dimanche 6 juin 2010
Le disque du jour - XXXV - Franz SCHUBERT - Die Schöne Müllerin ('La Belle Meunière') - Jorma Hynninen, Ralf Gothóni (Ondine)
On avait déjà évoqué la beauté étonnante de la version de Jorma Hynninen et Ralf Gothóni pour le Winterreise.
Toutefois c'était une question de sensibilité personnelle, il faut aimer ce désert ascétique, ces textes très articulés mais sans le moindre histrionisme expressif, cet accent bizarre.
Pour la Belle Meunière, en revanche, il me semble qu'on peut considérer leur lecture comme fondamentale - bien qu'ensuite, évidemment, le goût de chacun parlera en leur faveur ou défaveur.
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1. Un enregistrement
Tout d'abord Jorman Hynninen, la voix voilée, usé, dispense de superbes intentions sans se soucier de sa voix. Il conte son histoire, sans prêter garde au timbre un peu fêlé, avec beaucoup de sentiment et de simplicité. C'est bien ce que l'on attend ici.
Mais surtout, le piano de Ralf Gothóni est incroyablement incisif, et pour tout dire parfaitement fulgurant. Les notes sont d'une incisivité incroyable. On se situe dans le goût de ce que fait Helmut Deutsch avec Jonas Haufmann en concert (Bruxelles 2004, par exemple), avec beaucoup d'insolence joyeuse, un grand rebond de la danse. Gothóni parvient à un tranchant supérieur, avec une netteté incroyable des attaques et des contrechants. Il fait ainsi apparaître des bourdonnements hallucinants et même des chants d'oiseaux survitaminés dans Mein !, avec des changements de texture en un instant, du piano comme les lutins n'en avaient jamais entendu ni même rêvé.
Mein !, fortement compressé, avec donc un relief largement émoussé par rapport au disque original.
Le cas est d'autant plus impressionnant que l'accompagnement de ce cycle ne paraît pas si extraordinaire sur le papier à musique : inspiré, mais il ne pourrait pas exister seul comme celui du Winterreise - sans les figuralismes hallucinés du Schwanengesang aussi. La fascination est telle qu'on n'a plus guère besoin d'écouter le chanteur que pour les mots, toute l'expression passe déjà par le piano - du Wagner, quoi.
Tout cela est aussi dû à l'incroyable captation Ondine : rarement entendu un piano aussi bien servi par les ingénieurs.
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2. ... dans une discographie
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Poésie, lied & lieder - Le disque du jour a suscité :
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