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Les 24 Violons du Roy de Patrick Cohën-Akenine au TCE - Le pari perdu de l'authenticité ?


Les 24 Violons du Roy en concert au Théâtre des Champs-Elysées, mercredi 26 mai 2010.

Patrick Cohën-Akenine, immense violoniste devant l'Eternel, est depuis longtemps chef d'ensemble, et à la Tête des Folies Françoises, il a quelque temps fait merveille, comme par exemple dans ce récital baroque français de Patricia Petibon.

Or, il s'est mis en tête de réaliser une courageuse résurrection des 24 Violons du Roy, l'ensemble qui jouait pour Louis XIV, en utilisant des recréations des instruments manquants de la famille du violon qui étaient alors utilisés.

On en a déjà parlé par trois fois sur CSS :


Entre le dessus de violon toujours pratiqué et la basse de violon parfois réemployée dans les ensembles baroques, on a ainsi réintroduit la haute-contre de violon (assez comparable à l'alto), la taille et la quinte de violon. Cela produit visuellement un dégradé assez pittoresque, avec de gros violons qui pendent à de petits cous, touche en bas, comme ceci : (oui, leur enthousiasme semble limité).

Patrick Cohën-Akenine dispose ainsi d'un ensemble constitué de la façon suivante :

  • violons : 4 dessus, 2 hautes-contre, 2 tailles, 2 quintes, 2 basses ;
    • bien qu'appartenant à la famille des violons (contrairement à la contrebasse qui appartient à la famille de la viole, d'où leur son plaintif), les basses de violon disposent de frettes - c'est-à-dire de ces barres, comme sur les guitares, qui bloquent la corde à hauteur fixe en créant des "cases", de façon à assurer la justesse ; d'autant plus étrange que si les violes de gambe en disposent, les violoncelles baroques n'en disposent pas et les contrebasses n'en disposent plus (mais il faut là interroger les facteurs d'antan et non pas les malheureux instrumentistes exhumant...) ;
  • bois : 2 flûtes, 2 hautbois (le premier hautbois tenant les parties de flûte basse dans les trios), 1 basson français (au son si nasillard qu'il rappelle ici le cromorne !) ;
  • continuo : viole de gambe, violoncelle, clavecin, archiluth.


Cela se justifie très bien sur le papier. Lully était violoniste, il écrivait des dispositions qui n'étaient pas pensées pour le clavier comme le fera Rameau ou comme le faisaient déjà les Italiens (c'est-à-dire avec une basse isolée et les autres parties isolées dans l'aigu). Il utilisait une répartition beaucoup plus équilibrée au niveau des médiums, qui donne un certain fondu - et rend d'autant moins confortables à exécuter, quelquefois, les réductions pour piano du début du vingtième siècle (elles sont en réalité redéployées pour être 'claviérisables', y compris quand les parties intermédiaires originales subsistent).
Et cela se faisait avec l'instrumentarium restitué par le projet de Patrick Cohën-Akenine. Le but avoué était de retrouver la diversité des instruments, donc des couleurs originales, de la musique de Lully.

L'ensemble a beaucoup progressé depuis ses débuts, et déjà en 2009, il jouait tout à fait juste. Il est capable désormais de jouer certaines sections avec un beau tranchant. On a même pu observer, au cours de ce concert, quelques partis pris interprétatifs sensibles, même si l'on demeure très loin de ce qui pouvait être réalisé avec les Folies Françoises.
Néanmoins, le résultat immédiat de cette restitution est au contraire une plus grande homogénéité des timbres et une certaine mollesse d'articulation.

Et ce n'est pas si paradoxal : au lieu d'instruments divers, on décline les intermédiaires d'une même famille. Voilà pour l'homogénéité. Et pour l'articulation ? Il suffit d'observer la dimension des tailles et quintes de violon : les instruments sont retenus par des lanières discrètes, mais comme vu leur masse il ne doit pas être possible de les bloquer avec le cou, ils reposent en partie sur la main. Aussi, l'agilité en paraît fortement diminuée - n'imaginez même pas du vibrato, et encore moins un démanché, tout s'effondrerait ! Par ailleurs, pour qui a déjà joué un violon et un alto, la différence d'exigence physique en étant déjà assez considérable, on imagine la force nécessaire pour maintenir efficacement une corde de quinte de violon.

