George Benjamin - Written On Skin, création à Aix
Par DavidLeMarrec, lundi 16 juillet 2012 à :: Saison 2011-2012 - Discourir - Musicontempo - Opéras des écoles du vingtième siècle :: #2019 :: rss
Or l'Eternel avait dit à Moïse, je ferai venir encore une plaie sur Pharaon, et sur l'Egypte, et après cela il vous laissera aller d'ici, il vous laissera entièrement aller, et vous chassera tout à fait.
Or, l'Egypte étant alors un peu saturée pour en recevoir une onzième, l'Eternel envoya la dernière plaie sur le Festival d'Aix-en-Provence, une plaie pire que toutes les autres réunies : le livret-pourri.
Filmé ce samedi à Aix, on peut voir sur Arte Live Web cet essai lyrique de Benjamin - et désormais, avec sous-titrages, ce qui se montre salutaire vu les lignes vocales, les dictions relâchées et les errances du texte.
En réalité, la musique de Benjamin est assez fonctionnelle - elle n'échappe pas tout à fait à la tristesse un peu uniforme qui semble consubstantielle à la plupart des langages contemporains, mais elle bâtit une véritable tension dramatique, seconde très bien la scène, ménage des couleurs changeantes...
Malheureusement, le livret, sur un sujet d'attirance un peu malsaine qui a des résonances assez à la mode, rend impossible le maintien d'un fil dramatique : il alterne échanges directs et narration à la troisième personne par les personnages eux-mêmes - ce qui est certes original, mais absolument inopérant dramatiquement... A cela s'ajoutent des maximes et autres profondeurs dont le sens et l'intérêt m'ont pour l'instant échappé, mais peut-être que le visionnage intégral pourra éclairer un peu plus ces choix.
Quoi qu'il en soit, et même si la construction devait s'avérer absolument pertinente et virtuose, force est de constater qu'une fois de plus le livret met à distance, voire démonétise les efforts d'expression de la musique... et que le résultat n'est pas vraiment accompli, alors même que le compositeur avait fait la démarche de respecter une certaine modestie des tessitures et de construire de belles arches de tension. Le plus rageant est que l'opéra est très plaisant en musique pure, lorsqu'on ne regarde plus l'écran et les sous-titre... encore une occasion manquée pour le théâtre lyrique d'aujourd'hui, je le crains.
Le genre opéra ne semble pas avoir passé l'époque où l'émotion était soupçonnée d'être une catégorie bourgeoise de l'âme.
Alors que la musique instrumentale s'en est tout de même affranchie par l'explosion des écoles - on peut entendre du minimal, du filandreux, du sirupeux, du répétitif, de l'aride, de l'abstrait, de l'archaïque... tout existe -, l'opéra (en plus de ses contraintes propres) semble sans cesse tiré en arrière par ses librettistes, tantôt par prétention, tantôt par réticence.
A ce propos, il faudra publier ici une petite liste d'opéras récents recommandés, j'en ai dit trop de mal récemment pour ne pas présenter aussi l'aspect positif de la chose, même s'il est proportionnellement restreint.
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Ce ne sont que de premières impressions, je n'aurai pas l'occasion de m'y replonger, vraisemblablement, avant vendredi. Je n'hésiterai pas à faire amende honorable si jamais la vue de l'ensemble change ma perception.
Commentaires
1. Le mercredi 18 juillet 2012 à , par Ugolino le Profond
2. Le mercredi 18 juillet 2012 à , par Ugolino le Profond
3. Le jeudi 19 juillet 2012 à , par DavidLeMarrec
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