie.

Il faudrait que je réécoute Niquet, j'étais un peu passé à côté à l'époque. Kenny, c'est effectivement un remarquable anglais, tout est fluide mais ce n'est pas une version follement enthousiasmante. So british sans plus.

2. Le samedi 29 octobre 2011 à , par DavidLeMarrec

Salut !

Je n'ai mentionné, comme je l'ai dit, que des versions commerciales (sinon on n'avait pas fini...) et Valentin est édité, comme je l'ai dit, chez Lyrichord. C'est un petit label actif en particulier dans les opéras du premier baroque, avec des ensembles obscurs mais souvent intéressants (même si parfois limités techniquement).

A mon humble avis, tu détesteras. Mais tu peux essayer, bien sûr.

Currentzis mieux que Christie II ou III, possible, mais certainement pas mieux que Christie I ou IV pour moi.

Pas d'accord sur Kenny, je trouve cette version vraiment prenante, mais ce que je cherche ici est avant tout le naturel de la déclamation. Pour la virtuosité musicale, il n'y a pas assez de matière, c'est plus opérant pour les Sonates en trio, la musique de circonstance ou religieuse, les musiques de scène, ou encore King Arthur. Bref, à peu près tout sauf Dido, de mon point de vue.

3. Le lundi 10 septembre 2012 à , par Mathieu

Tu n'aimes pas Tatiana Troyanos, David?
J'ai la version Leppard, et je trouve que c'est une des plus belles voix que j'ai jamais entendues.
Après je suis peut etre trop glottophile...
Mais je ne trouve pas qu'elle se contente de faire du beau son, mais plutot qu'elle s'implique vraiment dans son role.
Sinon, j'ai une version avec Jessye Norman qui me plait mais je la trouve quand meme moins touchante.

4. Le lundi 10 septembre 2012 à , par DavidLeMarrec

Si, si, j'aime bien Tatiana Troyanos (et puis quand on chante Bartók et Penderecki comme ça, que demander de plus !). Il se trouve que contrairement à la totalité des mélomanes avec qui j'ai parlé d'elle (à ce jour, verdiens comme schoenbergiens, 100% m'ont dit l'adorer), je l'apprécie sans être non plus hystérisé. En fait, je trouve ça trop bien : voix extrêmement homogène et sûre, très ronde... ça manque un peu de fragilité, de coutures, de danger, d'angles aussi, quelquefois.

Cela dépend aussi des répertoires : en Judith (et en général dans les rôles plus tendus que du Verdi), elle est phénoménale de charisme, alors que dans les rôles centraux comme Charlotte ou Carmen, la diction un peu linéaire ne me satisfait pas vraiment.

Ce que je soulignais dans mon commentaire n'était pas un reproche vis-à-vis de Troyanos : les versions où elles figurent semblent seulement ne pas avoir d'autre atout que sa présence pour chanter la passacaille finale. C'est peu : autant acheter un récital.
Par ailleurs, effectivement, je crains que ne soit un peu homogène et moelleux, pour ne pas dire opaque et mou, eu égard au format du rôle, très petit et assez grave, qui ne flattera pas ses qualités. Pure hypothèse d'école de toute façon.

J'aime bien la version Leppard avec Norman. Evidemment, elle n'a pas l'intérêt d'une véritable version avec continuo, vivante et colorée, mais elle est jouée avec une certaine tension et très bien servie par les chanteurs. S'il fallait choisir une version traditionnelle un peu épaisses, ce serait assurément celle-là, je l'éoute avec beaucoup de plaisir, même si l'oeuvre y est assez dénaturée.

5. Le jeudi 17 septembre 2015 à , par Patrick Hoffman

Tombant sur cet article par hasard, je veux compléter cette discographie "exhaustive" en vous indiquant la version d'Alfred Deller (pas vraiment nouvelle...) que j'ai.
Les renseignements précis sont à cette adresse : http://www.medieval.org/emfaq/performers/deller.html
Et les références discographiques, la mienne sur une dizaine d'éditions : Vanguard Classics (Arcade) "The Bach Guild" 08 2032 71

Et voici les interprètes :
The Deller Consort,
Oriana Concert Choir and Orchestra ;
Harold Lester (clavecin),
Alfred Deller, dir.
Mary Thomas (Dido),
Honor Sheppard (Belinda, 1° sorcière & 1° suivante),
Maurice Bevan (Aeneas),
Helen Watts (sorcière),
Robert Tear (esprit & marin),
Ellen Dales (2° sorcière & 2° suivante)
Enregistrement: Mozartsaal, Konzerthaus [05/2-9/1963];
Réalisation: 1964.