Bref, au final, on gagne en fondu, mais on perd une part déterminante de ce que le mouvement baroqueux a apporté : clarté et autonomie des strates, individualisation des timbres, incisivité des attaques, palette expressive nouvelle. Le projet est généreux, mais il me semble qu'il se heurte aux difficultés structurelles qui ont fait que l'on a abandonné ce type d'orchestre au profit de la disposition italienne : c'est intrinsèquement un ensemble moins virtuose et moins brillant.

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Et le concert ?

Très beau, mais il avait aussi ses limites.

A commencer par le programme. Sublime : les moments de bravoure des trois dernières tragédies lyriques (Amadis de Gaule, Roland, Armide) et de larges extraits de la pastorale Acis et Galatée.
Mais ce n'est pas une surprise : Lully en tranches fonctionne mal. Ces airs de bravoure, même s'ils ne ressortissent pas à la même partie du canevas (on n'a pas eu trois chaconnes, qu'on se rassure), sonnent assez pauvres, ainsi isolés. Tout cela semble toujours la même chose, un joli archaïsme qui servait autrefois de hors-d'oeuvre dans les récitals de chant.
En revanche, la Pastorale, certes très coupée, mais donnée dans sa continuité, est beaucoup plus captivante, alors même que la substance littéraire et musicale en est sensiblement moindre. C'est aussi là qu'on entend les plus belles trouvailles orchestrales (si Cohën-Akenine maîtrise Armide depuis longtemps, ses Amadis et Roland semblaient bien sous-exploités...).

Côté interprètes vocaux, Lisandro Abadie est une basse-taille typique de ce que l'on produit aujourd'hui : des barytons un peu tassés (ce qui est tout à fait légitime, c'est ainsi que les rôles sont écrits), qui exaltent leur bas-médium et leurs couleurs sombres. Typiquement les emplois de Laurent Naouri, Jérôme Corréas, Bertrand Chuberre, Thomas Dolié... Dans ce registre, il réussit très bien sa tâche, la voix est belle, l'articulation verbale impeccable, et les graves tout à fait honorablement sonores. En Roland, il manque peut-être de panache (il faut dire qu'il doit débuter à froid le concert par une scène d'amour trompé puis une scène de folie...), mais en Polyphème, il mêle la présence intimidante à une certaine noblesse - le Cyclope est d'une vieille et illustre famille, après tout - qu'on ne trouvait pas dans les effets de Naouri au disque (conjugué à ceux tout aussi histrioniques de l'orchestre de Minkowski).

L'explosion extraordinaire d'Isabelle Druet, venue du théâtre, qui a fait tout son cursus vocal en deux ans (m'a-t-on assuré de source interne à son conservatoire), qui est passée en deux ans d'inconnue à solide comprimaria (et récompensée au Concours Reine Elisabeth), et en deux ans supplémentaires de quasi-troupière à prima donna dans un certain nombre de concerts baroques ou de récitals de mélodies. Pas à Garnier, certes, mais pas dans de petites salles de cinquième catégorie (l'Opéra-Comique ou l'Athénée, tout de même !).
J'en serais ravi si je n'avais de la peine à distinguer ses mérites propres. La voix est très bien projetée, mais au moyen d'harmoniques de nez assez désagréables - non pas que la voix en elle-même soit nasale, mais elle semble accrocher les résonateurs faciaux assez haut et tout en force. Je songe souvent, en l'écoutant, aux techniques Astrid Varnay et de Birgit Nilsson, qui ont ces caractéristiques, avec un formant extrêmement vigoureux. En descendant au parterre à l'entracte dans la salle aux deux tiers vide, la voix sonnait beaucoup mieux qu'au premier balcon, cela dit - un mystère vocal de plus, qu'on ne remarque pas avec les autres instruments...
En Armide, j'ai été très gêné par la lourdeur de ses appuis (elle semble avoir conservé ceux de sa voix parlée), la raucité du timbre, et tout cela sans être suivi d'une véritable implication dramatique - même si le cadre du concert est moins désinhibant que la représentation, la fin d'Armide est tout de même un extrait en or ! Et alors qu'elle est en décalage (d'une croche à peu près) avec l'orchestre (qui, pourtant, dans ce passage, articule plutôt vigoureusement), insensible aux gestes que le chef lui adresse désespérément, elle poursuit sa route et fini en bordure de piste, comme si elle n'écoutait rien autour. Et comme cet orchestre un peu indolent n'a pas la réactivité d'une autre formation - et qu'aucun musicien ne regardait le chef -, rien n'a été rattrapé, pendant d'assez longues secondes.
En revanche, en Galatée, allégeant son timbre (comme Nilsson en Elsa, en somme), avec un aspect plus 'mixte', jouant des regards et de l'ironie, elle séduit beaucoup plus, et je me suis pris à trouver son incarnation, sans doute aidée par la scène au lieu du studio, beaucoup plus vraie que celle sublime de Véronique Gens, qui se montrait moins sensible à tout le second degré du livret.

