mardi 1 novembre 2016
Beethoven – Intégrale des sonates pour piano – Stephen Kovacevich
J'ai toujours prisé cette intégrale, pour sa forme de juste mesure, pour son engagement permanent qui ne se départit pas d'un certain calme… Mais lors de cette dernière réécoute, j'entends d'autres détails : un soin très particulier accordé à la résonance (la pédale enrichit certains enchaînements un peu fades), des changements de couleur adroits lors des reprises, une capacité à créer le silence (avec des interruptions qui sonnent nécessaires plus que dramatiques), et par ailleurs une netteté et une fièvre assez hors du commun.
Cela mériterait un relevé précis (déjà fait pour les 15 et 29…), mais c'est un peu long à mettre en forme, aussi je vous laisse tenter le jeu de piste par vous-même.
Je trouve que cette attitude, tournée vers la poésie sans verser dans la contemplation, sert en particulier les sonates les plus faibles – entre les premières et les dernières, j'en ressens beaucoup comme au milieu du gué, je veux dire s'affranchissant des normes classiques sublimées dans les premières, sans proposer un langage réellement nourrissant en échange. Autrement dit, alors que les premières rendent la forme classique très dense musicalement, les médianes changent la forme sans forcément y mettre la même hardiesse (ou du moins suffisamment pour remplir l'espace ouvert). Impression personnelle, il va sans dire, qui se corrigera peut-être au fil des années.
Je ne crois pas qu'on la trouve de nos jours, mais les sonates célèbres ont été régulièrement rééditées en collection économique. On peut les écouter gratuitement et légalement ici par exemple (ce ne sont pas les mêmes sélections selon les albums…).
On peut se consoler avec la centaine d'autres intégrales existantes, dont certaines de premier intérêt : je reviens souvent à Nat, Grinberg, Backhaus II et Buchbinder II, mais ce n'est qu'un choix idiosyncrasique parmi la multiplicité de possibles. Et, pour les isolés (ou les dernières), Peter Serkin par-dessus tout (les dernières sonates sur un Graf d'époque : la couleur mais aussi la maîtrise suprême – son disque sur piano moderne est en revanche très standard, voire un brin ennuyeux), et comme toujours Bellucci.
Pour cette veine poétique, ce sont Goode et Lewis (tout à fait recommandables, en particulier le premier, d'une très séduisante sobriété) qui paraîtraient les plus proches, mais je les trouve plus tentés par la méditation, là où Kovacevich demeure toujours dans le mouvement.
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Petits marteaux a suscité :
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