Merci pour vos renseignements car cela me permettra de compléter ma discographie à ma guise...

6. Le jeudi 17 septembre 2015 à , par David Le Marrec

Bonsoir Patrick !

Effectivement, il manque les récentes versions du New Trinity Baroque (Lilac 2004) et de l'[b]Armonico Consort (Signum 2015), et j'aimerais pouvoir en dire autant de la version du Deller Consort, qui m'est étrangement restée inaperçue. Merci beaucoup de la signaler, j'étais assez persuadé qu'ils avaient fait King Arthur, mais pas Dido. Après y avoir jeté une oreille, ce n'est clairement pas la version la plus vivante, mais ça a très bien vieilli (un peu comme les premiers Malgoire) : on ne le jouerait plus ainsi aujourd'hui, mais le respect minimal de l'esprit est déjà là – pas tant au niveau des ornements que de la respiration générale, qui renonce aux grands fondus de cordes lentissimes.

Pourtant, j'avais passé un certain temps à explorer les recoins de ce qui était disponible, dans des catalogues qui intégraient en principe Vanguard… L'exhaustivité est un objectif difficile à atteindre, mais c'était en tout cas l'ambition de la notule, ne pas en rester aux quelques grandes versions dont on parle généralement – et qui ne sont pas forcément les meilleures, d'ailleurs, même si Pinnock ou Christie I tiennent fort bien leur rang.

Merci encore ! [/b]

7. Le mardi 12 février 2019 à , par Tropimovitch

Bonjour,
L'enregistrement Gardiner ne date pas de 1983 mais, sauf erreur de ma part, de 1990, aussi Christie n'a pu s'en inspirer pour son Dido de 1985. Cela dit, merci pour cette discographie commentée. Pour l'anecdote : la version Leppard 77 est très bien : Felicity Palmer, Belinda sans grâce à l'acte 1, est bien meilleure ensuite, Troyanos toujours aussi belle Dido, choeurs impeccables, Richard Stilwell excellent Enée même si trop baryton à mon goût. Patricia Kern magicienne engagée et intéressante par sa personnalité, même si pas très gracieuse. Sorcières plutôt belles. Seconde femme : magnifique Elizabeth Gale, Esprit un peu emphatique d'Alfreda Hodgson mais Philippe Langridge l'un des meilleurs marins de la disco. Et j'aime beaucoup la direction de Leppard, peut-être sans grande audace mais équilibrée. Je préfère Haïm, et quelques autres, mais je la réécouterai.
Cordialement,

8. Le mardi 12 février 2019 à , par DavidLeMarrec

Bienvenue Tropimovitch,

Merci pour la rectification ! Effectivement, ça semble être 1990 d'après plusieurs sources concordantes. J'ai retrouvé la mienne : Operaclass.com, qui indique 1983 et 1990 comme dates. Étonnant que je n'aie pas contrevérifié, les informations sont entrées manuellement et pas toujours exactes. (Il est vrai que ce n'était pas le cœur du sujet, mais tout de même.)

Leppard est effectivement toujours équilibré, même lorsqu'il bidouille les Italiens… sa fameuse Didon avec Norman ne manque pas d'élégance, malgré la pâte d'un genre enveloppant et opaque qu'on n'ose plus aujourd'hui. J'avoue que la présence de Troyanos n'en fait pas une découverte prioritaire pour moi – puisque je sais que, par essence, elle ne m'apportera pas le type de satisfaction que j'attends dans ce répertoire. Mais je suis tenté d'écouter au moins par extrait, ne serait-ce que pour Palmer et Langridge. Merci d'avoir complété le panorama !