Enfin, le bonheur d'entendre enfin Sébastien Droy hors des retransmissions. La voix est toujours aussi particulière, joliment appuyée sur l'arrière, comme adossée au timbre, assez vibrée pour du baroque (il chante aussi beaucoup de rôles de lyrique léger du répertoire français, tel l'Armand de Colombe de Damase). Ses interventions, même dans les mièvreries d'Amadis, mais bien plus, comme tout trois, pour Acis dans la pastorale, sont toujours très prégnantes, avec quelque chose de toujours intense dans la manière de dire. Un chanteur que je suis toujours avec beaucoup d'attention, mais à qui son disque le plus prestigieux, l'Adonis-titre de la pastorale de Desmarest avec Rousset, ne rend pas justice (abîmé aussi par la direction terriblement lente et surtout terne).

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Autrement dit, un concert très beau, assez fortement intéressant, mais qui révèle un concept qui, à mon humble avis, représente une voie sans issue, car structurellement défavorisé par rapport à n'importe quel autre orchestre plus banal.


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Commentaires

1. Le samedi 30 avril 2011 à , par florence_leroy :: site

1) Pourquoi suis-je allée voir ce concert ?
Il y a 3 ans , lors du cours d’histoire de la musique (en B1), Mr Corten nous fit entendre des extraits d’Armide de Lully , c’est à ce moment que je suis littéralement tombée amoureuse de ce style musical ,de cette époque et surtout du compositeur jean-Baptiste Lully !!! a l’époque, j’écoutais ces musiques en boucle, sans jamais m’en lasser.Il y a 3 ans j’avais été voir le concert des arts florissants sur quelques pastorales de Lully et Rameau, franchement, ça ne m’avait pas marqué (peut-être du à mon manque de maturité ?) . En novembre 2009 je me suis achetée l’intégrale des œuvres de Lully afin d’analyser cette musique plus en profondeur.J’ai fais beaucoup de recherches et me sis vraiment passionnée pour cette période si bien que j’ai eu l’occasion de faire un concert de chant ou je jouais le rôle d’Oriane dans la tragédie « Amadis ». C’est dans cet état d’esprit que j’ai décidé l’aller voir ce concert, j’avais lu dans la publicité que lors de ce concert on pourrait voir pour la première fois l’orchestre de Lully reconstitué (avec les 24 violons du Roy) cela m’a vivement intéressée. Je trouve cette période très riche tant par la musique que par les chorégraphies, les mises en scènes, les costumes , les décors…et surtout par la superbe poésie des textes utilisés, souvent écrits par des gens très cultivés et très esthètes tels que Quinault … (Molière pour ce qui est plutôt des comédies-ballets)
2) Le Concert et l’orchestre
Les artistes commencèrent par interpréter un air de la tragédie en musique « Roland » , le chanteur était Lisandreo abadie(basse taille) :avec sa voix au couleurs sombres il représentait un Roland assez doux, peut-être un peu trop doux (manque de Panache) par rapport aux forte de l’orchestre.
Patrick Cohën-Akenine (le chef) dispose d'un ensemble constitué de la façon suivante :
violons : 4 dessus, 2 hautes-contre, 2 tailles, 2 quintes, 2 basses ; bien qu'appartenant à la famille des violons (contrairement à la contrebasse qui appartient à la famille de la viole, d'où leur son plaintif)
bois : 2 flûtes, 2 hautbois (le premier hautbois tenant les parties de flûte basse dans les trios), 1 basson français (au son si nasillard qu'il rappelle ici le cromorne !) ;
continuo : viole de gambe, violoncelle, clavecin, archiluth.
Patrick Cohen-Akénine a souhaité retrouver le son de cet orchestre à cinq parties de violons, dont tous les interprètes baroques rêvent depuis des décennies. Malgré l’élan formidable qui a présidé à la redécouverte de la musique ancienne, on utilise toujours des altos, en lieu et place des hautes-contre, tailles et quintes de violon, pour jouer les « parties intermédiaires ».






