dimanche 9 janvier 2011
Henry Février - La Damnation de Blanchefleur - III - De la bataille à Djamina (et bilan)
En trois notules :
- I - Présentation de l'auteur et de l'oeuvre
- II - Evocation orientale depuis le septentrion
- III - Batailles, amours, structure et bilan
(Par erreur, je n'ai pas mis en ligne la même version que celle présente dans la précédente notule.)
Reprenons à 4'10.
Récit de combats et retour à la brume
THIERRY
Ruisselant de sa fauve lumière,
J'ai combattu là-bas,
Dans la mêlée où flambaient les armures,
Je n'étais sous l'acier qu'une flamme de plus !
Le soleil ! Le soleil !
Notre baron revit en sa mémoire la probable croisade, avec toujours la même expression imagée, baignée de cette luminosité radieuse. La musique, pendant ce temps-là, épouse des rebonds vaillants et assez dansants (rythmiquement très proches du ballet des walkyries à l'acte III de Die Walküre), avec une belle harmonie épique.
Puis le retour de l'invocation au soleil, qui contrairement à la séquence précédente, s'affaisse au lieu de s'amplifier.
Ici la brume. Une éternelle brume.
Quelle tristesse de suaire !
Retour des figuralismes évoquant la brume et par moment les sonneries du couvre-feu, ports de voix lassés sur la seconde phrase, avec une harmonie qui progresse douloureusement.
A ce moment, de doux arpèges introduisent une seconde évocation, liée non plus au jour, mais au soir :
Et la fraîcheur aussi de l'ombre parfumée
Où dans des mimosas roucoule une palombe,
Et le soir qui se berce au murmure des palmes...
Le texte conserve les mêmes rondeurs délicates, mais la douceur des harmonies contraste avec la froideur du brouillard et des appels, et avec l'élan exalté de la bataille.
On aboutit sur un cinquième motif, assez mélodique, un embryon de thème :
Et là, sous le grand cèdre,
Une double jacinthe à l'ombre de ses tempes...
La volupté m'offrant la pourpre de sa bouche...
Djamina ! Djamina ! L'Orient...
Des arpèges accompagnent des lignes assez lyriques à l'orchestre, tandis que le texte, feignant de poursuivre la description de la flore, se révèle progressivement l'évocation de félicités plus humaines.
Dans ces sinuosités, l'énigme de Djamina se résout dans ces fiévreux appels.
Musicalement, "L'Orient !" marque une cadence V-I très définitive, mais l'orchestre poursuit son chemin avec le motif oriental, cette fois comprenant des accords complets.
Retour du cinquième motif.
BLANCHEFLEUR
Messire...
(La réplique ne figure pas dans la version vidéo, antérieure à l'autre. Elle se situe en théorie juste avant les bruits de pas.)
L'épouse de Thierry est entrée, elle l'appelle doucement. Bruits de pas discrets, puis plus soutenus. Il ne l'a pas aperçue, et un discret lyrisme aux suspensions assez tristaniennes s'éteint doucement.
(La suite a été lue, mais pas encore jouée par les lutins. Il faudra donc patienter...)
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4. Quelle organisation générale ?
On trouve dans ces dix minutes pas moins de cinq motifs structurants, sans toutefois que la progression de la scène soit conditionnée par un développement d'ordre musical.
On pourrait découper le texte ainsi :
- Prélude
- Récitatif rêveur
- Evocation du paysage
- Evocation de la bataille
- Récitatif rêveur
- Evocation de la flore et de Djamina
Et les motifs ainsi :
- Motif 1 : bancs de brume.
- Motif 2 : sonneries du couvre-feu.
- Motif 3 : mélisme oriental.
- Motif 4 : les combats.
- Motif 5 : la paix voluptueuse.
Qui apparaissent dans cet ordre : 1-2-1-2-3-3-4-3-1-2-5-5-3-5, donc de façon plutôt cursive, mais non sans intrication.
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5. Quel bilan ?
Ce billet, écrit à par DavidLeMarrec dans la catégorie Opéras français d'après le romantisme - Lutin Chamber Orchestra a suscité :
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