9. Le dimanche 17 février 2019 à , par Tropimovitch

De rien ! Je vous remercie encore pour vos innombrables discographies, ici et/ou sur forum classik : nous n'avons pas exactement les mêmes goûts et attentes, mais vous m'avez été d'une aide inestimable. Pour en revenir à Dido, je vous rejoins sur la plupart des enregistrements, à quelques détails près. Pas écouté Radu, Jacobs m'a enchanté à défaut de m'émouvoir, Hickox m'a un peu ennuyé, tout comme Niquet en dépit de sa quasi perfection (mais chez lui, j'ai souvent ce problème), j'ai trouvé Van Asch assez passionnant à défaut d'être pleinement convainquant et surtout, deux enregistrements me combleront probablement à jamais : Haïm, avec sa vision vivante, habitée, dynamique, rythmée, et Ivor Bolton avec sa Dido chambriste absolument bouleversante - deux versions qui ont en plus l'avantage d'avoir une distribution sans faille, ce que je n'ai trouvé, ailleurs, que chez Christie 85 (mais direction un poil trop sèche), chez Niquet (aucun défaut apparent, danses inoubliables en effet, mais le résultat est un peu froid) et Jacobs (que j'adore, et que je mets en troisième position sans hésiter, mais que je trouve tellement vivant et chatoyant que j'en oublie d'être ému !). Il me reste quelques versions à écouter (Wentz, Gosta, Currentzis, Kenny, Alarcon, Christie DVD et Monks) : je reviendrai peut-être compléter. Merci encore, mille fois, pour avoir donné de votre temps ici ou là.

10. Le dimanche 17 février 2019 à , par DavidLeMarrec

Oh, merci, très heureux d'avoir été utile !

Ne manquez pas Alarcón, c'est devenu ma référence, une vérité dramatique et des couleurs qui ont peu d'exemple, le texte y coule de source et la musique ne m'a jamais semblé si bien utilisée.

11. Le mercredi 20 février 2019 à , par Tropimovitch

En fait, à part G. Jones, aucun enregistrement ne m'a paru mauvais. Currentzis agace un peu avec ses affèteries mais ça reste fort beau. Alarcon, c'est en effet superbe, tout comme Kenny, et j'ai adoré Christie en DVD (Christie, qui m'enchante au moment où je vous écris, avec son King Arthur, bien meilleur que ses pourtant valeureux prédécesseurs). Au disque, je préfère tout de même les versions Haïm (pour la vie, pour l'énergie), Bolton (pour l'émotion et la retenue), et Jacobs (version de synthèse idéale, très théâtrale, équilibrée, admirablement chantée, qui me rend aussi guilleret que son extraordinaire Giasone), mais Alarcon - que je connaissais surtout pour ses Cavalli -, c'est également first class : comme vous dites, tout semble couler naturellement. Que de beaux disques en tout cas.

12. Le mercredi 20 février 2019 à , par Tropimovitch

(même si je sais que vous n'aimez pas trop la version Christie de King arthur ;-)

13. Le mercredi 20 février 2019 à , par DavidLeMarrec

Je ne sais où je l'ai dit, mais j'ai été lu avec attention, je vois ! En effet, je trouve Christie un peu sec dans Purcell ; dans Didon, il propose d'autres choses qui font passer outre, mais dans King Arthur, comme c'est déjà l'œuvre qui me laisse assez froid, je ne sens que les limites…

Effectivement, de quoi se griser à loisir, et de propositions très différentes, dans cette discographie. Du fait de la facilité des parties vocales et du peu de musiciens requis, on a vraiment un choix très étendu quant aux approches, aux vocalités, aux couleurs, et même aux instrumentations – voire aux distributions vocales, témoin le retour aux sources de Hogwood avec son enchanteresse en clef de fa !

14. Le jeudi 24 novembre 2022 à , par Dometienne

D'accord avec Tropimovitch pour rehabiliter la version Leppard /Troyanos de 1977 avec l'incomparable sorcière/magicienne Patricia Kern. Cette version a été décriée par des critiques de disques mais il y a une homogénéité dans les voix et une émotion communicative.

15. Le dimanche 27 novembre 2022 à , par DavidLeMarrec

Bienvenue Dometienne !

Je comprends bien l'espèce de charisme vocal et d'ambiance très fondue qu'on peut y trouver, oui. Pour moi, c'est absolument à rebours de ce que je cherche ici : beauté du continuo, urgence et contrastes dramatiques. Donc plutôt García Alarcón ou Les Argonautes que Leppard, clairement. Mais la discographie, d'une exceptionnelle diversité, permet de renouveler les plaisirs, et à chacun de servir ses propres idéaux, c'est parfait comme cela.

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