Les Vingt-quatre Violons du Roi, appelés également La Grande Bande, ou encore Les
Violons Ordinaires de la Chambre du Roi est une formation musicale qui, de 1577
jusqu'à sa suppression par un édit de 1761, fut destinée aux divertissements et
cérémonies officielles de la Cour de France. Renforcée à de maintes reprises par les 12
Grands Hautbois de la Grande Écurie, elle est le premier exemple d'orchestre formel,
constitué sur la base d'un groupe d'instruments à cordes.
Ils étaient composés de cinq parties harmoniques couvrant plus de quatre octaves :
6 premiers violons
4 hautes-contre
4 tailles
4 quintes
6 basses de violon
Ils étaient de tous les divertissements donnés à la Cour - bals, ballets, concerts - et de
toutes les cérémonies officielles, réception de souverains, pompes funèbres... Ils se
joignaient au besoin à l'orchestre de l'opéra. D’après Voltaire dans Le Siècle de Louis
XIV, les Vingt-quatre Violons « étaient toute la musique de la France ». Ils ne
jouissaient pas moins d’une vaste réputation à l’étranger, grâce aux recueils de
danses françaises, notamment en Allemagne, en Suède, et en Angleterre.
Les violonistes de la Grande Bande faisaient partie de la corporation des ménétriers.
Les ménétriers avaient tous, en ce temps-là, la double fonction de violonistes et de
maîtres de danse. C'est parmi les 24 violons qu'était choisi le Roi des Violons, chef de
la corporation.
Pour être musicien du roi, il y avait plusieurs conditions à remplir : être de bonne
moralité (mais l'exemple de Lully prouve que la définition de moralité était large),
professer la religion Catholique Romaine, et avoir suffisamment d'argent pour
acheter sa charge.
Ensuite nous avons pu entendre des extraits d’Armine (Isabelle Druet) et Alcis et Galatée et entier après l’entracte (Sebastien Droy, Isabelle Druet et Lisandro Abadie)
3) Mon avis Personnel positif :
- Je trouve que c’est un grand honneur posthume fait à Lully d’avoir intérprété ainsi ses œuvres avec d’aussi bons musiciens et chanteurs j’ai particulièrement aimé l’interprétation d’Isabelle Druet dans le monologue d’Armide, on aurait dit qu’elle vivait ce qu’elle chantait. Sa voix correspondait à merveille avec cet extrait tragique de la pièce.(Pour l’histoire , c’est quand Armide, sorcière sans cœur veut tuer Renaud, chevalier de Godefroy et qu’au lieu d’accomplir son devoir elle tombe amoureuse de lui) .
- Dans l’interprétation de Roland, Lisandro, avec sa voix virile a bien su mettre en valeur le personnage, cependant, il n’a pas mis assez de nuances et émotions dans ce qu’il chantait.
- Je ne connaissais pas ce chef d’orchestre et j’ai été agréablement surprise , évidemment la reconstitution n’était pas terrible (voir points négatifs) cependant il avait l’air très impliqué dans ce qu’il dirigeait. Je dirais même qu’il a réussi à faire plaire cette musique que tant de gens rejettent d’habitude.
- J’ai trouvé le choix des morceaux assez judicieux : en effet, un concert ne peut pas durer 4 h et des tragédies en entier ça dure beaucoup trop longtemps pour ce type de concert. Je pourrais comprendre que le fait d’à chaque fois couper des extraits pourrait lasser certaines personnes, en effet il est plus aisé d’aimer cette musique quand on connait l’histoire en entier.
- J’ai trouvé que c’était une bonne idée de « faire le tour » des grandes œuvres de Lully dans la première partie du concert m^me si personnellement je n’aurais pas choisi les mêmes extraits.
- L’idée de mettre une pastorale en entier en deuxième partie n’est pas mal non plus.Je ne connaissais pas cette pièce et je l’ai trouvée assez marrante, dans cette pastorale, j’ai l’impression que les chanteurs se sont donnés plus « à fond », ils ont exprimé des choses. De plus les costumes étaient magnifiques.On à retrouvé ici une Isabelle Druet beaucoup moins froide que dans Armide, plus expressive encore…
-
4) Mon Avis Personnel négatif :
Je trouve que la reconstitution de l’orchestre n’était pas à la hauteur, de plus ils ont fait une esspèce « d’arrangement » en effet, ans la partition originale de Lully, on retrouve des interventions des percussions par exemple et ici, les percussions n’étaient pas présentes (pourtant dans le monologue d’Armide elles ont une importance capitale : elles expriment sa fureur). Lully utilisait une répartition beaucoup plus équilibrée au niveau des médiums, qui donne un certain fondu .
Idem dans la passacaille d’armide : le hautbois est censé faire une intervention mais il n’est pas présent : bizarre !!!
- Pour ce qui est des chanteurs ils étaient beaucoup trop statiques et « classiques » après tout c’est tout de même une musique de l’époque de Louis XIV : tout le monde dansait à la cour.Ce qu’ils faisaient ne ressemblait nullement à des « operas » on aurait plutôt dit qu’il présentaient chacun à leur tour des lieder sur la scène comme des élèves de conservatoire viennent présenter leur pièce qu’ils ont appris par chœur : aucune mise en scène aucune chorégraphie !!!
- J’aurais également préféré qu’il y aie des décors et des costumes d’époque.J’estime que ce qu’ils ont fait n’est pas une reconstitution fidèle !
- Le ténor n’avais pas une voix assez puissante et sa diction laissait à désirer : je ne comprenais pas un traître mot de ce qu’il chantait !!!(Heureusement qu’on avait un livret !)
- Les chanteurs n’avaient pas l’air d’être en connivence cela s’en ressentait dans leur attitude.

2. Le dimanche 1 mai 2011 à , par DavidLeMarrec

Bonjour Florence,

Et bienvenue !

J'ai moi-même fait un compte-rendu mitigé du résultat, néanmoins, sur les points négatifs, j'ai quelques éclairages à apporter.

1) Sur les "arrangements" de Cohën-Akenine. Bien évidemment, il n'y a pas d'arrangement. :) A l'époque de Lully, l'orchestration n'était pas quelque chose de fixé sur partition, même lorsqu'on disposait d'une trouve fixe.
Sur la partition originale d'Armide, on trouve généralement cinq portées instrumentales :
- dessus de violon en clef de sol 1ère ;
- haute-contre de violon en clef d'ut 1ère ;
- taille de violon en clef d'ut 2 ;
- quinte de violon en clef d'ut 3 ;
- basse continue en clef de fa.

Il peut arriver (scènes infernales) que qu'une ligne de basse en clé de fa intervienne au-dessus de la ligne de basse continue, pour le basson (qui la double simplement).

Pour les flûtes, elles sont notées sur les trois premières portées, et simplement indiquées en toutes lettres à la place des violons.

Pour les doublures de hautbois ou les remplacements des premières lignes par des bois, c'est tout simplement à la discrétion du chef d'orchestre, qui fait des choix selon la vraisemblance (une scène pastorale appelle les flûtes ou les musettes).
[Dans quelle version entend-on le hautbois dans la Passacaille, je n'y ai jamais entendu que des flûtes ?]

Même chose pour les percussions qui ne sont pas notées, en dehors des timbales associées aux trompettes : il y a alors une ligne supplémentaire tout en haut, en clef de sol 1ère, pour les trompettes, et en bas une clef de fa pour les timbales. Mais dans bien des cas, dont le monologue final d'Armide, elles demeurent à discrétion des interprètes et ne figurent pas sur la partition : pour la fin de l'oeuvre, il n'y a que cinq portées (les quatre violons et la basse continue) d'écrites !

Ce n'est donc absolument pas une liberté prise avec la partition. Celle-ci est simplement notée de façon suffisamment ouverte pour que plusieurs instrumentations soient possibles.

--

2) Pour l'équilibre des médiums, au contraire le choix de Patrick Cohën-Akenine est de leur donner toute leur importance, avec trop de fondu à mon avis du fait du peu de maniabilité de ces instruments par rapport au violon et à l'alto.

Ces parties étant écrites (de la main de Collasse), il ne les a de toute façon pas changées.

--

3) Une version scénique coûte cher, c'est pour cela que l'on fait des versions de concert. De toute façon, même en dansant (et les chanteurs ne dansaient pas !), on ne bougeait pas tant que cela au Grand Siècle : vu l'éclairage très limité, il fallait jouer en frontal, et on avait surtout quelques gestes symboliques (certes absent de ce concert).

--

4) Sébastien Droy se fait très bien entendre pourtant dans des rôles avec orchestre bien plus fourni. Sa voix plus ronde et polyvalente (il ne chante pas majoritairement du baroque, beaucoup de seconds rôles lyriques ou de premiers rôles lyriques assez légers dans l'opéra français des XIXe et XXe siècles) est certes moins clairement articulée que les deux autres, mais sa diction n'en demeure pas moins remarquablement claire (et en plus, bien plus expressive que les deux autres).
Au Théâtre des Champs-Elysées, je n'ai remarqué aucun problème de projection.

--

Pour le reste, un certain niveau de convergence entre nous sur le charme et les limites du pari de ce concert.


Bonne journée !

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David Le Marrec

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